LE PEUPLE DES ABÎMES (1968)

L’équipage d’un vieux cargo s’échoue dans un cimetière marin où surgissent des conquistadors, des algues vivantes et des monstres géants…

THE LOST CONTINENT

 

1968 – GB

 

Réalisé par Michael Carreras

 

Avec Eric Porter, Hildegarde Knef, Suzanna Leigh, Tony Beckley, Nigel Stock, Dana Gillespie, Neil McCallum, Ben Carruthers

 

THEMA EXOTISME FANTASTIQUE I INSECTES ET INVERTÉBRÉS

Adaptation du roman « Uncharted Seas » écrit par Dennis Wheatley en 1938, Le Peuple des abîmes s’inscrit dans la vogue exotico-fantastique que le studio britannique Hammer amorça avec des films tels qu’Un million d’années avant JC et La Déesse de feu. Si le métrage revendique ouvertement son modernisme à travers un générique souligné par une chanson pop typique des sixties, c’est pour mieux basculer l’instant d’après dans un univers fantaisiste dénué de repères spatio-temporels. Pour son dernier voyage, le capitaine Lansen (Eric Porter) transporte à bord du Corita, un vieux cargo à moitié rouillé, des passagers clandestins ainsi que des centaines de fûts de phosphate B, un explosif puissant qui s’active au contact de l’eau. En découvrant cette dangereuse cargaison, l’équipage s’affole, d’autant qu’un trou dans la coque fait pénétrer l’eau dans la cale. Une mutinerie éclate, mais Lansen entend rester le seul maître à bord. Alors que le bateau menace d’exploser, il s’enfuit sur un canot de sauvetage avec ses passagers…

Après une courte odyssée où deux des rescapés eux passent l’arme à gauche (l’un d’un coup de feu, l’autre entre les mâchoires d’un requin), tous découvrent avec stupeur qu’ils ont tourné en rond. Désormais, le Corita est entouré d’algues vivantes qui attaquent les humains comme des pieuvres géantes, d’où une impressionnante séquence d’action, démarcation végétale de l’attaque du calamar géant de 20 000 lieues sous les mers. Cette flore menaçante transporte le navire jusque dans un étrange cimetière de navires où sont échouées des épaves de toutes les époques. Là vivent des descendants des conquistadors qui sillonnaient jadis la mer des Sargasses. Pour ne pas s’enfoncer dans l’eau lors de leurs excursions hors des navires, ils marchent sur les algues avec des raquettes gonflables tandis que des ballons sont accrochés à leurs vêtements.

Invertébrés antédiluviens

Prise en chasse par ces fanatiques religieux, la belle Sarah (Dana Gillespie), descendante des colons en fuite, se réfugie à bord du Corita et orne superbement la grande majorité des posters du film, malgré une présence relativement réduite à l’écran. Dans ce décor de cimetière marin photogénique et surréaliste, où règnent brumes et lueurs rougeoyantes, d’autres dangers guettent nos héros, notamment d’improbables monstres antédiluviens. Un crustacé colossal et un scorpion gros comme un éléphant (animés avec conviction par Robert A. Mattey malgré un look qui évoque les inénarrables Crabes géants de Roger Corman) surgissent ainsi avant de se livrer un combat singulier. Un autre roman, « Le Cinquième message » de William Hope Hodgson, nous vient alors à l’esprit. « Sur le pont était étendu un crabe gigantesque, d’une taille si énorme que je n’aurais jamais cru qu’un monstre pareil pût exister » y lit-on. Tout s’achève par un grand combat entre peuplades puis par un traditionnel incendie géant. Tourné aux studios Elstree, Le Peuple des abîmes est réalisé sans grand panache par un Michael Carreras qui fut toujours meilleur producteur que metteur en scène, mais son charme rétro est indéniable, et nombres d’éléments visuels annoncent les films de Kevin Connor inspirés d’E. R. Burroughs.

 

© Gilles Penso


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