CASINO ROYALE (2006)

Les producteurs de la saga officielle James Bond récupèrent enfin les droits du premier roman d'Ian Fleming et dotent l'agent 007 d'un tout nouveau visage

CASINO ROYALE

2006 – GB / USA

Réalisé par Martin Campbell

Avec Daniel Craig, Eva Green, Mads Mikkelsen, Judi Dench, Caterina Murino, Jeffrey Wright, Giancarlo Giannini

THEMA ESPIONNAGE ET SCIENCE-FICTION I SAGA JAMES BOND

Jusqu’alors, les producteurs de la saga James Bond n’avait jamais pu adapter officiellement le roman « Casino Royale », suite à un problème de droits qui fut réglé lors de l’acquisition de la franchise par Sony. Déjà aux commandes de Goldeneye, Martin Campbell reprend du service et se lance dans une sorte de « post-préquelle » aux allures de reboot. Ainsi Casino Royale raconte-t-il les débuts de l’agent 007 et ses premières missions après l’obtention de son permis de tuer, le tout en 2006 (avec Judi Dench qui, pour sa part, conserve le rôle de M qu’elle tenait depuis 1995). Et puisque nous assistons à la renaissance d’un héros, il était logique de le doter d’un nouveau visage. Surprenant, le choix de Daniel Craig est un vrai coup de génie. Ses traits burinés et son corps trapu s’adaptent parfaitement à cet assassin mal dégrossi encore loin de l’espion sûr de lui que nous connaissons. D’où de savoureuses joutes verbales avec M. « Difficile de faire comprendre ça à un bulldozer, mais l’arrogance et l’introspection ne font pas bon ménage » lui lance-t-elle ainsi après qu’il soit entré par effraction chez elle. La brutalité de notre homme est apparente dès l’ahurissante séquence d’action qui ouvre les festivités, au cours de laquelle il course un terroriste incarné par Sébastien Foucan (Yamakazi). L’agilité acrobatique de l’un (qui évite les obstacles en se contorsionnant avec grâce) contraste fortement avec la rudesse de l’autre (qui a plutôt tendance à défoncer les murs !).

Autre morceau de choix : une poursuite en camion à couper le souffle qui n’est pas loin de nous rappeler celles des Aventuriers de l’Arche Perdue ou de Mad Max 2. La mission de Bond se précise alors : il doit affronter Le Chiffre (un vilain suave aux larmes de sang qui rappelle le Christopher Walken de Dangereusement Vôtre) au cours d’une partie de poker dans un casino du Montenegro. Le but de l’opération est de ruiner ce banquier dont la clientèle est constituée de terroristes internationaux. 007 est épaulé par Vesper Lynd (la sublime Eva Green), qui représente le Trésor Public. Une inévitable idylle se noue entre eux, mais qu’elles sont loin les James Bond girls affables qui se pâment devant le beau James avant de s’offrir à lui ! Vesper est une femme complexe, entreprenante et peu impressionnable. Lorsque Bond lui lâche nonchalamment « vous n’êtes pas mon genre », elle se contente de lui rétorquer, le sourire aux lèvres : « intelligente ? »

 

James Bond Begins

Le jeu du chat et de la souris s’achève par une histoire d’amour intense comme on n’en avait pas vue depuis Au service secret de Sa Majesté. Tout ce que 007 va vivre au cours de cette mission va peu à peu définir le personnage archétypique auquel vingt films nous ont familiarisé. Nous comprenons dès lors sa méfiance des femmes, son amour pour les voitures de luxe et les cocktails raffinés, sa prise d’assurance. La métamorphose du héros transparaît à tous les niveaux du film, depuis la redéfinition de la classique scène pré-générique jusqu’à la partition de David Arnold qui n’aborde jamais frontalement le célèbre James Bond Theme, sauf au moment d’un épilogue très gratifiant. Vivre une nouvelle aventure de l’agent 007 comme si nous le découvrions pour la première fois : voilà le cadeau que nous offrent là Martin Campbell et ses producteurs.

 

© Gilles Penso

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ENTRETIEN AVEC UN VAMPIRE (1994)

Neil Jordan adapte avec sensibilité le roman d'Ann Rice et s'entoure d'un casting de premier ordre

INTERVIEW WITH THE VAMPIRE

1994 – USA

Réalisé par Neil Jordan

Avec Tom Cruise, Brad Pitt, Antonio Banderas, Stephen Rea, Christian Slater, Kirsten Dunst

THEMA VAMPIRES

Vampirismes et homosexualité ont toujours fait bon ménage, surtout depuis la publication de la nouvelle «Carmilla» de Sheridan le Fanu et ses nombreuses adaptations cinématographiques. Mais jusqu’alors, ce sont les femmes qui étaient généralement au cœur de ce motif récurrent. La donne a changé en 1976 avec la sortie du roman «Entretien avec un vampire» d’Anne Rice, dans lequel le sexe et le sang touchent cette fois-ci la gent masculine, même si cette fois-ci l’acte sexuel n’est jamais ouvertement narré. Ce récit sulfureux inspira à Sting l’une de ses plus belles chansons, «Moon Over Bourbon Street», mais il faudra attendre une vingtaine d’années pour que le livre devienne enfin un film. Le choix du réalisateur Neil Jordan semblait d’autant plus approprié que ce dernier avait déjà joué la carte de l’attirance physique ambiguë dans Crying Game, et s’était même laissé aller à mêler psychanalyse, érotisme larvé, contes de fées et loups-garous dans La Compagnie des loups.

