STRIPPERS VS. WEREWOLVES (2011)

Des loups-garous, des strip-teaseuses et quelques guest stars sur le retour : un cahier des charges modeste et pleinement assumé

STRIPPERS VS. WEREWOLVES

2011 – GB

Réalisé par Jonathan Glendening

Avec Adele Silva, Billy Murray, Martin Compston, Barbara Nedeljakova, Sarah Douglas, Martin Kemp, Steven Berkoff, Robert Englund, Dominic Burns

THEMA LOUPS-GAROUS

En 2007, Robert Englund, anciennement Freddy Krueger d’Elm Street, mettait sa réputation d’horror star à contribution dans Zombie Strippers, une triviale zombie comedy. Quatre ans plus tard, il remet ça dans le britannique Strippers vs. Werewolves. Plutôt modestement d’ailleurs, sa présence n’y dépassant pas les trois ou quatre minutes dans le rôle d’un chef loup-garou incarcéré dans une geôle sinistre où lui rend visite l’actuel chef d’un clan de lycanthropes  gangsters.  Robert Englund n’est pas la seule guest-star de Strippers vs. Werewolves. S’y croisent aussi Sarah Douglas (la méchante Ursa des deux premiers Superman avec Christopher Reeve), Martin Kemp (l’un des Frères Krays), Lysette Anthony, Steven Berkoff, et même Billy Chainsaw, le rédacteur en chef du magazine Bizarre. Du beau monde donc, invités d’une farce pileuse qui lance ses hostilités dans le club de strip-tease Vixens. Là, au cours d’un effeuillage, une fille plante un stylo en argent dans l’œil d’un client qui s’avère être un loup-garou. Naturellement, les membres de sa meute hurlent vengeance, revanche qu’anticipe la propriétaire de l’établissement, celle-ci sachant à quel prédateur elle se frotte. Une complication dans le bon déroulement du différend : l’une des filles roucoule en compagnie de l’un des loups-garous ennemis. Comme un échantillon de « Roméo et Juliette »… 

Passablement idiot, bas du plafond ce script-là ? Certainement, mais le réalisateur semble l’assumer avec une absence totale de complexe, allant jusqu’au bout des scènes les plus exposées à une profonde débilité. Même pas peur du ridicule, surtout quand trois des strip-teaseuses, déguisées en chaperons rouges, tiennent en haleine un public d’une poignée de lycanthropes au moment de la pleine lune. L’occasion pour le réalisateur d’étaler des maquillages, davantage conçus pour le rire que pour le frémir, ceux-ci réduisant les créatures à truffes humides à leur plus élémentaire caricature. Amusant, ainsi que certaines tirades des dialogues. La plus savoureuse : « je te ferais si longtemps souffrir que ton permis de conduire aura le temps d’expirer ! »

Moyens réduits mais travail soigné

Tout conscient soit-il de la  portée limitée de son script, le réalisateur n’en porte pas moins une grande attention à la forme. Usage de l’écran divisé (jusqu’à trois cases !), inserts façon comics, éclairages étudiés, bande originale années 80 habilement compilée et intégrant opportunément le « Hungry like the wolf » de Duran Duran… En dépit de moyens réduits, la production soigne le travail dans ses moindres détails, réussissant à donner un certain lustre esthétique à un ensemble généralement voué au laxisme, surtout dans ce type d’exercice parodique. Le cinéphile sourcilleux aura, pour sa part, le loisir d’apprécier l’allusion à Lon Chaney (Le Loup-Garou d’Universal des années 40) par l’intermédiaire du nom du pénitencier où croupit Robert Englund. Le réalisateur et les deux scénaristes avouent aussi avoir semé moult références à Monster Squad et au Loup-Garou de Londres tout au long du récit et des répliques. Tout l’intérêt réside à les identifier !

© Marc Toullec

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AUX FRONTIERES DE L’AUBE (1987)

Kathryn Bigelow réinvente le mythe du vampirisme en puisant dans l'imagerie du western spaghetti

NEAR DARK

1987 – USA

Réalisé par Kathryn Bigelow

Avec Jenny Wright, Adrian Pasdar, Lance Henriksen, Bill Paxton, Jenette Golstein, Joshua Miller, Marcie Leads

THEMA VAMPIRES

Aux frontières de l’aube représente une étape importante dans la mesure où il propose un renouveau total du thème du vampirisme. Dès lors, les films abordant le mythe allaient se diviser en deux catégories : les « classiques » et les « modernes ». Certes, la démarche n’est pas inédite, et quelques œuvres phares comme Martin ou Soif de sang posaient déjà les jalons d’une approche hyper-réaliste des buveurs de sang, sans capes ni dents longues. Mais l’œuvre de Kathryn Bigelow a marqué les mémoires par son esthétisme magnifique et ses idées foisonnantes. Alors qu’il traîne en ville, Caleb Colton (Adran Pasdar), un jeune homme aux allures de cow-boy moderne, remarque une jeune fille qu’il tente d’aborder. Au fur et à mesure que la nuit s’étire, elle se fait de plus en plus mystérieuse. Son baiser se transforme en morsure. À l’aube, elle s’enfuit. Le jeune homme découvre alors son nouvel état… c’est un vampire ! Sauf que ce mot n’est jamais prononcé au cours du film, et que la trouvaille visuelle se passe de tout commentaire : tandis que le soleil se lève dans le ciel, le jeune homme faiblit, sa peau brunit et son corps exhale une fumée croissante…

