SCREAM (1996)

Wes Craven redonne ses lettres de noblesse au slasher en lui adjoignant une bonne dose de second degré et de mise en abyme

SCREAM

1996 – USA

Réalisé par Wes Craven

Avec Neve Campbell, David Arquette, Courteney Cox, Skeet Ulrich, Drew Barrymore, Matthew Lillard, Rose McGowan 

THEMA TUEURS SAGA SCREAM I WES CRAVEN

Avec Freddy sort de la Nuit, Wes Craven avait tenté une approche analytique du slasher, mais en tombant dans les lieux communs qu’il dénonçait, il finissait par ruiner un peu sa démonstration. Quelques années plus tard, il prolonge pourtant cette démarche avec Scream, et force est de reconnaître que cette fois-ci, la réussite est totale. « Dans Scream, on ne met plus en scène les gens qui font les films d’horreur, comme pour Freddy sort de la Nuit, mais ceux qui les regardent », nous explique Wes Craven. « Les personnages sont donc des fans de cinéma d’épouvante. Les spectateurs se trouvent du même coup en présence de héros qui leur ressemblent, ont les mêmes références et les mêmes réactions qu’eux. » (1) Tout de noir vêtu, masqué d’un faciès blanc et grimaçant, un serial killer fan de films d’horreur terrorise la petite ville tranquille d’Hillsboro, assassinant sauvagement Casey Becker et son petit ami, avant de s’en prendre à l’étudiante Sidney Prescott et à ses amis…

Le miracle de Scream tient au fait que le film démonte un à un tous les mécanismes qui régissent les HalloweenVendredi 13 et consorts tout en obéissant lui-même aux mêmes règles, piégeant ainsi un spectateur consentant, prévenu et conditionné. A ce titre, une séquence est exemplaire : Sidney se moque ouvertement des héroïnes de films d’horreur qui, au lieu de fuir les tueurs en quittant leur maison, courent stupidement se réfugier au premier étage. Or quelques minutes plus tard, c’est exactement ce qu’elle est contrainte de faire ! Le choix de l’aspect physique du tueur participe lui aussi d’une volonté de démarcation et d’approfondissement. Car à la culture populaire d’Halloween et de Vendredi 13 (le masque de carnaval ou de hockey), Craven oppose une référence expressionniste : le tableau « Le Cri » d’Edward Munch, auquel le film doit d’ailleurs son titre. « Voilà ce qui arrive quand un ancien professeur de fac réalise des films d’horreur ! » (2) plaisante Craven, avant de reconnaître que cette référence est en partie inconsciente, dans la mesure où le masque fut trouvé par hasard chez un collectionneur pendant des repérages. Le minutieux scénario de Williamson multiplie à loisir les fausses pistes jusqu’à une révélation finale pour le moins surprenante.

Un casting issu du petit écran

Outre Drew Barrymore, héroïne de la séquence d’introduction qui demeure l’un des moments les plus forts du film, Scream met en scène des comédiens issus de la sitcom et de la série familiale, notamment Neve Campbell (La Vie à cinq) et Courteney Cox (Friends), à contre-courant et à contre-emploi de leur popularité télévisée. La seule chose un tantinet curieuse, dans Scream, est le sentiment que Wes Craven crache un peu dans la soupe, comme s’il ne croyait plus vraiment au genre qui l’a pourtant nourri tout au long de sa carrière. D’autant que son film suivant, La Musique de mon cœur, marquera une brutale rupture en suivant les voies du mélodrame social réaliste. Mais Craven reviendra vite à ses premières amours, et sans doute faut-il surtout voir dans Scream une démarche introspective, mêlant intimement la dérision et le profond respect du genre. D’ailleurs le tueur au masque blanc a subitement relancé la vogue du slasher, dont la popularité s’était progressivement étiolée au fil des ans.

(1) et (2) Propos recueillis par votre serviteur en octobre 2005

© Gilles Penso

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BRAINDEAD (1992)

Pour son troisième long-métrage, Peter Jackson signe le film le plus gore de l'histoire du cinéma !

BRAINDEAD

1992 – NOUVELLE-ZELANDE

Réalisé par Peter Jackson

Avec Timothy Balme, Diana Penalver, Elizabeth Moody, Ian Watkin, Brenda Kendall, Stuart Devenie

