DANGEREUSEMENT VÔTRE (1985)

Pour son dernier tour de piste dans le smoking de James Bond, Roger Moore affronte Christopher Walken et Grace Jones

A VIEW TO A KILL

1985 – GB

Réalisé par John Glen

Avec Roger Moore, Christopher Walken, Tanya Roberts, Grace Jones, Patrick Macnee, Patrick Bauchau, Fiona Fullerton

THEMA ESPIONNAGE ET SCIENCE-FICTION I SAGA JAMES BOND

Comme Sean Connery avant lui, Roger Moore annonça plusieurs fois qu’il arrêterait d’incarner James Bond, notamment après Rien que pour vos yeux et Octopussy, ce qui poussa Albert Broccoli à faire des essais avec l’acteur américain James Brolin pour le remplacer. Mais le pont d’or offert par le studio et la griserie de prononcer une fois de plus « mon nom est Bond, James Bond » le poussèrent à accepter une dernière mission, malgré les rides indélébiles de ses 57 ans bien frappés. Le voilà donc face à Max Zorin, un dangereux mégalomane qui résulte de manipulations génétiques l’ayant doté d’une exceptionnelle intelligence mais aussi de fortes tendances psychopathes. La grande entreprise de son existence consiste à rayer de la carte le site de Silicon Valley, soit plus de 250 usines et des milliers de techniciens et de chercheurs, afin de s’emparer du monopole mondial en matière d’électronique. Son plan (qui ressemble comme deux gouttes d’eau à celui de Lex Luthor dans Superman) est à la mesure de sa folie, puisqu’il consiste à noyer l’endroit par un gigantesque raz-de-marée consécutif à un tremblement de terre artificiellement provoqué.

L’une des grandes qualités de Dangereusement vôtre est son casting haut de gamme. Christopher Walken excelle en super-vilain délicieusement cinglé, Grace Jones crève l’écran en bras droit sans état d’âme (à l’instar de Requin, elle se ralliera finalement à la bonne cause), et ce bon vieux Patrick McNee se glisse dans le costume d’un allié de 007 avec lequel il échange bon nombre d’hilarantes joutes verbales, nouvelle preuve que les univers de James Bond et de Chapeau melon et bottes de cuir sont intimement liés (souvenons-nous des présences éblouissantes d’Honor Blackman et Diana Rigg au fil de la saga). En revanche, si Tanya Roberts est une James Bond Girl à la beauté étourdissante (repérée par Broccoli dans Dar l’invincible), les scénaristes l’ont hélas affublée de dialogues ineptes se limitant à quelques « Oh James ! » lascifs, et ce malgré une première apparition prometteuse.

Climax sur le pont du Golden Gate

Énergique, la bande originale de John Barry s’adjoint les services du groupe Duran Duran, dont les sonorités électroniques typiques des eighties ont étrangement bien passé le cap des années, et l’ensemble est rythmé par de très belles scènes d’action, culminant par un affrontement au-dessus du Golden Gate Bridge dans un ballon dirigeable. « J’ai doublé Roger Moore dans la poursuite au cours de laquelle sa voiture se retrouve coupée en deux », nous raconte le cascadeur Jean-Claude Lagniez. « On voit d’ailleurs très bien que ce n’est pas lui qui conduit, car je ne lui ressemble pas beaucoup. D’habitude, il avait une doublure assez ressemblante, mais pour cette cascade particulière on m’a confié la mission, et les cadrages sur moi étaient beaucoup trop serrés. Nous n’avons même pas la même coupe de cheveux ! » (1) Les aficionados trouvèrent beaucoup à redire à Dangereusement vôtre, notamment son humour excessif, son scénario exempt de subtilité et l’âge avancé de son héros. Mais en l’état, le film s’avère franchement distrayant, et marque en beauté les adieux de Roger Moore à la série.

(1) Propos recueillis par votre serviteur en février 2004

© Gilles Penso

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JAMAIS PLUS JAMAIS (1983)

Produit en marge de la série officielle, ce James Bond "dissident" permet à Sean Connery de faire définitivement ses adieux à l'agent 007

NEVER SAY NEVER AGAIN

1983 – GB

Réalisé par Irvin Kershner

Avec Sean Connery, Klaus Maria Brandauer, Max Von Sydow, Kim Basinger, Barbara Carrera, Bernie Casey, Rowan Atkinson

THEMA ESPIONNAGE ET SCIENCE-FICTION I SAGA JAMES BOND

On peut légitimement se demander ce qui poussa Sean Connery à reprendre le smoking de James Bond douze ans après Les Diamants sont éternels, alors qu’il avait justement clamé haut et fort « jamais, plus jamais ! ». Les plus cyniques argueront que le succès modeste des films qu’il interpréta dans l’intervalle (notamment les inénarrables Zardoz et Meteor) le motiva probablement, mais la genèse de ce James Bond « pirate », réalisé et produit en marge de la saga officielle d’Albert Broccoli, remonte au début des années 60. A cette époque, Ian Fleming céda les droits de son roman « Opération Tonnerre » à Kevin McClory. Celui-ci produisit donc la première adaptation avec Connery en 1965, puis proposa au comédien de co-écrire avec Len Deighton le scénario d’un remake. A cause des difficultés juridiques liées au projet, celui-ci stagna jusqu’à ce que l’avocat et producteur Jack Schwartzman parvienne enfin à le concrétiser.

