TARANTULA (1955)

Jack Arnold cultive les phobies de son public en signant l'un des films de monstres géants les plus mémorables de tous les temps

TARANTULA

1955 – USA

Réalisé par Jack Arnold

Avec John Agar, Mara Corday, Leo G. Carroll, Nestor Paiva, Ross Elliott, Edwin Rand, Raymond Bailey, Hank Patterson 

THEMA ARAIGNEES

Après l’homme-poisson de L’Étrange créature du lac noir, Jack Arnold livre à la science-fiction des années 50 un autre monstre mémorable avec Tarantula, bien vite propulsé au rang de classique du genre. Dans son laboratoire situé en plein désert arizonien, le professeur Dreemer (Leo G. Carroll) expérimente une nourriture artificielle destinée à préserver les générations futures de la famine. Hélas, la substance chimique qu’il produit a le fâcheux effet de déformer les humains et d’accroître les dimensions des autres animaux. Eric Jacobs, l’un des assistants du savant, malformé à la suite d’une injection de ce produit expérimental, devient fou furieux, détruit le laboratoire et libère une énorme tarentule que Dreemer utilisait comme cobaye. L’araignée ne cesse de grandir et commence à tuer du bétail, puis des hommes. La mise en scène très efficace de Jack Arnold, s’appuyant sur des trucages d’un réalisme surprenant, sait susciter un climat d’angoisse permanent. Tarantula émerge donc sensiblement du lot des films de monstres géants tournés à la même époque.

La première apparition de la tarentule, grande comme une pieuvre et collée à une vitre derrière Leo G. Carroll, s’avère déjà très effrayante. Plus tard, lorsque le monstre attaque de nuit un fermier, c’est l’horreur pure qui prend le relais. Les séquences choc s’ensuivent alors sans discontinuer : l’agression d’un cheval encerclé par les immenses pattes velues, l’apparition du faciès arachnéen hideux à la fenêtre d’une chambre… Jusqu’à cette scène génératrice d’une tension extrême, au cours de laquelle des militaires regagnent tant bien que mal leurs véhicules pour fuir, tandis que l’araignée grande comme une colline avance lentement vers eux sur la route nocturne.

C'est Clint Eastwood qui tue le monstre !

Parallèlement aux évolutions très spectaculaires de la tarentule géante, dues au talent apparemment sans bornes du maître ès effets spéciaux Clifford Stinne, Jack Arnold décrit les ravages physiques progressivement causés au professeur Dreemer, atteint d’acromégalie par la grâce des maquillages spéciaux de Bud Westmore. Car le savant a été soumis à sa propre substance par son assistant Jacobs, devenu fou, lequel s’est enfui dans le désert pour y mourir dans de terribles souffrances. Le film prend, du coup, un ton pathétique qui sait éviter les pièges du mélodrame. Dommage que l’idylle entre le solide John Agar et la belle Mara Corday ne contourne pas aussi habilement les clichés, s’enlisant tranquillement dans la romance convenue. Au cours d’un dénouement abrupt cédant lui aussi quelque peu au déjà vu et s’inspirant visiblement de celui de King Kong, un tout jeune Clint Eastwood dont on ne voit que le regard déjà très perçant, lâche sur l’araignée une bombe au napalm du haut de son avion de chasse. La cauchemardesque araignée finit ainsi ses jours à quelques pas de la bourgade qu’elle s’apprêtait à dévaster. Le film marqua tant le public qu’il contribua à populariser un sous-genre du cinéma fantastique amorcé dix-huit mois plus tôt par Des monstres attaquent la ville : le film d’invasion d’insectes et d’arachnides géants, dont il demeure encore à ce jour l’un des mètres étalons.


© Gilles Penso

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LE CABINET DU DOCTEUR CALIGARI (1920)

Le directeur d'un hôpital psychiatrique organise des meurtres qu'il fait commettre à l'un de ses patients somnambules

DAS KABINETT DES DOKTOR CALIGARI

1920 – ALLEMAGNE

Réalisé par Robert Viene

Avec Conrad Veidt, Werner Krauss, Friedrich Feher, Lil Dagover, Hans Heinz Von Twardowki, Rudolf Lettinger

THEMA MEDECINE EN FOLIE

Œuvre phare de l’expressionnisme cinématographique allemand, film quasi-expérimental, Le Cabinet du docteur Caligari se distingue par ses décors biscornus, peints et extravagants, ainsi que par son ambiance inquiétante et onirique. Son accueil fut des plus mitigés en 1920, et c’est la patine du temps qui, peu à peu, le dota du statut de classique. En matière d’irréalisme, le record du film est peut-être atteint par la peinture du village de 1830 où prend place l’intrigue, dans laquelle les maisons sont enchevêtrées les unes dans les autres sans la moindre logique architecturale. Les cellules de l’asile psychiatrique et le bureau du docteur Caligari, où se déroulent plusieurs scènes clefs du film, sont tout aussi mémorables. Immenses, déformés, ces décors torturés ramènent sans cesse les individus à de ridicules proportions. Le scénario du film s’avère tout aussi labyrinthique, truffé qu’il est de retournements de situations, et se structure autour de la question : qui est fou ?

