L’ARMEE DES MORTS (2004)

Un remake efficace du Zombie de Romero qui aura révélé les talents du scénariste James Gunn et du réalisateur Zack Snyder

DAWN OF THE DEAD

2004 – USA

Réalisé par Zack Snyder

Avec Sarah Polley, Ving Rhames, Jake Weber, Mekhi Phifer, Ty Burrell, Michael Kelly, Kevin Zegers, Michael Barry

THEMA ZOMBIES

Après les séquelles, préquelles et imitations, voici le remake officiel du Zombie de George Romero. Derrière la caméra, on trouve Zack Snyder, un spécialiste du spot publicitaire qui réalise là son premier long-métrage. La première partie de cette Armée des morts est proprement époustouflante, puisant son inspiration dans une des scènes choc de La Nuit des morts-vivants en décuplant son impact. Nous suivons ainsi la jeune infirmière Anna, de retour chez elle après une harassante journée. Au petit matin, sa fille surgit dans la chambre, ensanglantée et le regard fou, puis se jette sur son père et lui arrache la gorge à coups de dents. Terrifiée, Anna se retrouve donc assaillie par son époux et sa gamine mués soudainement en zombies avides de chair humaine. Tandis qu’elle prend la fuite en voiture, elle découvre que l’épidémie s’est répandue en une seule nuit, dans toute la ville, et peut-être même à l’échelle planétaire.

Les agressions se multiplient, tout comme les accidents spectaculaires que Snyder filme avec virtuosité, adoptant parfois des angles surprenants, comme cette plongée vertigineuse au-dessus de la route. Anna trouve refuge dans un centre commercial abandonné, aux côtés d’autres survivants qui vont devoir se serrer les coudes pour survivre. C’est là que L’Armée des morts rejoint Zombie, reprenant la majeure partie de ses idées scénaristiques tout en créant de nouveaux personnages, notamment trois vigiles bien décidés à défendre leur territoire, et un sniper isolé sur son toit, qui communique avec nos héros par grands panneaux interposés. Suivant la démarche popularisée par 28 Jours plus Tard, les zombies ne traînent plus la patte mais courent en hurlant, se livrant parfois même à d’étonnantes acrobaties. Si le film y gagne en dynamisme, Snyder se prive en revanche de la métaphore des consommateurs abêtis déambulant parmi les rayons du supermarché.

Les zombies doivent-ils courir ?

« Pour être honnête, je trouve que le film n’est pas si mal par rapport à ce que j’imaginais », avoue George Romero. « Les vingt premières minutes sont très réussies. Mais ça ressemble un peu trop à un jeu vidéo. Et je n’arrive pas à me faire à l’idée que les zombies courent. Je ne trouve pas ça logique. » (1) C’est bien là que réside la différence majeure entre Zombie et son remake. Ici, toute satire sociale, toute subversion a disparu, au profit d’une action soutenue et d’une épouvante savamment entretenue. De plus, Snyder semble hésiter sur le ton à adopter, oscillant sans cesse entre la terreur pure (la scène d’introduction), le gore rigolard à la Evil Dead 2 (la grosse mama zombie), l’épouvante viscérale (la mémorable séquence de l’accouchement) et l’action façon Mad Max (la fuite des autobus relookés au milieu d’un océan de zombies déchaînés). Malgré une myriade de bonnes idées, le film s’essouffle un peu dans sa seconde partie, d’autant que les similitudes avec 28 jours plus tard s’accumulent progressivement, renforçant un fâcheux sentiment de déjà-vu. Le dénouement, quant à lui, lorgne un peu maladroitement du côté de celui du Jour des morts-vivants, complétant ainsi l’hommage à la trilogie de Romero.


(1) Propos recueillis par votre serviteur en juillet 2005

© Gilles Penso

Partagez cet article

LE MONDE DE NARNIA : LE LION, LA SORCIÈRE BLANCHE ET L’ARMOIRE MAGIQUE​ (2005)

Les studios Disney s'emparent de la saga littéraire de C.S. Lewis pour profiter de la vogue du fantastique tout public générée par la franchise Harry Potter

THE CHRONICLES OF NARNIA : THE LION, THE WITCH AND THE WARDROBE

2005 – USA

Réalisé par Andrew Adamson

Avec Georgie henley, Skandar keynes, Anna Popplewell, William Moseley, Tida Swinton, James McAvoy, Jim Broadbent

THEMA HEROIC FANTASY I CONTES I MAMMIFERES I MYTHOLOGIE I SAGA LE MONDE DE NARNIA

Les studios Disney n’ayant pas senti venir assez tôt la gigantesque vogue de l’héroïc fantasy et du conte fantastique amorcée par les sagas Harry Potter et Le Seigneur des Anneaux, ils se dépêchèrent de rattraper le train en marche afin de lancer eux-mêmes leur propre franchise. Pour minimiser les risques, ils engagèrent le réalisateur Andrew Adamson (jusqu’alors spécialisé dans l’animation avec les deux Shrek) et l’équipe des effets spéciaux de Weta, maîtres d’œuvres de la trilogie de Peter Jackson. Quant au scénario, il adapte le premier tome des « Chroniques de Narnia », un best-seller en sept volumes signé C.S. Lewis qui fut lui-même un ami proche de J.R.R. Tolkien, avec lequel il partageait le goût des univers fantaisistes et des créatures imaginaires. Avec de tels atouts en poche, et un budget colossal de 180 millions de dollars, la multinationale à tête de souris espérait bien tenir la dragée haute à ses concurrents.