THEMA ZOMBIES

Suite aux succès de Bad Taste et Les Feebles, Peter Jackson s’est décidé à passer à la vitesse supérieure avec Braindead, améliorant sa mise en scène, complexifiant son scénario et multipliant les défis techniques malgré un budget toujours très modeste. Il n’hésite pas, du coup, à reconstituer la Nouvelle-Zélande des années 50 à l’aide d’astucieuses maquettes ou d’user à outrance du steadycam pour dynamiser ses cadrages. Rétrospectivement, il est savoureux de revoir les allusions à King Kong qui ponctuent le début du film, preuve que le parcours de Jackson suit depuis toujours une ligne directrice logique. Braindead démarre en effet sur l’île du Crâne, au sud-ouest de Sumatra (les connaisseurs apprécieront !).Là, un zoologiste brave les indigènes et capture un singe-rat vorace, au prix de sa vie. Ainsi le ton est-il donné dès la scène pré-générique. Après l’allusion au chef d’œuvre de Schoedsack et Cooper, nous avons droit à une parodie du prologue des Aventuriers de l’Arche Perdue, puis au gag très sanglant de l’homme découpé à la machette… Ce n’est pourtant rien à côté de ce qui suit, c’est-à-dire une hystérie collective dans laquelle le sang gicle à un débit rarement vu à l’écran, ce qui valut à Braindead le titre fort convoité de film le plus gore de l’histoire du cinéma, carrément !

Le mal prend ses racines au zoo dans lequel a été transféré l’animal hybride, et où se promènent Lionel (Tim Balme) et Paquita (Diana Penalver), qui viennent de tomber amoureux l’un de l’autre. Mais la très possessive mère de Lionel, qui les espionne, se fait mordre par le singe-rat. Le monstre est animé image par image (maladroitement mais non sans charme) par Peter Jackson himself, lequel avoue ouvertement le clin d’oeil à Ray Harryhausen en plaçant dans la chambre de Lionel une affiche du Monstre des temps perdus. Une fois mordue, la mégère massacre la bestiole, très énervée, puis se mue progressivement en zombie avant de contaminer tout son entourage : une infirmière, le Père McGruder, un nourrisson, un gang de teenagers et une bande de fêtards invités par le cupide Oncle Les. L’assaut final des zombies dans la grande maison, version hard de celui de La Nuit des morts-vivants, accumule de tels débordements gore qu’il en devient forcément jubilatoire.

Un massacre qui bat tous les records

L’imagination de Jackson et de son expert ès effets spéciaux Richard Taylor fonctionnent à plein régime, nous offrant des démesures sanglantes inédites : l’homme au visage arraché comme un masque révélant un crâne grimaçant, la fille dont la tête plantée dans une ampoule s’allume à la manière d’un abat-jour, le zombie coupé en deux qui traîne derrière lui une colonne vertébrale et quelques organes rampants… Sans parler du massacre à la tondeuse à gazon, qui bat tous les records ! Assez curieusement, au milieu de ces débordements, l’idylle très naïve du  jeune couple vedette a quelque chose de touchant, probablement grâce à la spontanéité et à la fraîcheur de Diana Penalver et Tim Balme, imperturbablement sérieux au beau milieu de ce gigantesque bain de sang parodique.

 

© Gilles Penso

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LES DIAMANTS SONT ETERNELS (1971)

Après la parenthèse de George Lazenby, Sean Connery endosse une dernière fois le smoking de James Bond

DIAMONDS ARE FOREVER

1971 – GB

Réalisé par Guy Hamilton

Avec Sean Connery, Jill St John, Charles Gray, Lana Wood, Jimmy Dean, Bruce Cabot, Bernard Lee, Lois Maxwell, Joe Robinson

THEMA ESPIONNAGE ET SCIENCE-FICTION I SAGA JAMES BOND

En 1967, après On ne vit que deux fois, Sean Connery avait décidé, comme chacun le sait, d’abandonner le rôle de James Bond. Mais après l’essai de George Lazenby peu couronné de succès, les producteurs se tournèrent à nouveau, tout sourire, vers leur acteur vedette. Le retour de Sean Connery n’était évidemment pas gagné, et Saltzman et Broccoli envisagèrent un temps de confier le rôle à John Gavin (amant de Janet Leigh dans Psychose et Jules César dans Spartacus). Mais la poignée de films que la star écossaise avait tournée entre 67 et 71 ne marqua guère les mémoires. Alors, moyennant un salaire royal de plus d’un million de dollars (qui sera reversé à l’association Scottish International Educational Fund), Sean Connery endosse le smoking de Bond une dernière fois, si l’on excepte son retour quasi-parodique dans Jamais plus jamais en 1983. Le voici donc plongé dans un film très distrayant, mais au scénario passablement confus, reprenant plus ou moins la trame du quatrième roman d’Ian Fleming.

M (toujours incarné par Bernard Lee) met James Bond au courant d’une histoire de vol de diamants survenu dans des mines d’Afrique du Sud malgré un système de sécurité apparemment hermétique. Toutefois, ce qui est plus inquiétant est qu’aucun des joyaux volés n’est réapparu sur le marché mondial. La mission de Bond consiste à découvrir qui recèle les diamants et pourquoi. Pour commencer, Bond se fait passer pour Franks, un trafiquant que l’on sait appartenir à un gang, et se retrouve à Las Vegas, nez à nez avec Ernst Stavro Blofeld qui, après Donald Pleasence et Telly Savalas, a pris ici les traits peu charismatiques de Charles Gray. En fait, Blofeld a placé en orbite autour de la Terre un gigantesque générateur à laser qui utilise les diamants comme source d’énergie supplémentaire, et dont le rayon fait exploser fusées, missiles et sous-marins. Parmi les moments forts du film, Bond s’enfuit à bord d’un véhicule lunaire et affronte deux lutteuses redoutables autant que sculpturales, répondant aux doux noms de Bambi et Perle Noire.