L’intrigue d’Entretien avec un vampire démarre à San Francisco, de nos jours. Le journaliste Malloy (Christian Slater) y recueille les confidences de Louis (Brad Pitt), un homme mystérieux qui affirme être un vampire. Plusieurs heures durant, le reporter fasciné va écouter le récit incroyable de sa vie, structurant dès lors le film sous la forme d’un long flash-back. Louis raconte sa rencontre avec le vampire Lestat (Tom Cruise), son pacte, son initiation, ses premières extases, l’ivresse du sang puis ses doutes, ses déchirements, sa quête illusoire de la fraternité, ses affrontements avec la secte parisienne du Théâtre des Vampires et l’incurable solitude qui l’accompagne depuis des siècles.

Sex symbols masculins

La réussite du film repose en grande partie sur son casting, Jordan ayant choisi pour interpréter ses vampires quelques-uns des sex-symbols masculins les plus en vogue de l’époque, autrement dit Tom Cruise, Brad Pitt et Antonio Banderas. Suaves, ils campent chacun avec leur manière la surnaturelle androgynie qui fascina Louis lors de sa première rencontre avec Lestat, et que la romancière décrivait en ces termes : « C’était un homme de grande taille, au teint clair, à la chevelure blonde et abondante, aux mouvements gracieux, presque félins. » Au beau milieu de cet univers d’hommes brille la révélation du film, la toute jeune Kirsten Dunst, future vedette de Spider-Man, qui incarne avec beaucoup de sensibilité Claudia, une femme prisonnière dans le corps d’une fillette dont les rapports avec Louis sont également assez troubles. Esthétiquement, Entretien avec un vampire est une pure merveille, le gothisme du récit éclaboussant chaque élément visuel du film, des décors aux costumes en passant par la magnifique photographie de Philippe Rousselot. Signalons aussi le maquillage extrêmement subtil de Stan Winston qui fait apparaître sous la peau très pâle des vampires un lacis de veines discrètes. La seule réserve est finalement d’ordre musical. Car si la partition d’Elliot Goldenthal est de toute beauté, dommage que le tonitruant «Sympathy for the Devil» vociféré par Guns’n Roses au cours du générique de fin ait été préféré à l’envoûtante chanson composée par Sting.

© Gilles Penso

 

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THE X-FILES : REGENERATION (2008)

Ce second long-métrage dérivé de la cultissime série de Chris Carter lance les agents Mulder et Scully sur les traces d'un épouvantable traffic d'organes

THE X-FILES : I WANT TO BELIEVE

2008 – USA

Réalisé par Chris Carter

Avec Gillian Anderson, David Duchovny, Amanda Peet, Billy Connolly, Callum Keith Rennie, Mitch Pileggi, Xzbit, Adam Godley

THEMA MEDECINE EN FOLIE I POUVOIRS SURNATURELS

Six ans après la fin de la série X-Files, dix ans après un premier long-métrage pas spécialement enthousiasmant, ce X-Files régénération avait-il une quelconque légitimité ? Et surtout, que fallait-il en attendre ? Chris Carter ayant prouvé la diversité de son talent (notamment avec la série Millenium), Gillian Anderson s’étant efforcé de casser son personnage de Dana Scully à travers plusieurs longs-métrages éclectiques et David Duchovny ayant triomphé dans un rôle aux antipodes de celui de Fox Mulder grâce à la série Californication, on aurait pu attendre de ce nouveau long-métrage une totale révolution par rapport au concept initial. Or justement, la surprise de X-Files régénération provient de son indéfectible propension à revenir aux sources de la série. Surprenant, ce parti pris fait ressembler le film à un des meilleurs épisodes des trois premières saisons. La structure dramatique, l’enjeu et les rebondissements sont en effet très proches de ceux des récits imaginés par Carter et son équipe au début des années 90. D’ailleurs, comme pour effacer les erreurs de X-Files le filmX-Files régénération ne tient pas du tout compte de la thématique récurrente de la série (l’invasion insidieuse des extra-terrestres et le vaste complot gouvernemental) pour se concentrer sur une histoire inédite et autonome.

