LE SOUS-SOL DE LA PEUR (1991)

Wes Craven invente une nouvelle légende urbaine et détournant sous un angle horrifique les codes du conte de fée

THE PEOPLE UNDER THE STAIRS

1991 – USA

Réalisé par Wes Craven

Avec Everett MacGill, Wendy Robie, A.J. Langer, Ving Rhames, Brandon Adams, Sean Whalen, Bill Cobbs

THEMA TUEURS I CANNIBALES I ENFANTS I SAGA WES CRAVEN

Pour concocter le scénario du Sous-Sol de la Peur, Wes Craven s’inspira d’un fait divers réel, comme il le fit pour Les Griffes de la Nuit et L’Emprise des Ténèbres. Il s’agissait de l’histoire véridique de cambrioleurs s’attaquant à une maison puis mis en fuite par l’arrivée des autorités. Une fois sur place, les policiers entendirent d’étranges bruits provenant de pièces fermées à clefs. Ils y découvrirent des enfants, enfermés par des parents leur interdisant rigoureusement de sortir de la maison. C’est en s’appuyant sur cette étrange histoire que Craven bâtit son intrigue. Le personnage principal du film est « Fool » ou « Tout-Fou » en VF (Brandon Adams), un jeune garçon qui, pour aider sa pauvre mère atteinte d’un cancer, se laisse convaincre de cambrioler une maison à la sinistre réputation, habitée par un couple bizarre que protège un chien féroce. Fool parvient à pénétrer la demeure sans se douter de la nuit de cauchemar qui l’attend…

D’emblée, il est clair que Wes Craven a décidé de raconter son film en revisitant les codes du conte de fées classiques sous un angle horrifique. Son héros est en effet un enfant de treize ans dont le comportement se calque sur celui du Petit Poucet et qui rencontre une petite fille prénommée Alice, tandis que « Papa » et « Maman », le couple redoutable chez qui il s’introduit, sont traités comme des ogres modernes. Le nom du molosse féroce, Prince, n’est pas non plus choisi au hasard, et sa présence peut tout à fait s’interpréter comme une version métaphorique d’un dragon. Pour renforcer davantage ce sentiment, la grande maison prend les allures d’une attraction foraine truffée de pièges, de trappes et de passages secrets.

Quand les Goonies rencontrent Massacre à la tronçonneuse

Du coup, Le Sous-Sol de la Peur ressemble presque à un mariage étrange entre Les Goonies et Massacre à la Tronçonneuse. Car la légèreté avec laquelle est parfois traitée le sujet (les monstres incarnés par Everett McGill et Wendie Robbie, transfuges de la série Twin Peaks, forcent volontairement le trait en jouant à la lisière de la caricature, tandis que Fool les affronte avec beaucoup de désinvolture) se mêle à une noirceur parfois étouffante, liée aux conditions de vie épouvantables des enfants de ce couple maudit. Nous découvrons en effet que « Papa » et « Maman » sont en quête du fils idéal. Or chacun de leur rejeton possède à leurs yeux un défaut rédhibitoire, ce qui les pousse à leur couper la langue et à les enfermer dans le sous-sol où ils se nourrissent des cadavres laissés par leurs parents. Le plus malin d’entre eux est surnommé « cafard ». Il sait se faufiler partout et aidera notre héros à ne pas se faire dévorer par les autres, à qui il est livré en pâture. Le caractère malsain de la relation de ces parents infâmes monte d’un cran lorsque nous apprenons qu’ils sont frères et sœur ! Le Sous-Sol de la Peur est certes un peu bancal et non dénué de maladresses, mais plusieurs visions saisissantes nous restent en mémoire après son visionnage, comme le père qui endosse une tenue sadomasochiste en cuir du plus curieux effet pour partir en chasse, ou la petite Alice qui fabrique des poupées à l’effigie des victimes de ses parents pour sauver leur âme. 

 

© Gilles Penso

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LE SURVIVANT (1971)

Une adaptation très libre du roman "Je suis une légende" dans laquelle Charlton Heston affronte une secte de vampires mutants

THE OMEGA MAN

1971 – USA

Réalisé par Boris Sagal 

Avec Charlton Heston, Anthony Zerbe, Rosalind Cash, Paul Koslo, Eric Laneuville, Lincoln Kilpatrick, Jill Giraldi, Anna Aries

THEMA FUTUR I VAMPIRES I MUTATIONS

Le roman de Richard Matheson « Je suis une légende » ayant déjà fait l’objet d’une fort honorable adaptation au milieu des années 60, avec Vincent Price en tête de casting, cette nouvelle version était quelque peu attendue au tournant. Pour éviter toute comparaison désavantageuse, Boris Sagal a jugé bon de changer de ton, préférant au drame noir et pesant un film d’action et d’aventure plus en accord avec le cinéma catastrophe très en vogue dans les années 70. Et pour bien marquer la différence, le rôle-titre a été attribué à Charlton Heston, dont le jeu musclé et cynique n’a pas grand-chose à voir avec l’interprétation lasse et désespérée de Vincent Price. C’est un peu comme si on essayait de comparer Arnold Schwarzenegger avec Anthony Hopkins…