Or, si Le Monde de Narnia chapitre 1 remporta un indéniable succès, il faut bien avouer qu’il manque singulièrement d’âme et de personnalité, preuve qu’un bon produit marketing ne donne pas forcément un bon film, et que rien ne remplacera la forte personnalité d’un artiste (qu’aurait donné Le Seigneur des Anneaux sans Peter Jackson à la barre ?). Ce premier épisode démarre dans un contexte réaliste, celui de la seconde guerre mondiale. Alors que l’aviation allemande bombarde inlassablement Londres, quatre frères et sœurs, Peter, Susan, Edmund et Lucy Pevensie, sont envoyés par leur mère dans un manoir habité par un professeur excentrique et une gouvernante autoritaire. En jouant à cache-cache, Lucy découvre une armoire qui la transporte dans le monde de Narnia, dans lequel s’affrontent le valeureux lion Aslan et le redoutable Sorcière Blanche. Lorsque ses trois frères et sœurs la rejoignent, ils prennent une part active dans une monstrueuse bataille opposant des milliers de belligérants déchaînés.

Un gigantesque bestiaire mythologique

Et c’est bien là que Le Monde de Narnia entend en mettre plein la vue à ses spectateurs. Effectivement, on n’avait sans doute jamais vu autant de créatures fantastiques réunies dans le même film. Faunes, centaures, licornes, griffons, nains, minotaures, hommes-chauves-souris, cyclopes, guerriers à tête de phacochère, c’est un véritable festival, sans compter les innombrables animaux factices (lion, ours, rhinocéros, guépards, loups, renards, marmottes, chiens et gorilles) qui s’animent parmi nos héros. Œuvre commune des infographistes de Weta et du maquilleur spécial Howard Berger, tous ces êtres mythiques constituent l’attrait principal du film, mais ne suffisent guère à attiser l’intérêt sur les deux heures et demi que dure ce récit. Car il faut bien reconnaître qu’il ne se passe pas grand-chose dans ce conte préfabriqué, en dehors d’une poignée de péripéties déjà vues ailleurs. La bataille elle-même, point d’orgue du film, pêche par son manque d’enjeux et de tension, sans parler du cruel manque de charisme de l’ensemble des comédiens.

 

© Gilles Penso

Partagez cet article

JE SUIS UNE LEGENDE (2007)

Après Vincent Price et Charlton Heston, Will Smith incarne à son tour le dernier survivant de la fin du monde

I AM LEGEND

2007 – USA

Réalisé par Francis Lawrence

Avec Will Smith, Alice Braga, Charlie Tahan, Salli Richardson-Whitfield, Willow Smith, Emma Thompson, Dash Mihok

THEMA ZOMBIES I VAMPIRES I MUTATIONS

Armé d’un fusil et flanqué d’un berger allemand, Will Smith chasse le cerf dans les rues désertes d’une ville de New York dévastée. C’est cette séquence surréaliste qui ouvre Je suis une légende, troisième adaptation officielle du roman homonyme de Richard Matheson. La réussite de cette nouvelle version – sans doute la meilleure des trois – est d’autant plus appréciable qu’elle faillit bien ne jamais voir le jour. Au milieu des années 90, c’est Ridley Scott qui envisageait de réaliser le film, avec Arnold Schwarzenegger en vedette (successeur logique du Charlton Heston du Survivant), jusqu’à ce que les proportions pharaoniques du budget ne sabordent le projet. D’autres noms prestigieux circulèrent sur la chaise hypothétique du réalisateur, de Michael Bay à James Cameron en passant par Paul Verhoeven. C’est finalement Francis Lawrence, auteur d’un Constantine pas vraiment folichon, qui hérita du bébé. Et force est de constater que son traitement répond à toutes les attentes.