Une équipe étrangère à l’univers 007 se trouve donc derrière la caméra, notamment Irvin Kershner, réalisateur de L’Empire contre-attaque, Douglas Slocombe, chef opérateur des Aventuriers de l’Arche Perdue, Lorenzo Semple Jr, scénariste de Flash Gordon, et Michel Legrand, compositeur attitré de Jacques Demy. Ici, James Bond ne bénéficie plus de l’entière confiance de ses supérieurs et doit faire à nouveau la preuve de ses capacités physiques. Envoyé dans un établissement spécialisé pour y subir une cure de jouvence, l’agent 007 doit cependant reprendre rapidement du service pour combattre le diabolique Blofeld et son organisation le S.P.E.C.T.R.E. Utilisant Maximilain Largo, le S.P.E.C.T.R.E. a réussi à détourner deux missiles et menace de les utiliser si les grandes puissances n’acceptent pas ses conditions. Comme son titre l’indique, Jamais plus jamais tourne en dérision les propres propos d’un Sean Connery qui assume là pleinement son âge respectable (53 ans et une moumoute toute neuve). D’où une forte propension au second degré, assortie d’un casting surprenant.

La guerre des James Bond

Si les James Bond Girls sont comme toujours d’incontestables beautés (la débutante Kim Basinger et l’exotique Barbara Carrera), le maléfique Largo, bedonnant, borgne et grimaçant dans Opération Tonnerre, est ici interprété par le jeune et sympathique Klaus-Maria Brandauer, tandis que Felix Leiter, d’habitude blanc comme neige, est devenu le Noir Bernie Casey, que le chauve Blofeld a pris les traits affables de Max Von Sydow, et que « M », que l’on connaît âgé, dégarni et vénérable, est ici le jeunot Edward Fox… Il fallait tout de même oser ! Les dialogues jouent volontiers la carte du double sens salace (« Je suis toute mouillée ! » s’exclame la fatale Fatima Blush en se jetant dans les bras d’un Bond imperturbable qui rétorque « heureusement que mon Martini Dry est resté sec »). Ce grand moment d’action et d’humour sortit sur les écrans quelques mois après Octopussy, mais la « Guerre des James Bond » annoncée avec délectation par la presse n’eut pas vraiment lieu, chacun des deux films ayant connu les fastes du box-office tout en séduisant un public aux anges: deux 007 la même année, c’était presque trop beau pour être vrai !

 

© Gilles Penso

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OCTOPUSSY (1983)

James Bond enquête sur un trafic d'objets de luxe qui camoufle le projet plus inquiétant d'un vol de bombe atomique

OCTOPUSSY

1983 – GB

Réalisé par John Glen

Avec Roger Moore, Maud Adams, Louis Jourdan, Kristina Wayborn, Kabir Bedi, Steven Berkoff, Robert Brown, Douglas Wilmer

THEMA ESPIONNAGE ET SCIENCE-FICTION I SAGA JAMES BOND

Sous les traits vieillissants de Roger Moore, l’agent 007 enquête ici sur la vente aux enchères sur les marchés internationaux de plusieurs œufs de Fabergé, des joyaux rares. On en retrouve un faux entre les mains de l’agent 009 tué en Allemagne de l’Est. Incarné avec charisme par Robert Brown après le décès du vénérable Bernard Lee, « M » envoie James Bond assister à la vente de l’un des œufs, acheté à un prix exorbitant par Kamal Khan (Louis Jourdan, un méchant qui manque singulièrement de panache). Celui-ci remplace les originaux par des faux. Son gang de voleurs de bijoux est dirigé par la riche et belle Octopussy (Maud Adams, déjà James Bond girl dans L’Homme au pistolet d’or), camouflant ses activités sous le couvert d’un cirque voyageant dans son propre train d’Est en Ouest. Le vrai méchant du film est en fait le général Orlov, cerveau de toute cette préparation, qui compte dérober une bombe atomique dans une base américaine.