Car ici, les vampires exposés au soleil sont victimes de douloureuses combustions spontanées, qui peuvent s’achever par de spectaculaires explosions incandescentes. John Carpenter s’en souviendra sans doute lorsqu’il réalisera son Vampires. Conscient qu’il vient d’être « converti » malgré lui au monde des non-morts, Caleb n’a plus qu’une alternative : rejoindre la jeune fille et le groupe de vampires auquel elle appartient, une bande de desperados crasseux et noctambules qui traversent les grands espaces de l’Oklahoma dans un van aux fenêtres soigneusement occultées pour éviter la lumière du soleil. Le film prend alors les allures de western sombre et violent, émaillé de séquences choc comme l’attaque sanglante du bar, et de véritables morceaux d’anthologie, notamment l’embuscade dans la chambre d’hôtel au cours de laquelle chaque impact de balle tirée par la police trace un rai de lumière qui menace de brûler la peau des hors-la loi vampires. 

Un air de famille avec James Cameron

Aux frontières de l’aube reflète aussi plus que tout autre film les similitudes entre les univers de Kathryn Bigelow et James Cameron, dont elle fut à l’époque l’égérie. Ce parallélisme s’affirme par le choix des comédiens, avec en tête un Lance Henriksen impérial et un Bill Paxton surexcité, par le choix d’une musique 100% synthétique, signée ici Tangerine Dream, et par certaines séquences clefs, notamment la poursuite en semi-remorque qui présente d’indéniables ressemblances avec celle de Terminator. Bref, Aux frontières de l’aube est une indiscutable réussite visuelle, narrative, dramatique et émotionnelle, qui se paye en plus le luxe d’offrir pour la première fois un remède imparable contre le vampirisme : une transfusion sanguine ! Il fallait y penser… Signe des temps, comme la plupart des œuvres « modernes » des années 80, le film de Bigelow est très marqué par l’époque à laquelle il fut réalisé, paré désormais d’une patine indélébile.

 


© Gilles Penso

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MONSTRO ! (2010)

Trois bad girls qu'on croirait échappées d'un film de Russ Meyer se retrouvent confrontées à un monstre marin tentaculaire

EL MONSTRO DEL MAR !

2010 – AUSTRALIE

Réalisé par Stuart Simpson

Avec Nelli Scarlet, Kyrie Capri, Karli Madden, Kate Watts, Norman Yemm, Scott Brennan, Steven Stagg, David Grannon

THEMA MONSTRES MARINS

Dix ans durant, à partir du milieu des années 70, le cinéma australien fut l’un des contributeurs les plus originaux, les plus novateurs du  fantastique. Le temps béni des Pique-nique à Hanging RockPatrickLong week-end et  Mad Max. Depuis, si le genre suscite encore des vocations, plus de  mouvement collectif, sinon des cas isolés, sporadiques, tel notablement Andrew Traucki via Dark Water et The Reef. Stuart Simpson peut-il prétendre avec Monstro ! insuffler à ce cinéma-là un sang neuf ? Négatif. Ce n’était d’ailleurs pas son intention. Son ambition : ficeler vaille que vaille une petite production décalée, sous influence avouée de Quentin Tarantino et en hommage aux séries B produites ou réalisées par Roger Corman. Pourtant, Monstro ! ne démarre justement pas comme un Roger Corman, mais plutôt manière Faster, Pussycat, Kill, Kill ! de Russ Meyer. Il en reprend les trois pétroleuses vachardes (deux brunes, une blonde), doublées de serial-killeuses tatouées.

Non sans avoir saigné deux automobilistes, Beretta, Blondie et Snowball débarquent donc dans un minuscule village de pêcheurs. Au programme du repos des guerrières : défonce, bière, rock’n roll et baignade. L’occasion pour le réalisateur de montrer qu’il connaît bien ses classiques : l’une de ses garces porte le même bikini que la pin-up Betty Page dans les années 50. Naturellement, les tueuses auraient dû déguerpir au plus vite, un vieux paralytique les ayant averties de la menace. Et quel danger ! Une créature tentaculaire apparentée au Kraken de la mythologie… Lequel monstre assiège bientôt les survivants (deux des vilaines, le vieux et sa fille) reclus dans une cabane. Le climax d’un spectacle qui ne perd guère de temps en palabres, le film ne durant que le strict nécessaire : une heure quinze, générique de fin compris. Précisément comme les Roger Corman auxquels il se réfère. Le minutage d’un puriste.