Convaincue de pouvoir éradiquer le cancer, le docteur Crispin (Emma Thompson) manipule génétiquement le virus de la rougeole. Résultat : un an plus tard, la race humaine a disparu. Tous se sont mués en vampires mutants contaminant ou dévorant inlassablement leurs semblables. Seul Robert Neville (Smith, donc), un scientifique de l’armée, est miraculeusement immunisé contre l’infection. Serait-il le dernier homme sur terre ? Depuis trois ans, il diffuse chaque jour des messages radio dans l’espoir de trouver d’éventuels autres survivants. Le reste du temps, il remplit ses journées selon un rituel excessivement méthodique, cherche désespérément le moyen d’enrayer le phénomène du virus, et se barricade dans la maison qu’il a investie dès que le jour décline. Car les créatures qui vivent à l’extérieur se réveillent la nuit, mues par un insatiable appétit. Combien de temps lui reste-t-il avant de tomber entre leur griffes ?

L'attaque des zombies numériques

Certes, le sujet de Je suis une légende évoque énormément 28 jours plus tard, avec lequel il entretient de nombreux points communs. Mais il faut remettre les choses en perspective : le film de Danny Boyle s’inspirait de La Nuit des morts-vivants, Zombie et Le Jour des morts-vivants de George Romero, eux-mêmes largement influencés par le roman de Richard Matheson. Le film de Francis Lawrence marque ainsi un naturel retour aux sources, et si les séquences d’attaque des vampires – tous interprétés par des « acteurs » numériques bluffants de réalisme – coupent bien souvent le souffle, le drame humain l’emporte majoritairement sur l’action. Contrairement à I Robot d’Alex Proyas, dans lequel le studio refusait d’assumer l’austérité du personnage incarné par Will Smith en le poussant à lâcher quelques vannes détendues ou pire à faire de la publicité pour une marque de baskets, Je suis une légende expose pleinement les fêlures de son anti-héros méthodique et dépressif. Lorsque l’humour pointe le bout de son nez, c’est de manière désespérée, comme lorsque Neville récite par cœur les dialogues de Shrek qu’il a bien dû visionner cent fois. 

 

© Gilles Penso

Partagez cet article

LAND OF THE DEAD (2005)

George Romero profite de la vogue renouvelée des films de zombie pour doter sa légendaire saga d'un quatrième épisode ambitieux

LAND OF THE DEAD

2005 – USA / CANADA

Réalisé par George A. Romero

Avec Simon Baker, Asia Argento, Dennis Hopper, John Leguizamo, Robert Joy, Pedro Miquel Arce, Krista Bridges, Eugene Clark

THEMA ZOMBIES I SAGA LES ZOMBIES DE ROMERO

Les zombies sont revenus sur le devant de la scène au début des années 2000, générant de nombreux succès et de confortables recettes. Il était donc plus que temps de redonner la parole à l’homme qui popularisa les cadavres ambulants en créant presque un sous-genre du cinéma d’horreur, le bien nommé George Romero. C’est en tout cas ce qu’ont pensé le producteur Mark Canton et les dirigeants d’Universal, quasi-assurés de remplir leur tiroir-caisse tout en séduisant les fans irréductibles. « Sans m’en rendre compte, j’ai initié une sorte de chronique avec La Nuit des Morts-Vivants » raconte Romero. « A partir de Zombie, l’utilisation de ce motif récurrent était plus consciente. C’est maintenant ma plateforme de travail. » (1) Dès les premières images, Land of the Dead tient toutes ses promesses, prouvant que Romero n’a pas perdu la main et surclasse de loin tous ses imitateurs. Il suffit pour s’en convaincre de voir cette séquence d’ouverture surréaliste dans laquelle les zombies reprennent pathétiquement leurs habitudes d’antan, l’un trimbalant inutilement son attaché-case, l’autre soufflant sans conviction dans une trompette au milieu du kiosque d’un square, un troisième s’efforçant de faire fonctionner sa pompe à essence…

Peu à peu, il apparaît évident que les zombies ont évolué depuis Le Jour des morts-vivants. Ils ne courent pas le marathon pas plus qu’ils n’accomplissent d’improbables acrobaties, comme chez Zack Snyder et Danny Boyle, mais développent une intelligence commune et un mode de communication, s’organisant progressivement autour d’un meneur enclin à la révolte. Et l’esprit satirique de Romero transparaît aussitôt, la différence entre morts et vivants s’avérant de plus en plus ténue. Mais l’acerbe critique sociale chère au cinéaste n’éclate pleinement qu’au moment où il nous présente une ville muée en bunker dans laquelle des survivants barricadés résistent aux assauts des morts-vivants, tandis qu’une poignée de nantis vivent à l’abri dans une luxueuse tour, sous l’égide du mercantile Kaufman. Cette cité autarcique, cerclée d’une barrière électrifiée, n’est pas sans évoquer New York 1997, d’autant que la mise en scène nerveuse de Romero et ses personnages burinés rappellent l’univers de John Carpenter. Avec en prime des séquences gore inédites se parant de quelques effets numériques, et un casting particulièrement judicieux.