Lorsque le film commence, Carter profite de toute la latitude du format Cinémascope (un luxe qu’il n’avait évidemment pas sur le petit écran) pour aligner une foule d’agents du FBI dans un gigantesque paysage glacé, sous l’œil de plusieurs hélicoptères survolant lentement ce panorama presque surréaliste. Tous sont à la recherche d’une collègue fraîchement disparue, leurs seuls indices provenant d’un médium dont les visions permettent de faire avancer l’enquête. Convoqué en désespoir de cause, Fox Mulder n’accepte de reprendre du service qu’à une condition : refaire équipe avec Dana Scully. Celle-ci s’exécute avec d’autant moins de grâce que son poste de pédiatre l’accapare nuit et jour.

L'éternelle lutte entre la croyance et le scepticisme

Une fois de plus, Mulder et Scully opposent croyance et scepticisme, foi intrinsèque et rigueur scientifique, tandis que se profile au bout de l’enquête un épouvantable trafic d’organes à côté duquel les expériences du docteur Frankenstein ressemblent à des pâtés de sable. Par sa simplicité, sa sincérité apparente et sa nostalgie manifeste, X-Files régénération attire automatiquement la sympathie. Gillian Anderson n’a jamais été aussi belle, David Duchovny déborde une nouvelle fois de charisme, et de vraies scènes de tendresse entre eux nous sont enfin offertes. Car le facteur humain prime ici, au détriment du surnaturel qui, une fois n’est pas coutume, n’occupe pas le devant de la scène. Et si le sous-titre français, Régénération, laisse entendre une renaissance du concept (avec l’éventualité d’une nouvelle série de longs-métrages), le sous-titre original, I Want to Believe, a beaucoup plus de force. Non content de faire écho à une phrase culte de Fox Mulder (affichée tel un slogan au-dessus d’un poster représentant une soucoupe volante dans son bureau), il cristallise toute la thématique du film et toute la richesse du conflit intellectuel et moral opposant ses deux personnages principaux.


© Gilles Penso

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PREDATOR (1987)

Arnold Schwarzenegger réendosse la panoplie de Commando pour aller se frotter contre un extra-terrestre belliqueux

PREDATOR

1987 – USA

Réalisé par John McTiernan

Avec Arnold Schwarzenegger, Carl Weathers, Elpidoa Carrilo, Bill Duke, Jesse Ventura, Kevin Peter Hall, Sonny Landham 

THEMA EXTRA-TERRESTRESSAGA PREDATOR

La genèse de Predator est assez surprenante. L’idée du film serait née d’une blague absurde : un combat au sommet entre Rocky et E.T. ! Lorsque le concept d’un acteur musclé affrontant un alien fut pris un peu plus au sérieux, on envisagea une créature difforme, affublée d’un long cou, d’un faciès canin et d’un œil unique, tandis que le projet porta un temps le titre de « Hunter ». Le film ne prit sa forme définitive qu’avec l’arrivée du réalisateur John McTiernan, des scénaristes Jim et John Thomas, et du concepteur de la créature Stan Winston. Dans un rôle taillé sur mesure, Arnold Schwarzenegger incarne ici le major Dutch Schaeffer, un homme d’action, un soldat d’élite qui a combattu sous toutes les latitudes, à la tête d’un commando spécialisé dans les missions à hauts risques. Lorsque Predator commence, Dutch et ses hommes sont envoyés en Amérique latine pour sauver trois hommes, otages de la guerilla. Largués dans la jungle, ils exécutent leur mission, mais bientôt ils sentent rôder autour d’eux un ennemi inattendu, une créature invisible, féroce, silencieuse, d’une agilité et d’une puissance terrifiantes, qui entreprend de les détruire un à un. Venu d’une planète lointaine, ce prédateur a en effet choisi la Terre comme terrain de chasse et le commando comme gibier…

Etant donné qu’Arnold Schwarzenegger joue ici un rôle très similaire à celui qu’il tenait dans Commando, l’auto-dérision en moins, et comme en outre la première partie du film présente de fortes similitudes avec les Rambo qui triomphaient alors sur les écrans, Predator part d’emblée avec un sérieux handicap : celui du film d’actions guerrières musclé et stéréotypé à outrance. Mais ce serait oublier que le brillant John McTiernan, un an à peine avant son prodigieux Piège de cristal, se trouve derrière la caméra. Ici, l’affrontement entre l’homme et la bête prend une tournure incroyablement iconique, le salut de l’être humain semblant paradoxalement reposer sur sa capacité à évacuer son humanité pour redevenir une sorte de bête aux instincts primaires, et surtout pour faire de la forêt son allié – alors que la jungle était jusqu’alors représentée à ses yeux comme un obstacle. L’efficacité de la mise en scène repose souvent sur sa stylisation, notamment lorsque McTiernan joue sur les reports de mise au point, emploie des éclairages très graphiques, ou utilise les arrières-plans comme supports de suspense, un peu à la manière de John Carpenter dans La Nuit des masques.

