STAR WARS EPISODE 1 : LA MENACE FANTOME (1999)

Malgré les nombreuses audaces de George Lucas dans l'édification d'un univers précédant sa célèbre trilogie, la déception du public fut aussi grande que son attente…

STAR WARS EPISODE I – THE PHANTOM MENACE

1999 – USA

Réalisé par George Lucas

Avec Ewan McGregor, Liam Neeson, Natalie Portman, Jake Lloyd, Ian McDiarmid, Pernilla August, Ray Park, Frank Oz

THEMA SPACE OPERA I ROBOTS I SAGA STAR WARS

Seize ans après Le Retour du Jedi, George Lucas se lançait dans une préquelle de sa légendaire saga interplanétaire, attendue comme le messie par une myriade de fans surexcités. Les premiers posters du film, sur lesquels un petit garçon ressemblant comme deux gouttes d’eau à Luke Skywalker projetait dans le désert de Tatooine l’ombre de Dark Vador, attisait efficacement les espoirs, tout comme la bande originale de John Williams en circulation avant la sortie du film, où le célèbre thème de la marche impériale était décliné sur un mode paisible, presque enfantin. Evidemment, la promesse était trop grande. La déception n’en fut que plus intense. George Lucas aurait-il perdu en cours de route la flamme qui l’animait jadis ? N’aurait-il conservé que la patine en oubliant les fondations de son œuvre ? Paradoxalement, le fameux texte déroulant d’introduction, qui s’avère incompréhensible à sa première lecture tant la situation politique décrite nous échappe, laisse présager une complexité qui contraste avec la naïveté – la puérilité ? – du film lui-même. La Menace fantôme démarre pourtant bien. En un plan métonymique digne de Spielberg, deux faiseaux de sabres laser luisent dans la fumée, évoquant à eux seuls la puissance des chevaliers Jedi. Mais la construction dramatique de cet épisode s’avère totalement déséquilibrée, le rythme se ralentissant progressivement jusqu’à un gigantesque passage à vide qui fit décrocher plus d’un spectateur.

Certes, Lucas nous offre une splendide course de bolides sur la planète Tatooine très inspirée de Ben-Hur, au cours de laquelle le jeune Anakin Skywalker lutte pour sa liberté. Mais la qualité de la mise en scène et des effets visuels ne suffisent à nous captiver que superficiellement, car d’un point de vue strictement narratif, cette course est absurde. Pourquoi, malgré ses pouvoirs, le chevalier Qui-Gon Jinn laisse-t-il un gamin de huit ans risquer ainsi sa vie alors qu’il pourrait en un claquement de doigts l’arracher à ses esclavagistes ? Fort heureusement, le dernier tiers du film rattrape en partie ces carences. Le souffle épique qu’il dégage, la chorégraphie des combats et la partition de John Williams nous rappellent d’un seul coup que nous sommes bien dans cette Guerre des étoiles qui nous avait tant fait rêver. Il faut d’ailleurs avouer que si le charme opère enfin, c’est que nous sommes en terrain connu. En effet, le triple combat monté en action parallèle dans cette dernière partie du récit calque sa construction sur le dénouement du Retour du Jedi« Si George Lucas a attendu aussi longtemps avant de repasser à la mise en scène, c’est pour pouvoir montrer des choses qui étaient impossibles à réaliser jusqu’alors », explique Dennis Muren. « Les images de synthèse lui ont permis de concrétiser toutes ces nouvelles visions. En fait, George n’a jamais trop aimé être sur les plateaux de tournage. Il n’a pas vraiment la patience pour passer des heures à tourner des dizaines de prises dans l’espoir d’obtenir quelque chose de convainquant avec des marionnettes et des effets mécaniques. Grâce aux images de synthèse, il lui était désormais possible d’obtenir ce qu’il voulait de la manière la plus fidèle possible. Il y a encore des maquettes et des maquillages spéciaux dans le premier film, mais les effets numériques ont largement pris le dessus » (1).

Les pitreries de Jar Jar Binks

« Lorsque La Menace fantôme entra en production, ILM n’avait encore jamais pris en charge un film contenant 2000 plans truqués », raconte Kevin Rafferty, superviseur des images de synthèse. « Pour y parvenir, nous avons partagé le travail en trois équipes, chacune dirigée par son propre superviseur d’effets visuels : Dennis Muren, John Knoll et Scott Squires. » (2) Effectivement, le foisonnement des effets numériques est parfois étourdissant à l’écran. Mais un sentiment mitigé demeure. Alors que le casting humain est plein d’intelligence, Lucas n’a pas résisté à la tentation d’une profusion de créatures ridicules et inutiles, la pire de toutes étant sans conteste l’amphibien rasta Jar Jar Binks qui multiplie les pitreries tout au long du film pour assurer le rôle bien superflu de faire-valoir comique. Il en est de même pour les décors. On a beau s’extasier devant le magnifique palais princier tout droit sorti d’un album de « Flash Gordon », on ne peut s’empêcher de rester perplexe face au siège des Maîtres Jedi, une espèce d’appartement new-yorkais Art déco perdu dans une forêt de buildings sillonés par des voitures volantes. Ce premier épisode présente certes le mérite de donner fortement envie au public de voir les deux épisodes suivants, lesquels poseront les inexorables jalons du noir destin d’Annakin Skywalker. Mais la suite de cette nouvelle trilogie, malgré de nombreux morceaux de bravoure, n’arrivera jamais à la cheville de celle qui l’inspira.