Les secousses du 11 septembre

Moins révolutionnaire que La Nuit des morts-vivants, moins définitif que ZombieLand of the Dead n’en demeure pas moins le meilleur film de zombies depuis des décennies. « D’un point de vue stylistique, je pense que chacun des films de la série reflète le climat social et politique de l’époque à laquelle il fut réalisé » (2) , explique Romero. Ainsi, après le traumatisme du Viêt-Nam en 1968, les excès de la société de consommation en 197 et le militarisme accru en 1987, les secousses du 11 septembre ont largement influencé ce quatrième volet. Voilà tout le génie de Romero. Alors que la plupart de ses confrères se contentent de filmer des fusillades entre hommes et zombies dans l’optique de séduire les fans de jeux vidéo, Romero a toujours préféré se servir de l’horreur et des monstres comme miroir déformant de notre société.


(1) et (2) Propos recueillis par votre serviteur en juillet 2005

© Gilles Penso

 

Pour en savoir plus

Partagez cet article

FREDDY CONTRE JASON (2003)

Le choc des titans tant attendu entre le tueur de Crystal Lake et le croquemitaine aux griffes acérées n'aura finalement été qu'un pétard mouillé

FREDDY VS. JASON

2003 – USA

Réalisé par Ronny Yu

Avec Robert Englund, Ken Kirzinger, Monica Keena, Jason Ritter, Kelly Rowland, Chris Marquette, Brendan Fletcher, Kyle Labine

THEMA TUEURS I RÊVES I SAGA VENDREDI 13 I FREDDY KRUEGER

Ce crossover des deux tueurs les plus célèbres du cinéma fantastique est la concrétisation d’un fantasme entretenu pendant des décennies chez les fans de films d’horreur, même si le procédé n’est pas nouveau. Qu’on se souvienne par exemple des multiples rencontres du Monstre de Frankenstein, de Dracula et du Loup-Garou pendant l’âge d’or d’Universal, ou encore de la mémorable lutte entre King Kong et Godzilla orchestrée par la Toho en 1962. Le final du rigolard Jason va en enfer annonçait déjà, avec dix ans d’avance, ce mythique affrontement entre le tueur d’Elm Street et celui de Crystal Lake, et il faut croire qu’ici tout se passe comme si Jason X n’existait pas. Etant donné que la mise en scène en a été confiée à Ronny Yu, responsable d’un réjouissant La Fiancée de Chucky, tous les espoirs étaient permis.

Le film démarre par un résumé de l’histoire de Freddy Kruger, extraits des films précédents à l’appui. Aujourd’hui, le grand brûlé a été définitivement vaincu. Depuis que tout le monde l’a oublié, il ne peut plus sévir dans les cauchemars de ses jeunes victimes. Son seul recours est de rappeler les habitants d’Elm Street à son terrible souvenir. Pour y parvenir, il entre dans l’esprit mort-vivant de Jason Voorhees et l’incite à revenir à la vie une énième fois pour servir d’instrument à son retour. Le prétexte scénaristique est un peu tordu, mais le public est prêt à beaucoup de concessions pour voir ce combat tant attendu entre Freddy et Jason. Malheureusement, l’intérêt du film tourne court dans la mesure où il s’y passe rigoureusement tout ce qu’on attendait. C’est-à-dire des meurtres de teenagers crétins à coup de machette, et des cauchemars dans lesquels Freddy se marre en faisant crisser ses griffes. Ni plus, ni moins.

Combat de catch entre psychopathes

Cette absence de surprises et de nouveautés est pour le moins décevante, car les mythes des deux croquemitaines ne font que se juxtaposer au lieu de s’enrichir mutuellement, un peu comme si le monteur s’était contenté d’assembler un best of des meurtres de Jason et des rêves de Freddy, sans chercher à pousser plus loin le concept. A une exception près : lorsque Freddy est sur le point d’assassiner une jeune fille qui rêve de lui, mais se fait devancer par Jason qui la tue avant lui dans le monde réel. Dommage que cette belle idée tourne court et reste une tentative isolée. Quant à l’affrontement lui-même, il commence dans le monde des rêves, à coups de grandes empoignades musclées qu’on croirait issues d’un combat de catch, pour se terminer à Crystal Lake, avec force jets de sang et explosions en tous genres. Là où le délire et la démesure auraient pu battre leur plein, là où un second degré salvateur aurait pu apporter du recul et de l’humour, Freddy contre Jason ne propose que de la routine, et une absence d’ambition pour le moins regrettable. Dommage, car lorsqu’il se laisse inspirer, Ronny Yu compose des séquences assez surprenantes, comme le meurtre du jeune homme coupé en deux dans un canapé convertible, l’impressionnant bond de Freddy hors des eaux noires de Crystal Lake, ou le plan final qui révèle de très graphique manière l’issue de ce match au sommet.