Heston incarne donc le docteur Robert Neville, survivant d’une apocalyptique guerre bactériologique entre la Russie et la Chine qui s’est étendue à la planète tout entière. Son salut, il le doit à un antidote expérimental qu’il est parvenu à s’injecter après avoir échappé de peu à un crash d’hélicoptère. Désormais, dans un Los Angeles en ruines pavé de cadavres, il passe ses journées à rouler à toute allure dans les voitures les plus variées, à jouer aux échecs contre une statue qui constitue sa seule compagnie, à vider des bouteilles d’alcool et à regarder Woodstock au cinéma. Quant aux nuits, elles sont occupées à lutter contre des mutants albinos contaminés par les radiations. Armé jusqu’aux dents (de la part de Charlton Heston on n’en attendait pas moins !), Neville résiste quotidiennement à leurs assauts, tout en s’efforçant de préserver le petit confort qu’il a réussi à se constituer en plein centre-ville… 

Une confrérie religieuse retournée au moyen âge

Bien vite, Le Survivant nous fait oublier le récit de Richard Matheson et sa précédente adaptation cinématographique, non seulement par ses péripéties plus énergiques, mais aussi par les relations qui se tissent entre Neville et ses assaillants. En effet, si dans le film d’Ubaldo Ragona et Sidney Salkow (et surtout dans le roman initial) nous avions affaire à des vampires sans état d’âme au comportement proche du zombie et au dialogue limité à quelques gémissements, ici nous avons affaire à une véritable confrérie religieuse retournée au moyen âge, qui rejette toute forme de technologie et qui est menée avec fanatisme par leur chef prédicateur Matthias. Oubliant purement et simplement le matériau littéraire censé l’inspirer au cours de sa seconde moitié, le film de Sagal multiplie ainsi les rebondissements surprenants, annonçant même par moments le Zombie de George Romero et L’Invasion des Profanateurs de Philip Kaufman. La seule véritable ombre au tableau est la bande originale de Ron Grainer, auteur du célèbre thème de la série Le Prisonnier. Pour inventive qu’elle soit, sa musique pop-jazz s’avère parfaitement déplacée en pareil contexte, et dédramatise la plupart des séquences qu’elle accompagne, notamment les assauts répétés des mutants. Le final du Survivant, noir, dramatique et désenchanté comme savaient l’être bon nombre de films du début des années 70, laisse malgré tout la porte ouverte à une lueur d’espoir, à un avenir meilleur reconstruit sur les ruines du monde dévasté. 

 

© Gilles Penso

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DRACULA CONTRE FRANKENSTEIN (1969)

Une grande foire aux monstres avec Dracula et Frankenstein mais aussi un loup-garou, une momie et des extra-terrestres !

LOS MONSTRUOS DEL TERROR

1969 – ESPAGNE / ITALIE / ALLEMAGNE

Réalisé par Tulio Demichelli et Hugo Fregonese

Avec Michael Rennie, Craig Hill, Paul Naschy, Karin Dor, Patty Shepard, Helga Geissler, Angel del Pozo, Fajda Nicol

THEMA DRACULA I FRANKENSTEIN I LOUPS-GAROUS I MOMIES I VAMPIRES I EXTRA-TERRESTRES I SAGA WALDEMAR DANINSKY

Réalisé à l’initiative du comédien Paul Naschy (qui écrivit le scénario sous son vrai nom Jacinto Molina), Dracula contre Frankenstein est le second film dans lequel il incarne le loup-garou Waldemar Daninsky après Les Vampires du docteur Dracula. Officieusement, il existerait un autre film avant celui-ci, Las Noches del Hombre Lobo, mais toutes les copies ont visiblement disparu et personne ne semble s’en souvenir, donc cet épisode intermédiaire reste un mystère absolu. Tourné en seulement six jours avec des moyens ridicules, Dracula contre Frankenstein est une coproduction germano-espagnole fut commencée par le réalisateur argentin Hugo Fregonese, qui démissionna finalement en cours de route. Tulio Demichelli prit donc le relais pour terminer comme il put cet improbable métrage aux allures de patchwork. Michael Rennie, qui fut l’extra-terrestre Klaatu dans l’excellent Le Jour où la Terre s’arrêta, joue ici un alien bien moins convaincant, Odo Warnoff, lequel décide de conquérir la Terre en se servant des émotions humaines, car sa planète Ummo, est en train de mourir. 

Pour y parvenir, il décide de ranimer tous les grands monstres de la Terre et de se constituer une armée de jolies femmes, suivant un plan pas très clair que même Ed Wood aurait sans doute eu du mal à comprendre. Il réveille donc Dracula (Angel del Pozo, aux allures de play-boy latino) en enlevant le pieu fiché dans son squelette exposé dans une foire (une idée reprise sans vergogne à La Maison de Frankenstein), puis ressuscite le Loup-Garou Waldemar Daninsky (Naschy) en extrayant les balles d’argent qui ont pénétré son cœur, fait revivre la Momie avec un miroir sacré, et ranime le Monstre de Faranksalam (un patronyme bizarroïde employé pour éviter des problèmes juridiques avec Universal) grâce à l’énergie atomique. Ce dernier, incarné lui aussi par Paul Naschy et maquillé à la Boris Karloff, a une allure piteuse, un visage inexpressif et des yeux constamment fermés.

Reincarnator !