Rien que pour vos yeux, réalisé deux ans plus tôt, retrouvait l’ambiance d’espionnage pur et dur des premières aventures de James Bond, tandis que Dangereusement vôtre, sorti deux ans plus tard, allait à nouveau se laisser griser par les excès science-fictionnels, la démesure et l’auto-parodie. Octopussy se situe entre ces deux tendances, empruntant son titre évocateur à une nouvelle d’Ian Fleming. Sans rapport avec le texte initial, l’intrigue penche vers le thriller classique (la mort de 009, le trafic de bijoux, la chasse à l’homme en Inde) et se traîne même un peu dans sa première partie. Mais les scénaristes ne résistent pas au monde menacé par une bombe atomique, à l’île paradisiaque peuplée de femmes sculpturales, et à des clins d’œils humoristiques dépassant en outrance ceux – pourtant gratinés – de Moonraker. Il faut entendre James Bond se balancer au bout d’une liane en poussant le cri de Tarzan !

Le cri de Tarzan

La scène prégénérique, servie par des effets visuels magistraux, est un petit chef d’œuvre de dérision et d’action. On y voit Bond à bord d’un mini-jet monoplace, poursuivi par un missile à tête chercheuse. Plus tard, en Inde, on ne peut s’empêcher de penser à Indiana Jones et le temple maudit, tant les décors, les personnages et même les animaux semblent annoncer le film de Spielberg. C’est finalement un juste retour des choses, dans la mesure où le père d’E.T. rêvait de réaliser lui-même un James Bond, à l’époque de Rien que pour vos yeux, avant que George Lucas ne lui propose de réaliser Les Aventuriers de l’Arche Perdue. Le roi de la cascade Rémy Julienne nous offre cette fois une hallucinante poursuite en triporteurs au beau milieu d’un marché indien. « Pour pouvoir se cabrer et sauter, ces véhicules étaient entièrement modifiés dans nos ateliers », raconte Julienne, « parce que si nous les avions utilisés tels quels, ils n’auraient jamais dépassé les quinze kilomètres à l’heure. Pas terrible pour une poursuite censée être spectaculaire ! » (1) De retour derrière le pupitre après l’interlude proposé par Bill Conti dans le film précédent, John Barry compose pour Octopussy une partition plus axée sur la romance que sur l’action, dotant notamment le James Bond Theme d’une réorchestration pour cordes et cuivres du meilleur effet.

 

(1) Propos recueillis par votre serviteur en février 1998

 

© Gilles Penso

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RIEN QUE POUR VOS YEUX (1981)

Après s'être transformé en émule de Luke Skywalker, James Bond redescend sur terre pour une aventure plus réaliste

FOR YOUR EYES ONLY

1981 – GB

Réalisé par John Glen

Avec Roger Moore, Carole Bouquet, Julian Glover, Topol, Lynn-Holly Johnson, Cassandra Harris, Michael Gothard, John Wyman

THEMA ESPIONNAGE ET SCIENCE-FICTION I SAGA JAMES BOND

Moonraker avait battu tous les records au box-office, mais où envoyer James Bond maintenant qu’il avait conquis l’espace ? Refusant de poursuivre dans la voie de la surenchère, le producteur Albert Broccoli jugea préférable de ramener son héros sur Terre pour une aventure d’espionnage plus réaliste. Rien que pour vos yeux tire son inspiration d’une nouvelle homonyme d’Ian Fleming (« Bons Baisers de Paris » en français) et marque les débuts derrière la caméra de John Glen. Pilier de la saga (il officia comme monteur et réalisateur de deuxième équipe de trois James Bond et en mettra en scène cinq), Glen a l’excellente idée de faire démarrer le film par la visite de 007 sur la tombe de son épouse, créant un lien direct avec Au service secret de Sa Majesté. La suite du prégénérique ne démérite pas, puisque Bond est piégé dans un hélicoptère commandé à distance puis se débarrasse d’un super-vilain chauve cloué sur un fauteuil roulant en le jetant dans la cheminée d’une usine. Même si le nom de Blofeld n’est jamais prononcé pour des raisons juridiques (Kevin McClory, producteur d’Opération Tonnerre, avait acquis les droits exclusifs d’utilisation des noms Blofeld et S.P.E.C.T.R.E.), il est évident que nous avons affaire à l’ennemi juré de Bond, faisant là sa dernière apparition à l’écran. Après ce prologue, 007 se heurte à Aris Kristatos. Celui-ci projette de voler l’ATAC, un appareil qui donne l’ordre aux sous-marins britanniques de lancer leurs missiles.

Carole Bouquet apporte sa froide beauté à la James Bond Girl de service, Melina Havelock, virtuose de l’arbalète en quête de vengeance après l’assassinat de ses parents, et Julian Glover incarne un vilain cultivé adepte du double jeu et de la traîtrise de haut vol. Hélas, Bernard Lee, interprète du patron « M » depuis le tout premier film de la série, décéda peu de temps avant le début du tournage, laissant vacant son rôle que les scénaristes jugèrent bon de ne pas intégrer dans le récit, histoire de marquer le deuil. Rien que pour vos yeux inaugure en revanche l’arrivée d’un nouveau collaborateur régulier de la série, le vétéran de la cascade Rémy Julienne, réglant une séquence d’action mouvementée et semi-burlesque avec une 2CV Citroën, l’une des rares touches d’humour d’un film par ailleurs assez sérieux.