 

© Gilles Penso

Partagez cet article

JASON X (2001)

Après les morts et résurrections incessantes de Jason au cours des neuf films précédents, il ne restait plus qu'une solution pour varier les plaisirs : l'envoyer dans l'espace

JASON X

2001 – USA

Réalisé par James Isaac

Avec Kane Hodder, Lexa Doig, Chuck Campbell, Lisa Ryder, Peter Mensah, Melyssa Ade, Derwin Jordan, David Cronenberg

THEMA TUEURS I SPACE OPERA I SAGA VENDREDI 13

Après la tournure joyeusement parodique qu’avait pris Jason va en enfer, il était impensable de poursuivre la franchise Vendredi 13 sur la voie du classicisme. Le scénariste Todd Farmer s’est donc lancé dans un concept pour le moins audacieux, qu’on pourrait résumer en quelques mots : Jason dans l’espace ! La mise en scène de ce dixième opus a été confiée à James Isaac, réalisateur d’un House 3 passé un peu inaperçu et ancien créateur d’effets spéciaux. L’intrigue démarre dans un futur proche. L’ancien camp de vacances de Crystal Lake est désormais un centre de recherche scientifique. Jason Voorhees a enfin été capturé par les autorités (ce qui contredit sérieusement le dénouement apocalyptique du film précédent), et le docteur Wimmer (interprété par David Cronenberg en personne) tient à le maintenir en vie pour étudier son incroyable métabolisme, contre l’avis de l’officier Rowan (la mignonnette Lexa Doig).

C’était à prévoir, le tueur au masque de hockey s’énerve un bon coup et tue tout le monde sans faire de quartier. Rowan parvient tout de même à l’enfermer dans un caisson de cryogénisation, mais Jason provoque une fuite d’un coup de machette et tous deux se retrouvent congelés… Le récit se transporte alors vaillamment quelque 400 ans plus tard. La Terre n’est plus qu’une planète morte semée de ruines, parmi lesquelles un groupe d’astronautes découvre les corps de Jason et Rowan. Les scientifiques du futur les transportent dans leur vaisseau spatial et ont la mauvaise idée de les ranimer grâce à leur technologie médicale avancée. Et c’est reparti pour un jeu de massacre sacrifiant à toutes les conventions du genre. Car malgré son parti pris science-fictionnel et son changement radical de décor, ce dixième Vendredi 13 ne parvient guère à s’écarter du lieu commun. Les campeurs de Crystal Lake sont devenus des étudiants en médecine, les bois nocturnes des coursives de vaisseau spatial, mais la mécanique reste strictement identique, et l’ennui s’installe donc lentement mais sûrement. Sans compter que Jason X sacrifie au passage à un autre lieu commun hérité cette fois-ci d’Alien et ses séquelles : la femme forte et pugnace affrontant envers et contre tous le monstre devenu son ennemi juré.

Une espèce de Robocop psychopathe

Il faut attendre le dernier quart d’heure pour que surviennent deux folles idées qui relancent tardivement l’intérêt : Jason, réduit en bouillie par une belle androïde, est « réparé » par les machines du vaisseau spatial et se mue en une espèce de Robocop psychopathe plus redoutable que jamais ; et pour échapper à sa folie destructrice, les survivants l’emprisonnent dans une réalité virtuelle où il se retrouve dans le Crystal Lake des années 80, face à deux jeunes campeuses hystériques qui le titillent en se dénudant. Hélas, même ces trouvailles tombent à plat, à cause de la mise en scène sans idée de Jim Isaac, le jeu moyennement convaincu de l’ensemble du casting, la pauvreté des décors futuristes et l’indigence de la partition synthétique d’Harry Manfredini. Bref, le futur et l’espace n’auront pas réussi à arracher ce pauvre Jason à son inlassable routine, et le dénouement, comme il se doit, s’ouvre vers de nouvelles séquelles potentielles.

 

© Gilles Penso

Partagez cet article

JASON VA EN ENFER (1993)

En bout de course, la franchise Vendredi 13 rebondit de manière inattendue avec cet épisode délirant et semi-parodique qui s'affirme comme le meilleur de la saga

JASON GOES TO HELL

1993 – USA

Réalisé par Adam Marcus

Avec Kane Hodder, John D. LeMay, Kari Keegan, Steven Williams, Steven Culp, Erin Gray, Richard Grant

THEMA TUEURS I SAGA VENDREDI 13

C’est difficile à croire, vu les peu glorieux antécédents cinématographiques de Jason Voorhees, mais ce neuvième Vendredi 13 est un petit régal. La situation de base rassemble une bonne partie des affligeants clichés de la série : une jeune femme, seule à Crystal Lake, est attaquée en pleine nuit par Jason, qui la poursuit à travers la forêt. Perplexe, le spectateur regarde l’écran avec distance. Soudain, une armada de tireurs du FBI surgit de derrière les fourrés et mitraille l’assassin, jusqu’à ce que son corps explose littéralement. L’unité spéciale se retourne vers la jeune femme : “Bien joué, agent Marcus !” Voilà un angle d’attaque pour le moins inattendu, mais le spectateur n’est pas au bout de ses surprises. Une série d’effets de volets noirs permet ensuite au texte du générique de s’intercaler dans les plans de l’autopsie de Jason, un découpage judicieux révélant déjà, quoique de manière encore très embryonnaire, que le réalisateur Adam Marcus a décidé de s’engager sur la voie de l’inventivité.