Malgré le titre français, le pseudo-monstre de Frankenstein n’affronte jamais Dracula, mais se castagne avec la Momie au cours d’une des scènes les plus distrayante d’un film par ailleurs relativement soporifique. Le vampire meurt finalement d’une épée plantée dans le cœur (il se décompose en fondus enchaînés), la momie brûle dans la roue enflammée d’un moulin, le Monstre karloffien s’écroule dans une série de crépitations, et le loup-garou est tué d’une balle d’argent par une femme tombée amoureuse de lui, qui trépasse à ses côtés alors qu’il redevient humain… Encore une scène allègrement photocopiée sur le scénario de La Maison de Frankenstein, et déjà présente par ailleurs dans Les Vampires du docteur Dracula ! Il faut avouer que Naschy n’a jamais caché son admiration sans borne pour les Universal Monsters de la belle époque. Michael Rennie aurait sans doute mérité un meilleur testament que Dracula contre Frankenstein. Ce fut pourtant son dernier film, le charismatique comédien s’éteignant hélas l’année suivante. Les distributeurs vidéo français, ne reculant devant rien, décidèrent de rebaptiser le film Réincarnator au milieu des années 80.

© Gilles Penso

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HORSEHEAD (2014)

Pour son premier long-métrage, Romain Basset construit une atmosphère onirique troublante et cauchemardesque

HORSEHEAD

2014 – FRANCE

Réalisé par Romain Basset

Avec Lilly-Fleur Pointeaux, Catriona MacColl, Murray Head, Philippe Nahon

THEMA RÊVES

Après trois ans d’absence, Jessica revient au domicile familial pour assister aux funérailles de sa grand-mère Rose. La tension entre la jeune fille et sa mère est palpable, cette dernière ne s’en étant jamais vraiment occupé. Heureusement pour Jessica, elle trouve une oreille attentive auprès de son beau-père. Une attention qu’elle apprécie car depuis son plus jeune âge, elle est en proie à de violents cauchemars dans lesquels elle voit un curieux homme-cheval qui perturbe fortement ses nuits… Premier long métrage de Romain Basset (initialement intitulé Fièvre), Horsehead risque fort de déconcerter et de diviser les spectateurs. Le film n’est en effet pas un divertissement pop-corn et demandera un réel effort d’attention et surtout une participation émotionnelle et une immersion totale dans son univers. Horsehead prend en effet les allures d’un cauchemar en forme de puzzle mystérieux, plongeant son héroïne dans un univers effrayant, onirique, fantasmatique, gore et érotique.

Les rêves peuvent être mortels, on le sait depuis 1984 et Les Griffes de la Nuit de Wes Craven. Romain Basset nous le confirme à nouveau avec Horsehead et malmène la ravissante Lilly-Fleur Pointeaux, jeune actrice de 26 ans qui s’en sort haut la main et parvient à donner une vraie sensibilité à son personnage torturé par des visions récurrentes et particulièrement tétanisantes, qui sont remplies de symboles, tels le loup ou cet extraordinaire homme-cheval, véritable œuvre d’art à lui tout seul. On s’en doute, les cauchemars de Jessica, tout comme ceux de Nancy dans le film de Craven, ne sont pas là uniquement pour parsemer le film de séquences fantastiques et chocs (et elles le sont !) mais également pour participer au développement de l’histoire et sont autant de pièces à assembler pour la jeune fille, tout comme pour le spectateur qui tente lui aussi de comprendre et de faire la lumière sur ce qu’on devine être un secret de famille inavouable.

Un secret inavouable

Horsehead, de par son ambiance savamment travaillée, de par sa mise en scène brillante, de par sa splendide photographie, de par sa modernité également, nous plonge donc dans une sorte de conte gothique dont on veut connaître tous les aboutissants. Si, comme moi, vous vous faites happer par l’histoire, le film deviendra totalement hypnotique et vous n’arriverez pas à décoller votre rétine des splendides images qui défilent sur l’écran. Effectivement, tout n’est pas simple à suivre et on a souvent l’impression d’être un peu largué, de perdre ses repères. Par certains aspects, Horsehead m’a fait penser au Inferno de Dario Argento : les deux films ont en commun d’être énigmatiques, fascinants, d’une beauté picturale totale, mais aussi assez hermétiques et difficiles d’accès. Le casting est vraiment bon, on prend plaisir à retrouver Catriona MacColl en mère pas franchement exemplaire mais aussi Philippe Nahon ou le chanteur Murray Head. Plus l’intrigue avance, plus Romain Basset dévoile les mystères entourant cette famille brisée et se laisse aller à exploiter des thèmes certes déjà traités, comme le carcan que représente une éducation religieuse stricte par exemple, mais il le fait de manière intelligente et ce, notamment, à travers la figure du « Cardinal ». Les scènes de cauchemars bénéficient d’un soin tout bonnement prodigieux pour ce genre de film indépendant (et français !) et on félicitera David Scherer, Jacques-Olivier Molon, Adrien Pennequin et les équipes des effets spéciaux et de maquillage pour leur travail remarquable et qui participe amplement à offrir à Horsehead un splendide écrin pour pouvoir créer son ambiance à la fois fantasmagorique et envoûtante. N’oublions pas la musique de Benjamin Shielden, qui sert à merveille le film. A l’instar de The Lords of Salem de Rob Zombie en 2012, Horsehead est pour ma part l’une des plus intéressantes propositions du cinéma fantastique vues depuis longtemps. Laissez-vous aller, laissez-vous bercer et tentez cette expérience atypique et loin du préfabriqué qu’on nous sert à longueur de temps en ce moment…

