MALÉFIQUE (2014)

Angelina Jolie incarne la redoutable sorcière de La Belle au bois dormant et lève le voile sur son étrange passé…

MALEFICENT

 

2014 – USA

 

Réalisé par Robert Stromberg

 

Avec Angelina Jolie, Elle Fanning, Sam Riley, Sharlto Copley, Brenton Thwaites, Imelda Staunton, Juno Temple, Lesley Manville

 

THEMA CONTES I DRAGONS

Cette relecture surprenante du classique La Belle au bois dormant s’inscrit dans une démarche de déstructuration des contes entreprise depuis le début des années 2010 par le studio Disney, bien décidé à donner un nouveau souffle et une seconde jeunesse à son patrimoine. Mais contrairement à l’approche auto-parodique d’Il était une fois ou à la normalisation appauvrie d’Alice au pays des merveilles, Maléfique nous offre un angle de narration étonnant dénué du manichéisme habituellement de mise. Pour mettre toutes les chances de son côté, le studio confie le scénario à Linda Woolverton, qui participa à l’écriture de La Belle et la Bête, Aladdin, Le Roi Lion et Mulan. En terrain familier, la scénariste peine pourtant à trouver le bon ton et le juste équilibre, plus d’une quinzaine de versions du script étant nécessaires avant que le tournage puisse débuter. L’aspect visuel du film étant d’une importance capitale, on confie la mise en scène à Robert Stromberg, chef décorateur de talent (Avatar, Alice au pays des merveilles, Le Monde fantastique d’Oz) et vétéran des effets visuels (Une nuit en enfer, Master and Commander, Le Terminal, Aviator et près d’une centaine d’autres films et séries). Stromberg fait ainsi ses débuts derrière la caméra, soutenu par une équipe confiante et un studio qui lui alloue un très confortable budget de 200 millions de dollars.

Bien entendu, Maléfique s’inspire moins du conte de Perrault que du film d’animation de 1959 dont il constitue une sorte de prequel atypique. Maléfique (formidable Angelina Jolie, incarnation parfaite en chair et en os de la sorcière du dessin animé original) est à la fois entité du bien et du mal, une ancienne fée privée de ses ailes, de son amour et de sa candeur par un homme qu’elle a cru pouvoir aimer mais dont l’ambition dévorante a perverti les actes. Cet homme (Sharlto Copley) est devenu le roi Stéphane, père de la petite Aurore. Cette dernière est incarnée par Vivienne Jolie-Pitt, la propre fille d’Angelina et Brad Pitt, lorsqu’elle est enfant, puis par Elle Fanning à l’âge de l’adolescence. Ivre de vengeance, Maléfique jette sur le bébé le sort que l’on sait, mais finit par le regretter lorsque la fille grandit et qu’elle s’attache à elle. Les notions de Bien et de Mal sont ainsi séparées par une ligne très floue, chose peu commune au royaume de Mickey. Là n’est pas le moindre des attraits de Maléfique, l’autre étant la splendide mise en forme du film.

Monstres et merveilles

Puisant dans sa longue expérience acquise dans le domaine des effets spéciaux, Robert Stromberg s’efforce de trouver le bon équilibre entre les trucages numériques et ceux réalisés en direct sur le plateau de tournage. Les cornes de Maléfique sont ainsi des prothèses conçues par l’immense maquilleur Rick Baker. Ce dernier semble s’être laissé partiellement inspirer par l’une des plus belles créations de son ancien protégé Rob Bottin, le diabolique Darkness de Legend. Ce sera le dernier travail hollywoodien de Baker, le maquilleur multi-oscarisé fermant boutique après Maléfique face à la mutation irréversible de son métier et le grignotement croissant des effets numériques sur son propre travail. De fait, les effets digitaux occupent une place importante dans le film, notamment pour donner corps aux monstres et aux merveilles. Si un dragon intervient bien dans le récit, il ne s’agit plus, comme dans l’inoubliable final du dessin animé de Wolfgang Reitherman, d’une métamorphose de la sorcière, mais d’une mutation de son fidèle compagnon Diaval (Sam Riley), qu’elle peut transformer à loisir en toutes sortes d’animaux. Ce superbe dragon noir, aux larges ailes déployées et au front cornu, surgit au cours d’un climax riche en rebondissement où le monstre tente de libérer Maléfique du filet métallique qui la retient prisonnière et finit lui-même enchaîné par les hommes du roi. Cette très belle séquence s’appuie sur une musique splendide de James Newton Howard, qui accompagne le film de Stromberg avec emphase et se laisse partiellement inspirer par « La Belle au bois dormant » de Tchaikovski. Colossal succès auprès du public – même si la critique américaine lui réserve un accueil mitigé – Maléfique entérinera la démarche disneyenne de transformation de tous les grands classiques animés en versions live et donnera naissance à une suite en 2019 : Maléfique, le pouvoir du mal.

 

© Gilles Penso

 

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