Et effectivement, dès la fin du générique, le film bascule dans le fantastique pur, en nous révélant que Jason peut voyager de corps en corps, ce qui explique ses résurrections régulières au fil des épisodes, son essence maléfique se transmettant par la bouche. Ce concept complètement inattendu évoque évidemment Hidden, mais il faut sans doute y voir un clin d’œil plutôt qu’un plagiat. Car la vraie surprise de cet épisode réside dans le mélange du surnaturel, une idée déjà très réjouissante, avec l’auto-dérision permanente, une seconde idée carrément jubilatoire. Dès lors, le spectateur est aux anges. Lui qui s’apprêtait à se moquer du film, comme ile le fit probablement avec les épisodes précédents, le voilà qui rit avec le film, une nuance de taille : on ne s’ennuie pas une seconde à la vision de ce Jason Goes to Hell Cette neuvième mouture se détache d’ailleurs volontairement des autres puisque Jason, qui apparaît en pleine forme dès le début du film, se décomposait dans les égouts de Manhattan à la fin du huitième épisode.

Le Y'a-t-il un pilote dans l'avion du film d'horreur

Jason est poursuivi par Creighton Duke, une espèce de Van Helsing chasseur de prime qui, allez savoir pourquoi, est le seul à connaître le point faible du meurtrier, un point faible prétexte qui semble s’inspirer de La Fin de Freddy. Au titre des excellentes idées, on notera toute une série de clins d’œil au cinéma d’épouvante, en particulier l’apparition en guest stars d’objets divers comme le Necronomicon de Evil Dead, la caisse de Creepshow ou encore le gant de Freddy Krueger. Les morts violentes prennent toutes des tournures de gags cartoonesques, en particulier la mâchoire ravalée d’une victime ou la liquéfaction complète d’une autre. La mort de Jason – inévitable et toujours provisoire – est un véritable délire visuel qui évoque, pèle mêle, Evil DeadLe Cauchemar de FreddyHistoire de fantômes chinois ou même Starman. Saluons comme il se doit cette nouvelle orientation (bien tardive tout de même) vers la parodie qui aurait bien pu transformer la série en Y’a-t-il un pilote dans l’avion ? du film d’horreur.  

 

© Gilles Penso

Partagez cet article

WILLOW (1988)

George Lucas confie à Ron Howard les rênes d'un conte d'heroic fantasy épique aux influences multiples

WILLOW

1988 – USA

Réalisé par Ron Howard

Avec Val Kilmer, Warwick Davis, Joanne Whalley, Jean Marsh, Patricia Hayes, Billy Barty, Pat Roach, Gavan O’Herlihy

THEMA HEROIC FANTASY I DRAGONS

La maléfique reine Bavmorda (Jean Marsh) décide de se débarrasser d’Elora Danan, le bébé destiné à la supplanter sur le trône selon une de ces fameuse prophéties dont l’heroïc fantasy se délecte. Mais l’enfant est déposé dans un panier de roseau sur un cours d’eau par sa gouvernante, cette dernière finissant dévorée par les chiens de la cruelle souveraine. Willow (Warwick Davies), un petit homme de la tribu des Nelwyns, découvre la petite fille. Il part alors à la recherche d’un Daikini, c’est-à-dire un homme grand, pour lui remettre le bébé. Sur son chemin, il trouve le guerrier Madmartigan (Val Kilmer), prisonnier d’une cage suspendue, qu’il libère à condition que celui-ci s’occupe d’Elora. Mais le bébé est rapidement capturé par les Brownies, une tribu d’hommes minuscules. Pourchassé par les hommes de Bavmorda, Madmartigan doit donc retrouver Elora et braver mille dangers…

Beaucoup critiqué au moment de sa sortie, en particulier par les amoureux de Star Wars qui semblaient reprocher au producteur George Lucas d’avoir plagié sa propre saga interplanétaire, Willow mérite pourtant de nombreux éloges. Certes, le scénario de Bob Dolman, reposant sur une histoire de Lucas, mixe une infinité de thèmes et de motifs déjà utilisés, de l’Ancien Testament (Moïse sauvé des eaux) au « Seigneur des Anneaux » (le village des nains calqué sur celui des Hobbitts) en passant par le Merlin l’enchanteur de Disney (les transformations de la fée Raziel) et quelques épisodes de « L’Odyssée » (les soldats mués en cochons par la sorcière). Mais tous ces emprunts n’empêchent pas Willow de définir sa personnalité propre et ne lui ôtent en rien ses très grandes qualités formelles. Les scènes d’action surprennent par leur essoufflante vitalité (en particulier la descente des pistes neigeuses sur un bouclier), les effets spéciaux sont ahurissants d’inventivité (notamment la cohabitation permanente d’humains de tailles différentes et l’inauguration sur grand écran des fameux « morphings »), et Val Kilmer, tout juste sorti de l’hilarant Top Secret, est un parfait anti-héros dont les faits et gestes évoquent à la fois Indiana Jones et le Mad Max du Dôme du Tonnerre.