Le docteur du titre, directeur d’un hôpital psychiatrique interprété par Werner Krauss, organise chaque soir un meurtre dont aucune preuve ne peut l’accuser. En effet, il n’est responsable qu’indirectement de chacun de ses crimes, puisqu’il convoque l’un de ses malades, un somnambule halluciné nommé Cesare auquel l’impressionnant Conrad Veidt prête ses traits. Caligari le laisse ainsi parcourir les toits obliques de la ville et commettre ses forfaits sanglants dans la nuit. Le somnambule revient ensuite à l’hôpital, personne ne pouvant soupçonner le docteur ou l’un de ses malades. Intrigué par cette étrange affaire, le jeune Franz décide de mener sa propre enquête. Suivant le docteur jusque dans un asile d’aliénés, il tombe sur un grimoire révélant qu’un criminel nommé Caligari sévissait déjà cent ans plus tôt. Ce récit alambiqué, conçu au lendemain de la première guerre mondiale et de la défaite allemande, est l’œuvre combinée de trois hommes à l’imagination fertile : Hans Janowitz, profondément marqué par l’assassinat nocturne d’une passante auquel il assista partiellement dans une ruelle de Hambourg, Carl Meyer, au passé de marchand forain, et Robert Wiene, dont le père finit ses jours dans un hôpital psychiatrique.

La torsion des décors et de l'intrigue

Visuellement, Le Cabinet du docteur Caligari joue sur les enchaînements entre scènes par des fermetures d’iris sur les visages des personnages, et met en image d’étonnantes idées visuelles comme Caligari, en train de basculer dans la folie, voyant son nom s’afficher et briller partout autour de lui. Les acteurs ont un jeu très outrancier, en accord avec les habitudes de l’époque, sauf Conrad Veidt qui, en somnambule livide, annonce le Nosferatu de Murnau (il dort dans une boîte qui ressemble fort à un cercueil) et le Monstre de Frankenstein qu’interprétera Boris Karloff onze ans plus tard. La torsion extrême des décors et de l’intrigue se justifient au moment du dénouement du film, révélant que toute l’histoire nous est racontée par un fou dans un hôpital psychiatrique. Cette idée scénaristique, fort surprenante, est due à Fritz Lang, qui était pressenti à l’origine pour réaliser le film, mais qui fut contraint de se désister pour œuvrer sur le serial Les Araignées.  


© Gilles Penso

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NOSFERATU LE VAMPIRE (1922)

Une adaptation officieuse du "Dracula" de Bram Stoker où surgit un vampire hideux et terriblement iconique

NOSFERATU, EINE SYMPHONIES DES GRAUENS

1922 – ALLEMAGNE

Réalisé par Friedrich Wilhelm Murnau

Avec Max Schreck, Gustav Von Wangenheim, Alexander Granach, Greta Schroeder, Gustav Botz, G.H. Schnell, John Gottowt

THEMA DRACULA I VAMPIRES

Pour des raisons de droits littéraires non acquis par F.W. Murnau, ce film phare de l’histoire du cinéma fantastique est une adaptation officieuse du roman de Bram Stoker. Le cinéaste s’était d’ailleurs déjà prêté en 1920 au jeu avec La Tête de Janus, une transposition libre de « Docteur Jekyll et Mister Hyde ». Dans Nosferatu, Dracula est devenu le comte Orlock, mais l’histoire, située en 1838, est rigoureusement similaire, ce qui valut à Murnau un procès dont l’issue faillit être la destruction pure et simple du négatif de son film. La veuve de Bram Stoker apprécia en effet très peu cette exploitation «pirate» de l’œuvre de son illustre époux. Substitut du protagoniste initial Jonathan Harker, un jeune clerc de notaire nommé Hutter (Gustav Von Wangenheim), vient conclure une vente avec Orlock (Max Schreck), châtelain des Carpathes, qui n’est autre qu’un vampire assoiffé d’hémoglobine. Chaque soir, il part en quête de sang frais dans le voisinage. Surnommé « Nosferatu », c’est à dire « le mort-vivant », il répand l’horreur et la peur, accompagné d’une armée de rats porteurs de la peste. Horrifié, Hutter prend la poudre d’escampette en direction de la ville de Viborg, où l’attend sa jeune épouse Ellen (Greta Schroeder). Mais Orlock l’y attend déjà, s’installant dans une vieille maison croulante à deux pas du domicile des époux, et menaçant de vampiriser Ellen…