« Aiguise-moi ça ! »

Les capacités de mimétisme du prédateur nous sont décrites par d’extraordinaires effets visuels signés Boss Film, et la créature elle-même est une grande réussite, malgré des attitudes et des postures souvent humanoïdes. Son faciès de crustacé et son armure tribale la transformeront illico en icône du cinéma de SF. C’est l’athlétique Kevin Peter Hall qui endosse le costume animatronique de l’extra-terrestre, après des essais non concluants effectués avec un jeune acteur belge nommé… Jean-Claude Van Damme ! S’il ne peut s’empêcher de glisser dans la bouche de Schwarzenegger quelques répliques gag pour le moins déplacées (la plus improbable étant sans doute « Aiguise-moi ça » adressé à un ennemi dans le ventre duquel il vient de planter un couteau !), le film évite tous les pièges de la caricature et ne se laisse pas tenter par la conventionnelle love story qu’on sentait pourtant poindre à l’horizon.


© Gilles Penso

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AMITYVILLE LA MAISON DU DIABLE (1979)

Un fait divers réel inspire cette histoire de maison hantée centrée sur le couple qu'incarnent James Brolin et Margot Kidder

THE AMITYVILLE HORROR

1979 – USA

Réalisé par Stuart Rosenberg

Avec James Brolin, Margot Kidder, Rod Steiger, Don Stroud, Murray Hamilton, John Larch, Natasha Ryan

THEMA FANTÔMES I SAGA AMITYVILLE

A la base d’Amityville la maison du diable, il y a un fait divers réel qui fit couler beaucoup d’encre au milieu des années 70. Le massacre d’une famille de six personnes aux alentours de New York et des phénomènes surnaturels observés sur les lieux du crime servirent ainsi de base à un roman signé Jay Anson, puis à un scénario de Sandor Stern mis en image par Stuart Rosenberg (Luke la main froide). Lorsque le film débute, nous apprenons que Ronald de Féo a abattu au fusil sa mère, son père, ses deux frères et ses deux sœurs pendant leur sommeil, dans la nuit du 12 au 13 novembre 1974. Un an plus tard, la maison coloniale de dix pièce où se déroula le drame est acquise pour le prix très attractif de 80 000 dollars par un jeune couple, George et Kathleen Lutz.

Peu superstitieux et parfaitement au courant de la tragédie passée, George emménage avec Kathy ainsi qu’avec les trois enfants que cette dernière a eu d’un précédent mariage, Matt, Greg et Amy. Mais bientôt, plusieurs incidents étranges assaillent cette famille tranquille, notamment un courant d’air glacial et une invasion de mouches. Les Lutz font appel à une poignée de religieux de leur connaissance, notamment leur tante Helena et le père Delaney, mais leur intervention ne fait qu’aggraver la situation. Toutes les nuits à 3h15, George doit affronter les forces qui veulent s’emparer de sa personnalité, tandis que sa fille Amy s’amuse avec Jody, un inquiétant ami invisible. Dépêchée sur les lieux, la police ne trouve aucune explication tangible à ces événements. Le soir du 28ème jour, pendant une tempête, la demeure maléfique se réveille pour un ultime déchaînement.

« D'après une histoire vraie »

Les faits authentiques qui servent de base au film lui assurèrent au moment de sa sortie une belle couverture médiatique, le producteur Samuel Z. Arkoff (partenaire de longue date de Roger Corman) affirmant avec un bel aplomb que tout ce qui est décrit dans le film – à l’exception de la scène du sang dégoulinant sur les murs et les escaliers – est réellement arrivé. L’« histoire vraie » est une formule à vrai dire commode et attractive. Le film bénéficie de l’interprétation solide de deux comédiens fort charismatiques, James Brolin (Capricorn One) et Margot Kidder (Superman) dans le rôle du couple Lutz. Le choix de l’aspect physique de la maison elle-même est fort judicieux, avec ses deux larges fenêtres allumées comme les grands yeux diaboliques d’un visage effrayant, tandis que la partition de Lalo Schifrin (Bullit, Mission Impossible), orchestrée en partie à l’aide de chœurs enfantins, sait créer l’inquiétude à maintes reprises. Malgré tous ces atouts, Stuart Rosenberg a tout de même raté une grosse partie de son entreprise. Chaque fois que l’angoisse s’installe et que le climat devient pesant, la scène se détend brusquement et l’ambiance est brisée, perdant tout son impact. Du coup, seules quelques rares séquences choc tiennent en éveil, comme l’éclat surprenant des yeux félins de l’invisible Jody dans la nuit, l’attaque des mouches, ou encore l’apparition du visage de George dans la cave. Le film eut cependant suffisamment d’impact pour traîner dans son sillage trois séquelles et un remake.
 

