I AM NOT A SERIAL KILLER (2016)

Un adolescent qui travaille dans une morgue avec sa famille se demande s’il n’est pas en train de se transformer en tueur psychopathe…

I AM NOT A SERIAL KILLER

 

2016 – GB / IRLANDE

 

Réalisé par Billy O’Brien

 

Avec Christopher Lloyd, Max Records, Laura Fraser, Tim Russell, Christina Baldwin, Karl Geary, Lucy Lawton

 

THEMA TUEURS I DIABLE ET DÉMONS

Dix ans après Isolation, Billy O’Brien est de retour avec ce très étonnant I am not a Serial Killer adapté d’un roman de Dan Wells. Et force est de reconnaître que notre homme n’a rien perdu de son mordant ni de sa sensibilité. Entretemps, il aura concédé à réaliser un film fantastique pour SyFy Channel, Ferocious Planet, et de remplacer à la dernière minute le metteur en scène du film de science-fiction Scintilla. Ces travaux de commande lui permirent de ne pas perdre la main et surtout de préparer une œuvre plus personnelle, en l’occurrence I am not a Serial Killer. Fasciné par le roman homonyme de Dan Wells que lui soumet un producteur londonien, il contacte l’auteur qui lui avoue lui-même être un grand amateur d’Isolation. Les deux hommes étaient faits pour s’entendre ! Pour autant, O’Brien souhaite faire subir au livre quelques infidélités pour mieux conformer le récit à un traitement cinématographique. Ces changements concernent principalement le point de vue de la narrayion et le dernier acte. Wells n’est pas certain d’apprécier la démarche, et se ravisera finalement en voyant le résultat à l’écran. « Pour un film, ça fonctionne mieux », avouera-t-il au réalisateur.

Cette chronique intimiste s’intéresse à John Cleaver, un jeune homme qui travaille avec sa mère et sa tante dans une maison mortuaire et qui craint d’être saisi de pulsions susceptibles de le transformer en tueur en série. Avec l’aide d’un psychologue, il se fixe une série de règles destinées à entraver un comportement sociopathe. Mais un vrai serial killer sévit bientôt dans la petite ville. Notre héros s’intéresse à lui, le démasque, le suit de près, et finit par découvrir son incroyable secret. La mise en scène d’O’Brien étant extrêmement naturaliste et intuitive, l’intrusion du fantastique dans ce cadre familier et rassurant n’en est que plus surprenante. « Mon directeur de la photographie Robbie Ryan, avec qui j’étais à l’école et qui avait déjà éclairé Isolation, a une approche très naturaliste, ce qui contribue beaucoup à la patine réaliste du film », explique le réalisateur. « Et bien sûr, il y a la performance de Max Records. Il était tout simplement parfait. Il n’a que 17 ans et il porte la plus grande partie du film sur ses épaules. » (1)

Un tueur peut en cacher un autre

La double présence de Max Records et Christopher Lloyd aide en effet beaucoup à l’efficacité du film, le premier en jeune héros tourmenté, le second en vieux voisin qui cache bien son jeu. « La prestation de Christopher Lloyd dans Vol au-dessus d’un nid de coucou reste inégalée », dit O’Brien. « La manière très particulière qu’il a de jouer avec son corps et son visage dote son personnage d’une étrangeté subtile que je trouvais idéale pour le rôle. Dans le film, il joue un homme a priori sobre et taciturne, loin des personnages exubérants qu’on lui connaît, et il a beaucoup apprécié ce contre-emploi. » (2) A la fois attachant, drôle et effrayant, Lloyd s’éloigne en effet du Doc Brown de Retour vers le futur qui lui colle tant à la peau pour nous emmener sur un terrain totalement inattendu. Et c’est justement parce que Lloyd est un comédien naturellement sympathique et familier aux yeux du spectateur que les évolutions du scénario n’en sont que plus surpenantes. Car de manière imprévisible, le film de tueur en série se laisse peu à peu contaminer par le fantastique pur. Il y a en effet une créature dans le film, remettant en perspective tout ce que nous pensions comprendre ou savoir. Sans doute apparaît-elle de manière trop explicite pendant le climax, le maigre budget à la disposition du réalisateur ne lui permettant pas de faire des merveilles, même si l’on apprécie l’emploi d’une marionnette animatronique « à l’ancienne » plutôt que des images de synthèses plus « convenues ». Il faut cependant beaucoup de suspension d’incrédulité pour accepter cet ultime revirement. I Am Not a Serial Killer aurait mérité des effets spéciaux plus performants pour son grand final, et aurait probablement gagné à resserrer un peu sa narration. Mais la spontanéité de la mise en scène d’O’Brien et son refus de sacrifier aux canons hollywoodiens habituels sont franchement appréciables.

 

(1) et (2) Propos recueillis par votre serviteur en septembre 2016

 

© Gilles Penso

 

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