Trolls simiesques et dragon bicéphale

On y trouve aussi d’horribles trolls simiesques et un incroyable dragon bicéphale animé image par image sous la direction experte de Phil Tippett. « A l’origine, George Lucas envisageait un dragon à quinze têtes qui vivait sous terre dans un puits de lave, mais nous avons tôt fait de le ramener à la raison ! », raconte Tippett. « Nous sommes finalement tombés d’accord sur deux têtes. Richard Vander Wende a imaginé l’aspect de ce monstre que nous avions baptisé Eborsisk. Je crois qu’il l’a conçu comme un croisement entre une baleine et un éléphant. » (1) Si le film pèche quelque peu par son scénario patchwork, et par son affrontement final un tantinet abracadabrant, la bonne humeur qu’il distille, le souffle épique qui l’anime et son incomparable maîtrise technique en font un spectacle de très grande qualité, soutenu par une partition pleine d’emphase signée James Horner. Willow n’ayant pas été le succès escompté, George Lucas ne lui donna pas de suite cinématographique mais poursuivit les aventures de ses héros sous forme de romans.

 

(1) Propos recueillis par votre serviteur en avril 1998.

© Gilles Penso

À découvrir dans le même genre…

 

Partagez cet article

LA COMTESSE NOIRE (1973)

Une déclaration d'amour à l'actrice Lina Romay que Jess Franco filme sous toutes ses coutures dans cette vague adaptation de "Carmilla".

LA COMTESSE NOIRE

1973 – FRANCE / BELGIQUE

Réalisé par Jess Franco

Avec Lina Romay, Jack Taylor, Alice Arno, Monica Swinn, Jess Franco, Luis Barboo, Jean-Pierre Bouyxou, Raymond Hardy

THEMA VAMPIRES

Vague adaptation du roman « Carmilla » de Sheridan le Fanu, La Comtesse noire est une œuvre étrange qui s’efforce de marier l’érotisme et l’horreur, cocktail dont Jess Franco s’est fait une spécialité au fil des ans. Donnant pour la première fois la vedette à Lina Romay, son épouse et muse, le réalisateur de L’Horrible docteur Orloff semble s’adonner corps et biens à la belle vampire qu’il filme, oubliant au passage tous les principes élémentaires d’une mise en scène cinématographique digne de ce nom. Le premier plan du film donne le ton. Au son d’une musique exagérément langoureuse, Lina Romay avance lentement dans les bois, une cape sur les épaules, des bottes noires aux  pieds, un slip minuscule cachant son sexe et ses seins exhibés sans retenue. Ne sachant visiblement pas du tout comment cadrer son héroïne, Franco promène sa caméra dans tous les sens, perd bien souvent la mise au point, zoome et dézoome jusqu’au vertige… La belle se dirige vers un fermier, le séduit, l’embrasse, puis le gratifie d’une gâterie buccale qui s’achève par un hurlement du jeune homme, lequel retentit dans toute la montagne.

La voix off nous apprend que nous venons de voir à l’œuvre la sanglante comtesse Irina de Karlstein, tandis que sa voiture (ornée d’une petite chauve-souris aux ailes articulées sur le capot avant) arpente une route de montagne. Nous voilà à présent dans un hôtel portugais, sur l’île de Madère. Alors qu’Irina se prélasse au bord de la piscine, une journaliste (Anna Wattican) lui fait part de son envie de l’interviewer (ce qui n’est pas évident dans la mesure où Irina est muette !). Le soir, fascinée par sa rencontre avec la comtesse, Anna rêvasse, nue dans son lit, tandis qu’Irina apparaît et disparaît avec des bruits de chauve-souris. Pour que l’intrigue avance un peu, un médecin légiste fait son apparition et délivre son rapport d’autopsie à un inspecteur de police. « Il a été tué par une bouche » dit-il sans rire, avant d’ajouter : « il a été mordu en plein orgasme par un vampire qui a avalé toute sa semence. »