© Gilles Penso

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TOKYO ZOMBIE (2005)

Dans cette satire inspirée d'un manga de Yusaka Hanamuka, un excès de pollution provoque une invasion de morts-vivants dans la capitale japonaise

TÔKYÔ ZONBI

2005 – JAPON

Réalisé par Sakichi Sato

Avec Tadanobu Asano, Sho Aikawa, Erika Okuda, Arata Furuta, Hina Matsuoka, Satoshi Hashimoto, Masaki Miura

THEMA ZOMBIES

La parodie de films de zombies est un exercice d’autant plus délicat qu’Edgar Wright et Simon Pegg ont réalisé le chef d’œuvre du genre en 2003 avec Shaun of the Dead. Pour éviter de combattre dans la même catégorie, Sakichi Sato (qui fut notamment scénariste pour Takashi Miike) évite de se référer directement à l’œuvre de George Romero en adaptant le manga Tokyo Zombie de Yusaku Hanakuma. L’intrigue se situe à Tokyo, aux abords d’une usine d’extincteurs. Là, tous les habitants ont pris la mauvaise habitude de jeter leurs ordures, lesquelles s’accumulent jusqu’à atteindre les proportions d’une véritable montagne d’immondices, bientôt baptisée « Black Fuji ». Les vieux appareils électroménagers y côtoient les produits chimiques et même les cadavres gênants. Les ouvriers s’y débarrassent de leurs patrons tyranniques, les belles-filles y font enterrer (encore vivantes) leurs belles-mères envahissantes et les professeurs pédophiles y camouflent les corps de leurs jeunes victimes.

Au bout d’un moment, ce mélange peu catholique d’ordures diverses crée une réaction qui ranime les cadavres. Une horde de zombies surgit donc du Black Fuji et se met à attaquer les humains. Au milieu de la panique, deux collègues de travail excentriques, Mitsuo et Fujo, tentent de prendre la fuite. Le premier, chauve et autoritaire, est obsédé par l’art du ju-jitsu qu’il veut absolument enseigner au second, un abruti indécrottable affublé d’une improbable coupe afro. Persuadés que la Russie est la destination idéale pour deux lutteurs comme eux (« seuls les vrais hommes vont en Russie » déclare Mitsuo), nos deux pieds nickelés s’embarquent donc dans une camionnette et prennent la route, évitant les morts-vivants qui se massent un peu partout…

Pertes de rythmes et ruptures de ton

Pour que Tokyo Zombie déclenche les zygomatiques avec efficacité, il aurait fallu que l’univers comique créé par Sakichi Sato soit plus cohérent et mieux construit. Or ne sachant visiblement pas sur quel pied danser, le cinéaste hésite entre les gags bon enfant (à travers la relation très « buddy movie » des deux héros), les blagues franchement « limites » (le pédophile qui fesse avec délectation ses élèves, l’obsédé sexuel qui soulève la jupe d’une écolière zombie), le pastiche (la scène du supermarché qui évoque bien sûr Zombie) ou la satire sociale (dans toute la dernière partie du métrage). La mayonnaise ne prend pas vraiment, d’autant que le rythme manque de rigueur (une lacune difficilement pardonnable en matière de comédie) et que certaines scènes s’étirent inlassablement jusqu’à l’ennui. Au milieu du film, après un court dessin animé nous rappelant que le film s’inspire d’une œuvre graphique, la situation post-apocalyptique semble faire écho à Land of the Dead, car les nantis se sont réfugiés dans une pyramide ultra-moderne trônant au milieu d’une cité détruite, ont réduit les pauvres en esclavage et organisent des combats entre hommes et zombies pour se distraire. Mais une fois de plus, cette idée intéressante est gâchée par un cruel manque de péripéties et par des protagonistes laissant le spectateur parfaitement indifférent. Dommage, Tokyo Zombie était plein de belles promesses.

 

© Gilles Penso

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HULK REVIENT (1978)

Ce deuxième long-métrage tiré de la série à succès de Kenneth Johnson s'intéresse au caractère psychiatrique et mélodramatique de son héros à double visage

BRIDE OF THE INCREDIBLE HULK

1978 – USA

Réalisé par Kenneth Johnson

Avec Bill Bixby, Lou Ferrigno, Jack Colvin, Mariette Hartley, Brian Cutler, Diane Markoff, Duncan Gamble, Meeno Peluce

THEMA SUPER-HEROS I DOUBLES I SAGA HULK I MARVEL

Lancée au début de l’année 1978, la série L’Incroyable Hulk connut un succès retentissant grâce au savoir-faire indéniable de son créateur Kenneth Johnson. Non content de trouver deux acteurs idéaux pour personnifier le docteur Banner et son alter-ego rugissant (Bill Bixby et Lou Ferrigno), il sut se réapproprier la création de Stan Lee et Jack Kirby pour y apposer sa propre sensibilité, calquant la structure de chaque épisode sur celle du Fugitif et limitant – pour des raisons budgétaires – les fameuses métamorphoses à deux seulement par épisode. Du coup, la série entra dans une certaine routine sans toutefois perdre son charme et son pouvoir attractif auprès des téléspectateurs. Pour marquer le début de la seconde saison, Johnson décida de réaliser un téléfilm d’une heure et demie qui, à l’instar de celui qui inaugura la série en 1977, fut exploité au cinéma en Europe.