 

(1) Propos recueillis par votre serviteur en février 2014

(2) Propos recueillis par votre serviteur en décembre 2008

 

© Gilles Penso  

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LA COURSE A LA MORT DE L’AN 2000 (1975)

Cette variante satirique, cynique et politiquement très incorrecte des thèmes développés dans Rollerball oppose David Carradine et Sylvester Stallone

DEATH RACE 2000

1975 – USA

Réalisé par Paul Bartel

Avec David Carradine, Sylvester Stallone, Simone Griffeth, Mary Woronov, Roberta Collins, Martin Kove, Louisa Moritz, John Landis

THEMA FUTUR

L’idée de La Course à la mort de l’an 2000 est d’abord née sous forme d’une courte histoire écrite par Ib Melchior. Roger Corman se la réappropria, envisageant d’en faire un thriller futuriste sérieux. Mais à la réflexion, un traitement humoristique lui parut mieux servir les thématiques du film, et c’est dans cette voie qu’il poussa les scénaristes Robert Thom et Charles Griffith. En l’an 2000, les Américains sont passés par bien des années de disette, de dépression et de guerre. L’une des grandes attractions est désormais la « Course Transcontinentale », à laquelle participent les véhicules les plus fous, bricolés et transformés en machines de mort par leurs pilotes. L’enjeu de cette course, qui n’est pas une simple compétition de vitesse, est de massacrer le plus de spectateurs et de badauds possibles. Les points se comptent en cadavres, les enfants et les vieillards rapportant les plus grandes mises !

L’un des coureurs favoris est, comme toujours, le dénommé Frankenstein (David Carradine). Mille fois accidenté, mille fois refait et recousu, toujours masqué. Sans compter que Frankenstein est un ami intime du tout-puissant président, un parfait dictateur qui encourage chaque année cette compétition impitoyable. Face à Frankenstein concourt « Mitraillette » Joe Viterbo (Sylvester Stallone), un dur qui n’a rien à envier à son concurrent. Mais cette année, un groupe de résistants va tenter de saboter la course et de renverser le gouvernement. Parmi eux se trouve Annie Smith (Simone Griffeth), la coéquipière de Frankenstein, qui va tenter de lui porter le coup fatal.

Les fous du volant

Contemporaine de Rollerball, avec lequel elle présente bon nombre de points communs, cette Course à la mort de l’an 2000 est aussi une préfiguration satirique et futuriste de L’Équipée du Cannonball (1981) tout en s’inspirant visiblement du fameux cartoon Les Fous du volant d’Hanna et Barbera (1968). Il faut dire que le film de Paul Bartel s’amuse à faire concourir les individus et les véhicules les plus excentriques qui soient (principalement des Volkswagen entièrement redécorées). En plus de Frankenstein (tout de noir vêtu et capé comme un super-héros du plus bel effet) et de Joe Viterbo (aux allures de gangster des années 30), on trouve ainsi Néron (dont la coéquipière arbore un décolleté affriolant), Calamity Jane (et sa voiture-taureau), et même un couple de nazis. Le film, pétri d’humour noir et n’épargnant pas les morts sanglantes tout au long de sa course folle, s’amuse aussi à passer au vitriol le sport, la politique et la télévision. Quelques peintures sur verre maladroites, conçues à bas prix par le studio de Roger Corman, permettent de transformer un stade normal en tribunes futuristes. Toujours ingénieux lorsqu’il s’agit de faire des bénéfices, Corman revendit à un musée de l’automobile la plupart des voitures customisées spécialement pour le film, pour trois ou quatre fois leur prix initial. Lors de sa ressortie sur les écrans français dans les années 80, La Course à la mort de l’an 2000 fut rebaptisé Les Seigneurs de la route en axant tout le matériel publicitaire sur Sylvester Stallone, mué entre-temps en superstar grâce à Rocky et Rambo.

 

© Gilles Penso

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MAD MAX 2 (1981)

Après l'anticipation réaliste et brute du premier opus, George Miller opte pour un univers post-apocalyptique et impitoyable proche du western spaghetti

MAD MAX 2 / THE ROAD WARRIOR

1981 – AUSTRALIE

Réalisé par Réalisateur

Avec Mel Gibson, Bruce Spence, Vernon Wells, Mike Preston, Max Phipps, Kjell Nilsson, Emil Minty, Virginia Hey, William Zappa