 

© Stéphane Erbisti

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DARKMAN 3 (1996)

Une seconde séquelle du film de Sam Raimi dans laquelle Bradford May accumule l'action débridée et le gore décomplexé

DARKMAN III : DIE DARKMAN DIE

1996 – USA

Réalisé par Bradford May

Avec Jeff Fahey, Arnold Vosloo, Darlanne Fluegel, Roxann Dawson, Nigel Bennett 

THEMA SUPER-HEROS I SAGA DARKMAN

Deux ans après avoir réalisé la suite de Darkman, conçue directement pour le marché vidéo et la télévision, Bradford May embraye sur un troisième épisode s’efforçant d’exploiter une fois de plus le concept fou mis en place par Sam Raimi au tout début des années 90. Assumant totalement le format non-cinématographique du film, le pré-générique se conforme à ceux des séries télévisées, résumant les deux épisodes précédents à grands renforts d’extraits explicites. Assurant le lien avec Darkman 2, Arnold Vosloo incarne une fois de plus ce mixage moderne entre le Fantôme de l’Opéra, l’Homme au Masque de Cire et The Shadow. Toujours à l’œuvre pour essayer de franchir la barrière fatidique des 99 minutes au-delà desquelles sa peau artificielle se désagrège, il va devoir faire face à un nouveau vilain incarné par Jeff Fahey. Ce gangster caricatural, répondant au nom rugueux de Peter Rooker, veut à tout prix percer le secret de la force de Darkman pour pouvoir lancer sur le marché une nouvelle drogue propre à faire tomber aux oubliettes tous les anabolisants et autres stéroïdes. Notre super-héros est donc capturé et devient sujet d’expérimentations…

En tant que seconde séquelle, Darkman 3 jouit d’une situation particulière : celle de ne pas avoir à trop souffrir de l’ombre du premier épisode mais plutôt d’être jugée à l’aune du deuxième opus, bien moins ambitieux. Du coup, Bradford May se lâche, osant s’adonner à quelques scènes gore (un visage brûlé, une décapitation avec un bulldozer !) et à des scènes d’action volontairement excessives (la poursuite au milieu des fûts qui explosent, la locomotive prise en chasse par une roquette). Plus intéressant, May semble vouloir retrouver le grain de folie de Sam Raimi, notamment à travers une série de séquences d’hallucinations jouant la carte du surréalisme, comme cette jeune femme attaquée par un serpent à visage humain ou cet insecte dévoré par une plante carnivore. L’intérêt de Darkman 3 n’est donc pas à chercher du côté du scénario, reprenant structurellement ceux des deux précédents volets de la trilogie, mais plutôt d’une collection de séquences originales franchement bien menées. La meilleure d’entre elles ? Probablement ce moment bourré de suspense et d’humour au cours duquel Westlake se fait passer pour le redoutable Rooker et se retrouve coincé dans une soirée d’anniversaire donnée en son honneur. 

La Belle et la Bête

D’autres idées étonnantes ponctuent le métrage, comme ces quatre bandits transformés en surhommes après qu’on leur ait injecté la drogue puisée dans le sang de Westlake, et à qui Rooker ordonne de massacrer devant les caméras de télévision le gouverneur Mitchell, en croisade contre le trafic de drogue, le soir des élections. Certes, Darkman 3 ne restera pas dans les mémoires et marquera d’ailleurs le point final de cette mini-saga, mais on mentirait en disant qu’on n’y prend pas de plaisir. D’autant que May et ses scénaristes ont eu la bonne idée d’utiliser le motif de la Belle et la Bête pour symboliser l’attirance du héros défiguré pour la charmante mais inaccessible épouse du vilain.

 

© Gilles Penso

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LE PETIT POUCET (2001)

Olivier Dahan propose une vision sombre et réaliste du célèbre conte de Perrault

LE PETIT POUCET

2001 – FRANCE

Réalisé par Olivier Dahan

Avec Nils Hugon, Raphaël Fuchs, William Touil, Pierre-Augustin Crenn, Théodul Carré-Cassaigne, Hanna Berthaut

THEMA CONTES

Inattendu dans un registre fantastique pur, l’auteur de Déjà Mort et La Vie Promise a opté pour une adaptation extrêmement fidèle du conte de Charles Perrault, narré à la première personne par Michel Duchaussoy incarnant en voix off un Petit Poucet vieilli et aguerri. Cadet d’une famille de paysans crève la faim et souffre-douleur de ses frères, Poucet (incarné par Nils Hugon) découvre avec ses yeux naïfs la dureté d’une époque marquée par la guerre et la famine. Leur ferme ayant été pillée par une horde de soldats, les parents de Poucet décident d’abandonner leurs nombreux rejetons en pleine forêt. Tant de bouche de moins à nourrir, ça n’est pas rien en pareil contexte. Livrés à eux-mêmes, les enfants font dans les bois maintes rencontres désagréables, notamment des loups affamés, les guerriers à la solde du redoutable soldat à la jambe de fer, et surtout l’Ogre impitoyable qui raffole de la chair tendre des petits enfants pour son petit déjeuner.

