RESIDENT EVIL (2002)

Une adaptation fade du célèbre jeu vidéo de Yoshiki Okamoto, qui transforme Milla Jovovich en super-espionne adepte du kickboxing

RESIDENT EVIL

2002 – USA

Réalisé par Paul Anderson

Avec Milla Jovovich, Michelle Rodriguez, Eric Mabius, James Purefoy, Martin Crewes, Colin Salmon, Ryan McCluskey

THEMA ZOMBIES I SAGA RESIDENT EVIL

Lorsqu’il créa le jeu vidéo « Resident Evil » en 1996, Yoshiki Okamoto s’inspira ouvertement de la trilogie des morts-vivants de George Romero. Il paraissait donc logique que le père de Zombie en réalise l’adaptation cinématographique, et il en fut un temps question. Hélas, le jovial barbu de Pittsburgh n’étant plus à la mode au début des années 2000, la mise en scène de Resident Evil échut à Paul Anderson, dont le seul mérite fut de signer Mortal Kombat, l’une des moins mauvaises adaptations de jeu vidéo pour le grand écran. Le prologue du film cultive le mystère, enchaînant des séquences énigmatiques dont le sens ne nous est révélé que dans un second temps. Il y a d’abord les 500 employés de la société Umbrella Corporation, pris au piège dans leur laboratoire souterrain, attaqués par les systèmes de sécurité et les ascenseurs, et enfin assassinés en masse. Puis apparaît Alice (Milla Jovovich), une jeune femme qui s’éveille nue dans une luxueuse villa, complètement amnésique, avant d’être embarquée de force par un commando musclé qui la dirige tout droit dans le laboratoire sinistré, via un passage souterrain et un train blindé.

Les choses s’éclaircissent alors peu à peu. Les 500 membres du personnel scientifique semblent avoir été sacrifiés par « La Reine Rouge », un système de sécurité doté d’une puissante intelligence artificielle, afin d’éviter la propagation du virus T qui y était expérimenté. Ce dernier a la capacité de réactiver le cerveau des morts, muant ainsi les cadavres en zombies animés d’une vie mécanique et primaire. Lorsque la mémoire lui revient progressivement, Alice réalise qu’elle est un agent secret au service d’Umbrella Corporation, chargée de s’assurer que le secret entourant les recherches effectuées dans le laboratoire reste entier. Dès lors, en compagnie du commando sévèrement burné qui semble photocopié sur celui d’Aliens, elle va devoir affronter toute une armée de morts-vivants en blouse blanche, avides de chair humaine, ainsi qu’une poignée de monstres mutants particulièrement féroces.

Alice au pays des zombies

L’intrigue étant extrêmement linéaire, les personnages translucides et les situations mille fois vues, autant dire que Resident Evil se suit sans beaucoup de passion. D’autant que Milla Jovovich s’avère aussi expressive qu’un androïde et se bat contre les zombies à grands coups de kickboxing façon Jean-Claude Van Damme, en une série de pugilats franchement ridicules. Le film de Paul Anderson souffre ainsi du syndrome des adaptations de jeux, accumulant artificiellement les scènes d’action, le tout souligné par une musique techno fort prévisible. Restent trois séquences plutôt bien fichues : les soldats mutilés dans un sas par un rayon laser (avec un découpage en petits morceaux directement repris au prologue de Cube), l’attaque des chiens-zombies, et l’affrontement contre le monstre final, une hideuse créature conçue par les scientifiques d’Umbrella Corporation en injectant directement le virus dans des tissus vivants. Typique des « boss » de jeux vidéo, cette bête colossale en mutation demeure la seule pointe d’originalité d’un film par ailleurs assez banal, dont le final annonce une apocalypse très proche de la scène d’introduction du Jour des morts-vivants… de George Romero, bien sûr.