THEMA FUTUR

Une œuvre aussi puissante que Mad Max ne pouvait pas décemment demeurer sans suite. George Miller s’y attela donc aussitôt, bénéficiant d’un budget dix fois supérieur à celui de son premier opus. Pour éviter de se répéter, le cinéaste australien poursuit les aventures de son anti-héros dans un univers différent. Car si Max erre toujours sur les routes à bord de son Interceptor, le monde a entre-temps succombé à une troisième guerre mondiale ne laissant derrière elle qu’un immense désert, des survivants retournés à la sauvagerie et des réserves d’énergie réduites à leur plus simple expression. Le pétrole y est devenu une denrée rare, et les hommes mués en bêtes sont désormais prêts à s’entretuer pour le moindre baril d’essence (en 1981, le choc pétrolier des années 70 était encore très vivace dans les esprits). Cet état des lieux nous est expliqué par une voix off vieillissante sur un montage en noir et blanc mêlant des images d’archives du passé et des extraits du premier Mad Max. Lorsque l’écran s’élargit au format scope, que le moteur du V8 vrombit sur toutes les enceintes stéréo et que Max apparaît derrière son volant, l’action démarre et ne cessera plus pendant une heure et demie.

Les enjeux et la direction artistique ayant changé, cette séquelle peut s’apprécier de manière autonome. C’est la raison pour laquelle les distributeurs américains ont effacé la filiation avec le film précédent (pas encore très connu à l’époque), rebaptisant celui-ci The Road Warrior. Après sa rencontre avec un pilote d’ULM excentrique, Max découvre une communauté pacifique protégeant du mieux qu’elle peut sa citerne pleine d’essence. Mais Humungus, un colosse tyrannique dissimulant son visage sous un casque de gladiateur et régnant sur une horde de barbares, ne l’entend pas de cette oreille. Il les menace d’extermination, à moins qu’ils ne s’enfuient en laissant derrière eux tous leurs biens. Pappagallo (Mike Preston), le chef de la communauté, demande l’aide de Max, mais celui-ci n’a rien d’un philanthrope et préfère continuer son parcours en solo. « Qu’est-ce que tu cherches ? » s’entend-il répondre. « Tout le monde cherche quelque chose. Tu es heureux comme ça ? En errant ? Chaque jour effaçant le précédent ? Tu es un charognard, Max, un asticot. Tu te nourris des restes de l’ancien monde ! »

Un déchaînement de cascades hallucinantes

Les propos font mouche, mais il faut attendre que Max se retrouve à moitié mort après la destruction de son Interceptor pour qu’il accepte de les accompagner. Au volant du camion-citerne, il fonce donc à travers le désert, et la course-poursuite qui suit, un déchaînement de cascades hallucinantes, d’explosions, de morts violentes, de vitesse et de fureur, est entrée depuis dans l’histoire du cinéma. Cette fois-ci, la partition de Brian May se laisse volontiers influencer par « Mars », le morceau le plus martial de « La Symphonie des Planètes » de Gustav Holst. Car Mad Max 2 dépasse le cadre du western pour s’affirmer comme un film de guerre. Désormais, Attila et ses Huns sont affublés de looks punks fétichistes et leurs montures se sont muées en véhicules tout-terrains. Cette vision saisissante de ce que pourrait être un futur post-apocalyptique fera bien des émules.

 

© Gilles Penso

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TRON (1982)

Cette immersion avant-gardiste dans un univers virtuel fut sans doute un peu trop en avance sur son temps

TRON

1982 – USA

Réalisé par Steven Lisberger

Avec Jeff Bridges, David Warner, Bruce Boxleitner, Cindy Morgan, Barnard Hughes

THEMA MONDES PARALLELES ET MONDES VIRTUELS

Tron est un film tout à fait à part dans l’histoire du cinéma, une œuvre visionnaire et quelque peu déjantée qui aura souffert de sortir trop tôt sur les écrans, à une époque où les spectateurs se laissaient plus volontiers conquérir par l’amitié entre un extra-terrestre et un petit garçon, les affrontements épiques entre l’Empire Galactique et les guerriers rebelles ou les exploits rétro d’un intrépide archéologue. L’idée de départ de Tron est née dans l’esprit inventif de Steven Lisberger, réalisateur de films d’animation, et de son ami producteur Donald Kushner, tous deux cultivant une ardente passion pour les jeux vidéo. Le scénario part du principe un peu vertigineux que chaque programmateur de logiciels possède son propre double numérique qui évolue dans les circuits informatiques, et que ces deux univers parallèles coexistent. D’où une entrée en matière pour le moins étrange où, dans une salle de jeux vidéo, quelqu’un s’amuse aux courses de « cycles de lumière » (des motos futuristes qui laissent dans leur sillage un mur rectiligne et infranchissable), tandis que dans l’ordinateur, deux motocyclistes lumineux s’affrontent vraiment. L’un des personnages principaux de ce film fou est Kevin Flynn (Jeff Bridges), un créateur de jeux vidéo dont les idées ont été volées par son ex-patron Ed Dillinger (incarné par David Warner après le désistement de Peter O’Toole), désormais président de l’entreprise Encom.