Le James Bond préféré de Roger Moore

« Dans ce genre de scène, je travaille en étroite collaboration avec l’équipe des effets spéciaux pyrotechniques », nous explique-t-il. « Je me débrouille également pour que les gens de mon équipe jouent le rôle des méchants. Ça leur permet de conduire réellement les voitures et d’effectuer eux-mêmes les cascades. » (1) Parmi les autres moments forts du film, on se souviendra d’une poursuite à ski nerveuse, de l’affrontement sous-marin contre un scaphandrier, et surtout de la vertigineuse escalade d’un piton rocheux au cours de la séquence finale. Considéré par Roger Moore comme le meilleur James Bond auquel il participa (ce qu’on ressent à travers son interprétation bien moins désinvolte qu’à l’accoutumée), Rien que pour vos yeux fut un nouveau succès qui renfloua la compagnie United Artists, au bord de la faillite après le flop retentissant de La Porte du Paradis.


(1) Propos recueillis par votre serviteur en février 1998

 

© Gilles Penso

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L’ORPHELINAT (2007)

Une famille s'installe dans un orphelinat pour le réhabiliter mais une étrange ambiance y règne et des "êtres invisibles" semblent y séjourner…

EL ORFANATO

2007 – ESPAGNE

Réalisé par Juan Antonio Bayona

Avec Belen Rueda, Fernando Cayo, Roger Princep, Mabel Rivera, Montserrat Carulla, Andrès Gertrudix, Géraldine Chaplin

THEMA FANTÔMES

Les cinéastes espagnols ont une manière très personnelle d’aborder les histoires de fantômes, et les liens qui se tissent naturellement entre L’Orphelinat et quelques-uns de ses aînés ibériques tels que Fragile, Darkness ou L’Echine du diable sont indéniables. D’ailleurs, c’est Guillermo del Toro qui officie ici en tant que producteur, donnant sa chance au débutant Juan Antonio Bayona. Une fois de plus, l’auteur du Labyrinthe de Pan a eu du flair, car L’Orphelinat est une pure merveille, un film d’épouvante à fleur de peau qui marqua durablement le public et la critique, unanimes quant aux qualités du film. Ainsi remporta-t-il un succès colossal au moment de sa sortie (il battit tous ses confrères au box-office espagnol de 2007) et fut-il bardé de récompenses sur tous les continents (Grand Prix du Festival Gérardmer, sept Goyas, deux prix à Fantasporto…). En compagnie de son époux Carlos (Fernando Cayo) et de leur fils Simon (Roger Princep), Laura (Belen Rueda) s’installe dans l’orphelinat où elle a grandi, dans l’espoir de le reconvertir en centre spécialisé pour enfants handicapés. Prenant peu à peu possession des lieux, Simon s’invente des amis imaginaires avec lesquels il s’amuse souvent. Or un jour, une étrange assistante sociale rend visite à Laura et lui affirme qu’elle sait beaucoup de choses sur le garçon, des choses que seul le couple croyait savoir : Simon est un enfant adopté et gravement malade. Peu après, au cours d’une petite fête que donnent Laura et Carlos en l’honneur de leurs futurs pensionnaires, Simon disparaît. Malgré les recherches opiniâtres de la police, il demeure introuvable.

Les mois s’écoulent douloureusement, et Carlos se résigne peu à peu. Mais Laura refuse de porter le deuil, d’autant qu’elle est persuadée de percevoir elle aussi les amis imaginaires de son fils. En désespoir de cause, elle fait appel à une équipe de parapsychologues qui investissent la maison. Pour la médium Aurora (Géraldine Chaplin), il est clair que les « amis invisibles » en question sont des fantômes. « Quand un événement terrible se produit, il reste parfois une trace, une blessure qui fait le lien entre deux lignes du temps », affirme-t-elle . « C’est comme un écho qui se répète encore et encore pour se faire entendre. » Et de conclure : « il faut croire pour voir, et non l’inverse ».

« Il faut croire pour voir, et non l'inverse... »

Cette séquence n’est pas sans évoquer Poltergeist, mais L’Orphelinat échappe à toutes comparaisons grâce à sa singularité, sa sensibilité et sa profondeur, triple témoignage d’un réalisateur promis – n’en doutons pas – à une belle carrière. L’épouvante que distille J.A. Bayona est feutrée, évacuant tous les effets choc et les déflagrations sonores habituellement de mise au profit d’un climat oppressant. La peur que ressentent de concert les spectateurs et l’héroïne n’en est pas moins palpable, comme en atteste cette ultime partie d’« un deux trois soleil » réminiscence des jeux enfantins qui émaillent le prologue du film, ou ces apparitions récurrentes d’un inquiétant garçon au visage caché sous un sac de toile. Au cours d’un climax bouleversant, l’angoisse se mue en tristesse puis en mélancolie, concluant en beauté cette œuvre d’exception.