En tournant Nosferatu, Murnau clama haut et fort que ce film n’était absolument pas expressionniste, se plaçant du même coup à contre-courant d’œuvres contemporaines telles que Le Cabinet du docteur Caligari ou Docteur Mabuse. D’ailleurs, pour bien marquer la différence, le cinéaste est parti tourner entre août et octobre 1921 dans des sites extérieurs naturels, principalement aux Carpathes et dans les villes côtières de la mer baltique. Les rues où déambule le vampire proviennent ainsi des cités allemandes Lauenburg, Rostok, Lübeck et Wismar. Le château slovaque d’Oravsky devint celui d’Orlock, les plans marins furent captés à Helgoland et ceux des montagnes en Silésie. Malgré cet éloignement des plateaux de tournage, les éclairages, les jeux d’ombres et de lumières et la prestation des comédiens se rattachent ouvertement à l’expressionnisme, associé à tout jamais au cinéma allemand de l’entre deux guerres. Le célèbre plan du vampire gravissant en ombre chinoise un escalier est d’ailleurs devenu l’un des symboles les plus forts de ce courant artistique.

L'ombre rampante de Max Schreck

Si Max Schreck, derrière un maquillage toujours aussi impressionnant, sait provoquer à chacune de ses apparitions un véritable sentiment d’angoisse cauchemardesque (même s’il n’est physiquement présent qu’une dizaine de minutes au sein du métrage), le reste du film, lui, a plus difficilement passé le cap des années. Certains effets, en particulier les accélérés, ont même pris une allure comique, alors que le sentiment recherché à l’époque était évidemment inverse. Le personnage féminin principal joue également en défaveur du film, car en lieu et place de la belle vierge évanescente promise par le récit, nous avons droit à la figure rude de Greta Schroeder, aux charmes très discutables. Mais Nosferatu demeure une pièce maîtresse, qui donna le la pour toutes les futures adaptations, officielles ou non, du roman de Stoker.

 

© Gilles Penso

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PLANÈTE TERREUR (2007)

Le deuxième volet du dyptique Grindhouse permet à Robert Rodriguez de rendre hommage aux zombies et aux films post-apocalyptiques des années 70/80

GRINDHOUSE : PLANET TERROR

2007 – USA

Réalisé par Robert Rodriguez

Avec Rose McGowan, Freddy Rodriguez, Josh Brolin, Marley Shelton, Jeff Fahey, Michael Biehn, Naveen Andrews

THEMA ZOMBIES I MUTANTS

Deuxième volet du diptyque Grindhouse, Planète terreur s’avère infiniment plus réjouissant que Boulevard de la mort, ne serait-ce que par le foisonnement de ses personnages et de ses rebondissements. Dans une petite ville américaine, William et Dakota Block (Josh Brolin et Marley Shelton), un couple de médecins, constate qu’un nombre croissant de patients est soudain affecté d’une étrange gangrène. Bientôt, de nombreux habitants se mettent à errer dans les rues tels des zombies. Leur peau se décompose, leur regard est vide, et leur appétit anthropophage semble insatiable. C’est ainsi que la go-go danseuse Cherry (Rose McGowan), se fait attaquer en pleine nuit et arracher une jambe. Son ex-petit ami Wray (Freddy Rodriguez) veille sur elle, tandis que l’épidémie se propage à une vitesse alarmante. Pour faire face à l’invasion, Cherry et Wray prennent la tête d’une armée de combattants. Ils vont devoir se heurter aux assauts répétés des mutants cannibales, mais aussi aux militaires de la base voisine qui semblent être à l’origine du fléau…

On n’en finirait plus de citer les œuvres du cinéma d’exploitation auxquelles se réfère Planète terreur, mais au lieu du vague patchwork référentiel auquel il se livra dans The Faculty, Robert Rodriguez nous livre ici un film hommage qui se déguste avec délectation. Le soin tout particulier que le cinéaste apporte à ses protagonistes n’y est pas étranger. Freddy Rodriguez (qui excellait déjà dans la série Six Feet Under) y est un anti-héros extrêmement charismatique, Rose McGowan (également vedette de Boulevard de la mort) et Marley Shelton (que le réalisateur dirigea dans Sin City) s’avèrent irrésistibles, et le reste du casting réserve aux cinéphiles une galerie de trognes familières du plus bel effet (Michael Biehn, Tom Savini, Bruce Willis, Quentin Tarantino).