Si le scénario ne surprend donc guère, se contentant de reprendre les péripéties d’une histoire que chaque spectateur connaît depuis son plus jeune âge, c’est du côté de la direction artistique que le film d’Olivier Dahan étonne. Car du point de vue strictement formel, ce Petit Poucet est une vraie merveille. La partition de Jo Hisaishi, compositeur attitré de Hayao Miyazaki (Princesse MononokeLe Voyage de Chihiro), est lyrique à souhait, les décors mi-réels mi-numériques sont superbement oniriques, et les costumes bénéficient de designs particulièrement originaux. Avec une mention spéciale pour le look  horrifico-fétichiste de l’Ogre, dont le visage est entièrement dissimulé sous une sorte de muselière métallique articulée.

Un Ogre au look horrifico-fétichiste

Le casting, surprenant, réserve des rôles de choix à des comédiens pas du tout habitués, eux non plus, à ce registre féerique. On note en particulier Romane Bohringer en mère du Petit Poucet, Elodie Bouchez en épouse de l’Ogre, Samy Naceri en soldat à la jambe de fer, Saïd Taghmaoui en chef de troupe, Romain Duris en garde, Jean-Paul Rouve en cavalier, Maurice Barthélémy en comptable, et Catherine Deneuve en reine. Cette dernière apparition semble être conçue comme un clin d’œil au fameux Peau d’Âne. Mais contrairement au conte réalisé par Jacques Demy, qui se terminait par l’envolée incongrue d’un hélicoptère, le film d’Olivier Dahan ne s’envisage pas autrement qu’au premier degré, sans le moindre décalage ou la plus petite once d’humour. Personne ne s’en plaindrait outre mesure si ce Petit Poucet s’adressait principalement aux enfants. Mais la noirceur du traitement, l’épouvante pure dans laquelle baignent les apparitions de l’Ogre, des loups et du soldat à la jambe de fer, la dureté générale du film laissent au contraire imaginer que c’est l’adulte qui est ici visé. C’est ce petit fossé entre la naïveté linéaire de la narration et la rudesse de la mise en scène qui risque de déconcerter le public et d’empêcher cette œuvre pourtant bourrée de qualités de  trouver sa cible. A marquer d’une pierre blanche tout de même. Certes, nous sommes à mille lieues des splendeurs de La Belle et la Bête, mais ce n’est pas tous les jours que la France se pare de si beaux contes cinématographiques.

 

© Gilles Penso

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DARKMAN 2 (1994)

Une séquelle modeste du film de Sam Raimi dans laquelle Arnold Vosloo reprend le rôle de Liam Neeson

DARKMAN II : THE RETURN OF DURANT

1994 – USA

Réalisé par Bradford May

Avec Larry Drake, Arnold Vosloo, Kim Delaney, Renée O’Connor, Lawrence Dane, Kim Delaney, Jesse Collins, David Ferry

THEMA SUPER-HEROS I SAGA DARKMAN

Sam Raimi et Liam Neeson étant respectivement accaparés par L’Armée des Ténèbres et La Liste de Schindler, ils ne pouvaient décemment s’impliquer dans cette séquelle de Darkman commanditée par les studios Universal pour une exploitation directe en vidéo. Les rênes de la mise en scène furent donc confiées à Bradford May, vétéran du petit écran. Pour succéder à Neeson, les producteurs ont fait un choix étonnant : Arnold Vosloo, un comédien athlétique d’origine sud-africaine dont on avait déjà pu apprécier le charisme dans 1492 de Ridley Scott et Chasse à l’Homme de John Woo. « Je dois avoir un physique particulier, parce qu’on ne me propose jamais de comédie romantique », nous avouait-il non sans humour. « Je suis donc plutôt spécialisé dans les rôles de méchants ou de personnages atypiques. Sans compter qu’ici, mon visage était la plupart du temps recouvert de latex ! » (1) Car lorsqu’il n’arbore pas une figure humaine, l’infortuné super-héros apparaît toujours sous les traits d’un grand brûlé, grâce à un maquillage saisissant d’Evan Campbell reproduisant fidèlement celui que Tony Gardner créa pour le premier film. Vosloo apporte au docteur Peyton Westlake, alias Darkman, de la force, de la détermination et une certaine décontraction qui nous éloignent quelque peu du héros brisé et schizophrène créé par Sam Raimi.

Le déséquilibre mental, les tourments psychologiques et les troubles sentimentaux ont donc été évacués au profit d’une action soutenue et quelque peu basique. Seul rescapé du casting précédent, Larry Drake vole du coup la vedette au héros dans le rôle du parrain mafieux Robert G. Durant. Laissé pour mort à la fin du film précédent, il s’éveille d’un long coma et reprend illico les choses en main. Bien décidé à régner définitivement sur le milieu de la pègre et l’empire de la drogue, il fait évader un savant un peu fou et l’engage pour créer des armes d’un nouveau genre, à mi-chemin entre la mitrailleuse et le pistolet laser. Pour mettre en place sa chaîne de fabrication, Durant s’installe dans un entrepôt dont il fait assassiner le propriétaire. Or, comme par hasard, ce dernier était un scientifique qui œuvrait sur la création d’une peau artificielle, et qui avait été contacté par Peyton Westlake, désireux de trouver une solution pour que ses masques ne se désintègrent plus au bout de 90 minutes d’utilisation.

