

Le comte Dracula exhume le corps du monstre de Frankenstein et demande à un vieux savant fou de le ressusciter pour régner sur le monde…
DRACULA VS. FRANKENSTEIN
1971 – USA
Réalisé par Al Adamson
Avec J. Carrol Naish, Zandor Vorkov, Lon Chaney Jr , John Bloom, Jim Davis, Russ Tamblyn, Forrest J. Ackerman, Angelo Rossito, Regina Carrol, Anthony Eisley
THEMA DRACULA I FRANKENSTEIN
Ce film très confus, dont le tournage chaotique s’est étalé sur plus de deux ans, n’a rien à voir avec le Dracula contre Frankenstein de Tulio Demicheli et Hugo Fregonese, sorti sur les écrans en 1969, ni avec Dracula prisonnier de Frankenstein de Jesus Franco, réalisé en 1972. Il faut croire que la période fut propice à l’affrontement des deux célèbres monstres au sein du cinéma bis international. Or en la matière, Al Adamson est un grand spécialiste, sa filmographie s’ornant d’œuvres aussi invraisemblables que Psycho a Go-Go, Les Sadiques de Satan, Les Amazones du désir ou encore l’hallucinant Horror of the Blood Monsters. Fait de bric et de broc, Dracula contre Frankenstein utilise des séquences entières tournées pour un film qui fut finalement abandonné, avec des personnages secondaires qui apparaissent et disparaissent donc sans aucun lien avec l’intrigue principale. Au départ, c’est John Carradine qui est pressenti pour jouer le comte Dracula, mais le vénérable acteur – pourtant peu regardant à ce stade de sa carrière – réclame manifestement un cachet trop élevé pour la production. Le rôle est donc confié à un certain Zandor Vorkov (de son vrai nom Raphael Peter Engel) dont ce sera le seul titre de gloire. Face à lui, un J. Carrol Naish très malade (amnésique, à moitié aveugle et cloué sur un fauteuil roulant) incarne le docteur Duryea, dernier descendant de la famille Frankenstein.


Discrédité par les autorités médicales à cause de la réputation peu enviable de sa famille, Duryea possède une attraction macabre dans une fête foraine, couverture idéale pour ses sombres activités. Car dans son laboratoire secret, décoré d’un équipement électrique bigarré (le même que celui de Frankenstein et La Fiancé de Frankenstein, toujours fourni par le designer Kenneth Strickfaden), le vieil homme entend bien concevoir un sérum lui redonnant la jeunesse et la santé. Pour y parvenir, il envoie son serviteur muet et simple d’esprit, Groton (Lon Chaney Jr., lui aussi en bout de carrière et en bout de course), trucider à la hache des jeunes filles afin d’extraire leur fluide vital. Entre-temps, Dracula exhume les restes du monstre de Frankenstein (le massif John Bloom, affublé d’une bouillie en latex en guise de maquillage) et demande au savant de le ressusciter (pour une raison qui, avouons-le, nous échappe totalement). « Il est né avec la furie électrique des cieux, lorsque la comète Zornov passa au-dessus de la Terre », dit le vampire dans un élan lyrique. « Ce soir, à 11h29, la comète reviendra pour compléter le premier cycle de vie du monstre « , ajoute-t-il avec la ferveur d’un présentateur météo.
Le chant du cygne
S’il n’était pas aussi mal fichu, ce crossover nous rappellerait les grandes heures du cinéaste Erle C. Kenton, qui orna le cycle déclinant des Universal Monsters d’œuvres aussi récréatives que La Maison de Frankenstein ou La Maison de Dracula. Mais ce film sans queue ni tête n’a rien de très mémorable. Chaque acteur y surjoue sans nuance : J. Carrol Naish dans un registre exagérément sentencieux (on sent bien qu’il lit ses répliques écrites visiblement sur des grandes feuilles hors champ), Zandor Vorkov avec une théâtralisation extrême (yeux écarquillés, voix noyée dans l’écho, coups de zoom intempestifs) et Lon Chaney Jr. via une pantomime outrancière et caricaturale. L’effet comique involontaire fonctionne à plein régime, y compris lors des séquences invraisemblables où ce Dracula d’opérette envoie des rayons incandescents (en dessin animé) avec sa bague. On note pourtant quelques tentatives humoristiques intéressantes, comme cette salve à l’attention d’une génération hippie à la dérive (« N’oublie pas la manif ce soir ! », « Contre quoi est-ce que nous protestons déjà ? », « Je ne sais pas, mais ça va être sympa ») ou cette apparition sous forme de clin d’œil de Forrest J. Ackerman, le célèbre rédacteur en chef de Famous Monsters. Ce Dracula contre Frankenstein complètement foutraque sera le chant du cygne de Lon Chaney Jr. et J. Carrol Naish, qui s’éteindront tous deux quelques années après sa sortie.
© Gilles Penso
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