Une déclaration d'amour à Romero et Carpenter

Visuellement, Planète terreur est une pure merveille, combinant les prises de vues en HD et les effets numériques haut de gamme avec des trucages gore à l’ancienne (particulièrement gratinés) et un traitement de la pellicule digne des copies les plus éculées du plus petit des cinémas de quartier : l’image est rayée, salie, tachée, brûlée, et il manque même une bobine complète au beau milieu du métrage ! Véritable déclaration d’amour au cinéma de genre, le film est sous l’influence permanente de George Romero et John Carpenter (dont quelques extraits de la B.O. de New York 1997 sont d’ailleurs réutilisés). Et si Rodriguez ratait quelque peu son hommage à Zombie dans Une Nuit en enfer, il le réussit ici haut la main, enterrant tous les Resident Evil dans son sillage. De toute façon, comment résister à un film dans le climax duquel une pin-up bondit de sa moto pour mitrailler des soldats mutants décomposés avec sa jambe transformée en mitraillette ? Le fan d’horreur et de science-fiction n’aura sans doute aucun mal à classer Planète terreur parmi les meilleurs films de Rodriguez, un cinéaste attachant mais très inégal qui commença à développer ce projet fou dès 1998 puis l’abandonna en cours de route pour se consacrer notamment à la saga Spy Kids et à la création de sa société de production Troublemakers Studios.

 

© Gilles Penso

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HALLOWEEN (2007)

Rob Zombie balaie d'un revers de main tous les films de la saga Halloween pour raconter à sa manière l'enfance de l'apprenti-croquemitaine

HALLOWEEN

2007 – USA

Réalisé par Rob Zombie

Avec Malcolm McDowell, Sheri Moon Zombie, Tyler Mane, Scout Taylor-Compton, Brad Dourif, Danielle Harris, William Forsythe

THEMA TUEURS I SAGA HALLOWEEN

Un remake de La Nuit des masques n’avait rien pour réjouir les fans de films d’horreur, surtout après la catastrophique relecture de Fog qui leur fut infligée quelques années plus tôt. Mais avec Rob Zombie à la barre du projet, certains espoirs étaient permis. Et effectivement, la première moitié de cet énième Halloween s’avère prodigieuse, éclairant tout un pan de l’histoire de Michael Myers resté jusqu’alors dans l’ombre. C’est donc presque à une prequel que nous avons droit, au sein d’une de ces familles crasseuses et hystériques dont semble raffoler Zombie. Pour nourrir ses trois enfants, Deborah Myers (Sheri Moon Zombie, épouse et égérie du cinéaste) gagne sa vie comme strip-teaseuse dans un bar louche d’Haddonfield, tandis que son épave de compagnon emplit sa panse de bière en se plaignant des braillements du bébé et en lorgnant sur les mini-shorts de la grande sœur. Au sein de cette atmosphère poisseuse, le jeune Michael Myers (l’hallucinant Daeg Faerch) grandit comme il peut, se refermant sur lui-même, cachant la plupart du temps son visage poupon sous un masque de clown et tuant les animaux qui ont le malheur de passer à proximité de son cutter. Profondément asocial, il finit par attirer l’attention du docteur Sam Loomis, un psychiatre ambitieux auquel l’immense Malcom McDowell prête son charisme, succédant sans rougir au pourtant inoubliable Donald Pleasence. Un soir d’Halloween, Michael bascule dans la folie meurtrière, assassinant avec une violence inouïe son beau-père, sa sœur et son petit ami.

Cette partie de la vie du « héros » d’Halloween, que Carpenter avait résumé en quelques minutes le temps d’un plan-séquence subjectif entré dans la légende, est donc l’un des moments les plus forts de cet audacieux remake, et le récit aurait dû logiquement se raccorder ensuite au scénario qui nous est familier. Mais Rob Zombie décide d’aller plus loin dans l’exploration de son personnage, décrivant avec minutie la vie quotidienne de Michael dans l’institut psychiatrique où il est détenu, montrant la croissance de sa passion pour les masques, et la transformation du petit garçon psychopathe en colosse hirsute résolument impressionnant (incarné par Tyler Mane).

La prequel se transforme en remake

Lorsque Myers s’évade, le remake emboîte le pas de son modèle de 1978, et force est de constater que le film perd dès lors la majorité de son intérêt. Car la trame originale – extrêmement efficace en son temps, mais hélas galvaudé depuis – est quasiment reprise scène par scène. La surprise n’est plus vraiment au rendez-vous, les protagonistes redeviennent de simples archétypes (les lycéennes hilares, le croquemitaine muet, le policier incrédule, le psychiatre omniscient), et Zombie lui-même abandonne en cours de route les innovations de sa mise en scène. Certes, la violence paroxystique de certaines séquences assène de véritables coups de poings aux spectateurs, et les meurtres s’avèrent souvent longs, pénibles et douloureux – alors que le sang ne coulait qu’avec parcimonie dans l’originale Nuit des masques – mais la seconde partie du film souffre d’une trop grande aliénation à son modèle, et le climax traîne artificiellement en longueur. Cet Halloween est donc une semi-réussite, qui vaut principalement pour sa remarquable entrée en matière.