L'épisode central d'une petite saga

Darkman se retrouve donc une fois de plus face à son ennemi juré, et l’affrontement qui s’ensuit emprunte prudemment des chemins déjà très balisés. Car si Bradford May signe là une mise en scène nerveuse et efficace, et s’il maîtrise visiblement les cascades spectaculaires et les effets pyrotechniques en tous genres, le grain de folie de Sam Raimi fait ici cruellement défaut. D’autant que la plupart des situations décrites dans cette séquelle, et notamment les dédoublements des méchants grâce aux masques du Darkman, ont déjà été vues dans le premier film. Ce qui n’empêchera pas pour autant Universal de confier à Bradford May une seconde séquelle, toujours avec Vosloo, mais cette fois-ci sans Larry Drake.

(1) Propos recueillis par votre serviteur en juin 1999

 

© Gilles Penso

LES CHARLOTS CONTRE DRACULA (1980)

L'un des trios d'humoristes les plus populaires du cinéma français des années 70/80 affronte le roi des vampires dans une comédie gentiment poussive

LES CHARLOTS CONTRE DRACULA

1980 – FRANCE

Réalisé par Jean-Pierre Desagnat

Avec Andréas Voutsinas, Jean Sarrus, Gérard Rinaldi, Gérard Filipelli, Jean-Pierre Elga, Gérard Jugnot, Amélie Prévost

THEMA DRACULA I VAMPIRES

Chantres d’un humour franchouillard passé de mode depuis des lustres, les Charlots, chanteurs et musiciens à succès (ils firent tout de même la première partie des Rolling Stones !) devenus acteurs en 1970, ont su faire s’esclaffer les foules de l’hexagone à travers des films aux titres aussi évocateurs que Les Bidasses en Folie, Les Fous du Stade, Les Charlots font l’Espagne, Le Grand Bazar, Les Quatre Charlots Mousquetaires ou encore Bons Baisers de Hong-Kong. Pour fêter les dix ans de leur carrière cinématographique et inaugurer les années 80, les trois piliers du groupe (Gérard Rinaldi, Jean Sarrus et Gérard Filipelli) décident de marcher sur les traces d’Abott et Costello en se confrontant au plus grand vampire de tous les temps.

Mais c’est à peu près le seul point commun qu’on pourra trouver entre Les Charlots contre Dracula et une aventure des Deux Nigauds, tant l’aspect parodique du genre est ici sacrifié au profit de la comédie potache et de la drôlerie de bas étage. Il suffit de voir comment sont abordés les aspects fantastiques de l’intrigue pour comprendre que la présence du comte transylvanien aux dents longues n’est ici qu’un prétexte comme un autre pour mettre en valeur les pitreries du joyeux trio. Lorsque le film commence, le fils de Dracula (« Dracounet » pour les intimes) a douze ans. Il porte une cape et dort dans un cercueil, comme son défunt papa, et veut boire du sang comme lui. Mais les vampires sont usés par les vicissitudes des temps modernes, et pour posséder leur célèbres pouvoirs d’antan, ils ont besoin désormais d’une potion spéciale. Or une malédiction pèse sur la fiole qui renferme le précieux breuvage. Tous ceux qui veulent s’en approcher sont aussitôt pétrifiés, sauf la mère de Dracula Jr, ou toute femme qui lui ressemblerait trait pour trait. Un jour, la vénérable épouse de Dracula Sr rend l’âme. 35 ans et demi plus tard (comme nous l’annonce un carton très précis), Dracounet est devenu adulte et possède désormais les traits du comédien grec Andréas Voutsinas. Il loue les services du détective privé Gaston Lepope (Gérard Jugnot, alors en pleine période Bronzés) pour dénicher un sosie de sa mère afin de pouvoir enfin mettre la main sur la potion tant convoitée. Lepope trouve finalement la perle rare à Paris, dans une brocante où travaillent justement nos trois Charlots…

« Dieu est belge ! »

Et c’est parti pour une heure et demi de courses-poursuites laborieuses (les déambulations dans le train, les chassés croisés dans la forêt puis dans le château de Dracula), de gags interminables (la chute du plus haut pont d’Europe servie par un trucage optique abominable, la chauve-souris morte dont on essaie de se débarrasser) et de répliques absurdes (l’inénarrable « Dieu est belge ! »). La mise en scène télévisuelle de Jean-Pierre Desagnat, le montage constellé de faux-raccords et la musique éléphantesque signée par les Charlots eux-mêmes sont en accord avec la tonalité générale du film. Même l’inégal Dracula père et fils d’Edouard Molinaro ferait figure de chef d’œuvre à côté de ce Charlots contre Dracula fier de sa propre balourdise, témoignage d’une époque révolue où la comédie n’avait pas besoin d’être très sophistiquée pour titiller les zygomatiques des spectateurs bien de chez nous.