Pour pouvoir contrôler tout ce que font les employés de la société sur leurs ordinateurs, Dillinger utilise un vaste programme de sécurité, le MCP (Maître Contrôle Principal). L’un de ces employés, Alan Bradley (Bruce Boxleitner), se rend compte de cette surveillance informatique. Avec l’aide de sa fiancée Lora (Cindy Morgan) et de Flynn, il décide de s’infiltrer de nuit dans les locaux d’Encom pour mettre à jour les piratages de Dillinger. Mais le MCP décide d’intervenir. En pilotant un canon laser, il désintègre littéralement Flynn, qui se recompose dans l’univers informatique sous forme d’un individu électronique baptisé Clu. Là, il rencontre les alter ego numériques de Dillinger, Lora et Alan, qui se nomment respectivement Sark, Yori et Tron. C’est donc de l’intérieur de la machine qu’il doit affronter son ancien employeur et le tout puissant MCP.

Colorisation, dessin animé et images de synthèse

Et c’est parti pour cinquante minutes d’images surréalistes, fruit de techniques diverses qui mélangent colorisation (les prises de vues réelles de ces séquences ayant été tournées en noir et blanc), dessin animé et images de synthèse d’avant-garde. Les motos lumineuses, les chars d’assaut cubiques, le combat de frisbees lumineux, le voilier solaire sont depuis entrés dans les mémoires. Sans les performances héroïques des pionniers de l’image de synthèse qui permirent à Tron de se concrétiser, nul doute que les exploits actuels en matière de trucages numériques n’auraient jamais vu le jour. Historiquement, Tron marque donc une date importante dans l’histoire du cinéma de SF, même si sa mise en scène un peu pataude et son scénario accidenté jouent quelque peu en sa défaveur. Etrangement, le film ne reçut aucune nomination aux Oscars pour ses effets visuels. Et si son succès fut mitigé, le jeu vidéo d’arcade qu’il inspira, en revanche, fut un véritable hit mondial.

 

© Gilles Penso

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VAN HELSING (2004)

Le célèbre chasseur de vampires a pris le visage de Hugh Jackman dans cette épopée foisonnante où Stephen Sommers confond hélas générosité et indigestion

VAN HELSING

2004 – USA

Réalisé par Stephen Sommers

Avec Hugh Jackman, Kate Beckinsale, Richard Roxburgh, David Wenham, Shuler Hensley, Elena Anaya, Kevin J. O’Connor

THEMA DRACULA I FRANKENSTEIN I JEKYLL & HYDE I LOUPS-GAROUS I VAMPIRES

Très satisfait de ses deux versions de La Momie, Stephen Sommers s’est mis en tête de poursuivre son hommage aux films de monstres de la Universal avec ce Van Helsing qui ressemble à une véritable réunion de famille. En effet, on y trouve Dracula, Frankenstein et son monstre, des loups-garous, des femmes-vampires, le serviteur Igor, Jekyll et Hyde… Il ne manquerait plus que l’étrange créature du lac noir et l’homme invisible pour que la fête soit complète ! Le prologue est un véritable hommage à l’âge d’or. Tout y est : l’image en noir et blanc, le laboratoire électrique du docteur Frankenstein, l’étincelle de vie qui anime sa créature, l’apparition d’un Dracula très théâtral, les villageois en colère armés de torches, la fuite dans le moulin planté dans une campagne très expressionniste, le grand incendie final… Puis l’action se transporte un an plus tard, à Paris, où sévit le héros du titre, un hors-la-loi chasseur de monstres à qui Hugh Jackman prête ses traits de jeune Clint Eastwood. Nous le découvrons en plein pugilat avec un Mister Hyde colossal dont le look évoque immanquablement celui de La Ligue des gentlemen extraordinaires : la même carrure à la Hulk, le même comportement simiesque, les mêmes grognements, les mêmes favoris. Mais si, dans le film de Stephen Norrington, il était associé au crime de la rue Morgue imaginé par Edgar Poe, ici c’est carrément un émule du Quasimodo de Victor Hugo, et son affrontement avec Van Helsing prend tout naturellement place sur les toits de Notre Dame.

A peine a-t-on le temps de souffler que nous voilà dans les souterrains secrets du Vatican, et là Stephen Sommers nous refait James Bond : l’ordre de mission avec diapositives à l’appui, puis la visite de l’armurerie et des gadgets. L’action se transporte ensuite en Transylvanie, où Van Helsing rencontre enfin son adversaire de toujours : le comte Dracula. Celui-ci s’est installé dans le château de Frankenstein pour lui voler le secret de la vie artificielle et donner ainsi naissance aux milliers de rejetons qu’il a engendrés avec ses femmes-vampires. Il s’adjoint à cet effet les services d’Igor, ancien assistant du docteur, ainsi que d’un loup-garou et d’étranges gnomes équipés de masques à gaz. Van Helsing va donc mener le combat de sa vie, aux côtés de la belle gitane Anna Valerious.

