Théma PETITS MONSTRES

Pendant longtemps, le cinéma fantastique s’est appuyé sur le gigantisme pour effrayer ses spectateurs. Depuis le pionnier King Kong, on ne compte plus le nombre de créatures titanesques ayant hanté les écrans du monde entier avec des instincts destructeurs redoublés (singes, dinosaures, araignées, insectes, requins, crocodiles, tout le règne animal y est passé !). Mais les cinéastes ont fini par se rendre compte que l’ombre de ces géants pouvait cacher des frissons plus sournois et moins gargantuesques. C’est ainsi que sont entrées en piste les petites bêtes. Après tout, ne sont-elles pas un reflet plus fidèle des terreurs enfantines et des peurs primales ? Les gamins apeurés dans leurs lits ne craignent-ils pas le monstre caché sous leur lit ou tapi dans leur placard ? En 1984, Joe Dante crée un véritable sous-genre du fantastique avec Gremlins, dont le succès phénoménal déclenche une vague d’imitations et de plagiats plus ou moins inspirés. À l’origine, Steven Spielberg imagine un petit film d’horreur et confie le projet à Dante, qui s’est déjà illustré avec Piranhas et Hurlements. Mais très vite, l’ironie, le second degré et une touche de comédie s’invitent dans le projet, reflet des sensibilités de Spielberg, Dante et du scénariste Chris Columbus. Le résultat, inclassable, mêle frissons et humour avec brio. D’abord décontenancée, la Warner finit par exulter : Gremlins explose le box-office.

Le producteur Charles Band, toujours à l’affût, saute sur l’occasion. Il commande à Luca Bercovici les Ghoulies, démons facétieux aux gueules improbables. Dans la foulée surgissent les Critters, petits aliens voraces apparus en 1986 sous la houlette de Dominic Muir et Stephen Herek. Mais c’est Mick Garris qui les élève au rang culte avec une suite délirante, marquée par l’inoubliable « Critterball » géante. Dans un autre registre, les sinistres Minions de The Gate s’invitent dans un déluge d’images surréalistes masquant les faiblesses du scénario. On se souvient aussi du Leprechaun, joué par Warwick Davis (l’inoubliable Willow), qui terrorise une jeune Jennifer Aniston, ou encore des improbables Trolls de John Buechler, Hobgoblins de Rick Sloane, Subspecies de Ted Nicolaou et Munchies de Tina Hirsch. Les années 80 furent envahies de lutins sournois, gnomes délirants et démons miniatures, souvent animés avec une inventivité folle malgré des moyens dérisoires. Plongez-vous donc dans cette filmographie à petite échelle, mais vérifiez bien les recoins de votre chambre de temps en temps, on ne sait jamais. Attention, l’invasion commence !

© Gilles Penso