Bambi et Perle Noire

Celles-ci, incarnées respectivement par Fonna Garrett et Trina Parks, nous donnent droit à une séquence surprenante où – une fois n’est pas coutume – 007 perd ses moyens face au beau sexe, manquant même d’être étouffé puis noyé dans une piscine par les deux gymnastes en maillot de bain ! Dans le rôle de l’homme de main Bert Saxby, les cinéphiles reconnaîtront Bruce Cabot, qui fut le héros de King Kong 38 ans plus tôt, et qui s’éteignit un an après la sortie des Diamants Sont éternels. Toujours du côté des méchants, on note en prime un duo de tueurs improbables et implicitement homosexuels – au grand dam de Dame Censure – qui se nomment Kidd et Wint (Putter Smith et Bruce Glover), et qui participent au second degré devenu visiblement le maître mot de ce septième James Bond. La très belle chanson du générique est interprétée par la chaude voix de Shirley Bassey. Les 116 millions de dollars de recette du film prouvèrent que l’alchimie Connery/Bond fonctionnait toujours à merveille aux yeux du public.

 

© Gilles Penso

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REINCARNATIONS (1980)

Une enquête criminelle menée par le shérif d'une petite station balnéaire prend une tournure terrifiante lorsque les morts semblent revenir à la vie…

DEAD AND BURIED

1980 – USA

Réalisé par Gary Sherman

Avec James Farentino, Melody Anderson, Jack Albertson, Dennis Redfield, nancy Locke Hauser, Lisa Blount, Robert Englund

THEMA ZOMBIES

Par sa mise en scène très efficacement sobre et son acheminement lent vers la folie, Réincarnations distille un véritable climat de terreur, lequel est renforcé – au lieu d’être désamorcé – par une solide dose d’humour noir. L’histoire, apparemment policière, glisse le spectateur dans la peau du shérif Dan Gillis, interprété par James Farentino (transfuge de la série Dallas). Celui-ci, œuvrant dans la petite station balnéaire Potter’s Bluff, sur la Côte Est, voit sa tranquille routine subitement brisée par d’étranges actes de violence. Coup sur coup, il doit faire face à trois morts par le feu, mystérieuses et atroces. Inquiète de sa réputation, la petite ville tranquille affirme qu’il s’agit d’accidents sans aucun lien les uns avec les autres. Pour Gillis, ce sont indiscutablement des crimes. Et nous voilà face à un schéma qui nous est familier depuis Les Dents de la mer. Mais ce vague sentiment de déjà-vu vole vite en éclats face à l’audacieuse originalité de l’argument. Car malgré les pressions, Gillis enquête, collecte d’étranges indices, et ses investigations tournent au cauchemar. Il y a d’abord ces vivants qu’il croise et qui ressemblent étrangement aux victimes brûlées vives… Il y a ce piéton gravement blessé qui disparaît sans laisser de traces tel un fantôme. Et il y a surtout William Dobbs (Jack Albertson), croquemort et embaumeur qui semble en savoir bien plus qu’il ne le dit, et qui fut jadis renvoyé de l’hôpital où il exerçait à cause d’expériences illicites qu’il y menait.

Peu à peu, Gillis en vient à douter de ce qu’il découvre et de sa propre raison, son investigation prenant un tour cauchemardesque qui n’est pas sans évoquer celle de Mia Farrow dans Rosemary’s Baby, d’autant que l’épouse de Gillis (la belle Melody Anderson) semble impliquée dans cette étrange affaire. Mystère et inquiétude se développent sourdement, jusqu’à un dénouement démesuré, inattendu, qui remet non seulement en cause tout le film, mais marque une première dans l’histoire du cinéma fantastique, tant l’idée est inédite et surprenante. Pour en décrire l’impact sans gâcher la surprise, il faudrait comparer cette chute à celle de La Planète des singes. Après le choc, le film s’achève sur une séquence à la fois macabre et terriblement émouvante…

Par les auteurs d'Alien

Les auteurs de ce scénario fou ne sont autre que Dan O’Bannon et Ronald Shusett, à qui nous devons rien moins que l’histoire d’Alien. A la réalisation épurée de Gary Sherman se conforment le jeu dépouillé des acteurs et des effets spéciaux cosmétiques étonnamment réaliste signés Stan Winston. La mise en scène en plan séquence de l’embaumement de la jeune fille, notamment, est servie par un maquillage surprenant et semble rendre hommage à une des scènes de L’Invasion des profanateurs de sépulturesRéincarnations propose ainsi un regard tout à fait neuf sur le thème des zombies, et son titre original – Dead and Buried, c’est-à-dire « mort et enterré » – eut été bien préférable à cette « traduction » française passe-partout et surtout hors-sujet.

