SAW 3D : CHAPITRE FINAL (2010)

La 3D apporte du relief aux pièges mortels de ce septième opus de la saga Saw, mais son scénario reste hélas d'une grande platitude

SAW 3D

2010 – USA

Réalisé par Kevin Greutert

Avec Sean Patrick Flanery, Costas Mandylor, Chad Donella, Betsy Russell, Gina Holden, Tobin Bell, Cary Elwes, Laurence Anthony

THEMA TUEURS I SAGA SAW

Une franchise aussi juteuse que Saw ne pouvait pas décemment passer à côté du phénomène 3D. Ainsi, comme jadis Meurtres en trois dimensions ou Jaws 3D, le septième opus de la saga se pare-t-il de la prise de vue en relief. Cette décision n’est pas sans conséquences sur le budget du film, qui grimpe à 17 millions de dollars (aucun des épisodes précédents ne dépassait les 11 millions), ni sur sa durée de tournage qui s’étale sur neuf semaines, au lieu des six habituelles. Bien plus stratégique qu’artistique, ce choix se traduit à l’écran par une gadgétisation à outrance du procédé le temps d’une poignée de séquences – objets contondants qui se dirigent vers la caméra, piège vertigineux où les protagonistes risquent de tomber dans le vide, débris qui voltigent au moment des explosions, etc. Le reste du temps, la 3D est quasi-inexistante, puisque la mise en scène de Kevin Geutert (déjà signataire de Saw 6, l’épisode préféré des charcutiers) s’avère d’une platitude absolue.

Les prémisses de Saw 3D laissent pourtant espérer une secourable tentative de renouvellement, sous l’impulsion des scénaristes Marcus Dunstan et Patrick Melton (habitués de longue date de la franchise). Dès l’ouverture, la surprise est de taille, puisque pour une fois le piège dans lequel sont saisies trois infortunées victimes troque le traditionnel huis-clos rouillé et industriel contre une vitrine de magasin en plein centre-ville. Ainsi le massacre est-il visible par une foule de quidams qui, au lieu de chercher à porter secours à leur prochain, ont plutôt tendance à filmer la scène avec leur téléphone portable ! L’idée est savoureuse, et la série semble du même coup prendre une dimension différente, comme si Jigsaw souhaitait désormais muer ses machinations en véritables shows adressés au grand public. Rien n’interdit d’ailleurs de voir chez ces passants mi-horrifiés mi-fascinés un miroir dans lequel se reflèteraient les spectateurs du film.

Mise en abîme

Cette démarche, qui n’est pas sans rappeler les mises en abîmes pratiquées par Wes Craven sur la franchise Scream, se poursuit à travers le personnage de Bobby Dagen (Sean Patrick Flanery), survivant d’un des pièges machiavéliques de Jigsaw qui s’est mué en véritable gourou. Auteur à succès, habitué des plateaux télévisés, il organise des réunions de rescapés et développe la fameuse « philosophie » selon laquelle on ne peut ressortir que grandi d’une telle expérience traumatisante. Le beau discours vole en éclats lorsque l’une des participantes lance avec lassitude : « Vous savez ce que m’a rapporté mon bras coupé ? Une place pour handicapés sur le parking du supermarché ! » Un juste retour des choses, qui augure de nouvelles perspectives pour cet ultime chapitre. Mais la suite du métrage oublie cette audace pour retomber dans les lieux communs et les passages « obligatoires » : le parcours du combattant destiné à racheter les actes d’un pécheur non repenti, les morts en cascade (visualisées par des effets spéciaux tellement excessifs qu’ils évoquent les grandes heures du Grand Guignol), les flash-back à tiroir, et une revélation de dernière minute laissant imaginer que le sous-titre « chapitre final » n’est qu’un leurre. Bref, la routine habituelle. 

© Gilles Penso

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THE VAMPIRE LOVERS (1970)

Une adaptation sulfureuse de la nouvelle Carmilla de Sheridan le Fanu, qui consacre Ingrid Pitt comme star de l'épouvante

THE VAMPIRE LOVERS

1970 – GB

Réalisé par Roy Ward Baker

Avec Ingrid Pitt, Peter Cushing, Dawn Addams, Ferdy Mayne, George Cole, Kate O’Mara, Douglas Wilmer, Madeline Smith 

THEMA VAMPIRES

Fidèlement adapté de la fameuse nouvelle « Carmilla » de Sheridan le Fanu, The Vampire Lovers porte indiscutablement le seau des chefs d’œuvre de l’épouvante que la Hammer tourna dans les années 60, tout en y intégrant la décisive libération des mœurs des années 70. D’où un conte fantastique sensiblement imprégné d’érotisme décomplexé et d’horreur graphique. Le prologue donne le ton. Un homme y traque nuitamment un vampire dans une crypte embrumée. La créature s’avère être une magnifique jeune femme au décolleté vertigineux, et l’homme tombe sous son charme surnaturel. Mais lorsque la suceuse de sang étreint le chasseur, son opulente poitrine entre en contact avec le crucifix qu’il porte en bandoulière. Elle recule vivement, le charme est rompu, et l’homme en profite pour la décapiter d’un bon coup d’épée.