© Gilles Penso

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DIARY OF THE DEAD (2007)

George Romero revisite sa propre saga des morts-vivants en adoptant un point de vue à la première personne

DIARY OF THE DEAD

2007 – USA / CANADA

Réalisé par George A. Romero

Avec Michelle Morgan, Shawn Roberts, Nick Alachiotis, Matt Birman, George Buza, Joshua Close, Christopher Cordell

THEMA ZOMBIES I SAGA LES ZOMBIES DE ROMERO

Quels que soient les projets cinématographiques de George Romero, les zombies reviennent toujours croiser son chemin, comme si ces monstres surgis de l’au-delà stigmatisaient à merveille son point de vue sur les travers de l’humanité. Diary of the Dead est donc sa cinquième incursion au pays des morts-vivants – sans compter les cadavres récalcitrants de Creepshow – et s’apprécie comme une relecture complète du mythe que le cinéaste créa en 1968 avec La Nuit des morts-vivants. Ce nouvel opus prend ainsi les allures de préquelle nous racontant les événements depuis le tout début mais en s’appuyant sur les technologies d’aujourd’hui. « Land of the Dead était un film hollywoodien produit par le studio Universal », nous raconte Romero. « C’était agréable, dans la mesure où j’ai vraiment pu porter à l’écran ce que j’avais en tête sans trop de restrictions budgétaires. Mais le revers de la médaille est que j’avais un peu perdu le contact avec le concept brut tel que je l’avais imaginé à l’époque de La Nuit des morts-vivants. J’ai donc conçu Diary of the Dead comme un retour aux sources. » (1)

Lorsque l’épidémie de morts-vivants commence, ce ne sont d’abord que quelques cas isolés répertoriés par une police parfaitement impuissante. La nouvelle se répand à vive allure, et c’est à la radio que cette information parvient aux oreilles de Jason Creed, un étudiant en cinéma accaparé par le tournage d’un film d’horreur mettant en scène une momie à l’ancienne. Abandonnant son projet d’études, Jason entraîne son équipe dans la réalisation d’un documentaire dévoilant les horreurs bien réelles de l’affrontement entre les morts et les vivants. C’est donc à la première personne que Romero narre ce cinquième épisode de sa saga des zombies. Mais contrairement à Cloverfield ou à [Rec], qui optent pour le point de vue unique d’une caméra subjective, Diary of the Dead mixe diverses sources vidéo (caméras HD, appareil photo, caméras de surveillance, webcams, images d’actualités) auxquelles il ajoute des effets de montage et une bande originale de film d’épouvante.

La mort de la mort

Même si ces procédés sont pleinement assumés, dans la mesure où le long-métrage est conçu comme un faux documentaire (baptisé « Death of Death », autrement dit « la mort de la mort »), on ne peut s’empêcher de trouver le résultat hybride. Trop brouillon pour un film de fiction traditionnel, trop élaboré pour une simple captation vidéo, Diary of the Dead a du mal à se positionner et perd du coup une partie de son impact. L’autre problème est lié à la thématique du film, que la voix off nous assène de manière souvent trop explicite : la manipulation de la réalité. Le sujet est passionnant, mais il n’est jamais traité frontalement, à l’exception d’un bout de scène où les autorités truquent les premières images d’attaque des zombies pour faire croire à une agression de sans-papiers ! Malgré ces imperfections, la magie opère et les fans du réalisateur de Creepshow s’y retrouvent. Au lieu de sacrifier à la mode en se fendant d’une énième variante musclée sur le genre, le cinéaste parvient une fois de plus à se renouveler. Ce refus de la facilité est un atout considérable, dotant le film d’une sincérité que de nombreux réalisateurs devraient envier à Romero.

(1) Propos recueillis par votre serviteur en mars 2008
 

© Gilles Penso

 

Pour en savoir plus

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LE MONDE DE NARNIA : LE PRINCE CASPIAN (2008)

Un second épisode aux enjeux évasifs qui rattrape ses faiblesses par le souffle épique de sa bataille finale

CHRONICLES OF NARNIA CHAPTER 2 : PRINCE CASPIAN

2008 – USA

Réalisé par Andrew Adamson

Avec Ben Barnes, Georgie Henley, Shandar Keynes, William Moseley, Anna Popplewell, Peter Dinklage, Sergio Castellitto