 

© Gilles Penso

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AU SERVICE SECRET DE SA MAJESTÉ (1969)

Un James Bond à part dans lequel George Lazenby remplace momentanément Sean Connery sous le smoking de 007

ON HER MAJESTY’S SECRET SERVICE

1969 – GB

Réalisé par Peter Hunt

Avec George Lazenby, Diana Rigg, Telly Savalas, Gabrielle Ferzetti, Ilse Steppat, Lois Maxwell, Bernard Lee, Yuri Borienko

THEMA ESPIONNAGE ET SCIENCE-FICTION I SAGA JAMES BOND

Choisir un parfait inconnu pour succéder à Sean Connery dans le rôle de James Bond n’était pas une mauvaise idée en soi, d’autant que George Lazenby, mannequin australien faisant là ses premiers pas sur le grand écran, possède les attributs physiques adéquats et dégage une indéniable sympathie. Mais son charisme tout relatif joue en sa défaveur, ce qui explique partiellement pourquoi le public bouda un peu Au service secret de Sa Majesté. Un autre choix audacieux désarçonna les spectateurs : une fidélité respectueuse au onzième roman de la série, dans lequel l’agent secret se mariait, et où le happy end traditionnel était remplacé par un dénouement d’une surprenante noirceur.

Lorsque le film commence, James Bond profite de deux semaines de congé pour partir au Portugal, sur les traces de Ernst Stavro Blofeld. Il le retrouve, sous le titre de comte de Bleuchamp (traduction française littérale de « Blofeld »). L’interprétation de Donald Pleasence dans On ne vit que deux fois était tellement marquante qu’on imaginait mal qui pouvait décemment lui succéder, mais il faut bien avouer que la prestation de Telly Savalas est tout à fait à la hauteur. Se faisant passer pour Hilary Bray, un généalogiste du collège des armes, Bond est reçu à l’institut des recherches physiologiques de Blofeld. Celui-ci a cultivé un virus qui entraîne une stérilité définitive chez certains animaux et différentes espèces de plantes. Or il a prévu d’utiliser toutes les jeunes patientes de l’institut pour pulvériser ce virus sur la population…

Madame James Bond

Inaugurant là sa carrière de réalisateur, l’ex-monteur Peter Hunt prend dignement la relève de Terence Young, Guy Hamilton et Lewis Gilbert, nous offrant une spectaculaire poursuite à skis et un combat final sur un bobsleigh lancé à vie allure. Tracy di Vincenzo, la James Bond girl vedette, prend ici les traits de Diana Rigg, la délicieuse Emma Peel de Chapeau melon et bottes de cuir. Mais son statut est fort différent de toutes les jolies créatures qui la précédèrent, puisqu’elle devient ici Madame James Bond. « Sacrilège ! » crièrent sans doute les amateurs de l’agent secret misogyne et volage de la première époque, qui déclarait sous la plume d’Ian Fleming : « Dans la plupart des mariages, les conjoints n’ajoutent pas leur personnalité l’une à l’autre. Au contraire, ils la retranchent. » Mais il faut croire qu’en rencontrant la belle Tracy, son imperturbabilité fut quelque peu émoussée, car dans le roman dont s’inspire le film, il décrit sa future épouse avec passion : « Elle possède tout ce que j’ai toujours désiré chez une femme. Elle est magnifique, au lit et hors du lit. Elle est intrépide, courageuse, pleine de ressources, toujours excitante. » Et que dire de ce final poignant, provoquant les larmes d’un personnage qu’on n’a connu qu’insensible et cynique ? A cause de son succès mitigé, Au Service Secret de Sa Majesté ne fera pas école. Lazenby disparaîtra de la circulation, l’épisode du mariage tragique sera à peine évoqué dans L’Espion qui m’aimaitRien que pour vos yeux et Permis de tuer, et 007 redeviendra un héros non évolutif et solide comme un roc. Mais au fil des ans, le film de Peter Hunt gagnera ses galons d’œuvre culte.

© Gilles Penso

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CASINO ROYALE (1967)

Un James Bond parodique totalement délirant, mis en scène par cinq réalisateurs et paré d'un casting exceptionnel

CASINO ROYALE

1967 – GB

Réalisé par John Huston, Ken Hughes, Val Guest, Robert Parrish et Joe McGrath

Avec David Niven, Deborah Kerr, Orson Welles, Peter Sellers, Ursula Andress, Woody Allen, William Holden, John Huston

THEMA ESPIONNAGE ET SCIENCE-FICTION I SAGA JAMES BOND

« Casino Royale », le tout premier roman consacré à James Bond, était également le seul qui n’ait pas été acquis par les producteurs Harry Salzman et Albert Broccoli. Au milieu des années 60, profitant de la vogue 007 portée aux nues par Goldfinger et Opération Tonnerre, Charles K. Feldman, détenteur des droits, décida donc de lancer sa propre version des aventures de l’agent secret le plus célèbre du monde. Mais il estima avec prudence qu’il ne pouvait décemment combattre dans la même catégorie que les superproductions spectaculaires mettant en vedette Sean Connery (il envisagea pourtant un temps de confier le rôle principal à ce dernier, mais Connery réclamait un cachet trop élevé). Son option fut donc la parodie déjantée bourrée de stars internationales. Du coup, le budget grimpa à 12 millions de dollars, autrement dit deux fois plus que la somme initialement estimée, et même plus que celle dépensée sur On ne vit que deux fois.