© Gilles Penso

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L’ESPION QUI M’AIMAIT (1977)

Roger Moore s'impose enfin comme l'espion qu'on aimait dans l'un des James Bond les plus flamboyants de la série

THE SPY WHO LOVED ME

1977 – GB

Réalisé par Lewis Gilbert

Avec Roger Moore, Barbara Bach, Curt Jurgens, Richard Kiel, Caroline Munro, Walter Gotell, Geoffrey Keen, Bernard Lee

THEMA ESPIONNAGE ET SCIENCE-FICTION I SAGA JAMES BOND

James Bond allait-il survivre à l’accueil mitigé de L’Homme au pistolet d’or et à la rupture médiatisée de ses deux producteurs ? Rien n’était moins sûr, et Albert Broccoli, désormais seul à la tête de la franchise, décida de jouer le tout pour le tout : un budget colossal, la fabrication du studio le plus grand du monde (le célèbre plateau 007 de Pinewood), des séquences d’action dépassant toutes celles vues jusqu’à présent, des super-vilains dignes d’une bande dessinée, de nouveaux véhicules bourrés de gadgets, bref une surenchère à tous les niveaux. Le résultat aurait pu être indigeste, mais force est de reconnaître que L’Espion qui m’aimait est un spectacle euphorisant, probablement l’un des films les plus réussis de la série tout entière. Le scénario n’a rien à voir avec le roman du même titre, dans la mesure où le texte original s’éloignait des aventures classiques de l’agent 007 pour conter en huis clos les états d’âme d’une jeune femme à la première personne. La séquence pré-générique ressemble en fait à une variante aquatique de celle d’On ne vit que deux fois, car deux sous-marins nucléaires – un britannique et un soviétique – disparaissent sans laisser de trace, engloutis en réalité par un gigantesque tanker. Leur trajet secret ne peut être détecté que grâce à un microfilm que James Bond est chargé de récupérer.

Après une surprise nous laissant croire un instant que l’agent qui s’associera à Bond est un homme – une espèce de sosie de George Lazenby – pour nous révéler qu’il s’agit en réalité de la toute belle Barbara Bach, le film nous gratifie d’une cascade vertigineuse : le saut à ski de 007 au-dessus d’un immense précipice, qui s’achève par le déploiement d’un parachute aux couleurs de l’Union Jack. Et le générique de retentir, l’inoubliable « Nobody Does It Better » chaleureusement entonné par Carly Simon. Incarné par l’acteur allemand Curt Jurgens, le grand méchant du film est Karl Stromberg, un biologiste spécialiste de la faune marine qui possède ses propres laboratoires en Sardaigne. Réfugié dans sa colossale base sous-marine Atlantis, Stromberg compte utiliser les missiles nucléaires des sous-marins qu’il a volés pour détruire New York et Moscou, puis le reste du monde, pour créer son propre univers sous-marin. Voilà qui ne manque pas d’originalité.

James Bond Disco

Mais ce savant fou se fait voler la vedette par son homme de main, un colosse aux dents d’acier surnommé Requin, à qui Richard Kiel prête son impressionnante silhouette. L’Espion qui m’aimait se paie aussi le luxe d’une nouvelle « bondmobile » au moins aussi remarquable que l’Aston Martin de Goldfinger : une Lotus Esprit blanche qui se mue en bathyscaphe et regorge d’armes en tout genre. Aux côtés d’un Roger Moore plus détendu que jamais, Barbara Bach capte instantanément tous les regards sous l’uniforme de l’espionne délicieusement glaciale Anya Amasova, tandis que Caroline Munro fait une apparition brève mais remarquée dans le rôle de Naomi, pilote à la solde de Stromberg. Le caractère volontairement excessif de ce dixième James Bond trouve son écho dans une bande originale outrancièrement disco signée Marvin Hamlisch. 

 

© Gilles Penso

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L’HOMME AU PISTOLET D’OR (1974)

Un James Bond mineur mais qui aura tout de même permis à Roger Moore d'affronter le grand Christopher Lee

THE MAN WITH THE GOLDEN GUN

1974 – GB

Réalisé par Guy Hamilton

Avec Guy Hamilton (Grande-Bretagne)

Avec Roger Moore, Christopher Lee, Britt Ekland, Hervé Villechaize, Maud Adams, Richard Loo, Soon-Taik Oh