Action excessive et monstres numériques

Le film n’est pas exempt de morceaux de bravoure, notamment l’attaque du village par les enfants de Dracula (des gargouilles hideuses aux allures de Gremlins), les envolées des femmes-vampires tour à tour beautés en chemise de nuit ou furies mi-humaines mi-chauves-souris, ou les interventions d’un monstre de Frankenstein au look particulièrement réussi. Pour le reste, Van Helsing accumule des séquences d’action incongrues, des effets spéciaux excessifs, des images de synthèses omniprésentes, avec une telle démesure et une telle outrance que rien n’est crédible. Du coup, l’épouvante classique à laquelle le film est censé se référer s’estompe rapidement au profit d’une dynamique de jeu vidéo inventive mais sans charme. Sans compter l’incroyable fadeur du comédien Richard Roxburgh qui incarne sans charisme ni conviction le comte Dracula. Bref, nous sommes bien loin de la folie rafraîchissante des œuvres chorales d’Erle C. Kenton.

 

© Gilles Penso

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AUSTIN POWERS (1997)

Mike Myers nous prit par surprise avec cette parodie minutieuse de l'univers des James Bond des années 60

AUSTIN POWERS : INTERNATIONAL MAN OF MYSTERY

ANNEE – PAYS

Réalisé par Jay Roach

Avec Mike Myers, Elizabeth Hurley, Michael York, Mimi Rogers, Robert Wagner, Seth Green, Fabiana Udenio, Charles Napier

THEMA ESPIONNAGE ET SCIENCE-FICTION I SAGA AUSTIN POWERS

Depuis l’exceptionnel diptyque Y’a-t-il un pilote dans l’avion ? et Top Secret, Jim Abrahams, David et Jerry Zucker sont devenus la référence ultime en matière de parodies de films. Mille fois imitées, jamais égalées, ces deux perles ont engendré malgré elles une longue lignée de pastiches galvaudant peu à peu le genre. Il était temps que quelqu’un renouvelle l’exercice en tentant une autre approche. Le réalisateur Jay Roach et l’acteur/producteur/scénariste Mike Myers y sont parvenus haut la main, et si Austin Powers est le succès que l’on sait, c’est parce que les deux hommes ont un profond respect pour les œuvres dont ils se moquent. Loin des sous-James Bond paresseux à la Agent zéro zéro, Johnny English ou Double zéroAustin Powers décide de remonter à la source : les 007 des années 60, mais aussi les prestations variées d’incontournables comédiens anglais des sixties tels que Peter Sellers, Alec Guiness ou Michael Caine.

Myers s’était déjà amusé à parodier James Bond dans plusieurs sketches du « Saturday Night Live ». Ici, il crève l’écran dans le double rôle de l’agent britannique Austin Powers, affublé de grosses lunettes, de dents gâtées, d’une chemise à jabot et d’une libido démesurée, et du Docteur Denfer, hilarant super-vilain à la voix nasillarde qui mixe le costume de Dr No et le faciès de Blofeld dans On ne vit que deux fois. L’intrigue démarre en 1967, à Londres. Photographe de mode le jour et espion au service de Sa Majesté la nuit, Powers déjoue un attentat fomenté par Denfer, qui se met en hibernation et s’échappe dans l’espace. Pour le retrouver, l’agent secret se fait à son tour cryogéniser. Réveillés en 1997, tous deux reprennent leur pugilat, Denfer menaçant de faire exploser la planète entière…

L'influence de Casino Royale

La vraie réussite d’Austin Powers est de ne pas s’attacher aux détails de l’œuvre imitée (les gadgets, le smoking, les belles voitures) mais à l’esprit. Et de fait, par moments, on jurerait avoir affaire à un film réellement tourné dans les sixties. La direction artistique est à ce titre exemplaire. Photographie, décors, costumes se mettent au diapason de ce pastiche qui ne recule devant aucune exubérance. Sans parler de la musique de George S. Clinton, plus inspiré que jamais, qui rend ici un vibrant hommage aux plus beaux morceaux de John Barry, Henry Mancini et Jerry Goldsmith, au sein d’une bande originale flamboyante mi jazzy mi symphonique. Austin Powers doit aussi beaucoup à Casino Royale, qui parodiait déjà James Bond en 1967 et dont Roach et Myers empruntent des musiques et des séquences entières (d’où la présence de Burt Bacharach et de son fameux tube « The Look of Love »). Sans compter moult références à d’autres œuvres des années 60 et 70, telles que Quatre garçons dans le vent de Richard Lester, La Dixième victime d’Elio Petri, Notre homme Flint de Daniel Mann ou encore La Vallée des plaisirs de Russ Meyer. La finesse de l’hommage ne trouve pas son écho, en revanche, dans la plupart des gags du film, volontiers situés en dessous de la ceinture, voire carrément scato. C’est là tout le paradoxe de Mike Myers, et toute l’étendue de son registre comique.

