HERCULE (2014)

Brett Ratner à la réalisation, The Rock en tête d'affiche… Et un scénario qu désacralise les exploits du plus célèbre des demi-dieux.

HERCULES

2014 – USA

Réalisé par Brett Ratner

Avec Dwayne Johnson, Rufus Sewell, Ingrid Bolso Berdal, John Hurt, Aksel Hennie, Reece Ritchie, Ian McShane, Joseph Fiennes, Peter Mullan, Irina Shayk

THEMA MYTHOLOGIE

En s’appuyant sur un roman graphique de Steve Moore et Admira Wijaya, Brett Ratner désacralise le fils de Zeus pour le muer en simple mortel. Le prologue, situé dans la Grèce de l’an 358 avant JC, nous résume pourtant la naissance, l’enfance et les travaux d’Hercule avec panache et flamboyance. D’où une séquence spectaculaire où le héros, immergé dans un lac sinistre, affronte l’Hydre de Lerne. Ses monstrueuses et gigantesques têtes reptiliennes, au cou démesuré et au crâne hérissé de pointes, l’assaillent de toutes parts. La scène est brève mais efficace. Même chose avec le sanglier d’Erymanthe et le lion de Némée – plutôt impressionnants par ailleurs – qui apparaissent furtivement dans un montage jouant la carte du merveilleux… avant de le saborder. Car ici, Hercule (Dwayne Johnson) est un colosse fatigué qui gagne sa vie comme mercenaire, vendant sa force au plus offrant, accompagné d’un groupe de compagnons d’armes fidèles. C’est son neveu Iolaos (Reece Ritchie) qui se charge de romancer ses exploits passés, enjolivant les faits pour nourrir la légende et faire trembler les pirates autour du feu de camp.

Le postulat du film est clair : ce qu’on raconte d’Hercule est une légende, un tissu d’exagérations destiné à impressionner les crédules. Un flash-back nous révèle ainsi que l’Hydre n’était pas un dragon mais un groupe de brigands masqués comme des serpents. Hercule les aurait décapités pour ramener leurs têtes au roi Eurystée. Idem pour Cerbère, aperçu dans un cauchemar où il dévore des cadavres avant de se jeter sur Hercule… mais ce n’est qu’un rêve. Tout ça ne serait donc qu’une fraude ? Hercule un simple mortel dont la légende serait inventée de toutes pièces ? Cet Hercule devient ainsi le théâtre d’une relecture « terre à terre » du mythe, où l’on vend du spectaculaire comme on créerait une campagne publicitaire mensongère. Et pourtant, le surnaturel semble percer entre les lignes. Rhésos (Tobias Santelmann), le grand méchant, utilise ainsi un sortilège pour transformer des milliers de villageois en guerriers quasi-zombies.

La déconstruction du mythe

Visuellement, le film nous offre plusieurs idées intéressantes accentuant la confusion entre mythe et réalité. Une illusion d’optique nous fait par exemple croire à une armée de centaures en contre-jour… avant qu’un changement d’angle ne révèle simplement des cavaliers humains. Même effet pour Cerbère, qui s’avère être un alignement de trois chiens féroces côte à côte. Dwayne Johnson assure en Hercule, porté par sa carrure et un certain sens de l’autodérision, même si l’ensemble finit par manquer d’ampleur, comme si le film n’osait jamais vraiment choisir entre le péplum épique et la parodie du mythe. Les fans de mythologie peuvent bien sûr être déçus par cette réinvention. Terre à terre et mythomane, cet Hercule-là n’a plus rien du demi-dieu flamboyant. Mais le parti pris n’est pas inintéressant. En déconstruisant la figure héroïque pour l’ancrer dans la boue et le sang, Ratner nous offre une variation brute, presque crépusculaire, sur un mythe trop souvent édulcoré.

 

© Gilles Penso

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