Le scénario de Wolf Mankowitz, John Law et Michael Sayers ne s’inspire que très modérément du roman original pour narrer sur plus de deux heures un récit décousu qui semble notamment s’inspirer des comédies loufoques de Blake Edwards. Ici, Sir James Bond est incarné par David Niven (qui était à l’origine le comédien idéal pressenti par Ian Fleming). Profitant d’une paisible retraite bien méritée, il est contraint de reprendre du service lorsque l’organisation criminelle SMERSH menace la paix en faisant disparaître une dizaine d’agents secrets. Pour mieux tromper l’ennemi, Bond décide de partager son nom et son matricule 007 avec six autres agents. La majeure partie du casting s’appelle donc James Bond dans Casino Royale, que ce soit Peter Sellers, Terence Cooper ou même Ursula Andress ! L’enquête de cette improbable armada d’espions s’oriente vers un super-vilain absurde, le maléfique docteur Noé, qui s’apprête à lâcher une bactérie sur la planète pour transformer toutes les femmes en bombes sexuelles et éliminer tous les hommes mesurant plus d’un mètre soixante ! Noé est incarné par Woody Allen, et les trop rares séquences le mettant en scène figurent parmi les plus hilarantes du film.

Un vilain incarné par Orson Welles

Hélas, le reste du métrage n’est pas à l’avenant. Erratique, voire parfois complètement incompréhensible, l’intrigue s’achemine mollement vers la fameuse partie de cartes contre Le Chiffre (incarné par Orson Welles) dans le casino qui donne son nom au film, seul élément ayant survécu au récit de Fleming. Le bataillon de scénaristes et de réalisateurs réunis par Feldman n’ayant visiblement pas trouvé d’idée pour finir le film, le dénouement est un fourre-tout indigeste, au cours duquel quelques guest stars pointent le bout de leur nez, notamment Jean-Paul Belmondo en légionnaire et George Raft dans son propre rôle. Portée par le tube « The Look of Love », composé par Burt Bacharach et incarné suavement par Dusty Springfield, et lancé par une colossale campagne publicitaire, cet ovni nonsensique remporta contre toute attente un gros succès, et n’eut pas vraiment à rougir de la concurrence des James Bond officiel qui triomphaient alors sur les écrans.

 

© Gilles Penso

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OPERATION TONNERRE (1965)

James Bond affronte le redoutable Emilio Largo qui a détourné pour le compte du S.P.E.C.T.R.E. un navire transportant deux bombes nucléaires

THUNDERBALL

1965 – GB

Réalisé par Terence Young

Avec Sean Connery, Claudine Auger, Adolfo Celi, Luciana Paluzzi, Martine Beswick, Rik Van Nutter, Bernard Lee, Lois Maxwell

THEMA ESPIONNAGE ET SCIENCE-FICTION I SAGA JAMES BOND

Opération Tonnerre faillit ne jamais voir le jour, à cause d’une bataille juridique opposant Ian Fleming et Kevin McClory, réclamant sa part de droits sur une histoire dont il serait co-auteur. Après un arrangement à l’amiable et l’accès de McClory au poste de producteur, le quatrième James Bond amorça son tournage début 1965. Toujours aussi élégant, froid et imperturbable, Sean Connery commence très fort au cours d’une séquence d’introduction tournée au château d’Anet, non loin de Paris. Après avoir assommé une fausse veuve, il échappe à des tueurs  grâce à un réacteur dorsal qui lui permet de s’envoler dans les airs. Prototype réel de l’armée américaine, cette fusée personnelle nous gratifie d’une des séquences d’action les plus incroyables de la série tout entière, Bond (doublé par le cascadeur Bill Suitor) se propulsant à quelque deux cent mètres d’altitude avant que ne retentisse le générique de début entonné avec emphase par Tom Jones sur une partition puissante de John Barry.