© Gilles Penso

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PRINCE DES TENEBRES (1987)

Après deux superproductions n'ayant guère rencontré leur public, John Carpenter revient à l'essence de ses œuvres premières et aux terreurs indicibles qu'il affectionne tant

PRINCE OF DARKNESS

1987 – USA

Réalisé par John Carpenter

Avec Donald Pleasence, Jameson Parker, Victor Wong, Lisa Blount, Dennis Dun, Alice Cooper, Susan Blanchard, Anne Marie Howard

THEMA DIABLE ET DEMONS I INSECTES ET INVERTEBRES I SAGA JOHN CARPENTER

Les deux précédents films de John Carpenter, Starman et Les Aventures de Jack Burton dans les griffes du Mandarin, ayant été de gros flops au box-office malgré leurs moyens conséquents, le metteur en scène décida d’enchaîner avec une œuvre plus brute, en huis-clos, centrée sur un concept simple, avec un budget réduit et des comédiens qui lui sont familiers. Autant dire donc que ce Prince des ténèbres est probablement l’une de ses œuvres les plus personnelles. Comme il l’avait fait avec Assaut, quasi-remake officieux de Rio Bravo qui en reprenait certaines thématiques et plusieurs situations, Carpenter réalise là une variation autour du film Les Monstres de l’espace de Roy Ward Baker, dans lequel le professeur Quatermass mettait à jour dans le métro londonien un engin antédiluvien abritant une entité maléfique. Et pour bien marquer ses influences, il signe son scénario sous le nom de Bernard Quatermass. Un scénario étrange et envoûtant, mixant en un audacieux cocktail la science, la religion et la métaphysique.

Transfuge de La Nuit des masques et New York 1997, Donald Pleasence revêt ici la soutane d’un prêtre, découvrant après la mort d’un de ses collègues l’existence d’un ordre secret de l’église catholique, la « confrérie du sommeil ». Dans le sous-sol d’une ancienne chapelle bâtie dans un quartier défavorisé de San Francisco, il tombe sur un étrange container empli d’un liquide vert en perpétuel mouvement. Perplexe et inquiet, l’homme d’église demande au professeur de physique Howard Birac (Victor Wong, sorcier dans Les Aventures de Jack Burton) et à ses étudiants de venir étudier le phénomène, en compagnie d’une petite équipe de scientifiques. Les premières constatations sont des plus troublantes : la datation au carbone 14 révèle que le cylindre est vieux de sept millions d’années, son mécanisme semble être conçu pour n’être ouvert que de l’intérieur, et les inscriptions latines qui l’entourent sont des étranges équations mathématiques. Autour de l’église, les phénomènes curieux se multiplient. Les sans-abris se massent comme une menaçante armée de morts-vivants, et les insectes grouillent plus que de raison.

Le Diable en boîte

Bientôt, le liquide vert s’échappe et entre en possession d’une scientifique, qui contamine peu à peu tous les autres… Car le container abrite rien moins que le Diable, prisonnier d’un monde parallèle et bien décidé venir régner sur le nôtre. Du coup, la dernière partie du film, où les protagonistes sont pris en chasse dans les couloirs de l’église par leurs collègues zombifiés, évoque beaucoup celle de L’Au-delà. Et ce n’est pas un hasard, dans la mesure où John Carpenter et Lucio Fulci sont sous la même influence : celle d’H.P. Lovecraft, romancier de l’horreur indicible et des démons intérieurs. Prince des ténèbres retrouve ainsi l’atmosphère oppressante et l’unité de lieu qui firent le succès de Fog, tout en se permettant quelques écarts franchement gore, notamment lorsqu’un homme tombe littéralement en morceaux, son corps étant envahi par des milliers de scarabées. Fidèle à ses habitudes, Carpenter clôt son récit sur une fin ouverte et inquiétante, laissant vagabonder à loisir l’imagination du spectateur.

© Gilles Penso  

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GODZILLA FINAL WARS (2004)

Pour célébrer le cinquantième anniversaire du roi des monstres, Ryuhei Kitamura concocte une sorte de best-of délirant

GOJIRA FAINARU UÔZU

2004 – JAPON

Réalisé par Ryuhei Kitamura

Avec Masahiro Matsuoka, Rei Kikukawa, Akira Takarada, Kane Kosugi, Kazuki Kitamura, Maki Mizuno, Don Frye, Kenji Sahara

THEMA DINOSAURES I EXTRA-TERRESTRES I ARAIGNEES I MONSTRES MARINS I REPTILES ET VOLATILES I INSECTES ET INVERTEBRES I SAGA GODZILLA

Pour fêter dignement les cinquante ans de Godzilla et redorer le blason d’une franchise ternie par ses derniers rejetons, la Toho a décidé de confier le 28ème épisode de sa prolifique saga à Ryuhei Kitamura. Auteur de Versus, d’Azumi et de quelques animatiques de jeux vidéo, le cinéaste s’est spécialisé dans l’action non-stop, une aubaine pour des producteurs désireux de toucher le jeune public. Le prélude nous explique que la prolifération de monstres géants est due aux guerres et à la pollution. L’EDF (Earth Defense Force, rien à voir donc avec notre électricité nationale), a du coup formé une armée de mutants pour les combattre. Mais lorsque maintes créatures gigantesques se mettent à attaquer simultanément les diverses capitales de la planète, l’EDF se retrouve soudainement impuissante. Débarque alors une étrange soucoupe volante qui stoppe net la menace. À son bord se trouvent les Xiliens, des extraterrestres humanoïdes venus prévenir la Terre d’une menace imminente : la collision avec un astéroïde gigantesque nommé Gorus. Mais sous leurs airs doux et paisibles, les Xiliens désirent en fait utiliser l’humanité à des fins culinaires…

