AMITYVILLE 2 : LE POSSEDE (1982)

Damiano Damiani réalise une prequel terrifiante du classique de Stuart Rosenberg qui s'avère beaucoup plus effrayant que son modèle

AMITYVILLE 2 : THE POSSESSION

1982 – USA / MEXIQUE

Réalisé par Damiano Damiani

Avec James Olson, Burt Young, Rutanya Alda, Jack Magner, Andrew Prine, Diane Franklin, Moses Gunn

THEMA FANTÔMES I DIABLES ET DEMONS I SAGA AMITYVILLE

Trois ans après Amityville la maison du diable, succès public mou du genou réalisé par un Stuart Rosenberg peu inspiré, l’appel du profit pousse le nabab fou Dino de Laurentiis à produire une suite, en fait une préquelle à la triste histoire (vraie) des Lutz. Le massacre au fusil de chasse de sa propre famille par le jeune Ronald de Feo (brièvement résumé dans le prologue du premier opus), sera ici le corps du film. Damiano Damiani, artisan italien chevronné habitué du western et du polar, se lance dans son premier film fantastique, décidé à respecter humblement les codes du genre, mais aussi à briser tous les tabous possibles. Là où Rosenberg posait une belle atmosphère mais peinait à injecter du rythme et des péripéties à son histoire, sclérosé dans un classicisme soporifique, Damiani fait le choix payant d’une approche frontale de la peur et d’un onirisme bienvenu. Sa mise en scène est le point fort du film : personnalisant le démon venu posséder le fils aîné de la maison au moyen d’une utilisation classieuse de la Steadycam, ample et subjective, elle rappelle le Carpenter de La Nuit des masques ou le Sam Raimi d’Evil Dead. Les mouvements frénétiques de la caméra virevoltant autour des personnages créent une terreur palpable, optimisée par des éclairages baroques à la Mario Bava, de solides effets spéciaux et une partition anxiogène de Lalo Schifrin (qui pioche dans le score original). Car oui, le film fait peur, comme rarement.

Cette réussite est due également au soin apporté à l’écriture des personnages : le script de Tommy Lee Wallace (Ça, Halloween 3) met à mal la sacro-sainte famille américaine, n’hésitant pas à aborder sans ambages l’inceste entre frère et sœur, le viol conjugal ou l’infanticide. Impossible d’imaginer de telles thématiques à l’écran aujourd’hui… En cela Amityville 2 évoque l’ambition désinhibée et le caractère désespéré de Simetierre. L’interprétation est au diapason, de Burt Young livrant une version extrémiste de son Paulie de Rocky au marquant Jack Magner, meurtrier malgré lui suscitant autant la pitié que la terreur. L’intelligence du film est de ne jamais vraiment juger cette famille dysfonctionnelle et malsaine, nous la présentant même sous un jour touchant lors de la séquence de l’anniversaire.

Sous l'influence de L'Exorciste

Contre toute attente, la tuerie attendue survient bien avant la fin (traumatisante à souhait), et l’œuvre s’en va soudain braconner sur les terres de L’Exorciste, le citant même directement au détour de quelques plans. Cette dernière partie pourrait faiblir, gâchée par l’impression d’être en terrain connu, mais le savoir-faire et les idées du réalisateur font merveille et parviennent même à rendre le personnage de Sonny plus effrayant que celui de la mythique Regan (rejoignant le meilleur ersatz du film de Friedkin, L’Antéchrist d’Alberto de Martino). Pour son premier (et unique) essai dans le fantastique, Damiano Damiani ne signe rien de moins qu’un des fleurons du genre. Il cèdera malheureusement la place à un Richard Fleischer vieillissant pour l’inéluctable et raté Amityville 3.

 

© Julien Cassarino

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