Un Kraken old school

Autre preuve de l’orthodoxie de Stuart Simpson : des effets spéciaux rustiques. Plutôt que le très pratique tout numérique, désormais accessible à tous (y compris aux plus fauchés), il opte pour des trucages à l’ancienne, du caoutchouc, du latex, une petite équipe d’opérateurs pour les tentacules du Kraken… Un brin anachronique, mais encore assez efficace, pas si mal fait pour un projet dont le budget ne doit pas excéder les 100.000 $. Une somme pour l’essentiel visiblement investie dans la créature des profondeurs et quelques mignardises horrifiques, elles aussi sur le mode vintage. Pur exercice de style construit sur l’autel d’une cinéphilie fervente, Monstro ! aurait cependant gagné à des personnages moins stéréotypés, incarnés par des comédiennes plus douées. Celles-ci sont carrément catastrophiques à imiter le jeu de Tura Satana et autres interprètes sévèrement bustées de Russ Meyer. Deux bonnets au-dessous, elles n’altèrent cependant pas le plaisir passablement coupable qu’on peut prendre à ce drôle de petit film qui ne peut vraiment fonctionner qu’auprès d’un public de connaisseurs. Les seuls aptes à beaucoup lui pardonner.

 

© Marc Toullec

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BATTLESHIP (2012)

Le jeu de la bataille navale (touché, coulé !) sert d'inspiration à cette épopée de science-fiction balourde qui cherche à retrouver l'esprit des blockbusters de Michael Bay

BATTLESHIP

2012 – USA

Réalisé par Peter Berg

Avec Taylor Kitsch, Rihanna, Liam Neeson, Alexander Skarsgard, Brooklyn Decker, Tadanobu Asano, Hamish Linklater

THEMA EXTRA-TERRESTRES

D’ordinaire, Peter Berg est un réalisateur assez fréquentable. Il fut entre autres à l’initiative de Friday Night Lights (le film et la série), plongeon réaliste dans les coulisses du football américain universitaire, et aux commandes de Hancock, dynamitage culotté de l’univers des super-héros. Mais pourquoi diable a-t-il décidé de mettre sa personnalité et son savoir-faire au service d’un projet tel que Battleship ? Quel est l’intérêt artistique d’un film dont le cahier des charges consiste à reproduire le plus fidèlement possible les blockbusters de Michael Bay ? Car il n’est pas difficile d’y trouver, reproduits quasiment à l’identique, les séquences et les effets de style les plus voyants d’Armageddon, Pearl Harbor et de la trilogie Transformers.

Tout y est : la glorification emphatique de l’armée américaine, la bande originale synthético-symphonique de Steve Jablonsky, les titanesques machines extra-terrestres qui se déplacent à la vitesse de l’éclair pour tout ravager avec fracas, les buildings décapités qui s’effondrent sur la foule paniquée, les navires militaires qui chavirent sous les tirs nourris ennemis, la bimbo sculpturale qui titille le garçon turbulent dont l’héroïsme et le courage sauveront finalement le monde… Le travail de photocopie est minutieux, et la pratique du jeu des comparaisons peut s’avérer distrayante quelques minutes. Mais pour le spectateur, au-delà de la gratification pyrotechnique que suscitent les prodigieux effets visuels concoctés par les petits génies d’ILM, l’intérêt d’un tel spectacle reste très mineur. Le sujet se résume d’ailleurs en quelques lignes : au large d’Hawaï, en plein océan Pacifique, des vaisseaux extra-terrestres émergent des eaux pour coloniser la Terre et se heurtent aux fiers bâtiments de l’US Navy, dernier rempart contre l’invasion…

Rihanna et Liam Neeson en militaires improbables

Quand on sait que Battleship est né de l’envie d’Hasbro de produire un film dans la veine des Transformers en s’inspirant cette fois-ci des jouets de bataille navale dont raffolent les bambins depuis les années 30, on se doute bien que le scénario assurera le minimum syndical. Du côté des comédiens, la prestation est à l’unisson. Taylor Kitsch (simultanément en tête d’affiche de John Carter) cabotine dans le rôle du bad boy qui se repent, Brooklyn Decker assure une fonction de potiche totalement assumée (dans la droite lignée de Megan Fox et Rosie Huntington-Whiteley, les « Transformers Girls »), la chanteuse Rihanna fait ses débuts à l’écran en jouant l’archétype de la soldate dur à cuire et Liam Neeson paie ses impôts en incarnant sans trop y croire l’amiral autoritaire à la tête des grandes manœuvres. Aucun des lieux communs inhérents au genre n’est oublié, avec comme point d’orgue l’intervention des vétérans de la flotte américaine qui débarquent comme la cavalerie et se mettent à marcher au ralenti, le sourcil froncé, le pas assuré et la moustache frémissante, sous le regard humide de l’ensemble du casting. Battleship ne nous épargne quasiment rien en matière d’emphase patriotique, sauf le discours du président des Etats-Unis galvanisant les troupes, sans doute parce que le cinéma de Roland Emmerich n’était pas inscrit dans la liste des films à imiter. 

