

« Le visage du clown était blanc, et sur ce blanc, le sourire rouge s’étalait, dégoulinant. »
Stephen King, Ça
Né sur la piste du cirque au XIXe siècle, le clown incarne d’abord la joie, la maladresse et la tendresse. Héritier des bouffons médiévaux et des zanni de la commedia dell’arte, il amuse par ses chutes, ses grimaces et ses maladresses. Par ses excès et sa propension à semer le désordre, il symbolise aussi la liberté face aux conventions. Mais derrière le maquillage blanc et le sourire peint, se cache déjà une ambiguïté : celle d’un être qui cache sa véritable nature sous un masque. Cette duplicité, longtemps inoffensive, va devenir le cœur de sa métamorphose. Le XXe siècle amplifie cette tension. Dans la culture populaire, le clown n’est plus seulement comique : il devient étrange, parfois inquiétant. Les visages figés du cirque éclairés par les projecteurs ont quelque chose de spectral. Le cinéma muet en joue déjà, comme Tod Browning dans Freaks, où la monstruosité se mêle au rire. Puis le figure du clown triste, popularisée par Chaplin ou Emmett Kelly, révèle la mélancolie du comique. Sous le fard se cache l’humanité blessée.
Mais c’est dans la seconde moitié du XXe siècle que le clown bascule franchement dans l’horreur. En 1970, John Wayne Gacy, tueur en série américain surnommé « Pogo le Clown », marque les esprits. Dès lors, l’idée qu’un visage joyeux puisse dissimuler un monstre s’inscrit dans l’imaginaire collectif. En 1982, le clown spectral de Poltergeist surgit des ténèbres pour terroriser un enfant. Puis Stephen King, avec Ça, consacre la mutation : Pennywise, entité maléfique aux traits grotesques, incarne la peur primale du familier devenu étranger. Depuis, le clown terrifiant est devenu un archétype. De Killer Klowns from Outer Space à Terrifier, il hante les cauchemars avec la même logique : détourner l’innocence pour révéler la cruauté. Le clown horrifique fascine parce qu’il cristallise notre peur du double. Ce qui devait nous faire rire se retourne contre nous.
© Gilles Penso
INDEX DES FILMS CHRONIQUÉS :
1954 : Le Vengeur invisible de Motoyoshi Oda
1966 : Batman le film de Leslie H. Martinson
1974 : Les Démoniaques de Jean Rollin
1982 : Poltergeist de Tobe Hooper
1982 : X-Tro d’Harry Bromley Davenport
1988 : Les Clowns tueurs venus d’ailleurs de Stephen Chiodo
1989 : Batman de Tim Burton
1990 : Ça de Tommy Lee Wallace
1991 : Delicatessen de Jean-Pierre Jeunet et Marc Caro
1992 : Demonic Toys de Peter Manoogian
1993 : Dollman vs. Demonic Toys de Charles Band
1994 : The Crow d’Alex Proyas
1996 : Josh Kirby : Time Warrior épisode 3 – Trapped on Toy World de Frank Arnold
1999 : Blood Dolls de Charles Band
2000 : Killjoy de Craig Ross Jr.
2002 : Killjoy 2 de Tammy Sutton
2003 : La Maison des 1000 morts de Rob Zombie
2004 : Puppet Master vs. Demonic Toys de Ted Nicolaou
2008 : The Dark Knight de Christopher Nolan
2010 : Balada Triste d’Alex de la Iglesia
2010 : Demonic Toys 2 de William Butler
2010 : Killjoy 3 de John Lechago
2012 : Killjoy Goes to Hell de John Lechago
2013 : All Hallow’s Eve de Damien Leone
2015 : Krampus de Michael Dougherty
2015 : Poltergeist de Gil Kenan
2016 : Killjoy’s Psycho Circus de John Lechago
2016 : Terrifier de Damien Leone
2016 : 31 de Rob Zombie
2016 : Ça d’Andres Muschetti
2016 : Suicide Squad de David Ayer
2017 : Evil Bong 666 de Charles Band
2018 : Evil Bong 777 de Charles Band
2019 : Ça : chapitre 2 d’Andres Muschetti
2019 : Joker de Todd Philips
2022 : Baby Oopsie 2 de William Butler
2022 : Terrifier 2 de Damien Leone
2023 : Baby Oopsie 3 de William Butler
2023 : Demonic Toys : Jack-Attack de William Butler
2024 : Joker : folie à deux de Todd Philips
2024 : The Crow de Rupert Sanders
2024 : Terrifier 3 de Damien Leone
2025 : La Nuit des clowns de Eli Craig
2025 : Helloween de Phil Claydon