 

© Gilles Penso

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LE RETOUR DES MORTS-VIVANTS 5 : RAVE MORTEL (2005)

Quand des étudiants sont contaminés par un virus zombie, la grande rave party de l'année se transforme en joyeux massacre…

RETURN OF THE LIVING DEAD 5 : RAVE TO THE GRAVE

2005 – USA

Réalisé par Elleory Elkayem

Avec AImee-Lynn Chadwick, Cory Hardrict, John Keefe, Jenny Mollen, Peter Coyote, Claudiu Bleont, Sorin Cocis, Cain Minhea Manoliu

THEMA ZOMBIES I SAGA LE RETOUR DES MORTS-VIVANTS

Le cinquième épisode de la franchise Le Retour des Morts-Vivants, sous-titré Rave mortel, est tourné dans la foulée du quatrième opus, avec la même équipe technique, les mêmes acteurs principaux, le même réalisateur et les mêmes décors russo-roumains. Mais bizarrement, le scénario n’assure quasiment aucune continuité avec l’épisode précédent, comme si aucun des protagonistes ne se souvenait des événements survenus dans les locaux d’Hybra Tech. Pourtant les personnages principaux restent les mêmes. Seul le scientifique incarné par Peter Coyote poursuit son chemin avec une certaine « cohérence », même si son rôle tourne court. En cavale avec l’un des derniers barils de trioxine, il est prêt à les vendre à la mafia italienne. Pour tester la marchandise, ses acheteurs ont la mauvaise idée de faire inhaler le gaz à plusieurs cadavres en même temps. Comme on pouvait s’y attendre, tous les morts se relèvent d’un coup et s’adonnent à un joyeux carnage, à grand coup de cerveau arraché, de crâne trépané, d’yeux éjectés hors de leurs orbites et d’explosions de sang.

Les lycéens du film précédent sont de retour, notamment Julian Garrisson (toujours incarné par John Keefe) qui mène une petite vie tranquille avec sa nouvelle petite amie Jenny (Jenny Mollen) et s’afflige en apprenant la mort de son oncle (une amnésie subite aurait-elle occulté de sa mémoire le fait que ce dernier pratiquait des expériences innommables pour transformer les honnêtes gens en zombies ?). En fouillant dans son grenier, Julian trouve deux barils de trioxine et demande à son ami Cody (Cory Hardrict), féru de science, d’en analyser le contenu. Ce dernier en prélève donc des échantillons que Jeremy (Cain Minhea Manoliu), le frère de Jenny, absorbe en petite quantité pour en tester les vertus qu’il imagine hallucinogènes. Bientôt, des milliers de doses de « drogue », baptisée Z, sont fabriquées à partir du contenu des barils pour être vendues lors de la grande rave party qui sera organisée à l’occasion de la soirée d’Halloween. Les premiers étudiants touchés se transforment bientôt en zombies blafards gémissant « cerveau » et quelques cadavres mutilés commencent à joncher le sol, sans perturber outre-mesure les étudiants qui sont surtout excités par les préparatifs de la soirée d’Halloween. Pour assurer des touches d’humour régulières, le film croit bon d’intégrer dans son intrigue deux mafieux italiens caricaturaux. Habillés comme dans un film de Quentin Tarantino, écoutant de l’opéra italien dans leur voiture, ils se mettent en quête des précieux barils et surjouent en forçant leur faux accent (les deux acteurs sont roumains !), leurs tentatives pour faire rire les spectateurs s’avérant laborieuses. Plus versé sur l’humour que son prédécesseur, ce cinquième opus nous inflige aussi des soirées étudiantes stupides assurant leur quota de nudité et de mauvaise musique, et même des gags navrants à base de flatulences.

gags stupides et nudité gratuite

Certes, les effets spéciaux gore de l’équipe d’Optic Nerve sont toujours aussi généreux et se permettent tous les débordements (une énucléation avec des baguettes de batterie, une décapitation avec une guitare électrique, une autre à la hache, des stylos plantés dans un cerveau à travers les oreilles, le tout accompagné de gerbes de sang explosives), mais la lassitude gagne malgré tout le public. Lorsque vient le moment de la fameuse rave party, l’espoir d’une apothéose digne de ce nom est permis. Sans imaginer une hécatombe titanesque à la Braindead, les spectateurs sont en effet en droit de s’attendre à un festival de séquences gore excessives. Mais ce massacre final sombre vite dans la routine répétitive. Les figurants grimés à la va vite n’en finissent plus de gémir « cerveau » et de mordre leurs victimes au milieu de salves de coups de feu. Le retour de « Tar-Man », le fameux homme goudron, aurait pu donner lieu à quelques séquences réjouissantes. Hélas, le mort-vivant dégoulinant se contente de surgir d’un baril, de se faire tirer dessus, de s’éclipser puis de réapparaître sur la route pour faire de l’auto-stop, au cours d’un gag que le réalisateur juge tellement drôle qu’il le fait durer de longues, interminables et embarrassantes minutes. Même s’ils ont été envisagés initialement pour une sortie en salles, Le Retour des Morts-Vivants 4 et 5 seront directement diffusés sur SciFi Channel en 2005, dans des versions écourtées, avant d’être exploités sous leur forme intégrale non censurée l’année suivante en DVD. Et c’est sur ces deux opus anecdotiques que s’achève la saga sanglante du Retour des Morts-Vivants.

