MINECRAFT – LE FILM (2025)

Jack Black, Jason Momoa et leurs compagnons s’agitent dans cette adaptation d’un des jeux vidéo les plus populaires au monde…

A MINECRAFT MOVIE

 

2025 – USA

 

Réalisé par Jared Hess

 

Avec Jack Black, Jason Momoa, Sebastian Hansen, Emma Myers, Danielle Brooks, Jennifer Coolidge, Rachel House

 

THEMA MONDES VIRTUELS ET MONDES PARALLELES

L’industrie vidéo-ludique se posant en concurrente directe du 7ème art tout en se payant de belles synergies commerciales avec celui-ci, les adaptations de jeux sont devenues un genre à part entière, pour le pire… et le moins pire. En généralisant, on pourrait affirmer que les films se situant DANS l’univers du jeu peinent à impliquer le spectateur (le Super Mario Bros de 1993, Assassin’s Creed, Uncharted, Five Nights at Freddy’s), alors que ceux qui jouent la carte du « merveilleux » en commençant dans le monde réel avant de projeter leurs protagonistes dans un monde virtuel favorisent l’identification et la suspension d’incrédulité du spectateur. Une approche qui fonctionne parfaitement dans Tron, Matrix, Jumanji – Bienvenue dans la jungle, La Grande aventure Lego ou l’adaptation animée de Super Mario Bros (bien que la plupart de ces titres ne soient pas des adaptations de jeux existants), et que les scénaristes de Minecraft – le film ont salutairement choisi d’adopter ici face à l’absence totale d’enjeux dramatiques du matériau d’origine. Ainsi, sans jamais chercher à expliquer le pourquoi du comment puisqu’il est entendu que le spectateur sait ce qu’il est venu voir, le film introduit dès les cinq premières minutes le monde de Minecraft, dans lequel tout se construit et se détruit tout aussi facilement. L’argument narratif n’a de toutes façons que peu d’intérêt ici, la première demi-heure d’exposition enfilant les poncifs des films d’aventures familiaux des années 80 et 90 comme des perles – jusqu’aux inévitables enfants orphelins ayant du mal à trouver leur place dans une nouvelle ville – tout en émulant la structure et le ton de Jumanji – Bienvenue dans la jungle, dont l’efficacité de la mise en place s’avérait exemplaire. Mais copier n’étant pas jouer, Minecraft – le film est-il un divertissement aussi recommandable que son modèle ?

Hollywood ne s’avouant jamais vaincue face à la difficulté d’accoucher d’un scénario acceptable pour une propriété intellectuelle chèrement acquise, il aura fallu plus de dix ans de développement avant que Minecraft – le film ne débarque sur nos écrans. Dès 2014, Shawn Levy, à qui l’ont devait alors notamment le très réussi La Nuit au musée (qui empruntait déjà au Jumanji original), fut engagé mais, ne parvenant pas à s’entendre sur un scénario digne de ce nom, s’en alla réaliser Free Guy, une distrayante variation sur le thème de Un Jour sans fin appliquée… aux codes du jeu vidéo justement. C’est Jared Hess, acclamé (notamment par Spielberg, rien que ça) pour sa comédie Napoleon Dynamite, qui conduira le projet Minecraft à terme, aidé par ses complices de toujours au scénario : Chris Bowman et Hubbel Palmer. On notera également la présence de deux autres scribes au générique : Neil Widener et Chris Galetta. Tout ce beau monde pour accoucher de ça ? On peut légitimement penser que les deux premiers ont exposé les grandes lignes de l’ « intrigue » et que les suivants ont participé à l’élaboration des gags et des personnages. Car au-delà de la direction artistique et de l’animation de personnages en images de synthèse anguleux franchement réussies, chapeautées par le superviseur des effets spéciaux Grant Major (Fantômes contre fantômes, la trilogie Le Seigneur des Anneaux, King Kong), Minecraft – le film repose entièrement sur les épaules de ses interprètes principaux : Jack Black et l’étonnant Jason Momoa.

Black micmac

Étonnamment, Jack Black devait à l’origine se contenter de prêter sa voix à un cochon. Ayant déjà travaillé avec Jared Hess sur Nacho Libre, il accepta le premier rôle après le désistement de Matt Berry, initialement envisagé. La popularité de Black sur les réseaux sociaux a façonné un personnage à part entière : ses grimaces, ses chorégraphies et acrobaties (dis)gracieuses et ses chansons délirantes sont devenues sa marque de fabrique. Son évolution artistique semble même emprunter le chemin inverse de celles des clowns tristes Robin Williams et Jim Carrey, qui  sont passés de l’excentricité à la plus grande gravité (via la dépression). Jack Black, lui, semble avoir complètement abandonné toute envie de jouer la comédie et s’amuse de la façon la plus régressive qui soit. Selon que vous aimiez le comédien ou pas, le film s’apparente à un one-man show survolté ou à une torture ininterrompue, le summum étant atteint avec trois chansons parfaitement absurdes. Quant à Jason Momoa, peinant encore à s’imposer comme un nom « bankable » malgré les deux Aquaman et Fast & Furious X et semblant jouer ici le Dwayne Johnson de seconde classe, il crée la surprise en s’avérant être un substitut méritant, jouant comme s’il se fichait désormais de son image, s’amusant visiblement à jouer le raté sympathique. Bien sûr, la partition comique joue la même note tout le long du film, mais le montage ne laisse pas de gras sur les improvisations et nous emmène vite d’une péripétie à l’autre. On peut déplorer néanmoins l’absence totale d’enjeux dramatiques. Minecraft – le film annonce-t-il une certaine idée du cinéma de divertissement à l’ère Tiktok ? La plateforme a d’ailleurs contribué à la promotion du film par le biais du « chicken jokey challenge », consistant à se filmer dans les salles obscures en hurlant et en lançant du popcorn lors d’une scène précise. On aura le droit de désapprouver… Reste qu’il serait malhonnête de reprocher à Minecraft – le film ce qu’il n’a jamais prétendu être, à savoir un film enlevé et subtil : il s’agit d’un divertissement familial complètement potache et absurde et c’est déjà bien plus qu’il n’avait le droit de l’être !

 

 © Jérôme Muslewski

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