La suite du film nous familiarise avec une étrange jeune fille du nom de Marcilla, qui vient passer quelques jours chez le général Von Spielsdorf (le grand Peter Cushing en personne) et se lie d’amitié avec sa fille Laura. Peu après, cette dernière dépérit, victime d’une maladie inconnue. Ce que le général ignore, c’est que Marcilla est un redoutable vampire, au pouvoir de séduction implacable, qui se livre à de langoureux ébats amoureux avec ses victimes avant de les vider de leur sang. D’où de troublantes séquences saphiques bénéficiant du charme exotique d’Ingrid Pitt, et concrétisant sans retenue une thèse jusqu’alors prudemment symbolisée chez la Hammer : la morsure du vampire est un acte érotique. Après la mort de Laura, Marcilla disparaît et réapparaît quelques jours plus tard sous l’identité de Carmilla. Elle s’installe alors chez une autre famille de la haute bourgeoisie, vampirisant cette fois-ci la jeune Emma (incarnée par la délicieuse Madeline Smith), ainsi que la gouvernante de la maison et le maître d’hôtel.

La dernière descendante des Karnstein

Le vampirisme s’insinue donc lentement, comme un mal inconnu laissant pantois tous les médecins orthodoxes. « Sans m’en rendre compte, je me trouvais à un stade avancé de la plus bizarre maladie qui eût jamais affligé un être humain » nous conte Emma dans la nouvelle de Sheridan le Fanu. Il faudra l’énergie combinée d’une demi-douzaine d’hommes décidés à en découdre une bonne fois pour toute pour mettre enfin hors d’état de nuire la femme-vampire, dernière descendante de la redoutable famille Karnstein, avec un coup de pieu bien placé et une décapitation en règle. Roy Ward Baker et ses trois scénaristes (Harry Fine, Tudor Gates et Michael Style) retrouvent là toute l’essence vénéneuse du texte de Le Fanu, dont l’apparente naïveté dissimule à peine un érotisme contre-nature surprenant en plein contexte victorien (le récit fut publié en 1872, soit 25 ans avant le « Dracula » de Bram Stoker). The Vampire Lovers est donc une œuvre riche et précieuse, renouvelant le mythe tout en l’inscrivant dans un cadre classique, et consacrant Ingrid Pitt comme nouvelle égérie des fantasticophiles. Elle reprendra d’ailleurs un rôle voisin la même année dans Comtesse Dracula de Peter Sasdy.

 

© Gilles Penso

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LES MAÎTRESSES DE DRACULA (1960)

Un film au titre mensonger mais à l'intrigue passionnante qui met en scène un nouveau vampire : le comte Meinster

BRIDES OF DRACULA

1960 – GB

Réalisé par Terence Fisher

Avec David Peel, Peter Cushing, Yvonne Monlaur, Martita Hunt, Freda Jackson, Miles Malleson, Henry Oscar, Mona Washbourne

THEMA VAMPIRES I DRACULA DE LA HAMMER

Dans la foulée de l’excellent Cauchemar de Dracula, Terence Fisher dirigea ces Maîtresses de Dracula au titre quelque peu mensonger dans la mesure où le suceur de sang imaginé par Bram Stoker n’y figure pas, au profit d’un autre comte vampire qui n’a rien à lui envier en matière de charisme et de férocité. Véritable chef d’œuvre du genre, éclipsant largement plusieurs « Dracula » officiels avec Christopher Lee, Les Maîtresses de Dracula bénéficie d’un scénario novateur qui multiplie les idées originales et s’offre de nombreuses variantes autour d’un mythe pourtant connu. Nous y suivons les pérégrinations de Marianne Danielle, une jeune femme regagnant son poste d’institutrice de l’Académie Féminine de Badstein. Belle comme si elle était née sous la plume du dessinateur John Romita, Yvonne Monlaur incarne avec beaucoup de sensibilité cette demoiselle du 19ème siècle qui est amenée à passer une nuit au château transylvanien de la baronne Meinster. Excentrique et précédée d’une sinistre réputation, la vieille dame maintient enchaîné dans une pièce isolée son fils (David Peel), un séduisant jeune homme qui supplie Marianne de le libérer. La situation est suffisamment inattendue pour que le spectateur, à l’instar de l’héroïne, se demande un instant quelle attitude adopter. Qui croire ? L’étrange baronne qui déclare que son fils est dangereux, ou le beau garçon affirmant que sa mère est folle ?

