SEVERANCE (2006)

Le réalisateur de Creep transporte dans la forêt six employés d’une grande entreprise pour un week-end de détente qui vire à l’horreur burlesque…

SEVERANCE

 

2006 – GB

 

Réalisé par Christopher Smith

 

Avec Danny Dyer, Laura Harris, Tim McInnerny, Toby Stephens, Claudie Blakley, Andy Nyman, Babou Ceesay, David Gilliam

 

THEMA TUEURS

Décidément, les pays de l’Est n’inspirent guère confiance aux cinéastes du début des années 2000 ! Dans Hostel, on s’y fait torturer à outrance. Dans Ils, on s’y fait agresser et occire. Dans Severance, le bilan n’est guère plus rassurant. Tout est parti d’un pitch intriguant : « La série The Office rencontre Délivrance. » Séduits par le scénario de James Moran, le producteur Jason Newmark et le réalisateur Christopher Smith se lancent dans l’aventure, un an seulement après Creep. Mais Smith, qui attaque là son second long-métrage, tient à se réapproprier le récit et apporte donc un certain nombre de modifications au scénario initial. Il souhaite notamment ajouter des personnages féminins, concevoir de nouvelles scènes de meurtres originales et plus de gags. En effet, si Creep était un film d’horreur dans la plus pure tradition du genre, Severance y ajoute une bonne dose d’humour. Les rires et les frissons s’équilibrent équitablement dans cette histoire mouvementée qui arpente les sentiers connus pour mieux réserver son lot de surprises. Après avoir passé plus de quatre mois à dénicher les acteurs susceptibles d’incarner les sept rôles principaux, Smith s’installe avec son équipe en Hongrie et sur l’île de Man en s’efforçant de retrouver la patine granuleuse des slashers de la période 70/80. Le chef opérateur Ed Wild y parvient admirablement, sa tache étant compliquée par le fait que Severance est tourné en format digital.

À la fois satire des codes du slasher et du monde du travail, Severance donne très vite le ton. Pour renforcer les liens au sein de leur équipe, six employés de la société de vente d’armes Palisade Defense participent à un week-end de motivation organisé par leur entreprise. Au programme : une partie de paint-ball, une course d’orientation et la construction d’un pont. Bref, le guide du parfait petit séjour de « team building ». Les choses commencent pourtant assez mal. Un arbre leur barre en effet la route et le chauffeur du car qui les transporte, refusant d’aller plus loin, laisse notre petite équipe en pleine cambrousse. À eux de se débrouiller pour retrouver à pied le lieu de leur rendez-vous. Malgré ce démarrage inattendu des festivités, l’étrangeté des lieux et les rumeurs qui s’y rapportent, chacun essaie de jouer le jeu du mieux qu’il peut. Mais bientôt les participants découvrent que ces bois sinistres sont truffés de pièges et qu’un tueur armé jusqu’aux dents rode dans les parages avec un seul objectif en tête : les éliminer un à un.

Collègues de bourreau

En s’appuyant sur ses excellents comédiens et sur les rapports qui se nouent entre eux – l’Américaine qui a toujours raison, l’Anglais que personne ne croit -, Smith construit une intrigue à tiroirs désopilante avec à la clé une véritable relation de cause à effet entre les victimes et leurs bourreaux. Voilà qui change des sempiternels autochtones consanguins et cannibales hérités de Massacre à la tronçonneuse. De fait, les meurtres eux-mêmes ont un rapport direct avec les victimes, puisant la plupart du temps leur originalité dans la personnalité, le métier et le caractère des victimes. Pour se soustraire au passage obligatoire de l’explication des origines du mal, le réalisateur concocte trois flash-backs complémentaires – ou contradictoires ? – liés au passé du chalet où logent les protagonistes. Il s’agissait donc d’un asile psychiatrique dans les années 10, d’une prison pour criminels de guerre dans les années 90 et d’une maison close pour vieillards dans les années 60. Cette manière détournée de contourner l’un des lieux communs du genre sème le doute chez le spectateur. Laquelle de ces histoires est-elle vraie ? Une seule ? Toutes ? Aucune ? Voilà donc un excellent survival bourré d’humour, de brutalité et de surprises qui confirme le savoir-faire de Christopher Smith et la vitalité du cinéma de genre britannique démontrée à l’époque par des œuvres telles que 28 jours plus tard ou Shaun of the Dead.

 

© Gilles Penso


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