THEMA HEROIC FANTASY I CONTES I MYTHOLOGIE I MAMMIFERES I VEGETAUX I SAGA LE MONDE DE NARNIA

Le Monde de Narnia premier du nom ne nous ayant qu’à moitié convaincus, nos attentes quant à ce second épisode étaient prudemment mesurées. Et force est de constater que la première partie du récit n’attise que modérément l’intérêt, jonchée de clichés et de lieux communs inhérents au genre. Le prince déchu, le roi usurpateur, le tuteur à la longue barbe blanche (façon Dumbledore), les nains grognons cachés dans la forêt (hérités de Willow, l’un d’entre eux étant d’ailleurs incarné par Warwick Davis), la souris fine lame (copie conforme du chat botté de Shrek 2)… Si Andrew Adamson redouble d’inventions techniques et artistiques, révélant là une indéniable amélioration par rapport à l’épisode précédent, la narration a du mal à suivre. Témoin cette scène d’introduction au cours de laquelle les quatre enfants Pevensie, héros du récit, sont transportés depuis le métro londonien des années quarante jusque dans le monde de Narnia. Visuellement, la séquence est une merveille : les dalles au mur se décollent une par une, la rame du métro s’engouffre dans un tunnel qui la fait brusquement disparaître, la lumière envahit soudain les lieux pour révéler une plage ensoleillée… Mais le potentiel dramatique d’un tel spectacle est considérablement amenuisé par les réactions des jeunes protagonistes, se contentant de constater tranquillement : « tiens, ça sent la magie ».

La première heure du Prince Caspian est à l’avenant, galvaudant par son écriture laxiste une mise en image souvent remarquable. C’est d’autant plus dommage que l’une des thématiques centrales du film est passionnante, puisqu’il s’agit de la perte de l’innocence et du passage à l’âge adulte. Lorsque les enfants Pevensie pénètrent à nouveau dans le monde fantastique de Narnia, 1300 ans s’y sont écoulés. Les palais qu’ils ont connus ne sont plus que des ruines, les Narniens sont devenus un peuple opprimé obligé de se terrer dans les bois, une tyrannie a été mise en place par le cruel Miraz (excellent Sergio Castellitto) et le puissant lion Aslan semble n’être plus qu’une légende ancienne. Tous leurs repères ont donc disparu. Pour renverser la situation, les enfants vont devoir prendre leurs responsabilités, rassembler les Narniens, s’allier au prince Caspian et s’opposer aux troupes de Miraz. Or la bataille semble perdue d’avance, tant le nombre de belligérants et l’équipement militaire du roi jouent en leur défaveur.

Un climax plus grand que nature

A ce stade de l’intrigue, les enjeux se concrétisent enfin et le spectateur, qui suivait jusqu’alors le récit d’un regard distant, se surprend à plonger dans le feu de l’action et à s’impliquer dans la lutte. Si elles ne dépassent jamais en démesure celles mises en image par Peter Jackson, les batailles s’avèrent très prenantes, car leur issue est toujours incertaine. Lorsque la monstrueuse échauffourée vire au duel mano a mano, le suspense est à son comble, et Andrew Adamson le gère avec beaucoup d’efficacité, s’appuyant sur un montage nerveux et une partition fiévreuse d’Harry Gregson-Williams. La seconde partie du Prince Caspian rachète donc en partie les lacunes précédentes et s’achève sur un climax démentiel, la nature participant au conflit de fort spectaculaire manière.
 

© Gilles Penso

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28 JOURS PLUS TARD (2002)

Avec des moyens limités et une caméra légère, Danny Boyle redonne un coup de jeune aux films de zombies et relance une vogue désormais instoppable

28 DAYS LATER

2002 – GB

Réalisé par Danny Boyle

Avec Cillian Murphy, Naomie Harris, Noah Huntley, Alexander Delamere, Kim McGarrity, David Schneider, Toby Sedgwick

THEMA ZOMBIES

Après tant de films consacrés aux zombies, était-il encore possible de surprendre le public et de révolutionner le sujet ? Oui ! Danny Boyle y est parvenu de magistrale façon, en abordant le thème des morts-vivants sous un jour hyperréaliste, loin des conventions de ce sous-genre si souvent visité sur tous les continents. L’invasion des cadavres anthropophages est ici provoquée par des singes à qui des savants inconscients ont inoculé un virus censé exacerber leur rage. Grâce à une image DV proche du reportage, à des comédiens au jeu naturaliste et à une mise en scène évitant les figures imposées, le réalisateur de Trainspotting propose un traitement différent. D’ailleurs, le mot « zombie » n’est jamais prononcé dans le film. On préfère parler de « contaminés », comme si nous avions affaire à une maladie réelle, rendue plausible par des recherches orientées vers la guerre bactériologique. L’horreur de la situation n’en est que plus tangible, et le fait que Boyle fasse ici ses premiers pas dans le genre participe sans aucun doute de ce réalisme.