L'absorption du fluide vital

Le docteur Orloff (le patronyme préféré de Franco, apparemment) confirme que, selon la légende, elle assèche ses victimes et se nourrit de leurs hormones. Ce que confirme la grande scène saphique du film, qui s’achève par la vampirisation de la victime et l’absorption du fluide vital. A cours de péripéties, Franco enchaîne sans sourciller les scènes érotiques absurdes, Lina Romay se frottant lascivement contre le barreau de son lit puis contre son polochon, se faisant mollement fouetter par une femme vampire contrariée, ou s’offrant à un grand moustachu qui s’est épris d’elle… Pendant ce temps, Orloff, qui est aveugle mais pas manchot, palpe allègrement la toison d’une victime féminine avant de décréter : « Les canines ont perforé les lèvres et déformé le clitoris. » Tout le film est à l’avenant, jusqu’à son final énonçant lourdement l’impossibilité, pour Irina, de connaître un jour l’amour. La Comtesse noire existe dans une version classée X caviardée d’inserts pornographiques, sous le titre Les Avaleuses. Il est également connu en France sous le titre La Comtesse aux seins nus, le marché international ayant opté pour des titres variés, les plus courants étant Female Vampire et Erotikill

© Gilles Penso

Partagez cet article

TOUS LES GARÇONS AIMENT MANDY LANE (2008)

Un slasher dans la pure tradition du genre, qui s'assume pleinement et possède un supplément d'âme inattendu

ALL THE BOYS LOVE MANDY LANE

2008 – USA

Réalisé par Jonathan Levine

Avec Amber Heard, Anson Mount, Michael Welch, Whitney Able, Edwin Hodge, Aaron Himelstein, Luke Grimes, Melissa Price

THEMA TUEURS

Tous les garçons aiment Mandy Lane est un slasher dans la pure tradition du genre. Mais au lieu du second degré cinéphilique d’un Scream ou de la brutalité réaliste d’un Wolf Creek, le premier long-métrage de Jonathan Levine emprunte une voie jusqu’alors méconnue : celle de ce qu’on pourrait appeler le « serial killer poétique ». Élégante, enivrante, sa mise en scène collectionne les images nostalgiques d’une période lycéenne atemporelle, capte les insouciances et les frustrations, les petits plaisirs et les grandes douleurs, pour mieux basculer en cours de métrage vers une horreur au premier degré. En ce sens, Tous les garçons aiment Mandy Lane pourrait presque être appréhendé comme un croisement imprévu entre Vendredi 13 et Virgin Suicide.

La jeune fille qui donne son nom au titre, incarnée par Amber Heard, est comme la reine des abeilles trônant au milieu d’une ruche en effervescence. Depuis que l’année scolaire a commencé, tous les lycéens craquent pour elle, cherchant à la conquérir par tous les moyens, quitte à se mettre sérieusement en danger. Mais Mandy Lane ne cède jamais, promenant nonchalamment son innocence le plus loin possible de la testostérone en ébullition. Neuf mois après l’accident qui coûta la vie à l’un de ses prétendants, elle accepte de se joindre à cinq amis dans le ranch texan de l’un d’entre eux. Les parents ayant momentanément déserté les lieux, les cinq adolescents sont livrés à eux-mêmes, bien que le gardien des lieux, un cow-boy ténébreux nommé Garth (Anson Mount), ne les quitte jamais longtemps des yeux. Comme on pouvait le prévoir, les trois garçons présents tentent leur chance à tour de rôle avec Mandy, en vain. L’ambiance reste bon enfant, jusqu’au premier meurtre. Car un assassin encapuchonné rôde dans les environs, armé jusqu’aux dents, et semble être bien déterminé à transformer tous ceux qu’il croise en chair à saucisse. Le week-end entre amis vire alors au cauchemar le plus éprouvant…

Beauté plastique et meurtres sanglants

Une indéniable beauté formelle nimbe Tous les garçons aiment Mandy Lane, notamment via la photographie un brin rétro de Darren Genet et la musique étrange composée par Mark Schulz. Du coup, lorsque le sang se met à couler, le décalage surprend, d’autant que chaque exaction du tueur énigmatique est filmée avec une brutalité et une violence presque insoutenables, à mi-chemin entre un Rob Zombie et un Alexandre Aja. L’amour et la mort se côtoient donc de près ici, à moins qu’ils ne soient très étroitement liés. Qui est ce meurtrier ? Quelles sont ses motivations ? Qu’adviendra-t-il de Mandy Lane ? Le mystère s’éclaircit au cours de la révélation de l’identité du tueur, au milieu du film. Dès lors, l’intrigue prend une dimension nouvelle et s’achemine vers un climax forcément sanglant. Si Tous les garçons aiment Mandy Lane séduit par ses audaces et ses choix esthétiques, on peut tout de même regretter que le scénario de Jacob Forman se plie aussi facilement aux conventions habituelles du slasher, et que le twist final soit aussi artificiel, lorgnant dangereusement du côté de Scream.

© Gilles Penso 

Partagez cet article