Ici, l’ennemi de 007 est le sinistre Emilio Largo (Adolfo Celi), qui, pour le compte du S.P.E.C.T.R.E., compte profiter des manœuvres de l’OTAN afin de détourner un bombardier en remplaçant son pilote par l’un de leurs agents. L’avion transporte deux bombes atomiques qui serviront ensuite à obtenir une rançon de la Grande-Bretagne en menaçant de faire sauter l’une des principales villes de l’Occident. Opération Tonnerre se passe beaucoup sous l’eau, ce qui permet un très spectaculaire affrontement entre hommes-grenouilles au cours du final, mais qui a aussi le désavantage de ralentir sérieusement le rythme du film, malgré les efforts du réalisateur Terence Young pour que l’action demeure soutenue d’un bout à l’autre du métrage. D’où le retour de la fameuse Aston Martin DB5, qui révèle ici un nouveau gadget : le canon à eau savonneuse, très efficace pour envoyer dans le décor d’indésirables poursuivants. John Stears, le superviseur des effets spéciaux, fut cette fois-ci récompensé par l’Oscar des effets visuels pour ses trouvailles ingénieuses. 

Trois James Bond Girls

Une fois n’est pas coutume, c’est une femme (l’envoûtante Luciana Paluzzi dans la peau de la tueuse à gage Fiona Volpe) qui vole la vedette au méchant et à la pourtant délicieuse Claudine Auger, ancienne Miss France incarnant ici Domino Derval, la morose et sculpturale maîtresse de Largo. Fiona Volpe n’a d’ailleurs pas à rougir face aux gadgets de 007, au vu de sa redoutable moto équipée de lance-roquettes particulièrement destructeurs. Fait suffisamment rare pour être signalé : Martine Beswick, qui jouait l’une des deux gitanes belliqueuses de Bons baisers de Russie, revient ici dans le rôle très différent de Paula Caplan, sublime agent de liaison de Bond aux Bahamas. « Terence Young s’est battu pour que je joue dans Opération tonnerre », raconte la comédienne. « Tout le monde lui disait que c’était une très mauvaise idée, que je ne pouvais pas jouer deux rôles différents dans deux James Bond d’affilée. Mais il a insisté et je suis devenue l’agent de liaison de Sean Connery. Terence Young est l’homme le plus raffiné que j’ai jamais rencontré. » (1) Opération Tonnerre bénéficia d’une incroyable publicité puisqu’au moment de sa sortie, l’OTAN perdit vraiment en mer un bombardier chargé de bombes atomiques ! Le film demeura jusqu’à Moonraker le plus gros succès de la série (142 millions de dollars de recettes mondiales), traînant dans son sillage un nombre incalculable de produits dérivés – ce qui n’était pas chose commune à l’époque – ainsi que moult imitations sur le grand et le petit écran.

 

(1) Propos recueillis par votre serviteur en juin 2019

 

© Gilles Penso

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GOLDFINGER (1964)

Pour sa troisième aventure cinématographique, James Bond affronte l'un de ses plus redoutables adversaires

GOLDFINGER

1964 – GB

Réalisé par Guy Hamilton

Avec Sean Connery, Honor Blackman, Gert Fröbe, Shirley Eaton, Harold Sakata, Bernard Lee, Lois Maxwell, Desmond Llewelyn 

THEMA ESPIONNAGE ET SCIENCE-FICTION I SAGA JAMES BOND

Pour la troisième aventure cinématographique de James Bond, le réalisateur Terence Young cède le pas à Guy Hamilton, et le budget grimpe à 3,5 millions de dollars. Le scénario de Richard Maibaum et Paul Dehn met l’accent sur un méchant particulièrement savoureux, le milliardaire Auric Goldfinger qui donnait l’impression, dans le roman d’Ian Fleming, d’avoir « été fait de morceaux empruntés à des corps différents. Rien n’allait ensemble. » A l’écran, après un essai intéressant tourné avec le comédien Theodore Bikel, c’est l’acteur allemand Gert Froebe qui hérite du rôle, nous gratifiant d’une prestation haute en couleurs qui restera dans les mémoires de tous les bondophiles. Goldfinger projette de faire sauter Fort Knox, la réserve d’or des USA, afin de décupler la valeur de sa fortune personnelle. Évidemment, l’agent 007, habitué aux mégalomanes et psychopathes en tous genres, viendra mettre son grain de sel dans l’opération savamment calculée. Toujours très sûr de lui, Sean Connery arbore fièrement le smoking impeccable, notamment dans une scène prégénérique fort dynamique devenue une des marques de fabriques de la série depuis Bons baisers de Russie.

Le visuel du film est centré sur la couleur or, et l’image choc du cadavre de la secrétaire dorée à l’or fin est devenue emblématique de l’univers James Bond. Aux côtés de Goldfinger, Harold Sakata campe l’un des hommes de main les plus marquants de la saga, le célèbre Asiatique Oddjob équipé d’un couvre-chef aux redoutables bords acérés. Bond, quant à lui, séduit l’opiniâtre Pussy Galore, incarnée par la belle Honor Blackman qui sévissait dans les premiers épisodes de Chapeau melon et bottes de cuir. Dans le roman, cette cheftaine d’une équipe de cascadeuses aériennes était une lesbienne convaincue « ramenée dans le droit chemin » par l’irrésistible 007, mais le film se contente de quelques allusions sur la sexualité de cette James Bond Girl échappant au cliché de la jeune fille naïve et effarouchée. Goldfinger nous gratifie d’excellentes séquences de suspense, notamment celle où Bond est sur le point d’être découpé par un rayon laser dans le laboratoire du milliardaire maléfique, ou l’éprouvant compte à rebours final sur une bombe atomique que l’agent secret ne sait pas désamorcer.

