MERCREDI (2023)

La fille ainée de la famille Addams se réincarne sous les traits de Jenna Ortega dans cette série orchestrée par Tim Burton…

WEDNESDAY

 

2023 – USA

 

Créée par Alfred Gough et Miles Millar

 

Avec Jenna Ortega, Gwendoline Christie, Jamie McShane, Riki Lindhome, Christina Ricci, Hunter Doohan, Catherine Zeta-Jones, Luis Guzman, Isaac Ordenez

 

THEMA FREAKS I POUVOIRS PARANORMAUX I MAINS VIVANTES I LOUPS-GAROUS

Un jour où l’autre, il allait bien falloir que Tim Burton se frotte aux créations de Charles Addams, tant les univers gothico-morbido-fantastiques des deux hommes semblaient en phase. Au début des années 90, alors qu’une version cinéma de La Famille Addams se prépare, Burton est logiquement pressenti au poste de réalisateur. Mais Batman le défi occupe alors tout son temps, le poussant à céder sa place à Barry Sonnenfeld, qui signera aussi Les Valeurs de la famille Addams. Lorsque vingt ans plus tard Universal fait l’acquisition des droits des personnages de Charles Addams, Tim Burton revient en piste avec l’idée d’en tirer un long-métrage en stop-motion. Hélas, le projet avorte. Burton prend sa revanche avec Frankenweenie, et le film La Famille Addams sera au bout du compte animé en images de synthèse sous la direction de Greg Tiernan et Conrad Vernon. Jamais deux sans trois, dit-on. La rencontre entre Burton et Addams se fera finalement par le biais d’une série télévisée centrée sur la fille aînée de la célèbre famille, incarnée jadis par Lisa Loring sur le petit écran et par l’inoubliable Christina Ricci dans les films de Sonnenfeld. Tim Burton produit Mercredi avec Alfred Gough, Miles Millar et Gail Berman et réalise lui-même plusieurs épisodes, dont le pilote.

L’idée la plus judicieuse est d’avoir confié le rôle de cette nouvelle Mercredi à Jenna Ortega. Héroïne de la série pour enfants Harley : le cadet de mes soucis, diffusée sur Disney Channel, la jeune actrice avait amorcé un virage vers le cinéma d’horreur avec le cinquième Scream, The Baby Sitter : Killer Queen et X. La voilà donc parfaitement dans son élément, entrant dans la peau d’une de ces adolescentes gothiques taciturnes si chères à Tim Burton (dans la lignée de la Lydia de Beetlejuice ou de la Sally de L’Étrange Noël de Monsieur Jack). Morticia, Gomez, Pugsley, Fester et Lurch sont respectivement incarnés par Catherine Zeta-Jones, Luis Guzman, Isaac Ordonez, Fred Armisen et George Burcea, mais tous restent à l’arrière-plan pour laisser la vedette à Mercredi. Après avoir été renvoyée une énième fois d’un établissement scolaire, la jeune fille intègre l’académie Nevermore, une école privée pour étudiants « marginaux » – autrement dit dotés de capacités surnaturelles, ce qui n’est pas sans évoquer Miss Peregrine et les enfants particuliers. En cherchant à résoudre le mystère d’un meurtre dans la région, elle s’apprête à se heurter à des dangers insoupçonnés…

Chair de poule

Burton est donc parvenu à se réapproprier le monde de Charles Addams pour l’intégrer à sa propre imagerie, convoquant logiquement Danny Elfman pour composer le thème principal de la série (le reste de la musique étant l’œuvre de Chris Bacon). La fameuse chanson de Vic Mizzy brille hélas par son absence, même si un double claquement de doigts lui rend hommage de manière récurrente au fil de l’intrigue. Autre clin d’œil appréciable : la présence de Christina Ricci dans le rôle d’une des enseignantes de Nervermore (dont le nom est bien sûr une allusion à Edgar Poe). Il faut aussi louer la prestation de Victor Dorobantu dans le rôle (pas simple) de La Chose, qu’il dote miraculeusement d’une foule d’expressions. Calibrée pour un public adolescent en quête de gentils frissons, Mercredi évoque très souvent la franchise Harry Potter, avec laquelle elle entretient de nombreux points communs, mais aussi la saga littéraire « Chair de poule » de R.L. Stine, dont elle partage la même approche horrifique « soft ». Généreuse à défaut d’être très subtile, la série regorge de rebondissements, de retournements de situation, de coups de théâtre, de créatures fantasmagoriques et de phénomènes paranormaux, dotant même la jeune héroïne de pouvoirs que nous ne lui connaissions pas jusqu’alors : des visions furtives surgissant pendant un contact physique (à la manière de celles de John Smith dans Dead Zone). Le succès sera au rendez-vous, preuve que l’équation Burton + Addams était une vraie bonne idée.

 

© Gilles Penso


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