De toute évidence, Kitamura a un fort penchant pour les Godzilla des années 60-70 (« mon préféré est Godzilla contre Mecanick Monster » avoue-t-il) (1), et si Final Wars est conçu comme un best-of rendant hommage à l’ensemble de ses prédécesseurs, on y trouve surtout des allusions à la période disco. D’où ces extra-terrestres belliqueux qui rêvent de conquérir la Terre (comme dans Invasion Planète X), cette prolifération de monstres détruisant les grandes capitales du monde (comme dans Les Envahisseurs attaquent) et ce Godzilla redevenu sauveur de l’humanité. Etrange patchwork, Godzilla Final Wars tourne vite à la cacophonie, à force de vouloir mélanger les genres et de s’efforcer de satisfaire tous les publics à la fois. Certes, le spectacle y est total et l’action sans faille. Les combats entre humains enterrent tous les Matrix (notamment une échauffourée à moto proprement ébouriffante), les batailles spatiales s’avèrent généreuses en démesure post-Star Wars et les match de catch inter-monstres sont dotés d’un dynamisme encore jamais vu dans la série.

Règlements de compte avec Roland Emmerich

Mais le scénario part vite dans tous les sens, la mise en scène confond hystérie et rythme, et les fautes de goût abondent. Comme les interventions du bébé Godzilla le plus ridicule de la saga tout entière, ou la bande originale de Keith Emerson, mixture électro-synthétique un tant soit peu surannée. Reste un grain de folie fort appréciable et une poignée d’idées extrêmement réjouissantes. La plus géniale d’entre elles ? L’apparition d’un Godzilla en 3D, sosie de celui de Roland Emmerich, qui se fait dégommer d’un revers de queue par le « vrai » Godzilla ! « Cette scène était un clin d’œil à tous les fans du monde entier que le Godzilla américain n’a pas convaincu », explique Kitamura. « C’était aussi pour moi une manière de montrer que je préfère les trucages traditionnels aux images de synthèse. Rien ne vaut un bon costume de monstre en latex ! » (2) Derrière de si bonnes intentions, on ne peut que passer l’éponge sur les maladresses d’un film finalement plus personnel qu’il n’y paraît.

 

(1) et (2) Propos recueillis par votre serviteur en juin 2005

© Gilles Penso

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POLTERGEIST (1982)

Tobe Hooper et Steven Spielberg unissent leurs efforts pour nous conter une inoubliable histoire de fantômes

POLTERGEIST

1982 – USA

Réalisé par Tobe Hooper

Avec JoBeth Williams, Craig T. Nelson, Beatrice Straight, Dominique Dunne, Olivier Robins, Heather O’Rourke

THEMA FANTÔMES I VEGETAUX I JOUETS I SAGA POLTERGEIST

Début 82, Steven Spielberg avait déjà réalisé Les Dents de la mer et Les Aventuriers de l’Arche Perdue, et Tobe Hooper Massacre à la tronçonneuse. Leur association, l’un au poste de producteur, l’autre sur la chaise du réalisateur, avait tout d’un événement excitant. Et de fait, Poltergeist est un film d’épouvante de haut niveau, s’attachant à nous familiariser avec des protagonistes convaincants et réalistes pour mieux les faire basculer dans l’horreur et le surnaturel. Craig T. Nelson incarne Steve Freeling, agent immobilier et chef d’une famille installée dans une maison de banlieue construite par la société qui l’emploie. Tout va bien jusqu’au jour où d’étranges phénomènes se succèdent dans leur doux foyer : des objets se déplacent seuls, des voix se font entendre à travers le téléviseur après la fin des émissions.… Au début, les Freelings prennent ces événements avec un certain amusement mêlé d’incrédulité. Mais les manifestations se font de plus en plus inquiétantes, jusqu’à ce que la petite Carol Ann (Heather O’Rourke), disparaisse purement et simplement, emportée dans une dimension parallèle à mi-chemin entre le monde des morts et celui des vivants…

Officiellement, les taches de Spielberg et Hooper furent clairement réparties pendant le tournage de Poltergeist, mais il est plus que probable que le producteur ait activement participé à la mise en scène de cette histoire de fantômes, comme en témoignent les nombreuses réminiscences de son univers cinématographique. Au-delà des maisons de banlieue, des plans larges à la louma accompagnant des enfants à bicyclette et de ce foyer américain archétypal, cette œuvre quasi-commune évoque le téléfilm La Chose (la famille dans une maison hantée face à des fantômes qui s’en prennent aux enfants), Rencontres du troisième type (les jouets animés, les nuages lourds de menace, l’enfant enlevé), Les Aventuriers de l’Arche Perdue (l’héroïne entourée de cadavres momifiés et grimaçants, les spectres évanescents et liquides), et même E.T. qui fut tourné et post-produit en même temps que Poltergeist. Mais le scénario, rédigé par Spielberg lui-même, s’inspire surtout de la nouvelle « Little Girl Lost » de Richard Matheson, adaptée dans un célèbre épisode de La Quatrième dimension.