 

Gilles Penso

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LE RETOUR DES MORTS-VIVANTS 4 : NECROPOLIS (2005)

Ce quatrième opus tardif de la franchise initiée par Dan O'Bannon, produit par une toute nouvelle équipe, revoit sérieusement les ambitions de la saga à la baisse

RETURN OF THE LIVING DEAD 4 : NECROPOLIS

2005 – USA / ROUMANIE

Réalisé par Ellory Elkayem

Avec Aimee-Lynn Chadwick, Cory Hardrict, John Keefe, Jana Kramer, Peter Coyote, Elvin Dandel, Alexandru Geona, Toma Danila

THEMA ZOMBIES I SAGA LE RETOUR DES MORTS-VIVANTS

Une décennie après Le Retour des Morts-Vivants 3, le producteur russe Anatoly A. Fradis décide de ressusciter la saga en initiant deux séquelles tournées simultanément. Limitant le budget de chacun des films de manière drastique, Fradis met sur pied une co-production américano-roumaine, via sa compagnie Aurora Entertainment, décide de planter ses caméras en Roumanie et en Ukraine, tout près du site de Tchernobyl, et confie la mise en scène des deux films à Ellory Elkayem. Ce dernier avait créé une surprise plutôt agréable à travers ses premiers travaux : le court-métrage Larger Than Life, le téléfilm Eclosion et le blockbuster aux mille et une pattes Arac Attack. Mais autant être honnête : son talent et son inventivité semblent ici s’être totalement évaporés. Le premier film du diptyque, Le Retour des Morts-Vivants 4 : Necropolis, commence sous la forme d’un spot publicitaire vantant les mérites de la compagnie Hybra Tech. Or derrière ses apparences respectables, la puissante société se livre à des activités abjectes. L’un de leurs scientifiques en chef, Charles Garrison, est incarné par Peter Coyote, seul visage familier d’un casting d’une grande fadeur. Il se rend à Tchernobyl pour y faire l’acquisition des derniers barils de Trioxine 5 encore répertoriés. Mais les deux hommes qui l’accompagnent font bientôt les frais du dangereux produit. Le premier, touchant malheureusement le liquide qui suintait d’un des futs, se transforme illico en zombie, crie « cerveau » et arrache d’un coup de dents celui de son comparse, avant de s’écrouler au sol lorsque Garrison lui tire une balle dans la tête. Car ici, contrairement aux trois films précédents, les morts-vivants ont perdu toute indestructibilité. Un simple coup de feu peut en venir à bout. 

Quelques séquences joyeusement délirantes émaillent le film, comme ce gros rat bien dodu que font cuire deux clochards dans les sous-sols du bâtiment Hybra Tech et qui se ranime soudain pour les dévorer. Mais ce sont des tentatives relativement isolées, et lorsque les véritables « héros » du Retour des Morts-Vivants 4 font enfin leur apparition (un groupe de lycéens caricaturaux), les maigres promesses du film s’effondrent. En pleine séance de motocross acrobatique, l’un d’eux, Zeke (Elvin Dandel), se blesse en sautant sur un tremplin et est hospitalisé. Mais on ne retrouve plus sa trace. Menés par Julian (John Keefe), le neveu de Garrison, ses amis mènent l’enquête et découvrent qu’il a été transporté dans les locaux de Hybra Tech pour subir des expériences. Coup de chance, la jolie Kate (Jana Kramer), qui travaille au poste de sécurité des locaux en question, est amie avec le petit groupe. Futés, les étudiants accèdent au site Internet de la compagnie et découvrent, au sein du département de recherche médical, une zone nommée « Necropolis ». Ils se fabriquent alors de faux badges, s’équipent comme un commando et décident de s’immiscer dans les locaux en passant par les souterrains. Là, ils découvrent tous les zombies sur lesquels Charles pratique des expériences, ainsi que des bébés monstrueux flottant dans des bocaux. Interrogé sur l’intérêt de telles expériences, Charles répond laconiquement : « Pourquoi ? Mais pour dominer le monde ! » Le film assume ainsi frontalement la vacuité de son scénario et de ses enjeux dramatiques.

Des armes bio-chimiques d'un genre inattendu

Légitimement révoltés mais pas très malins, les jeunes héros libèrent par mégarde les zombies cobayes qui vont dès lors s’en donner à cœur joie. Le carnage ne fait évidemment pas dans la demi-mesure : têtes arrachées, ventres ouverts à mains nues, cerveaux extirpés et dévorés… Le sang gicle par hectolitres avec une belle générosité et les maquillages gore sont plutôt réussis. John Vulich les supervise, fort de son expérience sur les très impressionnants zombies du remake de La Nuit des Morts-Vivants de Tom Savini, et intègre au sein de son atelier Optic Nerve quelques artistes de talent comme Mark Shostrom (Evil Dead 2) et Gary Tunnicliffe (Candyman). S’engouffrant timidement dans la voie ouverte par Le Retour des Morts-Vivants 3, le climax révèle des « armes bio-chimiques » d’un genre inattendu, autrement dit un couple de zombies monstrueux engoncés dans des armures high-tech dont les bras sont reliés à des canons surdimensionnés et à des armes blanches. Mais l’intervention prometteuse de ces deux créatures s’avère frustrante car elle se limite à quelques minutes de présence à l’écran. Le film s’offre aussi un petit hommage au premier Retour des Morts-Vivants lorsqu’un des zombies, après avoir dévoré le cerveau d’un gardien, s’empare du téléphone et dit « envoyez plus de gardiens ». Mais l’humour reste pataud et lorsque le combat se poursuit à mains nues, faute de munitions, le ridicule est de la partie. On note tout au long du métrage une musique électro-orchestrale assez efficace de Robert Duncan, qui renforce le suspense et la tension même lorsqu’il ne se passe rien de bien excitant à l’écran.

 

© Gilles Penso

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