Pourtant, 28 Jours plus tard cligne souvent de l’œil en direction de l’œuvre de George Romero, référence ultime et incontournable en la matière. Dès l’extraordinaire séquence d’introduction, lorsque le héros se retrouve seul dans un Londres désert et laissé à l’abandon, on pense au prologue du Jour des morts-vivants. L’ombre du grand George plane encore sur ces quatre survivants qui fuient ensemble en quête d’un refuge hypothétique. Les séquences du ravitaillement à la station-service (avec une attaque d’enfants zombifiés) ou des courses dans le supermarché déserté sont des hommages évidents à Zombie. Et lorsque nos héros se heurtent à des militaires bornés qui ont capturé l’un des « contaminés » pour l’étudier, c’est à nouveau Le Jour des morts-vivants qui revient en mémoire, via son incroyable personnage de Bud le zombie apprivoisé. Pourtant, 28 Jours plus tard existe d’une manière parfaitement autonome, sans jamais souffrir du syndrome de la copie ou du clin d’œil amusé à la Kevin Williamson.

Des zombies marathoniens

Danny Boyle parvient à nous terrifier à de nombreuses reprises avec ses zombies qui, contrairement à leurs ancêtres à la démarche traînante, courent hystériquement, accompagnés d’effets sonores effrayants et d’un effet « shutter » qui dote les prises de vues d’une frénésie fort efficace. A ce titre, la séquence du tunnel est un véritable morceau de bravoure, les monstres étant précédés d’une horde de rats terrifiés. D’autres scènes, comme cette vue panoramique de Manchester sous les flammes, sont empreintes d’une poésie quasi-surréaliste. Après un climax dans lequel la violence et l’hystérie explosent sans aucune retenue, le dénouement s’ensoleille enfin mais reste ouvert, laissant planer un doute sur le destin des rescapés. Encore un point commun avec Romero. 28 Jours Plus Tard aura un tel impact que dès lors, il sera difficile d’envisager un film de zombie autrement qu’avec des cadavres courant le marathon hystériquement. Un parti-pris que Romero lui-même juge illogique, mais qui démontre ici une indéniable efficacité.

 

© Gilles Penso

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LE SEIGNEUR DES ANNEAUX : LE RETOUR DU ROI (2003)

La trilogie de Peter Jackson inspirée des écrits légendaires de Tolkien s'achève sur une apothéose épique et spectaculaire

THE LORD OF THE RINGS – THE RETURN OF THE KING

2003 – NOUVELLE-ZELANDE

Réalisé par Peter Jackson

Avec Elijah Wood, Ian McKellen, Viggo Mortensen, Orlando Bloom, John Rhys-Davies, Liv Tyler, Sean Astin, Billy Boyd

THEMA HEROIC FANTASY I SORCELLERIE ET MAGIE I MAMMIFERES I VEGETAUX I ARAIGNÉES I SAGA LE SEIGNEUR DES ANNEAUX

La Communauté de l’Anneau et Les Deux tours avaient placé la barre artistique tellement haut qu’on imaginait mal comment Le Retour du Roi allait encore pouvoir nous émerveiller. Force est de constater que non seulement ce troisième épisode nous comble de bonheur cinéphilique, mais qu’en plus il transcende et dépasse ses deux prédécesseurs par sa richesse et sa force. Le récit s’amorce par un flash-back nous révélant comment le hobbit Smeagol s’est mué en épouvantable Gollum après avoir été perverti par l’anneau de Sauron. Puis le récit se centre sur les principaux protagonistes de la Communauté, à savoir Frodon, Sam, Aragorn, Gimli, Legolas, Merry et Pippin. Plus inspiré que jamais, Peter Jackson nous livre des moments de poésie pure, d’une beauté à couper le souffle. Notamment l’arrivée de Gandalf dans la magnifique cité déchue de Minas Thirit, les flambeaux qui s’allument de montagne en montagne, ou la chevauchée accompagnée par le chant mélancolique de Pippin.