Les frayeurs enfantines universelles

Toujours est-il qu’Hooper et Spielberg se réapproprient en virtuoses les frayeurs enfantines universelles (l’arbre aux formes inquiétantes, le clown qui sourit) et transforment la dernière partie du film en véritable train fantôme. « Les effets spéciaux sophistiqués sont agréables, car ils donnent l’impression de pouvoir tout faire, mais parfois les vieux trucs sont les plus efficaces », raconte Tobe Hooper. « Dans Poltergeist, un panoramique suit JoBeth Williams qui passe devant une table et lorsqu’elle revient, trois secondes plus tard, toutes les chaises y sont empilées ! En fait, dès que la caméra faisait sortir la table du champ, les accessoiristes changeaient la disposition des six chaises. C’est l’un de mes trucages préférés, un simple tour de magie. » (1) Poltergeist a aussi le mérite d’évoquer les phénomènes paranormaux et les fantômes avec beaucoup de crédibilité et d’intelligence. D’où son impact, et la mini-saga cinématographique et télévisuelle qu’il entraîna.


(1) Propos recueillis par votre serviteur en février 1995

© Gilles Penso

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EVIL DEAD 2 (1987)

Encore plus folle, encore plus inventive, cette séquelle aux allures de remake oscille entre l'horreur graphique et les gags de Tex Avery

EVIL DEAD 2 : DEAD BY DAWN

1987 – USA

Réalisé par Sam Raimi

Avec Bruce Campbell, Sarah Berry, Dan Hicks, Kassie DePaiva, Ted Raimi, Denise Bixler, Richard Domeier

THEMA ZOMBIES I DIABLES ET DEMONS I SAGA EVIL DEAD

Après l’horreur troublante du film précédent, Sam Raimi opte pour un ton très différent, à la limite du cartoon et de Tex Avery. Et pourtant, Evil Dead 2 s’inscrit parfaitement dans la continuité du premier puisqu’il lui s’y enchaîne à la seconde près, si l’on fait abstraction du flash-back du prologue, simplifiant à l’extrême l’intrigue du film original et réduisant le nombre de protagonistes à deux au lieu de cinq. Seul survivant de l’attaque des forces diaboliques réveillées par les incantations du professeur Knowby, enregistrées sur un magnétophone à bande, Ash (Bruce Campbell) est à son tour possédé par le démon qui le mue en zombie grimaçant. Mais le soleil lui redonne son aspect normal. Le pont, seul accès vers l’extérieur, s’étant écroulé, Ash s’avère incapable de quitter la cabane où se déroula le drame. Il se cloître alors et sombre peu à peu dans la démence. D’où une séquence hallucinante où tous les objets dans la cabane se mettent à éclater de rire, de la tête de cerf empaillée à la chaise en passant par la lampe et la bibliothèque. Du délire pur !

Puis survient une magnifique scène d’animation où le cadavre de Linda, la défunte fiancée d’Ash, sort de terre et se met à danser dans les bois, jusqu’à ce que sa tête décapitée ne morde la main droite du malheureux. « C’est une séquence que j’aime beaucoup », avoue Doug Beswick, qui en signa l’animation. « Elle fut particulièrement amusante à réaliser. Sam Raimi nous a fourni un storyboard précis, puis nous avons engagé une chorégraphe. On peut presque considérer la danse de Linda comme un petit film d’animation à elle seule. Il y a un début, un milieu et une fin, comme dans un court-métrage. »… (1) Au seuil de la folie, Ash est rejoint par la fille du professeur Knowby, son fiancé Ed, et deux guides, Jake et Bobby Joe, tous quatre ayant emprunté un chemin à travers les bois. Les forces du mal ne vont guère tarder à se manifester à nouveau, multipliant les apparitions de zombies divers dans la cabane.

A mi-chemin entre Mad Max et Leatherface

Ici, le gore n’est plus cru mais comique, grand-guignolesque, et Bruce Campbell joue la démence à la perfection. Le scénario cultive volontiers les références à H.P. Lovecraft, déjà présentes dans le premier Evil Dead, en particulier à travers le livre des morts réveillant les démons, qui n’est rien d’autre que le fameux Necronomicon imaginé par l’écrivain tourmenté. Les nouveaux personnages n’existent ici que dans le but de se faire décimer par des monstres loufoques : grand-mère zombie au cou télescopique, main coupée qui ricane et court se réfugier dans un trou de souris comme si elle était échappée d’un « Tom et Jerry », et Ash lui-même, métamorphosé à son tour en mort-vivant agressif. Les prises de vues acrobatiques de Sam Raimi étonnent toujours, et le budget confortable alloué par Dino de Laurentiis en personne n’a effacé ni la personnalité du cinéaste, ni son style visuel reconnaissable à des kilomètres à la ronde. Au beau milieu du film, Bruce Campbell, une tronçonneuse greffée à la place de sa main droite coupée, un fusil à canon scié dans l’autre, se mue quasiment en super-héros au look des plus surprenants, à mi-chemin entre Mad Max et Leatherface. Quant au dénouement, proprement hallucinant, il annonce les délires anachroniques du troisième volet.

(1) Propos recueillis par votre serviteur en avril 1998.

© Gilles Penso

 

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