SHAZAM ! LA RAGE DES DIEUX (2023)

Le justicier le plus immature de l’histoire des super-héros affronte un gloubi-boulga mythologique dans cette séquelle invraisemblable…

SHAZAM ! FURY OF THE GODS

 

2023 – USA

 

Réalisé par David F. Sandberg

 

Avec Zachary Levi, Asher Angel, Jack Dylan Grazer, Rachel Zegler, Adam Brody, Ross Butler, Lucy Liu, Helen Mirren, Djimon Hounsou

 

THEMA SUPER-HÉROS I DRAGONS I MYTHOLOGIE I SAGA DC COMICS

Face au succès du premier Shazam !, il était évident qu’une suite se mettrait rapidement en chantier. La concrétisation de ce second épisode aura inévitablement été repoussée de quelques années à cause de la pandémie du Covid 19, laissant entretemps l’univers cinématographique de DC se déployer sous des formes diverses et parfois contradictoires (Birds of Prey, Wonder Woman 1984, The Suicide Squad, Zack Snyder’s Justice League, The Batman, Black Adam). Pour Shazam ! la rage des dieux, l’équipe du premier film est logiquement remise en selle : le scénariste Henry Gayden, le réalisateur David F. Sandberg et tout le casting original, Zachary Levi en tête. Le compositeur Benjamin Wallfisch étant indisponible, c’est Christophe Beck qui lui succède. Mais honnêtement, malgré le talent indiscutable des deux hommes, la différence ne saute pas aux oreilles, tant le travail qu’ils auront respectivement accompli se conforme sagement aux codes attendus de la bande originale super-héroïque sans laisser transparaître une quelconque personnalité artistique. Car ce second Shazam !, comme on pouvait s’y attendre, offre exactement aux spectateurs ce qu’ils attendent.

La scène chaotique dans un musée d’Athènes qui ouvre le film est certes impressionnante et permet au récit de s’enclencher sans temps mort. Mais rapidement, le scénario entre dans la routine des enchaînements de blagues, des scènes de sauvetage filmées sans autre parti-pris visuel que la quête de l’effet spectaculaire immédiat et des explications nébuleuses motivant les actes des super-vilains. Ici, la sympathique « famille Shazam » doit faire face aux redoutables filles du dieu Atlas, qui emprisonnent la cité de Philadelphie sous un gigantesque dôme (une idée que le scénariste avoue avoir empruntée au long-métrage Les Simpsons !). Dès lors, le réalisateur David F. Sandberg étire sur plus de deux heures de métrage une intrigue pourtant filiforme qui déborde de clins d’œil : tous les super-héros de l’univers DC sont cités, la poupée Annabelle fait son apparition dans le cabinet d’un pédiatre, les références à la pop-culture abondent (Game of Thrones, Fast and Furious). Ce type de démarche post-moderne masque généralement la vacuité d’un univers peinant à forger seul sa propre originalité.

Shazam sans âme

Aux côtés du casting initial avec lequel les spectateurs sont déjà familiers, le film s’offre de nouveaux personnages bien peu mémorables malgré le talent de leurs interprètes. Rachel Zegler, qui fut si touchante dans le West Side Story de Steven Spielberg, nous laisse ici de marbre, minaudant sans finesse. Les prestations de Lucy Liu et Helen Mirren sont tout autant anecdotiques, coincées dans des registres caricaturaux indignes de leur étoffe et de leur charisme. En désespoir de cause, on se rabat sur le bestiaire du film, conçu par l’équipe du studio d’effets visuels DNEG. Le surgissement de Ladon (un dragon dont le corps hérissé de pointes semble en bois) est un moment fort, même si le design de la bête déçoit ceux qui attendaient une représentation fidèle du véritable monstre mythologique dont il s’inspire (un reptile à cent têtes !). La prolifération du jardin des Hespérides dans la cité de la Philadelphie et l’apparition d’une nuée de hideuses créatures hybrides (chimères, harpies, minotaures et même un cyclope reprenant la morphologie de celui du 7ème voyage de Sinbad) vaut aussi le coup d’œil. Mais comme souvent, la qualité des effets visuels s’inverse proportionnellement avec celle du scénario, qui accumule dès lors des péripéties de plus en plus absurdes – pour ne pas dire embarrassantes – jusqu’à un final atteignant les sommets du ridicule.

 

© Gilles Penso


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