Le phénomène d’identification fonctionne ainsi à plein régime, et lorsque Marianne décide finalement de libérer le fils Meinster, elle réalise bien vite la portée de son acte. Car notre homme est un vampire de la pire espèce, au moins aussi redoutable que Dracula malgré ses airs affables, ses cheveux blonds bien peignés et sa jolie cape bleu ciel. Dès qu’il est libre de ses mouvements, il vampirise sa mère et disparaît, tandis que Marianne, horrifiée, s’enfuit dans les bois et est recueillie au matin par le docteur Van Helsing. Ce bon vieux Peter Cushing n’apparaît ainsi qu’au bout d’une demi-heure de métrage, mais dès lors il porte presque tout le film sur ses épaules, emplissant tout l’écran de sa présence magnétique. Seul véritable lien avec Le Cauchemar de Dracula, Van Helsing mène l’enquête jusqu’au château des Meinster où il libère la baronne de son statut peu enviable de vampire.

Le visage félin de la femme vampire

Marianne, pour sa part, a rejoint son poste d’institutrice, mais elle reçoit bientôt la visite du jeune baron qui profite de son charme surnaturel pour la séduire et la demander en mariage. Au passage, il vampirise Gina, l’une des amies de Marianne, qui se mue dès lors en prédatrice bestiale. Incarnée par Andree Melly, une comédienne à la beauté étrange et au visage félin, cette femme vampire deviendra un des icônes du cinéma d’épouvante des années 60 et ornera de son envoûtante présence les affiches du film, aux côtés de David Peel qui trouva là son rôle le plus marquant. Au cours du climax, Peter Cushing mouille sa chemise, effectuant lui-même toutes les cascades nécessitées par son affrontement brutal avec Meinster, jusqu’à la mise à mort finale du vampire, fruit d’une idée scénaristique génialement inventive née de l’imagination fertile de Jimmy Sangster.

 

© Gilles Penso

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DRACULA PRINCE DES TENEBRES (1966)

Ce second Dracula de la Hammer imagine une nouvelle intrigue se passant des services du chasseur de vampires Van Helsing

DRACULA PRINCE OF DARKNESS

1966 – GB

Réalisé par Terence Fisher

Avec Christopher Lee, Barbara Shelley, Andrew Keir, Francis Matheras, Thorley Walters

THEMA DRACULA I VAMPIRES I SAGA DRACULA DE LA HAMMER

Terence Fisher fait très fort avec cette séquelle du Cauchemar de Dracula qui commence par le fameux dénouement du film original, au cours duquel Van Helsing venait à bout de Dracula en l’exposant à la lumière du soleil. Peu après, deux couples anglais font une excursion au château de Carlsbald, dans les Carpathes, appartenant au défunt comte Dracula. Ils y sont abandonnés par leur cocher, apeuré comme toujours en pareille circonstance. Klove, l’ancien serviteur de Dracula, invite cordialement les quatre vacanciers à séjourner quelques temps au château. Dès lors, le jeune Kent, son épouse Diana, son frère Allan et sa belle-sœur Helen vont connaître les heures les plus éprouvantes de leur vie. Au menu: égorgements, baisers mortels et coups de pieu dans le cœur…

Pas de Peter Cushing/Van Helsing ici, mais un moine excentrique aux méthodes expéditives, le père Sandor,  et deux couples prisonniers du château de Dracula et de son maléfique serviteur. Thorley Walters reprend ici le rôle de Renfield tenu par Dwight Frye en 1931 (le personnage avait été évacué du scénario du Cauchemar de Dracula par souci de gain de temps et de concision). Barbara Hershey (dont tous les hurlements furent doublés par Susan Farmer) est étonnante dans le rôle à deux facettes d’Helen, la londonienne apeurée muée en aguichante femme-vampire. Mais à force de se concentrer sur tous ces personnages « secondaires », Fisher néglige un peu trop sa « vedette », autrement dit Christopher Lee qui ne fait que de brèves (mais non moins marquantes) apparitions et campe un Dracula tellement bestial qu’il ne prononce plus une seule phrase de dialogue.

Un vampire muet et bestial

En fait, le scénario de Jimmy Sangster lui réservait bien quelques répliques, mais Lee les trouva ineptes et préféra finalement n’en prononcer aucune. C’est bien dommage. Sa diction impeccable et sa voix ténébreuse méritaient autre chose que ces sifflements et autres grognements plus proches du fauve affamé que du comte vampire raffiné décrit par Bram Stoker. Pour gagner du temps et de l’argent, la Hammer s’efforça de tourner simultanément Dracula prince des ténèbres et Raspoutine le moine fou, les deux films bénéficiant du coup des mêmes décors et de plusieurs comédiens similaires, Christopher Lee en tête. Le final de Dracula prince des ténèbres, c’est à dire la mort – provisoire, évidemment – du vampire dans le lac glacé de son château, manque sérieusement de cohérence. Mais Sangster prouve une fois de plus son imagination sans borne en écrivant une séquence aussi extrême, et l’aficionado attend dès lors la future résurrection du vampire avec impatience, laquelle surviendra dans Dracula et les femmes deux ans plus tard.