Si l’affiche française de Hulk Revient, exagérément emphatique, nous montre une créature verte démesurée emportant sous son bras sa blonde dulcinée, il faut probablement y voir une allusion tardive au King Kong de John Guillermin, car le scénario s’intéresse ici beaucoup plus aux personnages humains qu’aux monstres. Certes, les allusions aux grands classiques sont toujours présentes (Banner cite le roman « Docteur Jekyll et Mister Hyde » de Stevenson, le thème musical de Hulk puise son inspiration dans celui composé par Franz Waxman pour La Fiancée de Frankenstein) mais ce second téléfilm opte surtout pour une approche réaliste, voire mélodramatique. Ici, le docteur Banner débarque à Hawaï pour rencontrer le docteur Carol Fields (Mariette Hartley), une psychiatre et hypnothérapeute à la renommée mondiale qui pourrait, selon lui, l’aider à dompter le monstre qui sommeille en lui. Mais l’éminente scientifique vient de cesser ses activités. Frappée d’un mal incurable, elle s’efforce de lutter contre la maladie tout en profitant de ses derniers jours. Banner lui propose alors de lui apporter son aide. Combinant leurs expertises scientifiques, les deux médecins finissent par tomber amoureux…

Cauchemars et métaphores

Très porté sur la symbolique, Hulk Revient accumule les visions métaphoriques : la maladie de Carol prend la forme d’Indiens encerclant une caravane de cowboys, Banner s’imagine dans le désert face à un Hulk impressionnant qu’il essaye de capturer en vain, un cauchemar funeste montre la psychiatre embarquer dans un autocar vide conduit par une silhouette noire encapuchonnée… La romance, qui constitue le cœur du récit, n’est pas toujours traitée avec finesse. Certes, lorsque Carol observe avec mélancolie un petit garçon qui joue sur la plage (l’enfant qu’elle n’aura jamais) et que David lui demande spontanément de l’épouser, la scène est d’autant plus touchante qu’elle est inattendue. Mais la suite bascule quelque peu dans la mièvrerie, sertie dans des effets visuels kitsch qui ont bien mal passé le cap des années, et la fin larmoyante nous renvoie illico à celle de L’Incroyable Hulk réalisé l’année précédente, confirmant que ce pauvre docteur Banner n’a décidément pas de chance avec les femmes…

© Gilles Penso

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ERASERHEAD (1977)

Pour son premier long-métrage, David Lynch se lance dans une œuvre expérimentale aux allures de cauchemar éveillé

ERASERHEAD

1977 – USA

Réalisé par David Lynch

Avec Jack Nance, Charlotte Stewart, Allen Joseph, Jeanne Bates, Judith Anna Roberts 

THEMA ENFANTS I FREAKS I SAGA DAVID LYNCH

Diplômé de l’Académie d’Arts Plastiques de Philadelphie, David Lynch envisageait à l’origine une carrière de peintre, jusqu’à ce que l’idée d’un « tableau qui bouge » ne le mette sur la voie du cinéma. Après une poignée de courts-métrages expérimentaux, il s’attaquait à Eraserhead, fruit de cinq années de travail intensif dont le scénario demeure aujourd’hui encore une énigme. Marié puis abandonné par son épouse, Henry (Jack Nance), massif et maladroit, les yeux dans le vide, les cheveux coiffés en pétard, vit seul dans un appartement misérable rempli de bruits bizarres. Pour seule compagnie, il a un enfant-foetus monstrueux qui gémit sans cesse. Peu à peu, Henry sombre dans la démence. Il voit dans le radiateur une fille aux joues boursouflées qui chante « Au Paradis, tout est beau », il découvre de grands vers qui grouillent dans son appartement, il a une aventure avec sa voisine de palier… Sa folie va peu à peu pousser Henry à vouloir se débarrasser de son rejeton…