© Gilles Penso

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AFTER HOURS (1985)

Martin Scorsese nous raconte la nuit sans fin d'un homme pris dans les mailles inextricables d'un enchaînement d'événements incontrôlables…

AFTER HOURS

1985 – USA

Réalisé par Martin Scorsese

Avec Griffin Dunne, Rosanna Arquette, Verna Bloom, Tommy Chong, Linda Fiorentino, Teri Garr, John Heard, Cheech Marin 

THEMA CONTES

En 1985, Martin Scorsese est au plus mal. Le tournage de La dernière tentation du Christ, projet qui lui tient à cœur, vient d’être avorté, les producteurs frileux de la Paramount ayant retiré leurs billes par peur du scandale. Le réalisateur frustré et déçu parle même de mettre un terme à sa carrière, et est animé par une rage de tourner sans limites. Cette rage s’exprimera à plein régime dans After Hours, objet filmique non identifié totalement hybride dans son œuvre. Il y gagnera le prix de la mise en scène à Cannes. Nous nous retrouvons immergés dans la folle nuit d’un informaticien timide, Paul Hackett (le trop rare Griffin Dunne, ici dans le rôle de sa vie), qui rencontre une beauté fatale, Marcy (hypnotisante Rosanna Arquette) et se retrouve ainsi entraîné dans des péripéties aussi absurdes qu’inextricables. Scorsese est déchaîné, sa caméra en mouvement constant, épaulé par un montage au cordeau et un thème entêtant d’Howard Shore. Dès le début, nous épousons totalement le point de vue de Paul et ne le quitterons plus. Impossible pour cet antihéros (et donc pour nous, spectateurs) de regagner un sécurisant domicile, Soho et sa faune bigarrée le happant pour ne plus le lâcher. Scorsese a d’ailleurs tourné le film entièrement de nuit, même les scènes en intérieur, par souci de réalisme. Le New York que traverse Paul ressemble à celui de Taxi Driver, inquiétant et peuplé de personnages pittoresques, mais en version décalée. La référence au Magicien d’Oz faite au détour d’un dialogue est à ce sujet assez parlante. Paul EST Dorothy, personnage innocent perdu loin de chez lui, plongé dans un rêve semi-éveillé pouvant passer de l’euphorie au cauchemar en un éclair, et qui n’aspire au final qu’à rentrer à la maison. Il croise sur sa route des protagonistes étranges qui vont le guider dans sa quête ou lui mettre des bâtons dans les roues, le tout dans une atmosphère chimérique.

Le motif de la tornade qui aspire Dorothy est ici repris dans une construction en spirale délibérément répétitive, où le personnage principal n’a de cesse de repasser dans les mêmes endroits et de croiser les mêmes personnes, toutes subtilement reliées entre elles, sans pour autant sembler progresser, constamment acculé (un insert montre même un rat brusquement pris dans un piège). Partant de cette subtile analogie et pervertissant le conte pour enfant (la motivation première de Paul est sexuelle, il lit même Tropique du cancer d’Henry Miller, écrivain obsédé par le vice), le film pratique avec délice la rupture de ton perpétuelle, tantôt hilarant (les répliques sont cultes, surtout en vf), tantôt effrayant (la traque menée par les voisins en colère), provoquant comme par accident la situation triviale qui dérape (on pense à Hitchcock et Polanski), cherchant le détail qui intrigue ou dérange. La différence majeure avec Le Magicien d’Oz est l’extrême solitude de Paul, qui, bien que très entouré du début à la fin de l’histoire, ne parvient jamais à se faire entendre ou à susciter une quelconque compassion chez les autres, trop préoccupés par leurs propres soucis ou verrouillés dans leurs névroses (thématique reprise plus tard de façon détournée par Coline Serreau dans La Crise).

 

Ultime pirouette

Le sujet profond du film se révèle alors : l’impossibilité de communiquer avec l’Autre. Chaque nouvelle rencontre se solde par un cuisant échec dans le dialogue, un malentendu. La non écoute mutuelle ne peut déboucher que sur du négatif et de la frustration. La seule respiration pour notre informaticien (qui sait parfaitement expliquer le fonctionnement de programmes complexes à un tiers mais n’arrive pas à faire passer ses émotions et envies avec des mots) n’arrivera que sur le tard, dans une magnifique scène de danse muette avec une mystérieuse dame âgée. Là, en suspens, sur le tempo lancinant de « Is that all there is » de Peggy Lee (chanson sur l’insatisfaction et la désacralisation),  sans se parler, deux solitudes s’unissent et se comprennent enfin… Jusqu’à ce que la folie des habitants du quartier les rattrape et vienne tout briser. Paul se retrouve alors piégé une fois de plus, cette fois-ci littéralement statufié dans son incompréhension, par cette dame qui veut enfermer avec lui ce précieux instant de complicité et le conserver pour toujours. Une ultime pirouette absurde le libérera, hirsute, épuisé et recouvert de blanc, tel un clown triste, et le relâchera dans son monde rassurant au lever du jour. Aura-t-il retenu les leçons de son expérience nocturne ou persistera-t-il malgré tout dans son aveuglement ? Libre à chacun d’imaginer sa réponse, la caméra de Scorsese est déjà repartie à toute vitesse, virevoltant de plus belle au beau milieu de la vacuité des bureaux et des ordinateurs, laissant notre héros loin, loin derrière… 