 

© Gilles Penso

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LA REVANCHE DE FRANKENSTEIN (1958)

Ce second Frankenstein produit par la Hammer montre une expérience qui réussit enfin… Jusqu'à ce que les circonstances en décident autrement

THE REVENGE OF FRANKENSTEIN

1858 – GB

Réalisé par Terence Fisher

Avec Peter Cushing, Michael Gwynn, Francis Matthews, Oscar Quitak, Eunice Gayson, John Welsh, Lionel Jeffries

THEMA FRANKENSTEIN 

Dans ce second Frankenstein de la Hammer, le monstre, cette fois joué par Michael Gwynn, est constitué des membres amputés de plusieurs malades d’un hospice et du cerveau du bossu Karl. Suivant le modèle de La Fiancée de Frankenstein, cette Revanche de Frankenstein s’avère plus réussie que Frankenstein s’est échappé, tout en s’inscrivant dans le même courant subversif et modernisé. Le scénario de Jimmy Sangster, moins bavard que dans Frankenstein s’est échappé, n’a plus grand-chose à voir avec Mary Shelley et se débarrasse définitivement des derniers oripeaux hérités de la série Universal, tandis que Terence Fisher atteint ici les sommets de son art, dynamisant sa mise en scène et l’agrémentant de passages sanglants flirtant bien souvent avec l’humour noir le plus cynique. Ici, le baron a survécu à l’échafaud en soudoyant le bourreau et en faisant exécuter le prêtre à sa place ! Trois ans plus tard, sous le nom de Victor Stein, il ouvre un cabinet à Carlsbuck. Hans Kleve (Francis Matthews), jeune praticien, le reconnaît et devient son assistant. La froideur du baron dans l’épisode précédent s’est ici muée en délicieuse duplicité, le savant se camouflant derrière ses activités charitables de médecin des pauvres, adoré du peuple mais détesté du conseil médical pour lequel il représente une concurrence irritante. Le film peut donc s’apprécier comme une salve lancée à l’encontre de la bourgeoisie bienséante et hypocrite.

Peter Cushing a affiné son jeu, et il est difficile de ne pas partager son enthousiasme, d’autant que, pour une fois, son expérience réussit parfaitement… la catastrophe étant provoquée après coup par accident. En effet, la créature tente de détruire son ancien corps de bossu camouflé dans le laboratoire. Surprise par le concierge, elle est assommée et son cerveau est lésé. Michael Gwynn campe le plus émouvant et le plus pathétique des « monstres » de la série Hammer. Le voir peu à peu régresser vers les tares de son ancien corps (son bras se paralyse, sa jambe se raidit, son dos se courbe) a quelque chose de très poignant. Et son irruption au stade final de sa dégénérescence dans une réception mondaine, suppliant Frankenstein de l’aider, est un des moments forts du film.

Le savant fusionne avec sa créature

A la fin, à la faveur d’un rebondissement insensé, la fameuse confusion qu’entretient généralement le public entre le docteur et sa créature prend d’un seul coup tout son sens. Refusant d’aborder toutes les questions métaphysiques que cette ultime péripétie soulève immanquablement, Jimmy Sangster et Terence Fisher se contentent d’en exploiter le potentiel dramatique et ironique. L’épilogue nous montre de fait Frankenstein ouvrant un nouveau cabinet à Londres sous le nom de Victor Frank… La série peut donc tranquillement reprendre son cours. N’hésitant pas à en faire des tonnes, les affiches américaines de l’époque clamaient en guise d’avertissement : « n’allez pas voir ce film seul, sinon vous allez rentrer chez vous en courant ! »

 

© Gilles Penso

 

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FRANKENSTEIN S’EST ÉCHAPPÉ (1957)

Le studio Hammer s'empare du mythe popularisé par Universal et le revisite de fond en comble

THE CURSE OF FRANKENSTEIN

1957 – GB

Réalisé par Terence Fisher

Avec Peter Cushing, Christopher Lee, Robert Urquhart, Hazel Court, Melvyn Hayes, Paul Hardtmuth, Valerie Gaunt

THEMA FRANKENSTEIN

En 1957, la Grande-Bretagne ressuscite magistralement le mythe de Frankenstein, par l’intermédiaire de la compagnie Hammer Films et du réalisateur Terence Fisher. Celui-ci décide d’ignorer superbement l’influence des films Universal, ce qui constitue en soi un difficile pari, et même celle du roman initial (qu’il dit n’avoir jamais lu !) pour donner le premier rôle non pas au monstre mais à son créateur, le docteur Frankenstein. Et ce rôle est confié au brillant Peter Cushing, révélé l’année précédente par son rôle de Winston Smith dans le 1984 de Rudolph Cartier. Respectueux du jeu de Colin Clive, il apporte toutefois à son personnage plus de détermination, plus de froideur, plus de cruauté même.