Une cathédrale d'or

Le film marque aussi l’entrée en scène d’un des gadgets les plus célèbres de 007, sa fameuse Aston Martin DB5 munie d’un équipement high-tech des plus ingénieux par le superviseur des effets spéciaux John Stears : plaques d’immatriculation réversibles, siège éjectable, phares mitrailleurs, enjoliveurs scies, rétroviseurs radars, écran pare-balles, gicleur d’huile, écran de fumée… Saluons également l’extraordinaire travail du chef décorateur Ken Adam, ayant construit de A à Z l’intérieur de Fort Knox en studio («je veux une cathédrale d’or» lui aurait demandé Broccoli) après que l’entrée du site ait été interdite à l’équipe du film. Quant au compositeur John Barry, il se surpasse une fois de plus, confiant la chanson du générique à Shirley Bassey. Ce titre sera un gigantesque hit en 1964, d’où le retour de la chanteuse pour deux autres James Bond,  Les Diamants sont éternels et Moonraker.

 

© Gilles Penso

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BONS BAISERS DE RUSSIE (1963)

Le second James Bond incarné par James Connery lance l'agent 007 dans une aventure mouvementée sous influence hitchcockienne

FROM RUSSIA WITH LOVE

1963 – GB

Réalisé par Terence Young

Avec Sean Connery, Daniela Bianchi, Pedro Armendariz, Lotte Lenya, Robert Shaw, Bernard Lee, Martine Beswick

THEMA ESPIONNAGE ET SCIENCE-FICTION I SAGA JAMES BOND

Quel roman d’Ian Fleming adapter pour faire suite au succès colossal de James Bond contre docteur No ? Fallait-il surenchérir dans la science-fiction et la gadgétisation, ou plutôt ramener le personnage dans un univers plus réaliste et plus noir ? C’est cette seconde option que choisirent les producteurs Albert Broccoli et Harry Salzman, jetant leur dévolu sur « Bons Baisers de Russie », que le président John Kennedy cita à l’époque comme l’un de ses dix livres de chevet. Ancienne Miss Rome, Daniela Bianchi incarne Tatiana Romanova, une Russe qui a fait savoir qu’elle déserterait en emportant une remarquable machine à coder appelée Lektor si James Bond (dont elle est tombée amoureuse) venait la chercher à Istanbul. Ce que 007 et son supérieur M ignorent, c’est que le S.P.E.C.T.R.E. a manigancé toute l’histoire, pour trois raisons : pousser les Russes et les Anglais à s’affronter, revendre très cher aux Russes le Lektor que les agents du S.P.E.C.T.R.E. auront ainsi récupéré, et tuer James Bond pour venger la mort de leur ancien agent le docteur No. Même si le prétexte amoureux est un peu grossier, ils estiment que les Anglais tomberont facilement dans le piège…

Souvent considéré comme l’un des meilleurs James Bond de toute la série, Bons baisers de Russie se laisse inspirer par le cinéma d’espionnage popularisé par Alfred Hitchcock, comme en témoignent ce long chassé croisé à bord d’un train ou cette prise en chasse de Bond par un hélicoptère, réminiscences de quelques scènes clefs de La Mort aux trousses. Effectuant là ses premiers pas sur le grand écran, Daniela Bianchi est une James Bond Girl des plus séduisantes, et le film compte parmi ses scènes d’anthologie le fameux combat à mort de deux Bohémiennes s’étant amourachées du même homme, l’une d’entre elles étant incarnée par la belle Martine Beswick, qui réitérera l’exercice du « catch féminin » trois ans plus tard avec Raquel Welch dans Un Million d’années avant JC« J’avais postulé pour jouer Honey Rider, le rôle féminin principal de James Bond contre docteur No », nous raconte Martine Beswick. « A l’époque, je ne connaissais rien à l’univers de 007, je n’avais lu aucun livre de Ian Fleming. Terence Young m’a regardée et m’a dit : “Tu es trop jeune pour jouer Honey Rider. Acquiers un peu d’expérience et reviens me voir“. C’est un homme qui savait exactement ce qu’il voulait. Il m’avait promis de me faire jouer dans un autre film, parce qu’il avait vu quelque chose de “spécial“ en moi. J’étais persuadée que c’étaient des promesses en l’air. Mais il a tenu parole. Il m’a rappelée pour Bons baisers de Russie en me disant : “Tu seras parfaite pour jouer la Gitane“ » (1).

