SUPER INFRAMAN (1975)

Amateurs de super-héros sautillants en combinaisons multicolores et de monstres en caoutchouc aux morphologies improbables, ce film est fait pour vous !

JUNG-GWOK CHIU-YAN

1975 – HONG-KONG

Réalisé par Shan Hua

Avec Danny Lee, Terry Liu, Wang Hsieh, Yuan Man-Tzu, Lin Wen-wei, Shu-Yi Tsen, Chien-Lung Huang, Lu Sheng 

THEMA SUPER-HEROS I EXTRA-TERRESTRES

Au commencement était Ultraman (1966-1967), série japonaise annonçant avec une décennie d’avance les super-héros nippons de la petite lucarne s’agitant dans Spectreman, San Ku Kaï, X-Or, Bio-Man et consorts. Produite par EIji Tusburaya (créateur des effets spéciaux des premiers Godzilla), Ultraman connut un succès retentissant à Hong Kong, et poussa les Shaw Brothers à s’en inspirer pour créer le premier super-héros chinois de l’histoire du cinéma, le bien nommé Super Inframan. Dans un premier temps, cet ambitieux long-métrage bénéficie de l’effet de surprise. Qu’on en juge : au démarrage, le film nous montre pêle-mêle une sorte de ptérodactyle de taille humaine qui provoque un séisme, un gigantesque incendie en pleine ville, une cohorte de scientifiques high-tech analysant très sérieusement l’ampleur des dégâts depuis leur base (« cette situation est si grave que c’est la pire que nous ayons jamais connue », constate-t-on sinistrement en haut lieu), des statues géantes de dragons surgissant des montagnes, une méchante extra-terrestre habillée à la mode Barbarella (la princesse Dragon Mom, alias Terry Liu) et menaçant le monde, et une armada de monstres en latex se disputant la palme du ridicule.

Le spectateur n’est pas au bout de ses peines, car il lui reste alors à découvrir les origines de Super Inframan, un super-héros engoncé dans une combinaison en skaï rouge, au casque en forme de tête d’insecte, créé par un savant inventif, le professeur Chang (Wang Hsieh), à partir d’un courageux policier volontaire, l’inspecteur Rayma (Li Hsiu-Hsien). Et le combat de faire rage, à grand renfort de voltiges diverses obtenues à l’aide de trampolines, de câbles et de prises de vues passées en marche arrière. Ici, tout le monde pratique le kung-fu : super-héros, super-vilains, monstres en caoutchouc, bref c’est un véritable festival d’arts martiaux surréalistes.

Cathartique et régressif

Entre deux bagarres, le scénario nous offre de délicieux clichés de serial : le meilleur ami du héros (Chu Ming) qui se fait hypnotiser et devient traitre malgré lui, la jolie fille du professeur (Yuan Man-Tsu) qui s’éprend du beau justicier en skaï… Dans une scène inspirée par Godzilla 1980, et reprise plus tard dans la série Spectreman, l’un des monstres et le super-héros atteignent tous deux une taille gigantesque et s’affrontent dans un paysage miniature. Parmi les scènes mémorables du film, notons l’attaque de la base scientifique par un monstre à tentacules et le combat d’Inframan contre deux robots à tête extensible. Passé l’effet de surprise, cette succession de batailles joyeusement chorégraphiées, d’explosions en rafale, de rayons rotoscopiques maladroits et de zooms intempestifs s’avère assommante, et le dénouement arrive presque comme une libération. Mais reconnaissons tout de même à Super Inframan  d’indéniables vertus cathartiques et régressives. Quand on songe que la même année, le cinéma américain nous offrait Les Dents de la mer, Vol au-dessus d’un nid de coucou ou Un Après-midi de chien, on mesure le vertigineux écart culturel qui sépare parfois certaines cinématographies…

© Gilles Penso

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