Aidé du professeur Kempe (Robert Urquhart), Frankenstein procède à de curieuses expériences. Les deux hommes viennent de ranimer un chien mort, et Frankenstein a désormais pour but de donner vie à un homme parfait. A contrecœur, Kempe l’aide à voler le cadavre d’un pendu. Orpheline depuis peu, Elisabeth (Hazel Court), cousine et fiancée de Victor, sollicite son hospitalité. Mais Frankenstein a d’autres préoccupations. La mort du sculpteur Bardello lui procure deux mains précieuses qu’il greffe sur le corps du pendu. Quant aux yeux, il se les procure sans vergogne à la morgue. Il ne manque bientôt plus qu’un cerveau supérieurement intelligent pour parfaire son œuvre. Ne reculant devant aucun « sacrifice », Frankenstein abat dans ce but le professeur Bernstein (Paul Hardtmuth), puis insuffle enfin la vie à sa créature. Mais celle-ci s’avère n’être qu’un monstre hideux aux instincts homicides qui s’échappe dans les bois où il tue un enfant et un aveugle, variante de deux séquences mythiques de Frankenstein et La Fiancée de Frankenstein. Horrifié, Kempe tue le monstre, mais le baron le ranime aussitôt et lui ordonne de tuer Justine (Valerie Gaunt), sa servante et maîtresse. Bien vite, la créature devient incontrôlable…

Qui est le plus monstre des deux ?

Révolutionnaire, ce premier Frankenstein de la Hammer propose une vision moderne et violente du mythe, avec de surcroît l’apport de la couleur. Ici, le monstre (Christopher Lee, qui deviendra célèbre l’année suivante en incarnant Dracula) n’a qu’un rôle très effacé. Brouillon raté et violent (maquillé à la va vite par Phil Leakey), il déambule comme un zombie  dans les bois, meurt, ressuscite, puis meurt à nouveau… Peu importe aux yeux de Terence Fisher. Car c’est le baron qui constitue ici le pôle d’intérêt, et tout le film se concentre sur ses agissements. Voué tout entier à de douteuses expériences, le regard fou, il se fait volontiers volage, voire criminel. La mise en scène souffre parfois de pertes de rythme et d’une théâtralisation excessive, mais ce premier pas demeure magistral, comme en témoignera son immense succès. Contrairement à la série Universal, où le monstre meurt à la fin de chaque épisode pour ressusciter au début du suivant, celui de la Hammer ne sera jamais le même d’un film à l’autre, la vedette restant le baron qui, lui, conservera les traits anguleux de Peter Cushing.

 

© Gilles Penso

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I SPIT ON YOUR GRAVE (1978)

Violée par quatre hommes, tabassée, laissée pour morte, une jeune femme panse ses blessures et se mue en ange exterminateur

I SPIT ON YOUR GRAVE / DAY OF THE WOMAN

1978 – USA

Réalisé par Meir Zarchi

Avec Camille Keaton, Eron Tabor, Richard Pace, Anthony Nichols, Gunter Kleemann, Alexis Magnotti, Terry Zarchi

THEMA TUEURS I SAGA I SPIT ON YOUR GRAVE

Descendant contre-nature de Délivrance et de La Dernière maison sur la gauche, ce surprenant I Spit on your Grave est un film OVNI, d’une noirceur à la limite du soutenable, dont les intentions et la morale nous échappent quelque peu. Film voyeuriste et malsain pour pervers en tout genres ? Film d’horreur « survival » dans la droite lignée de Massacre à la tronçonneuse ? Drame psychologique dénonçant la violence à la manière des Chiens de paille ? Film féministe au ton revanchard (comme le laisserait entendre son autre titre connu, Day of the Woman) ? A vrai dire, la classification de I Spit on your Grave est des plus malaisées, mais la dernière option pourrait bien être la bonne, dans la mesure où Meir Zarki eut l’idée de ce film après avoir porté secours à la jeune victime d’un viol, à l’encontre d’une police désespérément inerte. « Beaucoup de gens considèrent que c’est un pur film d’exploitation qui se sert de la sexualité et de la violence comme outil de promotion », nous dit à ce propos la comédienne principale Camille Keaton. « Mais je pense que le film est beaucoup plus riche que ça. Plus les années passent, plus les femmes l’apprécient et comprennent qu’il ne se contente pas d’exploiter l’image de la femme mais au contraire de la renforcer. » (1)