 

Catch féminin, chaussure empoisonnée et tueur russe

Futur chasseur de requin des Dents de la mer, Robert Shaw campe ici un tueur redoutable, et son affrontement avec Bond constitue l’un des moments forts du film. A ses côtés, Lotte Lenya excelle dans la peau de l’affreuse Rosa Klebb qui élimine ses ennemis d’un coup de couteau empoisonné caché dans sa chaussure. Avec des méchants aussi réussis, le film ne pouvait que plaire, si l’on en croit l’adage hitchcockien. Dans le camp des bons, l’inébranlable Bernard Lee et la malicieuse Loïs Maxwell reprennent respectivement leurs rôles de M et de sa secrétaire Miss Moneypenny, tandis que Desmond Llewelyn joue pour la première fois le personnage qui le rendra célèbre : Q, le créateur des gadgets de 007. Décidément supérieur à James Bond contre docteur No sur bien des points, Bons baisers de Russie se permet quelques traits d’humour référentiels du meilleur effet (la trappe cachée dans la bouche de l’actrice Anita Ekberg sur l’affiche de Call Me Bwana, produit la même année par Broccoli et Salzman), et s’offre une extraordinaire bande originale, signée cette fois-ci intégralement par John Barry qui deviendra l’un des piliers artistiques de la saga James Bond.

 

(1) Propos recueillis par votre serviteur en juin 2019

© Gilles Penso

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COURSE A LA MORT (2008)

Jason Statham tient le haut de l'affiche dans ce remake sans âme de l'irrévérencieuse Course à la mort de l'an 2000

DEATH RACE

2008 – USA

Réalisé par Paul W.S. Anderson

Avec Jason Statham, Tyrese Gibson, Joan Allen, Ian McShane, Robin Shou, Janaya Stephens, Natalie Martinez, Jacob Vargas

THEMA FUTUR

A l’annonce d’un remake hollywoodien de la joyeusement subversive Course à la mort de l’an 2000 produite par Roger Corman et réalisée par Paul Bartel en 1975, les fans s’inquiétèrent sur le bien-fondé de l’entreprise. Le studio Universal, désormais acquéreur du concept, allait-il en conserver les aspects les plus politiquement incorrects ? Lorsque le nom du réalisateur du remake fut annoncé, l’inquiétude se mua en affliction. Car s’il a toujours prouvé un penchant indéfectible pour les récits d’anticipation (Soldier, Event Horizon), Paul W.S. Anderson s’est surtout spécialisé dans le massacre en règle de franchises pourtant pleines de promesse (Mortal Kombat, Resident Evil, Alien Vs. Predator). Alors que penser de cette nouvelle Course à la mort ? Hélas, le résultat est encore pire que tout ce que l’on pouvait craindre. Du scénario original, co-écrit par Robert Thom et Charles Griffith d’après une histoire d’Ib Melchior, le remake n’a conservé que l’idée basique d’une course automobile violente, évacuant prudemment toute satire politique, toute critique sociale et tout l’humour noir que chérissait tant Roger Corman.

C’est donc avec le sérieux d’un pape que Jason Statham incarne Jensen Ames, un ouvrier en disgrâce. Licencié suite à la fermeture de l’usine où il suait sang et eau pour nourrir sa petite famille, il se retrouve accusé à tort du meurtre de son épouse et atterrit dans un pénitencier dirigé d’une main de fer par Miss Hennessey (Joan Allen). Seul échappatoire : participer à la « course à la mort », une compétition automobile sans foi ni loi qui oppose plusieurs prisonniers pilotant des véhicules customisés façon Mad Max et bourrés d’armes offensives. Plusieurs victoires consécutives permettent aux concurrents de racheter leur liberté, tandis que Hennessey remporte à chaque fois un pactole grâce à un audimat en hausse perpétuelle. Or notre héros est un ancien champion de courses de voitures, ce qui tombe plutôt bien. S’il accepte de participer au jeu, il doit le faire sous le masque de « Frankenstein », le meilleur pilote de sa génération, dont on cherche à cacher la mort pour éviter les chutes d’audience.

Froissements de tôle innoffensifs

Et c’est parti pour une heure et demie de froissements de tôle, d’explosions, de crissements de freins, de fusillades et de morts brutales. Lorgnant grossièrement du côté de l’imagerie des jeux vidéo, le film se structure sur une course en trois étapes et présente chaque coureur sous forme d’un clip. Les courses elles-mêmes sont illisibles, Anderson s’obstinant à cadrer ses véhicules en macro et à éviter les plans dépassant une durée d’une seconde. Les poursuites de Michael Bay dans The Rock ressemblent presque à du Bullit, en comparaison ! Autant dire que l’enjeu de la compétition – déjà bien peu palpitant – n’y gagne pas en efficacité. C’est d’autant plus dommage que l’équipe des cascadeurs s’en est visiblement donnée à cœur joie, multipliant les voltiges et les destructions spectaculaires jusqu’à l’intervention d’un semi-remorque cuirassé plutôt impressionnant. Edulcorée, niaise et sans âme, cette relecture de La Course à la mort de l’an 2000 se clôt sur un happy end grotesque qui parachève le massacre.

© Gilles Penso

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