© Gilles Penso

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HOSTEL 2 (2007)

Dans cette séquelle sans surprise, trois touristes américaines en voyage en Europe tombent dans un piège qui va les livrer à des amateurs de tortures

HOSTEL PART 2

2007 – USA

Réalisé par Eli Roth

Avec Jay Hernandez, Roger Bart, Richard Burgi, Edwige Fenech, Lauren German, Stanislav Ianevski, Roman Janecka

THEMA TUEURS

S’il s’efforce d’améliorer les problèmes de rythme et de structure du premier opus, notamment à travers une narration parallèle qui permet d’entrer un peu plus vite dans le vif du sujet, ce second Hostel se démarque difficilement de son aîné, dont il reprend servilement la trame et les ingrédients, se contentant principalement de changer le sexe de ses protagonistes. Alors qu’elles sont en vacances dans une Europe fort peu engageante, Beth, Lorna et Whitney, trois jeunes Américaines, rencontrent une femme charmante et mystérieuse avec laquelle elles sympathisent. Celle-ci se propose de leur faire découvrir pour le week-end un établissement de cure où elles pourront se reposer et s’amuser. Attirées par cette offre, les touristes la suivent avec enthousiasme et tombent dans un piège redoutable. Livrées à de riches clients associant l’horreur au plaisir, les malheureuses ne vont pas tarder à vivre un cauchemar absolu…

Avec cette séquelle, le problème majeur demeure : Eli Roth, incapable d’assumer un discours cohérent et une tonalité idoine, se laisse porter par toutes ses envies et part dans tous les sens : l’horreur gothique (l’effroyable séquence du massacre à la faux qui se réfère directement au personnage d’Elizabeth Bathory), le gore au second degré (le cannibale interprété par Ruggero Deodato qui déguste une pauvre victime lentement dépecée vive, le final excessif qui semble cligner de l’œil vers Street Trash), l’approche psychologique (le point de vue des « tueurs » qui sont en quête d’un pouvoir dont ils manquent cruellement dans leur propre foyer), la dénonciation d’un système abominable gangréné par l’argent (les enchères effectuées on-line sur les futures victimes, comme si des bourreaux pouvaient choisir sur Ebay les personnes qu’ils souhaitent trucider)…

La quête du dégoût

Mais à tant sauter d’un style à l’autre, Hostel 2 ne touche personne et ne fait rien ressentir, à l’exception bien sûr du dégoût suscité par ses scènes de torture outrancières et désespérément complaisantes. Soucieux de bien marquer ses influences cinématographiques, notamment les films de genre italiens, Roth a orné son casting de quelques figures emblématiques transalpines. Ainsi, outre l’apparition du réalisateur de Cannibal Holocaust, on remarque la présence d’Edwige Fenech (L’Île de l’épouvante de Mario Bava, Nue pour l’assassin d’Andrea Bianchi) dans le rôle d’un professeur d’art, et celle de Luc Merenda (Le Parfum du diable et Torso de Sergio Martino) sous la défroque d’un inspecteur de police. Le réalisateur lui-même a fait mouler son visage par l’équipe des maquillages spéciaux pour que sa tête décapitée trône au milieu de dizaines d’autres dans une pièce sinistrement surréaliste, aux allures de salle de trônes, que n’aurait pas reniée le Comte Zaroff. Finalement aussi vain que le premier, cet Hostel 2 multiplie les passages horrifiques (un homme dévoré par des chiens, un visage découpé à la scie circulaire, des décapitations et des mutilations en tout genre, une émasculation digne d’Umberto Lenzi) à défaut de développer un récit palpitant et de discourir sur les horreurs qu’il étale.


© Gilles Penso

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INVASION (2007)

Nicole Kidman et Daniel Craig tiennent la vedette de cette quatrième adaptation officielle de L'Invasion des profanateurs de sépultures

THE INVASION

2007 – USA

Réalisé par Oliver Hirschbiegel

Avec Nicole Kidman, Daniel Craig, Jeremy Northam, Jeffrey Wright, Jackson Bond, Veronica Cartwright, Alexis Raben