Son infortunée héroïne est une romancière du nom de Jennifer Hill. Elle fuit la ville pour terminer calmement son dernier livre dans une charmante maison de campagne au bord de l’eau, en lisière d’une petite ville du Sud. Mais sa beauté ingénue finit par attirer l’attention d’un pompiste libidineux, de l’idiot du village et de deux bons à rien qui passent le plus clair de leur temps à jouer au couteau ou à faire des ronds dans l’eau avec leur barque à moteur. Un jour, poussés par leurs instincts les plus bestiaux, tous les quatre fondent sur elle comme des oiseaux de proie et la violent à tour de rôle, pendant trois quarts d’heure particulièrement éprouvants pour le spectateur. Humiliée, tabassée, laissée pour morte, Jennifer se remet douloureusement de la quadruple agression et panse une à une ses blessures. Une fois d’aplomb, elle ne prévient pas la police, pas plus qu’elle ne quitte les lieux. La seule chose qui l’anime désormais est la soif de vengeance. Muée en véritable ange exterminateur, elle attire donc chacun de ses agresseurs dans ses filets séducteurs et leur réserve un sort des moins enviables. 

J'irai cracher sur vos tombes…

« Je crois que lorsque Meir Zarchi m’a choisie parmi les trois actrices finalistes qui avaient été sélectionnées pour jouer le rôle principal de I Spit on Your Grave, c’est parce qu’il a senti que j’étais capable d’incarner une victime qui se transforme en bourreau », raconte Camille Keaton. « Au début du film, mon personnage est simple, plutôt passif, jusqu’à ce que survienne l’agression. Ensuite, elle passe à l’action et se venge. J’ai toujours trouvé intéressante cette dualité entre la faiblesse et la force. » (2) Le scénario prend la forme d’une cinglante démonstration d’autodéfense réduite à sa plus simple expression. La mise en scène est à l’avenant, exempte d’effets de style, épaulée par des comédiens sobres et des dialogues épurés. Pour autant, Meir Zarchi n’opte pas pour une forme pseudo-documentaire, avec caméra portée, improvisations des comédiens et gros grain à l’image. Il assume au contraire pleinement le statut fictionné de son film, contrairement à La Dernière maison sur la gauche par exemple, qui puisait une grande partie de son impact sur son réalisme cru. I Spit on your Grave (sorti un temps en vidéo sous le titre Œil pour œil en France) est donc un film ô combien déroutant, l’un des plus marquants fleurons d’un sous-genre insolite et parfois douteux connu sous l’appellation de « rape and revenge ». Le slogan de l’époque ne reculait devant aucune démesure : « Cette femme vient de découper, hacher, écrabouiller et brûler cinq hommes jusqu’à les rendre méconnaissables… Mais aucun jury américain ne la condamnera ! » Pour l’anecdote, c’est Demi Moore qui prête son dos à la célèbre affiche du film.

(1) et (2) Propos recueillis par votre serviteur en juin 2019

 

© Gilles Penso

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LES VOYAGES DE GULLIVER (2010)

Jack Black fait le pitre dans cette version burlesque du grand classique de Jonathan Swift

GULLIVER’S TRAVEL

2010 – USA

Réalisé par Rob Letterman

Avec Jack Black, Jason Segel, Emily Blunt, Amanda Peet, Billy Connolly, Chris O’Dowd, T.J. Miller, James Corden, Catherine Tate

THEMA NAINS ET GEANTS

Malgré une boulimie qui l’incite à jouer dans tout et n’importe quoi, Jack Black est un acteur qui force la sympathie, ne serait-ce que pour ses prestations dans des œuvres aussi recommandables que King Kong ou Soyez sympa rembobinez. Le savoir en tête d’affiche d’une nouvelle adaptation du classique de Jonathan Swift, modernisée et parodique, n’avait a priori rien d’incongru. « Les Voyages de Gulliver » originaux étaient d’ailleurs des écrits extrêmement cyniques, jouant sur les codes de l’odyssée fantastique et sur les lois de la relativité pour mieux décrier les travers des contemporains de leur auteur.

Avec Rob Letterman derrière la caméra (spécialiste de l’animation à qui nous devons notamment le savoureux Monstres contre Aliens) et Joe Stillman à la co-écriture du script (Shrek, Shrek 2, Planète 51), une bonne tranche de rigolade semblait au menu. Hélas, l’humour rase ici les pâquerettes et le cynisme se limite à quelques références balourdes à la culture pop américaine juxtaposées les unes aux autres comme autant de gros clins d’œil faussement complices adressés aux spectateurs. Star Wars, Titanic, X-Men, Avatar sont convoqués à tour de rôle, mais sans la nostalgie sincère d’un Michel Gondry, une telle accumulation embarrasse plus qu’elle n’amuse. Jack Black incarne donc un Lemuel Gulliver du 21ème siècle. Modeste employé préposé au courrier dans les locaux d’un grand journal, il est secrètement amoureux de la rédactrice Darcy Silverman (Amanda Peet). Suite à un quiproquo, le voilà qui part en reportage au beau milieu du Triangle des Bermudes. Naufragé après avoir été happé par un cyclone, il échoue sur l’île de Lilliput et fait la rencontre de ses minuscules habitants, en guerre perpétuelle contre leurs voisins de Blefescu.