© Julien Cassarino

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HUNGER GAMES (2012)

Le réalisateur de Pleasantville adapte le roman à succès de Suzanne Collins et livre un film routinier aux forts relents de déjà-vu

HUNGER GAMES

2012 – USA

Réalisé par Gary Ross

Avec Jennifer Lawrence, Josh Hutcherson, Liam Hemsworth, Woody Harrelson, Elizabeth Banks, Lenny Kravitz, Stanley Tucci

THEMA FUTUR I SAGA HUNGER GAMES

Malgré son origine littéraire, en l’occurrence la trilogie « Hunger Games » écrite par Suzanne Collins et publiée avec un grand succès à partir de 2008, le troisième long-métrage de Gary Ross se démarque à grand-peine d’un riche passif filmique au sujet voisin. Il est en effet difficile d’apprécier Hunger Games sans penser tour à tour à Punishment Park, Rollerball, Le Prix du danger, Les Traqués de l’an 2000 ou Battle Royale, pour n’en citer qu’une poignée. Mais si les films de Peter Watkins, Norman Jewison, Yves Boisset, Brian Trenchard-Smith et Kinji Fukasaku partagent de nombreuses thématiques, ils possèdent chacun leur propre personnalité et véhiculent les idées radicales de cinéastes au caractère bien trempé. On ne peut pas vraiment en dire autant de Hunger Games, malgré tout le bien qu’on pense du réalisateur de Pleasantville. L’idée initiale, celle qui inspira les livres de Collins, fut de mixer le sensationnalisme de la télé-réalité avec le mythe de Thésée (notamment le sacrifice de jeunes gens jetés en pâture au Minotaure dans le labyrinthe du roi Minos). Nous sommes donc dans une cité futuriste, l’ex-Amérique du Nord. La nation de Panem est désormais divisée en douze districts où le peuple survit péniblement dans une société qui semble avoir régressé jusqu’au moyen âge.

Seule la capitale est peuplée de nantis et de riches oisifs qui se repaissent d’un jeu cruel et spectaculaire : les « Hunger Games » (autrement dit « les jeux de la faim »). Le principe à consiste à tirer au sort annuellement un couple de jeunes citoyens par district. Ces 24 « tributs » doivent s’affronter dans une forêt hostile, en s’aidant d’armes disséminées sur le terrain et de vivres chichement distribuées par d’éventuels sponsors. Un seul d’entre eux doit survivre. Tous les coups sont donc permis. Une fois ce contexte posé, le récit s’intéresse à la jeune Katniss (Jennifer Lawrence), qui se porte volontaire pour prendre la place de sa sœur cadette et se jette donc dans la fosse aux lions, face à des adversaires impitoyables et surentraînés. Ses seuls atouts : une détermination d’acier, une dextérité hors norme dans le maniement de l’arc, et la loyauté de son compagnon d’infortune Peeta (Josh Hutcherson).

Des choix artistiques discutables

Le sentiment de déjà vu, omniprésent, s’adjoint à des choix artistiques discutables. Visiblement en quête de prises de vues brutes et dynamiques, Gary Ross abuse ainsi d’une caméra portée (ou plutôt tremblée) et d’un surdécoupage nerveux (même dans les scènes les plus anodines) qui sont d’une efficacité toute relative. Sans compter ces visions grotesques de la capitale où cohabitent costumes bariolés, visages fardés et perruques fluorescentes, comme si la cour de Louis XVI et les années 80 avaient fusionné en un mixage contre-nature. Voir Stanley Tucci jouer les présentateurs TV hilares avec une moumoute bleue sur le crâne est un spectacle pour le moins consternant. En guest stars, Woody Harrelson et Donald Sutherland assurent quant à eux le service minimum. Hunger Games se rattrape partiellement grâce aux nombreuses séquences situées pendant le jeu lui-même, et au cours desquelles le suspense est souvent intense. Dommage que l’ensemble du film ne soit pas à l’avenant.