THEMA EXTRA-TERRESTRES I VEGETAUX

Tous les quinze ou vingt ans, Hollywood s’essaie à une nouvelle adaptation du roman de Jack Finney « Invasion of the Body Snatchers », avec plus ou moins de bonheur. Si L’Invasion des profanateurs de sépultures de Don Siegel s’est vite érigé au statut de classique en 1956, et si son remake signé en 1979 par Philip Kaufmann en modernisait le propos avec beaucoup d’efficacité, le Body Snatchers d’Abel Ferrara (1992) ne présentait pas un grand intérêt. Pour varier les plaisirs, le producteur Joel Silver s’en alla quérir un réalisateur européen, pratique devenue courante auprès des grands studios soucieux de repérer les talents britanniques, ibériques ou français. Le dévolu de Silver se jeta sur Oliver Hirschbiegel, signataire de deux œuvres très remarquées : L’Expérience et La Chute. Pas très éloignée de celle de Philip Kaufmann, l’approche du metteur en scène allemand se veut sobre et naturaliste, ponctuée ça et là d’éléments insolites. Nicole Kidman y incarne Carol Bennell, une psychiatre renommée, mère de l’adorable petit Oliver (Jackson Bond) et liée au sympathique médecin Ben Driscoll (Daniel Craig). Suite au crash de la navette spatiale Patriot, des débris se répandent sur des milliers de kilomètres carrés, de Dallas à Washington. Dépêchées sur place, les autorités les plus compétentes ignorent qu’une spore venue de l’espace est attachée à chacun des débris, et que quiconque y touche se trouve contaminé par un mal étrange.

L’un des premiers touchés est Tucker Kaufman (Jeremy Northam), l’ex-mari de Carol. La nuit venue, dès qu’il sombre dans les bras de Morphée, une étrange métamorphose s’opère. Le lendemain, plus aucune émotion ne transparaît sur son visage froid et sans âme. Et cette modification de comportement gagne peu à peu la majorité de la population. Carol s’alerte lorsque l’une de ses patientes (incarnée par Veronica Cartwright, à l’affiche de L’Invasion des Profanateurs version 1979) lui affirme avec aplomb que son mari a été « remplacé ». La psychiatre fait la même constatation à propos de son ex-mari, lequel s’est emparé du jeune Oliver. A la recherche de son fils, Carol va devoir cacher ses émotions afin de se noyer dans la masse des humains contaminés qui hantent les rues de la ville, et surtout lutter contre le sommeil si elle ne veut pas devenir l’un d’entre eux.

Un montage retouché à la demande de Joel Silver

Le refrain est connu, certes, mais la mise en scène à fleur de peau d’Hirschbiegel et le jeu convaincant des comédiens jouent en faveur d’Invasion qui, à défaut de révolutionner le genre, nous réconcilie avec un récit fort malmené par Abel Ferrara. Hélas, face au premier montage du film, Joel Silver s’inquiéta du caractère trop intimiste du résultat et de son rythme languissant. Soucieux de toucher le public le plus large, il confia la réécriture d’une partie du scénario aux frères Wachowski et le tournage de nombreuses séquences additionnelles à James McTeigue, réalisateur de V pour Vendetta. Au final, Invasion est fatalement un produit hybride, bourré d’ellipses déstabilisantes, encombré dans son climax de séquences d’action un peu vaines, et embarrassé d’un dénouement d’une grande faiblesse. A quand le director’s cut ?

© Gilles Penso

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SA MAJESTÉ MINOR (2007)

Dans cette relecture insolite de la mythologie grecque, José Garcia incarne un simple d'esprit amoureux et Vincent Cassel un satyre mi-homme mi-bouc

SA MAJESTÉ MINOR

2007 – FRANCE

Réalisé par Jean-Jacques Annaud

Avec José Garcia, Vincent Cassel, Sergio Peris-Mencheta, Mélanie Bernier, Claude Brasseur, Rufus, Jean-Luc Bideaui, Bernard Haller

THEMA MYTHOLOGIE

Sa Majesté Minor est le dixième long-métrage de Jean-Jacques Annaud et le dernier scénario de Gérard Brach, mort quelques jours avant le début du tournage. Pour leur ultime association, le réalisateur de Stalingrad et le scénariste du Bal des vampires (qui œuvrèrent jadis ensemble sur La Guerre du feuLe Nom de la RoseL’Ours et L’Amant) ont décidé de s’attaquer à la mythologie grecque. Les grands amateurs de Jason et les Argonautes que nous sommes ne pouvaient que se réjouir d’une telle initiative, mais le résultat a de quoi laisser perplexe. Le récit prend place dans une antiquité imaginaire antérieure aux odyssées narrées par Homère. Sur une île perdue au beau milieu de la mer Egée vit une peuplade primitive coulant des jours paisibles sous l’œil vénérable du patriarche (Jean-Luc Bidaud). Dans la porcherie du village, truies et cochons partagent leur couche avec Minor (José Garcia), un imbécile heureux orphelin et muet. Ce dernier n’est pas insensible au charme de Clytia (Mélanie Bernier), la fille du patriarche, mais elle est déjà promise au poète Karkos (Sergio Peris-Mencheta), fils du teinturier Firos (Claude Brasseur).