Des farces d'école maternelle

Les figures visuelles imposées par l’œuvre initiale sont logiquement intégrées au film (Gulliver ficelé sur la plage, luttant contre la flotte ennemie, s’asseyant dans la cour du château royal) et prennent corps par l’entremise de trucages supervisés par Jim Rygiel (les trois Seigneurs des Anneaux, La Nuit au musée, Narnia 3). Mais ces effets visuels ne comblent évidemment pas les trous d’un scénario aussi peu étanche qu’une tranche de gruyère, d’autant que des prouesses techniques très similaires étaient déjà appréciables dans les versions précédentes du roman, notamment celles de Jack Sher (1960) et Charles Sturridge (1996). Quelques gags font tout de même mouche (la première partie située à Manhattan, le recyclage des paroles du « Kiss » de Prince pour séduire la belle princesse) mais la plupart d’entre eux se cantonnent à des farces d’école maternelle (comme lorsque l’un des Lilliputiens est écrasé par les fesses du héros déculotté). Même les idées les plus folles du script (Gulliver affrontant un robot géant d’inspiration nippone) tournent court, faute d’une exploitation correcte de leur concept (où est le combat titanesque tant attendu ?). Bref, pas grand-chose à sauver de ce long sketch pataud qui n’a su conserver ni la drôlerie, ni la subversion de son modèle littéraire, et dont la morale lénifiante se résume à : « il n’y a pas de petits métiers, il n’y a que de petites personnes… »

 

© Gilles Penso

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INSANE (2007)

Un film d'horreur brut, entre le slasher et le survival, qui calque son traitement sur ses modèles des années 70 et 80

STORM WARNING

2007 – AUSTRALIE

Réalisé par Jamie Blanks

Avec Nadia Farès, Robert Taylor, David Lyons, Mathew Wilkinson, Joh Brumpton, Jonathan Odham

THEMA TUEURS

De la part du réalisateur d’Urban Legend et de Mortelle Saint Valentin, on n’attendait forcément pas grand-chose. Mais avant de se retrouver à la tête de ces purges post-Scream édulcorées jusqu’à l’excès par des producteurs à côté de la plaque, Jamie Blanks était un fan d’horreur dans la pure tradition des slashers des années 70/80. Pour pouvoir s’adonner à son genre favori sans subir les desideratas des studios américains, il retourna dans son Australie natale et s’acoquina avec le scénariste Everett de Roche, à qui nous devons quelques petits bijoux océaniques tels que Patrick, Harlequin, Long week-end ou Razorback. De leur collaboration est né Insane, un survival dont le scénario ne déroge guère aux lieux communs du genre mais dont la mise en scène et les performances d’acteurs forcent le respect. Tout se met en place selon des codes bien établis : un avocat australien et son épouse française (Robert Taylor et Nadia Farès) décident de s’octroyer une bouffée d’air frais en s’aventurant à bord d’une frêle embarcation de pêche. L’orage qui couve ne les inquiète pas outre mesure, les incitant plutôt à braver les intempéries au lieu de rebrousser chemin. Cette obstination un peu absurde est surtout l’apanage du fier époux, sa moitié laissant transparaître une relative docilité.

Mais la nature reprend vite ses droits et nos yuppies en vadrouille sont forcés d’accoster la première île venue, sur laquelle ils ont toutes les peines du monde à trouver le moindre signe de civilisation… A l’exception d’une ferme crasseuse et délabrée apparemment déserte. Tels Boucle d’Or dans la demeure des trois ours (une référence que le scénario assume pleinement en citant nommément le conte lui-même), nos tourtereaux s’immiscent dans les lieux, en quête d’un téléphone ou d’un véhicule susceptible de les ramener vers des terres moins hostiles. En découvrant un hangar mué en serre à marijuana, ils comprennent un peu tard qu’ils sont allés trop loin. Et c’est justement le moment que choisissent les trois ours (en l’occurrence deux frères et leur père qui rivalisent de tares et de vices) pour rentrer à la maison. Le choc social et culturel bascule alors bien vite dans le cauchemar, suivant une mécanique parfaitement huilée depuis le séminal Délivrance.