© Gilles Penso

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LES IMMORTELS (2011)

Le futur Superman de Zack Snyder incarne Thésée dans cette interprétation libre de la mythologie grecque

IMMORTALS

2011 – USA

Réalisé par Tarsem Singh

Avec Henry Cavill, Mickey Rourke, Stephen Dorff, Freida Pinto, Luke Evans, John Hurt, Isabel Lucas, Kellan Lutz, Joseph Morgan 

THEMA MYTHOLOGIE

C’est le succès de 300 qui présida à la naissance du projet Les Immortels. Soucieux de retrouver les ingrédients qui composèrent l’épopée de Zack Snyder, les producteurs Mark Canton et Gianni Nunnari se penchèrent vers la mythologie grecque, remise au goût du jour par le remake du Choc des Titans, et engagèrent un réalisateur au style visuel très marqué, en l’occurrence Tarsem Singh (The Cell). Les Immortels partage ainsi avec 300 les combats sanglants privilégiant les actions au ralenti, le courage sans faille de guerriers galvanisés face à un agresseur mille fois plus puissant, les muscles bombés, les décors aux allures de peintures de la Renaissance, les effets visuels omniprésents et le basculement dans le fantastique pur. Tarsem cherche malgré tout à s’approprier le matériau légendaire de manière suffisamment personnelle pour y injecter des éléments autobiographiques. Ainsi les rapports complexes qu’il entretient avec la foi religieuse (il est athée alors que sa mère a toujours prié avec ferveur pour sa réussite) se retrouvent-ils injectés respectivement dans le personnage de Thésée et de sa génitrice.

L’une des meilleures idées du film consiste à avoir confié à Mickey Rourke le rôle du sanguinaire roi Hyperion. Révolté contre les dieux qui ont laissé périr sa famille, ce colosse sans foi ni loi, à la tête d’une armée impitoyable, a décidé de libérer les Titans, enfermés au cœur du Mont Tartare, afin de faire chuter l’Olympe et de régner sur l’humanité. Chacune des apparitions de l’ancienne star d’Angel Heart fait froid dans le dos, sa voix caverneuse, sa corpulence impressionnante et son regard noir magnétisant immédiatement les spectateurs tout en suscitant un climat de menace sourde et palpable. Face à lui, Henry Cavill ne démérite pas dans la peau de Thésée. Transfuge de l’excellente série Les Tudors, il prête son physique sculptural au valeureux héros, un rôle qui constituera le starting-block de sa future prestation dans Man of Steel réalisé par… Zack Snyder justement.

Où sont les monstres ?

Souvent somptueux d’un point de vue graphique (et aussi musical par l’entremise de la puissante partition cuivrée de Trevor Morris), Les Immortels aborde l’histoire de Thésée en évacuant ses aspects les plus classiques. Les monstres et merveilles inhérents à la mythologie grecque se voient ainsi réserver la portion congrue, comme ces Titans visualisés ici sous forme de simples guerriers humanoïdes se distinguant simplement par une vitesse d’action inhabituelle et des grognements bestiaux, ou le fameux Minotaure qui n’est plus ici qu’un lutteur bodybuildé affublé d’un casque métallique en forme de tête de taureau ! Quant au labyrinthe de Minos et à la douce Ariane, ils brillent ici par leur absence. Ces écarts avec le mythe initial ne seraient guère rédhibitoires si Tarsem Singh n’avait osé doter les dieux de l’Olympe d’attributs aussi grotesques. Comment ne pas sourire face à ces post-ados épilés de près aux pectoraux gonflés, coiffés de casques improbables et dotés de pouvoirs de super-héros ? Les Immortels ne convainc donc qu’à moitié, mais il rachète ses maladresses narratives et artistiques par quelques fulgurances sublimement lyriques.

© Gilles Penso

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TWIXT (2012)

Francis Ford Coppola revient au fantastique minimaliste de ses débuts en dirigeant un Val Kilmer étonnamment touchant

TWIXT

2012 – USA

Réalisé par Francis Ford Coppola

Avec Val Kilmer, Bruce Dern, Elle Fanning, Ben Chaplin, Joanne Whalley, David Paymer, Anthony Fusco, Alden Ehrenreich 

THEMA VAMPIRES

Avec Twixt, Francis Ford Coppola s’est mis à nu. Une équipe réduite à son strict minimum, un budget restreint, un tournage de sept petites semaines cantonné principalement à son domaine vinicole : c’est dans un dénuement manifeste que le réalisateur d’Apocalypse Now et Le Parrain a conçu ce conte fantastique douloureusement empreint d’autobiographie. De son propre aveu, c’est la mort de son fils dans un accident nautique qui poussa Coppola à écrire, produire et réaliser Twixt, comme pour exorciser le fantôme d’une culpabilité lancinante. Un sentiment de malaise nous saisit fatalement face à ce film sans doute trop impudique, qui semble avoir plus été imaginé pour ses vertus thérapeutiques que pour son potentiel cinématographique. Le cinéaste efface d’ailleurs tous ses effets de mise en scène, limitant au maximum les mouvements de caméras, dirigeant ses comédiens avec minimalisme, ne sollicitant qu’avec parcimonie les multiples atouts de la grammaire filmique.