THEMA ESPIONNAGE ET SCIENCE-FICTION I SAGA JAMES BOND

James Bond contre Dracula ! C’est en ces termes que les cinéphiles entendirent parler de L’Homme au pistolet d’or, dans la mesure où Roger Moore affronte ici un tueur redoutable incarné par l’immense Christopher Lee. Pour la petite histoire, Lee était un cousin éloigné d’Ian Fleming et avait postulé en 1962 pour le rôle du Docteur No, qui lui échappa de justesse au profit de Joseph Wiseman. Inspiré du roman homonyme publié en 1965, L’Homme au pistolet d’or lance James Bond à la recherche du Sol-X Agitateur, un appareil miniaturisé capable de transformer l’énergie du soleil en électricité. Or ce dispositif très convoité est tombé entre les mains de Francisco Scaramanga, qu’incarne avec beaucoup de délectation l’ex-vampire de la Hammer. Installé sur une île dans laquelle il a fait bâtir un labyrinthe truffé de pièges, cet assassin professionnel grave sur une balle en or le nom de ses futures victimes. Or James Bond en a reçu une marquée de son patronyme. Un duel à mort se prépare donc entre les deux hommes, mais ce point de départ prometteur et l’alléchant casting ne sauvent guère le film du naufrage.

Car autant l’avouer, L’Homme au pistolet d’or est probablement le plus anecdotique de tous les épisodes de la série. Scénario évasif, mise en scène pataude, humour au ras des pâquerettes, personnages secondaires transparents, rien ne sauve l’entreprise. Même les séquences d’action les plus intéressantes, marque de fabrique de la franchise, sont sabrées par un désamorçage cartoonesque du plus mauvais goût. Le meilleur exemple est probablement l’hallucinante cascade automobile réalisée par Jay Milligan, au cours de laquelle une AMC Hornet saute au-dessus d’un pont détruit, effectue un tour sur elle-même, puis retombe sans encombre sur ses roues. En l’état, la scène est d’une efficacité indéniable. Mais l’ajout ridicule d’un effet sonore à la Tex Avery annihile définitivement son impact. Sans compter la présence insupportable du shérif J.W. Pepper (Clifton James), un faire-valoir « comique » que les scénaristes nous avaient déjà infligé dans Vivre et laisser mourir. Et que dire de ce passage carrément embarrassant au cours duquel Bond est sauvé par deux jeunes filles karatékas qui mettent une raclée à des hommes de main agressifs ?

La cour de Scaramanga

Au cours de sa mission, Bond est épaulé par Mary Goodnight (Britt Ekland, inoubliable dans The Wicker Man), une jeune espionne agréable à regarder lorsqu’elle arbore un minuscule maillot deux pièces, mais empotée et maladroite au-delà de toute vraisemblance. La cour de Scaramanga s’avère plus intéressante, constituée principalement du nain Trik-Trak (Hervé Villechaize, héros de la série L’île fantastique) et de la belle Andrea Anders (Maud Adams, future interprète d’Octopussy). Quelques gadgets étonnants égaient le film, notamment le pistolet d’or de Scaramanga (constitué d’un étui à cigarettes, d’un briquet, d’un stylo et d’un bouton de manchette assemblés) ou encore sa voiture-avion conçue par le génie des effets spéciaux John Stears. Les recettes du film ayant été fort décevantes et le duo Saltzman Broccoli s’étant officiellement séparé, la série faillit bien s’arrêter après ce passable Homme au pistolet d’or.

 

© Gilles Penso

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VIVRE ET LAISSER MOURIR (1973)

Après Sean Connery et George Lazenby, James Bond prend le visage décontracté de Roger Moore et se retrouve dans une étrange affaire qui flirte avec le vaudou

LIVE AND LET DIE

1973 – GB

Réalisé par Guy Hamilton

Avec Roger Moore, Yaphet Kotto, Jane Seymour, Clifton James, Julius Harris, David Hedison, Geoffrey Holder

THEMA ESPIONNAGE ET SCIENCE-FICTION I SAGA JAMES BOND

Après Les Diamants sont éternels, c’est Roger Moore qui remplace officiellement Sean Connery dans le rôle laissé vacant de l’agent 007. Très à l’aise, ce dernier campe un James Bond décontracté et plein d’humour, à mi-chemin entre Brett Sinclair (Amicalement vôtre) et Simon Templar (Le Saint). Au fil des épisodes suivants, Moore saura effacer peu à peu les empreintes de ses héros précédents pour se construire un personnage à part entière. L’intrigue de Vivre et laisser mourir flirte avec le vaudou, ce qui imprègne le film d’un climat fantastique inhabituel pour la série. Dès la scène pré-générique, trois agents secrets sont tués en l’espace de 24 heures. Bond doit découvrir si ces trois meurtres ont un rapport entre eux. Ses recherches le mènent d’abord à Harlem, en compagnie de son ami Felix Leiter de la CIA (David Hedison, ex-Mouche noire), où il est kidnappé par le mystérieux Mister Big, à qui Ian Fleming prêtait des propos pleins d’emphase : « Je suis par nature et par goût un loup, et je vis suivant la loi des loups. Naturellement, le troupeau n’a qu’un mot pour qualifier un tel homme. Le mot “criminel” ».