Le cœur du film décrit une monstrueuse bataille qui oppose pêle-mêle des humains, des orques, de colossaux trolls simiesques, des Nazgûl aux allures de gigantesques reptiles volants, des éléphants aux proportions démesurées et toute une armée de fantômes. Autant dire que cette séquence, époustouflante et anthologique, dépasse encore en exubérance et en folie la pourtant mémorable bataille du Gouffre d’Elm qui se situait au cœur des Deux Tours. Elle évoque tour à tour Braveheart, Gladiator, L’Empire contre-attaque et Starship Troopers, mais relève du jamais vu sur un écran de cinéma, et surprend par la violence de ses échauffourées. Pour mieux rythmer son récit et mieux lier le destin des Hobbits avec ceux des humains, Peter Jackson et sa co-scénariste Fran Walsh ont opté pour une réécriture d’une partie du récit tel qu’il était initialement narré par Tolkien. Au lieu de situer l’arrivée de Frodon et de Sam dans la tour de Mordor au tout début du film, ils la racontent en parallèle avec les différents combats qui scandent l’histoire, nous réservant une terrifiante séquence de suspense au moment de l’affrontement avec l’immonde araignée géante Arachnée.

Un final grandiose

Du point de vue du casting, la passation du rôle principal s’est opérée progressivement entre Elijah Wood et Viggo Mortensen, celui-ci campant avec un indéniable charisme le magnifique roi du titre. « Quel que soit le personnage qu’on interprète, il m’apparaît important de ne pas perdre de vue qu’il s’agit d’un jeu et que nous sommes tous de grands enfants », nous livre le comédien. « C’est cette part enfantine qui stimule l’imagination et la créativité. » (1) De l’action ahurissante, de la mélancolie à tirer des larmes aux plus insensibles, de la comédie pleine de fraîcheur, de l’épouvante à glacer le sang, de la romance profonde et riche… Tout ce que le cinéma comporte comme émotions fortes explose littéralement dans chaque scène de cet inoubliable Retour du Roi. Le film s’achève en douceur, fermant tranquillement toutes les portes qui ont été ouvertes, et clôt en beauté cette sublime trilogie qui demeurera probablement le chef d’œuvre incontesté de Jackson.

(1) Propos recueillis par votre serviteur en octobre 2005

 

© Gilles Penso

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LE SEIGNEUR DES ANNEAUX : LES DEUX TOURS (2002)

Cet épisode central est riche en morceaux d'anthologie, le moindre n'étant pas l'intervention du rachitique Gollum

THE LORD OF THE RINGS : THE TWO TOWERS

2002 – NOUVELLE-ZELANDE

Réalisé par Peter Jackson

Avec Elijah Wood, Ian Mac Kellen, Viggo Mortensen, Liv Tyler, Brad Dourif, Christopher Lee, Orlando Bloom, Andy Serkis

THEMA HEROIC FANTASY I SORCELLERIE ET MAGIE I VEGETAUX I MAMMIFERES I SAGA LE SEIGNEUR DES ANNEAUX

Volet central de la trilogie du Seigneur des AnneauxLes Deux Tours ne s’embarrasse plus de longues expositions et plonge directement au cœur du conflit. Car cet épisode est avant tout un film de guerre. Une guerre qui se prépare sur tous les fronts, incitant le scénario à adopter une triple narration parallèle. Frodon, le jeune hobbit porteur de l’anneau, et Sam, son fidèle compagnon, se dirigent péniblement vers les montagnes enflammées du Mordor, repaire du maléfique Sauron, afin de détruire l’objet de toutes les convoitises par le feu duquel il naquit. Aragorn, héritier du trône de Gondor, et Gandalf, le magicien, s’efforcent de leur côté de mobiliser un maximum de guerriers humains pour pouvoir faire face aux troupes croissantes des forces du mal. Quant aux hobbits Merry et Pippin, ils trouvent refuge dans la forêt magique des Ents, de gigantesques arbres vivants qui nous offrent un point de vue nouveau sur la bataille à venir.

Les monstrueux guerriers du Mordor symbolisent en effet plus que jamais les élans sans retenue d’une industrialisation colonisatrice et destructrice, en butte aux forces positives de la nature. La guerre de l’anneau serait donc avant tout une guerre écologique. Lorsque se concrétise enfin le pugilat, il prend une dimension dantesque et apocalyptique au cours de la séquence de la bataille du Gouffre de Elm, appelée à entrer au panthéon des combats cinématographiques les plus spectaculaires du siècle. Orques, Trolls et humains s’y affrontent violemment, déployant des stratégies toujours plus élaborées et d’ingénieuses machineries héritées de l’art de la guerre médiéval. Catapultes, échelles et béliers s’y bousculent donc allégrement. Le Mordor nous dévoile aussi un panel de nouveaux monstres hideux à son service, notamment les dragons servant de monture aux noirs Nazgûls, des loups-hyènes qui nous offrent une belle séquence d’échauffourée en rase campagne, ainsi que de colossaux pachydermes répondant aux doux nom d’oliphants.

