REEL EVIL (2012)

Une petite équipe de documentaristes vient filmer le tournage d’un film d’horreur dans un ancien hôpital psychiatrique abandonné…

REEL EVIL

 

2012 – USA

 

Réalisé par Danny Draven

 

Avec Jessica Morris, Kaiwi Lyman, Jeff Adler, Jamie Bernadette, Marc-Andrew Chicoine, Michael Cline, Sandra Hinojosa, Galen Howard, Kimberly Jürgen

 

THEMA CINÉMA ET TÉLÉVISION I FANTÔMES I SAGA CHARLES BAND

En 2000, les productions Full Moon jouaient déjà le jeu du « found footage » en s’appuyant sur le succès du Projet Blair Witch pour truffer Witchouse 2 de plans subjectifs filmés avec une caméra vidéo, et en concoctant la même année The St. Franciscville Experiment. Entretemps, la discipline des images d’archives à la première personne est devenue un véritable sous-genre du cinéma d’horreur, porté par des films tels que [Rec], Diary of the Dead ou Paranormal Activity. Les scénaristes Shane Bitterling et Danny Draven décident alors de s’engouffrer dans la brèche. Le producteur Charles Band s’implique peu dans le projet, accaparé par les franchises Killjoy et Puppet Master, mais fait confiance aux deux hommes. « Nous savions que nous détestions les films en found footage où l’utilisation des caméras n’avait aucun sens ou semblait forcée », raconte Bitterling. « Alors nous avons eu l’idée d’une équipe de tournage documentaire filmant les coulisses d’un plateau de cinéma. Cela réglait une bonne fois pour toutes la question du placement des caméras. » (1) Draven prend en charge la réalisation de Reel Evil, dont le tournage se déroule pendant six nuits dans l’ancien hôpital de Linda Vista. « Comme d’habitude, le budget frôlait le néant », ajoute Bitterling. « Il était tellement bas que notre équipe des effets spéciaux a dû voler un mannequin à une autre boîte pour la scène finale, puis le remettre en place avant que les employés n’arrivent au bureau le lendemain matin ! » (2)

Pour arrondir ses fins de mois en attendant de pouvoir produire son propre documentaire, une petite équipe vidéo accepte d’être engagée sur le tournage d’un film d’horreur pour y filmer le making of. La réalisatrice Kennedy (Jessica Morris), le cameraman James (Jeff Adler) et l’ingénieur du son Cory (Kaiwi Lyman) font donc la rencontre du producteur Dirk Bailey (Michael Cline), qui les considère avec un certain mépris pas vraiment engageant. Cet accueil glacial est un avant-goût de ce qui les attend. Car dans l’ancien institut psychiatrique désaffecté où se déroule le tournage, personne sur le plateau n’est vraiment coopératif. Le réalisateur et l’actrice principale jouent les divas, les techniciens ne sont pas très bavards, bref récupérer des images ou des interviews exploitables n’est pas une tâche si facile. Entre deux prises de vues, le trio s’aventure dans les couloirs déserts du site, sans se douter des terribles secrets qui s’y cachent et n’attendent qu’une occasion de ressurgir…

L’enfer du décor

Reel Evil parvient à nous séduire quasi-immédiatement grâce au naturel décomplexé de ses comédiens, dominé par Jessica Morris qu’on avait déjà pu apprécier dans Les Geôles du diable. Beaucoup de répliques ou de réactions semblent improvisées, et les portraits de ce producteur désagréable, de ce réalisateur imbu de lui-même et de cette actrice insupportable sont franchement délectables. À ce naturalisme s’ajoute la photogénie du décor, une véritable trouvaille qui dote le film d’une atmosphère visuelle unique. Très inventive, la mise en scène de Draven intègre des éléments insolites dans les plans de manière furtive – un visage monstrueux, une apparition spectrale. Le réalisateur parvient ainsi à créer un climat de tension très efficace, avec une remarquable économie de moyens. Malheureusement, tout ça ne marche qu’un temps. Les passages qui recyclent les codes de Paranormal Activity – la caméra de surveillance immobile braquée sur un couloir vide – fonctionnent beaucoup moins bien. Les effets y sont trop appuyés, avec en outre un abus de parasites artificielles pas franchement crédible. Autre travers, qu’on sentait venir assez tôt : les situations finissent par se répéter, et lorsque tout le monde hurle en courant pendant que la caméra s’agite dans tous les sens, notre patience arrive à ses limites. S’il ne parvient pas à exploiter son concept jusqu’au bout, Reel Evil aura au moins eu le mérite de combattre audacieusement et sans rougir dans la même catégorie que les grands studios.

 

(1) et (2) Propos extraits du livre « It Came From the Video Aisle ! » (2017)

 

© Gilles Penso

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