

C’était à craindre : ce remake « live » du film d’animation ultra-populaire de 2002 manque singulièrement de personnalité et de surprise…
LILO & STITCH
2025 – USA
Réalisé par Dean Fleischer Camp
Avec Maia Kealoha, Sydney Agudong, Zach Galifanakis, Billy Magnussen, Tia Carrere, Courtney B. Vance, Kaipo Dudoit, Amy Hill, Jason Scott Lee, Chris Sanders
THEMA EXTRA-TERRESTRES
Chaque fois qu’un film d’animation Disney passe le cap d’une relecture « live », la légitimité d’une telle entreprise laisse perplexe. L’argument financier est évidemment la motivation première de ce type d’initiative, quoique l’échec cuisant du Blanche Neige de Mark Waters au box-office laisse entendre qu’il ne suffit pas de capitaliser sur des propriétés intellectuelles connues du public et de les resservir avec d’autres sauces pour forcément remplir les tiroir-caisse. Trois familles de films se dégagent de ce flot de remakes réinventant les grands classiques dans l’espoir d’attirer de nouveaux spectateurs : les réadaptations libres et personnelles portées par des cinéastes désireux d’apporter leur patte personnelle (Peter et Eliott, Dumbo), les « origin stories » revisitant certains personnages célèbres depuis leurs débuts (Cruella, Maléfique) et les remakes fidèles. Lilo et Stitch entre confortablement dans cette troisième catégorie, ce qui est d’autant plus dommage que le concept initial offrait des opportunités artistiques infinies, pour peu qu’on se donne la peine de réadapter le sujet original – clairement conçu pour le médium animé, avec la pureté de ses traits, la simplicité de son animation et la beauté de ses couleurs pastel – pour le transposer dans un univers en prises de vues réelles.


Pour raconter Lilo et Stitch au milieu d’acteurs en chair et en os, la solution la plus logique et la plus efficace aurait sans doute été de reprendre le mètre étalon en la matière, autrement dit E.T. : l’inscription du récit dans un contexte réaliste, avec des personnages crédibles et attachants, prélude au surgissement dans un second temps de la créature extra-terrestre et de l’impact de sa présence sur les protagonistes. La campagne marketing du film valorisant son tournage à Hawaï avec des acteurs locaux pour plus d’authenticité, cette approche tombait sous le sens. Mais ce remake choisit l’imitation structurelle de son modèle et démarre donc son intrigue dans l’espace, au beau milieu du conseil intergalactique présidant aux destinées du savant fou Jumba et de sa création démoniaque, l’expérience 626. Pour réadapter cette séquence, la production fait le choix logique de l’image de synthèse. Mais le design, la modélisation, le rendu et l’animation des personnages nous semblent d’un autre âge, comme échappés d’un Pixar ou d’un Dreamworks des années 2000. Lorsque le film se déplace ensuite sur Terre, le décalage abyssal entre les scènes « humaines » et ce prologue animé en 3D saute aux yeux, comme s’il s’agissait de deux films distincts. Et lorsque les personnages animés – Stitch, Jumba et Pleakley – surgissent au milieu des acteurs, le grand écart esthétique se creuse davantage.
Lilo et les Minimoys
Car voilà bien le problème majeur de ce Lilo et Stitch : son incapacité à opérer des choix artistiques cohérents. Ce n’est pourtant pas la première fois que des créatures numériques cartoonesques côtoient des humains à l’écran. Mais pour que le rendu tienne la route, encore faut-il que les premiers soient intégrés de manière fluide dans l’action – à la manière du Rocket Racoon des Gardiens de la galaxie par exemple. Or ici, nos deux chasseurs extra-terrestres s’agitent de manière saccadée comme s’ils parodiaient la frénésie du Bob Razowski de Monstres et compagnie ou du Tilt des 1001 pattes. L’harmonie de ce traitement avec le cadre naturaliste dans lequel se situe l’intrigue est donc sérieusement mise à mal (on se croirait par moments dans le dernier opus d’Arthur et les Minimoys !). Stitch s’en sort mieux, grâce à une animation plus fluide, un travail de texture remarquable (son museau humide et sa fourrure bleue sont très réalistes) et surtout une interaction parfaite avec la petite Maia Kealoha, géniale trouvaille de casting qui est probablement la meilleure surprise du film. Mais l’abatage savoureux de cette star en herbe ne suffit pas à nous convaincre pleinement, les scénaristes et le réalisateur Dean Fleischer Camp – pourtant signataire d’un très sympathique Marcel le coquillage (avec ses chaussures) – renonçant tant à choisir la tonalité du film qu’ils affublent le film d’une infinité d’épilogues, surlignant lourdement tout ce que les spectateurs sont pourtant suffisamment intelligents pour comprendre ou imaginer seuls. Bilan ? Un film honnêtement très agréable mais un peu vain, comme la grande majorité des versions « live action » du patrimoine animé de Disney.
© Gilles Penso
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