La bataille la plus folle de l'histoire du cinéma

Au titre des nouvelles créatures de ce second volet, il y a aussi et surtout le rachitique Gollum. Cette incroyable prouesse infographique se fait oublier dès les premières secondes, tant la crédibilité du personnage est intense, une performance d’acteur virtuelle unique en son genre due au talent combiné du comédien Andy Serkis et des artistes de Weta Digital. Etre complexe, hybride, insaisissable, Gollum est un ancien hobbit transformé peu à peu en monstre rampant à cause de l’influence de l’anneau, et son rôle s’affirmera pleinement au cours du troisième et ultime épisode. A l’instar de L’Empire contre-attaque, autre épisode central d’une mythique saga, Les Deux Tours est plus énergique que son prédécesseur, plus noir aussi, et se nimbe à nouveau d’une splendide partition d’Howard Shore, composant à l’occasion un magnifique nouveau motif musical pour violon celtique, le thème du royaume de Rohan. Le film s’achève une fois de plus en pleine action, annonçant un ultime épisode encore plus flamboyant.

  

© Gilles Penso

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PHÉNOMÈNES (2008)

Spécialiste des concepts étonnants, M. Night Shyamalan imagine que la nature se révolte contre l'humanité en la poussant à un suicide collectif

THE HAPPENING

2008 – USA

Réalisé par M. Night Shyamalan

Avec Mark Wahlberg, Zooey Deschanel, John Leguizamo, Ashlyn Sanchez, Betty Buckley, Spencer Breslin, Robert Bailey Jr

THEMA CATASTROPHES I VEGETAUX I SAGA M. NIGHT SHYAMALAN

Selon une théorie scientifique imagée, notre planète s’ébroue parfois pour se débarrasser des parasites humains qui lui démangent l’échine. C’est ce qui expliquerait les tremblements de terre, raz de marées et autres éruptions volcaniques qui, régulièrement, déciment les populations. Cette théorie sert de base au scénario de Phénomènes, un film catastrophe sombre et désenchanté que M. Night Shyamalan semble avoir mis sur pied pour redorer son blason aux yeux du public et de la profession. Car La Jeune fille de l’eau, son opus précédent, n’avait pas convaincu grand monde. Exit donc la naïveté bon enfant et les personnages de contes de fées, place au drame fantastique qui avait si bien fonctionné à l’époque de Sixième sens. Après avoir claqué la porte du studio Disney et commis un flop chez Warner, le cinéaste trouve finalement refuge chez la Fox.

Le premier quart d’heure du film se reçoit comme un coup de poing. A Central Park, un groupe d’hommes et de femmes s’immobilise soudain, comme sous l’effet d’une pétrification de groupe, tandis qu’une jeune femme décroche l’aiguille qui tenait son chignon et se l’enfonce tranquillement dans la gorge. Quelques pâtés de maison plus loin, des ouvriers se laissent tomber d’un toit par dizaines et s’écrasent au sol. Partout dans New York, des suicides en masse son ainsi répertoriés. S’agirait-il des effets d’une neurotoxine déclenchée par une attaque terroriste ? Les trépas collectifs s’intensifiant à une vitesse alarmante, les new-yorkais doivent évacuer la ville. C’est ainsi que le professeur de sciences Elliot Moore (Mark Wahlberg), son épouse Alma (Zooey Deschanel), leur ami Julian (John Leguizamo) et sa petite fille Jess (Ashlyn Sanchez) s’embarquent pour un des trains spécialement affrétés. Mais le phénomène touche bientôt toute la côte Est des Etats-Unis. Perdus en rase campagne, nos héros tentent de survivre et de comprendre l’origine du mal, jusqu’à ce qu’un de leurs compagnons d’infortune n’évoque une idée impensable : las des agressions répétées à l’encontre de la nature, les plantes se mettent à développer des spores qui contaminent les humains et les poussent à se donner la mort.