Alors qu’il erre dans la forêt voisine, Minor fait la rencontre d’un satyre mi-homme mi-bouc (Vincent Cassel) qui l’initie aux joies du paganisme et lui présente ses amis mythologiques : des nymphes lubriques et un centaure anthropophage. Lorsqu’il revient parmi les siens, Minor fait une chute mortelle du haut d’un olivier et s’apprête à subir les rites funéraires d’usage. Or contre toute attente, le voilà qui revient d’entre les morts, capable désormais de s’exprimer avec une éloquence désarmante. A contrecœur, le devin du village (Bernard Haller) et le prêtre Rectus (Rufus) le sacrent roi. A partir de ce moment, les choses vont se compliquer allégrement…

Entre Fellini et les Robins des Bois !

On n’en finirait plus de citer les qualités de Sa Majesté Minor : un casting haut de gamme, des dialogues désopilants, des effets spéciaux de très haut niveau, des décors extraordinaires, une audace de tous les instants… Faisant fi de toutes modes, Annaud se fait visiblement plaisir, mettant ici à profit sa minutie légendaire et ses connaissances encyclopédiques en matière de culture grecque (d’où une étrange partition ethnique composée par Javier Navarrete, à qui nous devons la magnifique bande originale du Labyrinthe de Pan). Brach, quant à lui, nage en plein surréalisme, abattant volontiers les tabous et les codes moraux qui entravent bien souvent le cinéma hexagonal. Sa Majesté Minor déborde donc de bonnes intentions, mais comme chacun sait l’Enfer en est pavé, et le film finit par s’effondrer sous un trop plein d’idées mal canalisées. Le scénario patine, l’absurdité des rebondissements émousse considérablement leur efficacité, et la destinée des protagonistes ne parvient guère à nous captiver. C’est d’autant plus dommage que les dernières minutes du film laissent entrevoir des moments d’émotion qui manquent cruellement au reste du métrage. Ne sachant trop sur quel pied (de bouc) danser, oscillant entre des gags à la Robins des Bois (RRRrrrr !!! n’est pas loin) et une folie toute fellinienne (on pense parfois à Satyricon), le dixième film de Jean-Jacques Annaud est donc un patchwork déroutant qui manque singulièrement d’unité.

 

© Gilles Penso

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TRANSFORMERS (2007)

Michael Bay porte à l'écran les célèbres jouets Hasbro sans la moindre finesse, sacrifiant la lisibilité des actions au profit d'une hystérie numérico-pyrotechnique

TRANSFORMERS

2007 – USA

Réalisé par Michael Bay

Avec Shia LaBeouf, Megan Fox, Josh Duhamel, Tyrese Gibson, Rachael Taylor, Anthony Anderson, Jon Voight, John Turturro

THEMA ROBOTS I SAGA TRANFSORMERS

Un film sur les « Transformers », c’est à priori un rêve d’enfant qui se réalise. Ces jouets Hasbro, devenus vedettes d’une série animée dans les années 80, ne pouvaient que se prêter à merveille au grand écran et aux possibilités infinies de l’imagerie numérique. Et qui mieux que le réalisateur Michael Bay et le producteur Steven Spielberg pour s’emparer d’un tel concept ? Hélas, si le projet est alléchant sur le papier, il s’avère plutôt consternant lors de son visionnage. Pourtant, fidèle à son habitude, le réalisateur de The Rock nous époustoufle dès le prologue situé dans le désert du Qatar, au sein d’une base militaire américaine. Tandis que les valeureux soldats luttent contre un robot géant doté d’un incroyable pouvoir de destruction, le jeune Sam Witwicky (Shia LaBeouf), se voit généreusement offrir par son père une vieille Camaro qui s’avère capricieuse et dotée d’une forte personnalité. A ce stade, on se croirait dans La Coccinelle revient des studios Disney, ce qui n’augure rien de bon. Et la suite confirme bien vite cette fâcheuse impression, malgré quelques bonnes idées narratives. Ainsi, face au colossal robot découvert jadis dans les glaces par l’aïeul de Sam, et conservé secrètement par l’armée, un agent du gouvernement incarné par John Turturro affirme : « Vous contemplez la source du monde moderne ; les puces électroniques, le laser, l’aérospatiale, tout cela découle de l’étude de ce spécimen. » Skynet et le Terminator ne sont pas loin.

Nous apprenons bientôt que deux races de machines extra-terrestres, les Autobots et les Decepticons, se livrent une guerre sans merci depuis des temps immémoriaux et que leur conflit s’étend désormais à la Terre, où ils se dissimulent sous toutes les formes de véhicules possibles et imaginables : voitures, camions, tanks, avions de chasse ou hélicoptères… Ces robots sont évidemment les attractions principales du film. Etant donné que les transformations de véhicules en automates géants ont déjà ébahi les spectateurs dans des films publicitaires haut de gamme, Michael Bay tente de surpasser ses prédécesseurs en injectant un dynamisme excessif à ses scènes de transformation et d’action. Les intentions sont compréhensibles mais le résultat est loin d’être performant. Car si les effets visuels sont extraordinaires, la frénésie de leur mise en scène fait obstacle à leur impact dramatique.