Avec son cortège d’images abstraites mais traumatisantes, sa logique hermétique et pourtant perceptible, ses personnages à la fois quelconques et étranges, Eraserhead restitue assez fidèlement les sensations que suscite un cauchemar. Ici, nous ne sommes pas si loin de l’épouvante surréaliste de Luis Buñuel et Salvador Dali, dont Le Chien andalou et L’Age d’or semblent avoir eu des répercussions sur cette « Tête à effacer ». David Lynch a donc pleinement réussi le caractère expérimental de son film. On peut, de même, saluer la qualité de sa photographie achrome, savamment contrastée, et de sa bande son particulièrement riche et complexe. Au-delà de ses qualités purement formelles, Eraserhead est une œuvre profondément troublante, en ce sens qu’elle met son spectateur mal à l’aise en lui donnant à voir des horreurs incompréhensibles et paradoxalement familières (le bébé qui gémit en permanence de manière lancinante, sa maladie douloureuse, sa mort épouvantable, les vers omniprésents chez Henry, le poulet qui saigne en gigotant pendant le repas). C’est la raison pour laquelle la vision du film est assez difficile pour qui ne s’y est pas préparé.

« L'Homme Labyrinthe »

L’exercice de style reste exemplaire, mais l’intérêt dramatique d’Eraserhead fait tout de même défaut. Sans protagonistes auxquels se rattacher, sans enjeux clairement définis, sans structure cohérente, le film s’apprécie comme un bel objet d’analyse dénué d’émotion intense ou de capacité d’implication réelle. Lorsqu’on lui affirme que le public a du mal à comprendre certains de ses films les plus abscons, dont Eraserhead est le chef de file, Lynch répond, un sourire en coin, « moi aussi, j’ai parfois du mal à les comprendre ! », avant d’ajouter : « Ce qui est intéressant, c’est que vous faites d’abord votre film dans votre tête, puis vous le tournez, vous le montez, vous le finalisez, et ensuite vous le lâchez dans la nature. Il vous quitte, part dans le monde, vit sa propre vie, et vous ne contrôlez plus rien. Si votre film porte des abstractions, il offre une infinité d’interprétations possibles. Or je reste persuadé que chacune d’entre elles est juste. » (1) Sorti en France après Elephant Man, le film fut rebaptisé Labyrinth Man par des distributeurs opportunistes et malins.

 

(1) Propos recueillis par votre serviteur en février 2007

© Gilles Penso

 

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LES MORTS-VIVANTS (1932)

Un an après Dracula, Bela Lugosi vient hanter ce film d'épouvante, pionnier d'une longue série de longs-métrages consacrés aux zombies

WHITE ZOMBIE

1932 – USA

Réalisé par Victor Halperin

Avec Bela Lugosi, Madge Bellamy, Joseph Cawthorn, Robert Frazer, John Harron, Brandon Hurst, George Burr

THEMA ZOMBIES

Premier d’une longue lignée de films d’épouvante consacrés aux morts-vivants, White Zombies prend naturellement pour cadre Haïti, terre du vaudou. Madeleine Short (Madge Bellamy) et Neill Parker (John Harron), un jeune couple américain, s’y rend avec l’intention de s’y marier. Mais Charles Beaumont (Robert Frazer), leur hôte, amoureux de Madeleine et repoussé par elle, fait appel à Murder Legendre (Bela Lugosi), un sorcier qui transforme les gens en zombies pour les muer en ouvriers esclaves travaillant ardemment mais d’un pas pesant dans sa plantation de sucre. Lorsque sa bien-aimée sera morte, puis ressuscitée sous la forme d’un zombie, Beaumont espère ainsi l’avoir toute à elle. Legendre lui confie donc une drogue prévue pour être discrètement versée dans un verre de vin. Mais le plan  machiavélique ne se passe pas exactement comme Beaumont l’avait prévu…

Les zombies sont donc ici d’anciens humains mués en esclaves sans âme, aux yeux fixes et aux gestes mécaniques, suite à l’absorption d’une simple goutte d’un liquide mystérieux, et à la confection d’une réplique miniature de leur corps dans une bougie taillée au couteau. Leur maquillage sobre mais franchement efficace est l’œuvre de Jack Pierce, créateur des monstres les plus célèbres du studio Universal. Le maître des zombies est l’inimitable Lugosi, les yeux fous, les traits livides, le sourire cynique et les mains crispées, superbe comme à son habitude, tout juste un an après le Dracula qui le rendit célèbre. Esthétiquement, le film de Halperin joue la carte de la curiosité, multipliant les surimpressions (les yeux de Lugosi menaçant la carriole des futurs mariés, l’image fantomatique de Madeleine apparaissant à son fiancé éploré) et les effets de volets (Madeleine à sa fenêtre et Neill assoupi sous une tente apparaissant chacun dans une moitié de l’écran).