Dans le rôle d’un alter ego imaginaire de Coppola, Val Kilmer, plus bouffi que jamais, incarne Hall Baltimore, un écrivain sur le déclin qui s’est spécialisé dans les romans de sorcellerie. Désabusé, l’homme débarque dans une petite bourgade des Etats-Unis pour une séance de dédicace pathétique au fond d’une épicerie presque déserte. Parmi les autochtones, Baltimore a tout de même un fan : le shérif Bobby Lagrange (Bruce Dern). Ce dernier lui propose de s’associer à lui pour écrire à quatre mains un nouveau roman baptisé « L’exécution du vampire », en s’inspirant du meurtre récent d’une jeune fille de la région. Endetté, en perte d’inspiration, l’écrivain finit par accepter… La mécanique narrative, le protagoniste principal et le cadre de l’intrigue évoquent bien vite Stephen King, une référence qui semble assumée par l’entremise d’une des répliques du film. Mais dès que Twixt bascule dans le fantastique – autrement dit lorsque Hall Baltimore s’endort et se laisse bercer par la magie inquiétante des lieux – Coppola semble revenir à ses premières amours.

Le fantôme d'Edgar Poe

De fait, Twixt évoque moins Dracula que les œuvres d’épouvante que Roger Corman réalisa dans les années 60, et auxquelles Coppola participa en tant que réalisateur de seconde équipe, dialoguiste ou co-réalisateur officieux (L’Enterré vivant, L’Halluciné, La Malédiction d’Arkham). Les nombreuses séquences oniriques de Twixt regorgent d’images fortes, comme ce clocher démoniaque orné de sept cadrans désynchronisés, les apparitions éthérées d’une jeune fille blafarde incarnée par Elle Fanning, ou l’intervention récurrente d’Edgar Allan Poe en personne (incarné par Ben Chaplin), lequel renforce davantage le lien entre Twixt et les premiers pas de Coppola aux côtés de son mentor Roger Corman. La démarche du long-métrage est donc sincère, et la volonté de retrouver l’essence d’un début de carrière encore balbutiant franchement courageuse. Mais s’il ne portait pas la signature de Francis Ford Coppola, il y a fort à parier que Twixt serait passé totalement inaperçu. Son approche anecdotique du thème du vampirisme, ses partis pris esthétiques douteux et sa trame filiforme n’ont en effet rien de particulièrement mémorable.

© Gilles Penso

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LA CABANE DANS LES BOIS (2012)

Un hommage à tout un pan du cinéma d'épouvante qui commence comme un plagiat d'Evil Dead avant de révéler des ramifications inattendues…

CABIN IN THE WOODS

2012 – USA

Réalisé par Drew Goddard

Avec Kristen Connolly, Chris Hemsworth, Anna Hutchison, Fran Kranz, Jesse Williams, Richard Jenkins, Bradley Whitford 

THEMA DIABLES ET DEMONS

Cinq amis décident de passer le week-end dans une vieille cabane isolée au milieu de la forêt. Après avoir brièvement croisé un autochtone patibulaire puis traversé un sentier sinueux, ils découvrent l’antique maisonnette, ornée d’une tête d’animal empaillée, d’un vieux piano, d’un mobilier séculaire, et jouent à se faire peur. Le soir venu, une trappe s’ouvre brutalement, comme mue par une force surnaturelle. Elle révèle une cave enfouie d’objets hétéroclites, dont un vieux grimoire qui renferme une incantation. Lorsque cette dernière est lue à voix haute, des créatures maléfiques se réveillent, et la terreur s’empare du petit groupe, d’autant que le seul chemin qui leur permettait de s’échapper s’effondre soudain… Ce petit résumé vous semble-t-il familier ? Normal, c’est le même que celui d’Evil DeadLa Cabane dans les bois serait-il donc un plagiat éhonté du chef d’œuvre de Sam Raimi ? On pourrait le croire, d’autant que Drew Goddard utilise parfois les mêmes angles de vue que son aîné, les mêmes bruitages, les mêmes cadrages… Pourtant, dès les premières minutes du métrage, le spectateur sent bien que quelque chose ne tourne pas rond. Qui sont ces scientifiques massés dans un grand bâtiment, observant les moindres faits et gestes de nos cinq jeunes protagonistes à l’aide d’une multitude de caméras dissimulées partout sur les lieux de leur week-end ? Seraient-ils l’objet d’une obscure expérience scientifique, à la façon des cobayes de Cube ? A moins qu’il ne s’agisse d’un sordide jeu de téléréalité, version sanglante du Truman Show ?

La surprise est savamment entretenue, jusqu’à un climax hallucinant qui convoque une mythologie chère à H.P. Lovecraft et donne à cette anecdotique mésaventure des dimensions planétaires, quasi-métaphysiques. La dernière bobine du film bascule dans le délire total, en un foisonnant hommage aux classiques du genre (Zombie, Hellraiser, Ça, Poltergeist, Shining, The Grudge et de nombreux autres). La Cabane dans les bois digère et restitue ainsi trente ans de cinéma horrifique. Mais cette approche post-moderniste ne se contente pas d’accumuler les références. Car le scénario nous propose une relecture de la plupart des films d’horreur bâtis sur le même schéma narratif (un groupe d’amis passe le week-end dans un endroit isolé qui vire au cauchemar).