Rendez-nous Robot Jox !

La première métamorphose de la Camaro du héros, qui aurait dû être un moment fort du film, est finalement trop rapide pour laisser la moindre place à une quelconque émotion. Quant à son combat avec le robot-voiture de police, il est tout bonnement illisible. Les choses s’améliorent un peu en cours de route, notamment avec la poursuite et l’affrontement sur l’autoroute, mais l’hystérie du montage et des mouvements de caméra demeure, d’autant que l’anthropomorphisme systématique des robots (l’un d’entre eux fait même du break dance !) fait souvent sombrer le film dans le ridicule. Incorrigible, Michael Bay continue inlassablement à filmer des décollages d’hélicoptères et d’avions de chasse au coucher du soleil, soutenus par une partition à la Hans Zimmer aussi subtile qu’un marteau piqueur. Dans le même registre, l’ultra fauché Robot Jox s’en sortait finalement bien mieux.


© Gilles Penso

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SISTERS (2006)

Un remake du Sœurs de sang de Brian de Palma dans lequel Lou Doillon reprend le rôle tenu jadis par Margot Kidder

SISTERS

2006 – USA

Réalisé par Douglas Buck

Avec Chloé Sevigny, Lou Doillon, Stephen Rea, Alistair Abell, J.R. Bourne, Serge Houde, Dallas Roberts, Ross Viner

THEMA DOUBLES

C’est pour asseoir sa carrière de cinéaste, brillamment entamée avec Family Portrait, que Douglas Buck accepte de réaliser le remake de Sœurs de sang à la demande du producteur Edward S. Pressman. Soucieux d’injecter son propre style et d’évacuer l’esthétique du film initial, un peu trop artificielle à son goût, Buck débarrasse de ses oripeaux hitchcockiens le récit imaginé par Brian de Palma. Pour autant, il ne s’écarte que fort peu de la trame d’origine, dont il demeure étonnamment respectueux. Sisters raconte donc l’enquête menée par la journaliste Grace Collier (Chloé Sevigny) après qu’elle ait assisté à l’assassinat d’un homme depuis sa fenêtre. L’appartement où s’est déroulé le drame est habité par la Française Angélique Turner (Lou Doillon), ex-femme du mystérieux docteur Lacan (Stephen Rea) qui dirige la clinique Zurvan. Or Angélique a une sœur jumelle, Annabelle, qui semble posséder un caractère beaucoup plus instable.

Les écarts entre le scénario de Buck et celui de De Palma sont finalement minimes : la journaliste n’est plus témoin du meurtre chez elle mais au cours de ses investigations dans un appartement de Lacan qu’elle soupçonne de traitements psychanalytiques expérimentaux sur des enfants ; le meurtre est vu à la fois à travers la fenêtre et sur un écran d’ordinateur relié à des caméras de surveillance ; la victime des sœurs jumelles n’est plus un inconnu rencontré dans un jeu télévisé mais un médecin bénévole qui officie dans la clinique de Lacan ; le détective privé a été remplacé par un collègue reporter et ex-petit ami… Ces modifications étant légères, le scénario initial – écrit à quatre mains par Brian de Palma et Louisa Rose – est bien moins transfiguré que ce qu’on aurait pu croire. Même le fameux cauchemar surréaliste dans l’institut psychiatrique est étonnamment fidèle à son modèle.

La quête de l'enfance volée

Là où Buck s’éloigne de De Palma, c’est dans la description des fêlures de son personnage principal, autrement dit Grace Collier (le film de 1973 partageait plus équitablement le rôle du protagoniste entre la journaliste et la sœur jumelle). Traumatisée dans sa prime jeunesse, sur le fil du rasoir, elle cache sous son apparent endurcissement une grande fragilité. Cette quête inavouée de féminité refoulée et d’enfance volée prépare en douceur un dénouement pour le moins inattendu, seule véritable entorse au premier Sœurs de sang. Toutefois, le revirement psychologique qu’implique une telle chute manque singulièrement de crédibilité et laisse un peu perplexe. Influencé par David Cronenberg et Ingmar Bergman, plus porté sur la métaphore que sur le réalisme pur et dur, Buck met en scène un duo d’actrices peu banal. Après le désistement d’Asia Argento, Lou Doillon campe une Angélique au déséquilibre immédiatement décelable (l’apparente ingénuité qu’exhalait jadis Margot Kidder s’est ici en grande partie évaporée) et Chloé Sevigny est ici le parfait archétype du garçon manqué assoiffé d’indépendance. Plus intimiste, plus lent et plus cru que son modèle (la scène de sexe ne manque pas de verdeur), Sisters n’a pas vraiment convaincu les distributeurs, atterrissant du coup directement dans les bacs à DVD sans passer par la case grand écran.

 

© Gilles Penso

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