L'apprenti-sorcier

Quand elle n’est pas saturée d’une musique puisée dans un stock de compositeurs variés (belle mais parfois envahissante et approximativement synchrone avec l’image, comme dans un film muet), la bande-son distille efficacement l’angoisse, via les cris terrifiants d’un vautour, le grincement des machines actionnées par les zombies, ou le concert des animaux de la nuit. Sous-tendue par une intrigue sentimentale à base de jalousie et d’amour frustré, cette habile histoire de morts-vivants se clôt au-dessus d’une falaise, sur laquelle est juché le magnifique château de Lugosi. Ce dernier, particulièrement photogénique, est tour à tour une peinture sur verre conçue par Howard A. Anderson (dont le fils allait vaillamment assurer la relève en dirigeant les effets spéciaux de La Machine à explorer le temps, Jack le tueur de géants et autre Les Évadés de la planète des singes) ou un vaste décor tourmenté créé par le directeur artistique Ralph Berger (qui œuvra sur divers Flash Gordon, Tarzan et Dick Tracy). Dans un mouvement collectif aveuglé, tous les zombies se jettent dans le vide au cours du climax, entraînant avec eux leur maître Lugosi, selon le schéma classique de l’apprenti-sorcier tué par ses propres créations.

 

© Gilles Penso

 

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ÉPOUVANTE SUR NEW YORK (1982)

Ne reculant devant aucun défi, le réalisateur Larry Cohen lâche sur la population un gigantesque serpent ailé issu de la mythologie aztèque

Q / THE WINGED SERPENT

1982 – USA

Réalisé par Larry Cohen

Avec Michael Moriarty, Candy Clark, David Carradine, Richard Roundtree, James Dixon, Malachy McCourt, Fred J. Scollary

THEMA REPTILES ET VOLATILES

L’idée d’Epouvante sur New York est née le jour où Larry Cohen, observant le Chrysler Building, imagina que cet immeuble aux formes étranges serait l’endroit idéal pour abriter un œuf de monstre. Six jours après, le scénario était écrit, l’équipe technique était prête à tourner, et le résultat à l’écran, comme on pouvait s’y attendre, s’avère franchement déroutant. Car Epouvante sur New York s’efforce de mixer deux genres à priori incompatibles : la comédie dramatique urbaine mâtinée de thriller, et le fantastique dans ce qu’il a de plus extravagant et de plus démesuré. D’un côté nous suivons les mésaventures de Michael Moriarty, excellent en pianiste jazz raté et en gangster minable aux prises avec ses complices d’un hold-up manqué et avec la police (cette dernière est représentée par ce bon vieux David Carradine qui, lui aussi, est des plus convaincants). De l’autre côté, nous découvrons un gigantesque reptile volant qui survole New York en toute liberté et y multiplie ses victimes avant de se réfugier sous le toit d’un building où il couve un œuf géant, tandis qu’un illuminé s’improvise grand prêtre du dieu Quetzalcoatl et écorche vif des adorateurs consentants.

A vrai dire, la mayonnaise ne prend pas facilement. La caméra à l’épaule en constant mouvement, les dialogues en partie improvisés par les comédiens, les décors et les éclairages minimalistes s’accordent mal avec la créature animée par David Allen et Randy Cook et avec les effets de mise en scène spectaculaires qui l’accompagnent. « La première idée du réalisateur était de montrer la créature très discrètement », nous explique Randy Cook. « On devait juste la voir traverser le ciel rapidement devant la caméra, ce genre de choses. Mais il a finalement eu envie de montrer le monstre plus précisément. » (1) D’un point de vue strictement technique, il faut avouer que le monstre ne s’intègre pas toujours de manière convaincante dans les prises de vues réelles, à cause de la synchronisation difficile entre ses mouvements et ceux des arrière-plans mobiles, et d’un mariage pas toujours heureux des lumières, les images rétro-projetées étant souvent trop pâles par rapport à la figurine.

Une œuvre hybride et bizarroïde

Malgré tout, de nombreux plans demeurent très impressionnants, notamment celui où le serpent volant heurte un tireur posté sur une nacelle de laveur de carreaux, ou encore celui dans lequel la tête gigantesque du monstre apparaît brusquement derrière David Carradine, en un clin d’œil manifeste au célèbre surgissement du requin derrière Roy Scheider dans Les Dents de la mer.  « Etant donné le petit budget dont nous disposions, le résultat n’est pas si mal », nous avouait David Allen. « Dommage que le scénario soit si confus à propos de cette créature. » (2)  Quant aux petits rôles, en particulier ceux qui se contentent de crier en voyant la créature, ce sont apparemment des comédiens amateurs à peine dirigés, et la crédibilité de leurs interventions s’en ressent. Bref, Epouvante sur New-York est une œuvre hybride et bizarroïde, mais qu’on ne peut s’empêcher d’apprécier pour son audace et son grain de folie, maîtres mots de l’œuvre générale de Larry Cohen.


(1) Propos recueillis par votre seviteur en mai 1999
(2) Propos recueillis par votre seviteur en avril 1998 

© Gilles Penso

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