Avis de tempête

Mais ce schéma narratif connu n’empêche nullement Insane d’exhaler sa propre personnalité et un style unique, dû au savoir-faire indéniable d’un cinéaste enfin libéré de ses entraves. La violence physique n’intervient que tardivement, Blanks prenant tout son temps pour construire minutieusement un climat étouffant et oppressant, à l’image de cet orage qui couve dangereusement et qui donne au titre original Storm Warning tout son sens. Mais lorsque le sang finit par couler, c’est avec une brutalité excessive et subite qui laisse bouche bée et qui mue le troisième acte du film en véritable jeu de massacre dénué de la moindre concession. La conviction des comédiens et les tours de force visuel de Blanks (qui recourt une fois de plus à ses fameuses prises de vues en plongée totale et compose au passage une bande originale énergisante) rendent finalement très recommandable ce survival à l’ancienne.

 

© Gilles Penso

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GHOSTS OF MARS (2001)

John Carpenter nous emmène sur la planète rouge où il combine ses trois genres favoris : le western, l'horreur et la science-fiction

GHOSTS OF MARS

2001 – USA

Réalisé par John Carpenter

Avec Natasha Henstridge, Ice Cube, Jason Statham, Clea DuVall, Pam Grier, Joanna Cassidy, Richard Cetrone, Rosemary Forsyth

THEMA EXTRA-TERRESTRES I SAGA JOHN CARPENTER

A l’aube du vingt et unième siècle, Hollywood s’est aussi subitement qu’éphémèrement passionné pour la planète Mars, comme en témoignent notamment Mission to Mars et Planète Rouge. Dans la même mouvance, John Carpenter s’est lancé dans Ghosts of Mars, l’occasion pour lui de combiner ses trois genres de prédilection : le western, la science-fiction et l’horreur. Le récit se situe 500 ans dans le futur, sur la planète écarlate, et met en vedette une unité de police dirigée par Melanie Ballard (la sculpturale Natasha Henstridge, ex-Mutante, remplaçant Courtney Love à la dernière minute). Leur mission : transférer un dangereux prisonnier nommé Desolation Williams (Ice Cube). Mais lorsqu’ils arrivent dans la petite ville de Chryse, ils constatent que tout le monde ou presque a été assassiné par une horde de sauvages inhumains armés jusqu’aux dents. Ceux-ci sont en réalité d’anciens ouvriers possédés par l’esprit des Martiens, et dont le but est d’éliminer purement et simplement la race humaine.

Tourné intégralement de nuit au Nouveau-Mexique, le film, raisonnablement distrayant, regorge de réminiscences à l’univers de Carpenter. Le commissariat de police violemment assiégé évoque évidemment Assaut, l’entité extra-terrestre qui voyage de corps en corps nous renvoie bien sûr à The Thing, et les batailles rangées entre les héros et les bandes meurtrières rappellent celles de New York 1997 et Los Angeles 2013 (avec en prime un nouveau personnage haut en couleur incarné par Pam Grier). Ces dernières séquences sont d’ailleurs joliment chorégraphiées, et se permettent quelques écarts gore surprenants, notamment bon nombre de mutilations et de décapitations à coup de projectiles tranchants. Carpenter profite également de cette histoire de Martiens antédiluviens influençant le comportement des humains pour rendre une nouvelle fois hommage à l’un de ses films de chevet, Les Monstres de l’espace, dont il fit quasiment un remake avec Prince des ténèbres.

Des flash-backs dans des flash-backs

Assez curieusement, Ghosts of Mars adopte le choix d’une narration complète en flash-back, Melanie Ballard racontant sa mésaventure à un juge martial. Ce parti pris, pas vraiment justifié, ôte de plus un enjeu au film : jamais le spectateur ne s’inquiète du sort de la belle policière, puisqu’il sait qu’elle a survécu à toutes les épreuves qu’elle relate. Plus bizarrement, au sein même de ce grand flash-back, de nombreux autres flash-backs s’insèrent, chaque personnage racontant des événements auxquels il a assisté, jusqu’à ce que l’intrigue se perde dans des tiroirs narratifs qui relèvent plus du gimmick que de la trouvaille scénaristique. Prolongeant les expérimentations qu’il avait inaugurées dans Vampires, John Carpenter truffe désormais sa mise en scène de fondus enchaînés à la John Woo qui, eux aussi, semblent faire office de gadgets esthétique dans la mesure où leur usage excessif ne renforce en rien à l’impact du film. Quant au dénouement, il s’avère à la fois illogique, expéditif et dénué de la moindre finesse. Malgré tout, Ghosts of Mars relève le niveau d’un Los Angeles 2013 et d’un Vampires qui avaient placé la barre assez bas malgré quelques poignées de séquences assez jouissives. Un John Carpenter pas vraiment imperissable donc, mais efficace, bien rythmé, et qui se regarde d’un bout à l’autre sans déplaisir. C’est déjà pas mal.

 

© Gilles Penso

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