Captif, Bond fait la connaissance de Blanche Solitaire, experte en tarot et douée de pouvoirs divinatoires (la délicieuse Jane Seymour). L’une des idées amusantes du scénario est que Solitaire, lorsqu’elle exulte enfin dans les bras décidément irrésistibles du beau James, perd à la fois sa virginité et tous ses dons de voyance, redevenant alors simple mortelle. Une fois que 007 a réussi à échapper aux griffes de Mister Big, il se rend à l’île de San Monique où le docteur Kananga (Yaphet Kotto, future victime d’Alien) cultive des champs entiers de pavots sous des filets de camouflage. Finalement, notre héros débarque à la Nouvelle-Orléans où se fabrique l’héroïne. Mister Big et le docteur Kananga s’avèrent n’être qu’une seule et même personne, laquelle a l’intention de distribuer gratuitement deux tonnes d’héroïne pour obtenir le contrôle du marché américain.

Au cœur de la blaxploitation

Le film bascule alors dans les excès les plus outranciers, nos deux héros étant attachés à un mécanisme qui les engloutit progressivement dans un bassin plein de requins (une idée qui resservira dans Austin Powers), puis Solitaire étant carrément promise à un sacrifice vaudou avec sorcier maléfique, danses tribales et serpents venimeux. Au cours du climax, le méchant avale une capsule d’air comprimé et finit par gonfler comme un ballon avant d’exploser ! Même s’il est doté de scènes d’actions franchement réussies (la cavalcade à bord de l’autobus à impériale, la confrontation avec les alligators, le saut en deltaplane, la poursuite en hors-bord dans les canaux de la Louisiane), Vivre et laisser mourir n’est pas toujours très convaincant et ressemble presque à un essai, comme s’il s’agissait d’une première tentative pour donner un nouveau souffle à la série. D’où notamment le remplacement provisoire du compositeur John Barry par George Martin, célèbre producteur des Beatles (c’est d’ailleurs Paul McCartney qui a signé la chanson du générique), dont la partition se réfère directement au style musical funky de la blaxploitation des années 70.


© Gilles Penso

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BRAINSTORM (1983)

Douglas Trumbull anticipe avec des décennies d'avance le développement des univers virtuels

BRAINSTORM

1983 – USA

Réalisé par Douglas Trumbull

Avec Christopher Walken, Natalie Wood, Louise Fletcher, Cliff Robertson, Jordan Christopher, Donald Hotton

THEMA MONDES PARALLELES ET MONDES VIRTUELS

Concepteur des magnifiques effets visuels de 2001 l’odyssée de l’espace, Rencontres du troisième type, Star Trek le film et Blade Runner, Douglas Trumbull était passé derrière la caméra au début des années 70 pour réaliser un space opéra écologique au ton très personnel, Silent Running. Dix ans plus tard, le voilà aux commandes de son second long-métrage, Brainstorm, mettant en vedette Christopher Walken et Natalie Wood. Assisté par Richard Yuricich, Trumbull entame le tournage de ce film alors que Blade Runner n’est pas encore achevé, laissant à David Dyer le soin de finaliser les effets visuels du chef d’œuvre de Ridley Scott. Ecrit par Philip Frank Messina d’après une histoire originale de Bruce Joel Rubin et Robert Stitzel, le scénario de Brainstorm imagine une machine reliée au cerveau humain et permettant de lire et d’enregistrer toutes les sensations physiques, émotionnelles et intellectuelles d’un individu. Lesdites sensations peuvent ensuite être reproduites et revécues intégralement par n’importe quelle autre personne. A l’instar de l’Au-delà du réel de Ken Russell, Brainstorm se vit surtout comme un trip, un étrange voyage en caméra souvent subjective parsemé de visions fantastiques. L’originalité du postulat de départ se double d’un traitement technique novateur, avec l’utilisation d’un format d’image 4/3 s’élargissant en Cinémascope pour les visions des porteurs du casque, et des effets spéciaux visuels inédits.

Prophétisant avec une décennie d’avance l’énorme développement des univers virtuels, Brainstorm n’est pas sans annoncer les thématiques que déclinera James Cameron pour Strange Days. A vrai dire, la mise en scène de Trumbull élève le film à un niveau que son scénario seul ne lui aurait pas permis d’atteindre. En effet, l’enjeu pour lequel tout le monde s’agite et se poursuit dans le film reste finalement assez obscur. S’agit-il de cette fabuleuse invention capable d’enregistrer et de restituer les sensations, ou seulement de la bande enregistrée de la mort de Lilian Reynolds (Louise Fletcher) ? Comment l’armée compte-t-elle s’en servir ? Michael Brace (Christopher Walken) cherche-t-il à empêcher les militaires de s’approprier l’invention, ou n’a-t-il pour seul but que de se passer ladite bande une fois en entier pour en tester l’effet ? Quelles sont les motivations d’Alex Terson (Cliff Robertson) ? Toutes ces interrogations restant dans le flou, il s’avère bien difficile de prendre fait et cause pour ou contre les protagonistes. Mais il est clair que la dramaturgie de Brainstorm bouleverse les habitudes des spectateurs pour les inviter à vivre une expérience presque métaphysique.