L'explication des clichés du genre

Tous les lieux communs, tous les clichés, tous les stéréotypes inhérents au genre trouvent ainsi une explication rationnelle. Producteur et scénariste du film, Josh Whedon prouve ainsi qu’il n’est pas seulement un auteur (Toy Story) et un réalisateur (Avengers) de talent, mais aussi un homme en quête de concepts inédits et culottés (une série télévisée comme Dollhouse en témoigne sans conteste). En s’associant au réalisateur Drew Goddard, il trouve un alter ego idéal, son compère ayant rédigé de nombreux scripts pour Buffy contre les vampiresAngelLost et le long-métrage Cloverfield. Les effets de montage parallèle, induits par la rupture narrative établie entre les deux univers décrits dans le récit, ajoutent à La Cabane dans les bois un charme supplémentaire, achevant d’en faire l’une des meilleures surprises de l’année 2012.

© Gilles Penso

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SUR LA PISTE DU MARSUPILAMI (2012)

Alain Chabat déclare une fois de plus sa flamme aux BD de son enfance, même s'il reste très éloigné de l'esprit de Franquin qui lui sert ici de modèle

SUR LA PISTE DU MARSUPILAMI

2012 – FRANCE

Réalisé par Alain Chabat

Avec Alain Chabat, Jamel Debbouze, Fred Testot, Lambert Wilson, Patrick Timsit, Géraldine Nakache, Liya Kebede 

THEMA EXOTISME FANTASTIQUE

Le triomphe d’Astérix et Obélix : Mission Cléopâtre n’en finit plus de faire des émules. Fascinés par l’objet de culte que le film d’Alain Chabat représente, de nombreux réalisateurs et producteurs français ont tenté d’en retrouver les ingrédients et l’alchimie, notamment Patrick Braoudé avec son très anecdotique Iznogoud, Frédéric Forestier et Thomas Langmann avec le catastrophique Astérix aux Jeux Olympiques ou même Luc Besson avec le maladroit Les Aventures d’Adèle Blanc-Sec. Chabat lui-même s’efforce de retrouver les clefs de son succès en s’attaquant au Marsupilami d’André Franquin, et en toute logique c’est lui qui s’en sort le mieux. Il faut dire que le projet trotte dans la tête de l’ancien Nul depuis un bon bout de temps. « Je suis en train d’écrire une comédie d’aventure familiale en anglais avec le Marsupilami », nous disait-il en janvier 2007. « Comme vous le voyez, c’est encore un projet d’une grande maturité. J’ai toujours l’impression de faire des films pour enfants. En tout cas pour le môme que j’étais. On pourrait dire que je travaille pour un spectateur qui est moi-même plus jeune. » (1) Ce rêve d’enfant aura mis cinq ans pour se concrétiser, sous forme d’une production finalement francophone. Et comme on n’est jamais mieux servi que par soi-même, Chabat s’octroie le rôle principal, aux côtés de Jamel Debbouze, qui fut déjà son complice d’Astérix et Obélix : Mission Cléopâtre.

Le premier incarne Dan Geraldo, journaliste télévisé en perte de vitesse qui cherche un scoop susceptible de relancer sa carrière, tandis que le second entre dans la peau de Pablito, un faux vétérinaire qui s’improvise guide touristique de Palombie, un pays imaginaire d’Amérique centrale. La rencontre des deux hommes est explosive – sur un principe quelque peu hérité des comédies de Francis Veber – et les mène tout droit sur la piste d’un animal légendaire connu sous le nom de Marsupilami. Or cette créature existe réellement, et attire bien des convoitises… Le marsupial à longue queue imaginé en 1951 par le génial Franquin prend ici corps grâce aux coups de baguette numérique du studio Buf. Techniquement, le résultat est irréprochable. Artistiquement, c’est plus discutable. Car la bête facétieuse qui s’agitait dans les pages de Spirou Magazine se retrouve ici affublée d’une bouille de peluche trop mignonne pour convaincre.

Un film trop consensuel ?

Et c’est sans doute le problème du film tout entier. S’il respecte les élans écologistes du père de Gaston Lagaffe, le scénario de Chabat est trop gentil, trop consensuel, trop savamment calculé. L’humour référentiel fonctionne toujours (Lambert Wilson est irrésistible en dictateur amoureux de Céline Dion, le clin d’œil furtif à Avatar fait mouche) et le duo vedette séduit par son abatage, mais le film se traîne et témoigne d’une certaine paresse, corolaire possible d’une trop grande confiance de Chabat et de son équipe. Tout le monde semble bien s’amuser sur le plateau, mais ce rire n’est pas toujours communicatif. Patrick Timsit en fait des caisses, Géraldine Nakache ne sert à rien, Fred Testot cabotine à outrance, et le film n’en ressort guère grandi. Conclusion : Sur la piste du Marsupilami amuse et distrait, certes, mais s’effacera bien vite des mémoires.

(1) Propos recueillis par votre serviteur en janvier 2007

© Gilles Penso

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