La mort prématurée de Natalie Wood

Frappé par la mort prématurée de Natalie Wood, le film manque bien ne jamais voir le jour, les cadres du studio s’efforçant d’en interrompre le tournage. Mais Trumbull se bat jusqu’au bout et mène son projet à bien, recueillant un beau succès d’estime à défaut de s’attirer les faveurs d’un large public. La mésaventure le marque cependant suffisamment pour qu’il décide dès lors d’abandonner définitivement Hollywood au profit des films dynamiques conçus pour les parcs d’attractions. Il en profite pour mettre en application le Showscan, un procédé de prise de vues et de projection à soixante images par seconde qui offre aux spectateurs une luminosité et une finesse d’image inégalées et que les limitations budgétaires de Brainstorm ne lui permettaient pas d’expérimenter. Revoir ce film aujourd’hui permet de mesurer à quel point Trumbull était un incroyable visionnaire.

 

© Gilles Penso

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INCUBUS (1965)

Un film d'épouvante tourné en esperanto dans lequel William Shatner tombe amoureux d'une émissaire du diable

INCUBUS

1966 – USA

Réalisé par Leslie Stevens

Avec William Shatner, Allyson Ames, Eloise Hardt, Robert Fortier, Ann Atmar, Milos Milos, Paolo Cossa, Ted Mossman

THEMA DIABLE ET DEMONS

Prolifique scénariste pour le grand et le petit écran, Leslie Stevens a notamment participé à la création de la série Au-delà du réel en 1963. Avec Incubus, il se lançait un défi pour le moins inattendu : mettre en scène des créatures diaboliques dans un film dont tous les dialogues seraient prononcés en esperanto ! Ce choix linguistique inédit lui permettait de construire un récit universel ancré dans une tradition latine. Le prologue nous montre un malade étanchant sa soif à l’eau de la « source aux cerfs », censée selon la légende guérir tous les maux. L’homme se laisse attirer par une séduisante jeune fille (Allyson Ames) qui l’entraîne jusque sur une plage, l’incite à se baigner et le noie finalement sous sa sandale… Cette femme fatale dont la beauté glaciale n’aurait pas dépareillé dans un film d’Alfred Hitchcock est une succube nommée Kia. Sa mission consiste à attirer des âmes perverties et à les livrer au Seigneur des Ténèbres. Mais elle est lassée de cette routine. Pour devenir la préférée de son maître, elle décide de corrompre une âme pure et jette son dévolu sur Marco (William Shatner), un soldat blessé qui vit dans une ferme avec sa sœur Arndis (Ann Atmar).

Lorsque Kia lui rend visite, feignant s’être égarée, une éclipse survient, chacun étant libre d’interpréter ce présage à sa guise. « Certains disent que c’est un dragon qui avale le soleil » lance Shatner dans un étrange espéranto prononcé avec l’accent canadien. Kia n’a aucun mal à le séduire, mais Marco lui voue aussitôt un amour d’une grande pureté et a même l’impudence de la mener jusqu’à l’autel d’une église. Paniquée, la tentatrice prend la fuite et écoute les conseils de son aînée qui prône la vengeance : « Fends la surface de la terre, ouvre l’abîme, lâche Incubus ! » Etonnante, la scène où toutes deux invoquent le diable laisse apparaître la silhouette d’un démon ailé tandis que retentit un cri d’animal. Puis un homme surgit de terre, en une vision sinistre digne du Masque du démon : c’est Incubus (Milos Milos), le frère de Kia. Dès lors, la lutte sera rude entre les forces du bien et du mal… 

Un film maudit ?

Incubus traîne depuis de longues années la réputation de chef d’œuvre maudit, réputation qui sied fort bien, il faut l’avouer, à un long-métrage mettant en présence des serviteurs de Satan. Jamais sorti en salles aux Etats-Unis malgré son accueil enthousiaste dans de nombreux festivals à travers le monde, le film sembla perdu à tout jamais lorsqu’un incendie réduisit en cendres l’original et la plupart de ses copies. Un drame n’arrivant généralement pas seul, deux des acteurs, Milos Milos et Ann Atmar, se donnèrent la mort un an après le tournage. Finalement, William Shatner fut l’un des seuls à ressortir grandi d’Incubus, puisqu’il triomphait dès l’année suivante avec la série Star Trek. S’achevant sur la séquence hallucinante d’un affrontement entre Kia et son frère soudain transformé en bouc (sans trucage, par la seule magie du montage), Incubus ressortit des limbes en 1998, lorsqu’une copie miraculée fut découverte à la Cinémathèque Française. Désormais visible en DVD, il saute aux yeux par ses qualités formelles et son atmosphère insolite voisine de certaines œuvres d’Ingmar Bergman.

 

© Gilles Penso

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