Un troisième acte décevant

Le point de départ est donc très fort, et Shyamalan n’y va pas avec le dos de la cuiller, concoctant des suicides particulièrement gratinés (on n’est pas près d’oublier les scènes de la fosse aux lions et de la moissonneuse batteuse !). Moins stylisée qu’à l’accoutumée, la mise en scène réserve malgré tout quelques morceaux de bravoure, notamment lorsqu’un pistolet passe de main en main, semant les cadavres sur le bitume. Hélas, le scénario peine à développer ces prémisses prometteuses et se met bien vite à patiner, Shyamalan s’avérant incapable de bâtir un troisième acte satisfaisant et une chute digne de ce nom. Quelques scènes incohérentes (l’évacuation de New York ressemble à un tranquille départ en vacances), des dialogues indigents (la dissertation sur les hot-dogs) et un jeu d’acteurs approximatif (Zooey Deschanel passe la majeure partie du film à écarquiller bizarrement ses jolis yeux) jouent également en défaveur de ce Phénomènes trop laxiste pour convaincre totalement.

 

© Gilles Penso

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SHAUN OF THE DEAD (2003)

Edgar Wright et Simon Pegg sont parvenus à concocter la parodie ultime des films de morts-vivants

SHAUN OF THE DEAD

2003 – GB

Réalisé par Edgar Wright

Avec Simon Pegg, Nick Frost, Dylan Moran, Kate Ashfield, Lucy Davis, Nicola CunninghamKair Mills, Matt Jaynes, Gavin Ferguson

THEMA ZOMBIES

Annoncé comme « une comédie romantique avec des zombies », Shaun of the Dead est probablement l’une des variantes les plus réussies et les plus intelligentes autour de la mythologie créée par George Romeo. Plus respectueux que L’Armée des morts, plus subversif que 28 jours plus tard et bien plus malin que tous les Resident Evil, le scénario de Shaun of the Dead est l’œuvre d’Edgar Wight et Simon Pegg, le premier assumant la réalisation du film et le second jouant le rôle de son héros Shaun. Trentenaire britannique sans ambition ni grande envergure, ce dernier passe ses journées dans un magasin d’électronique où il officie sans conviction comme vendeur médiocre, ses débuts de soirée au Winchester, le pub du coin, et ses fins de soirée devant la télé avec son co-locataire et meilleur ami Ed. Cette routine morose finit par agacer sérieusement Liz, la petite amie de Shaun, qui rêve d’un peu plus de fantaisie et de romantisme. Or la monotonie va se briser d’une manière tout à fait inattendue lorsque soudain les morts reviennent à la vie et hantent les rues en rampant, avides de chair humaine et terriblement contagieux.

Avant même que cet incroyable événement ne survienne, la plupart des gens présents dans le film agissent déjà comme des zombies, errant sans but dans la cité, le bus ou les magasins, preuve que Wight et Pegg ont parfaitement intégré les thématiques défendues par Romero. Si nous n’y prenons pas garde, nous allons tous finir comme des zombies, semblent-ils dire, muant d’emblée Shaun of the Dead en autre chose qu’une simple parodie potache. Les éléphantesques Scary Movie sont donc à des années-lumière de cet excellent exercice de style délicieusement british. A un script habile et réjouissant s’ajoute ici une réalisation extrêmement inventive, notamment lorsque Shaun se promène un matin dans son quartier sans remarquer que tous ceux qui l’entourent sont déjà des morts-vivants, preuve qu’il vivait lui-même comme un zombie sans s’en rendre compte. Dès lors, comédie et épouvante cohabitent sans se nuire l’un l’autre, bien au contraire, comme au bon vieux temps de Deux Nigauds contre Frankenstein ou S.O.S. Fantômes.

Approuvé par George Romero !

Le film se permet même quelques écarts gore surprenants, comme lorsque l’une des victimes des zombies est éviscérée puis démembrée sans aucune retenue. En bon émule de Tom Savini, le maquilleur Stuart Conran (From Hell) effectue là un travail remarquable. Shaun of the Dead est donc à ranger avec les meilleures parodies du genre, aux côtés de Frankenstein Junior et Docteur Jerry et Mister Love, et collectionne les séquences hilarantes, l’une des plus mémorables étant probablement celle où le petit groupe de héros tente d’imiter la démarche des zombies pour se fondre discrètement parmi eux. Et puis, cerise sur le gâteau, le film a été accueilli avec un enthousiasme sans borne par George Romero lui-même. « J’adore Shaun of the Dead ! », s’écrie-t-il lorsqu’on lui pose la question. « Simon Pegg et Edgar Wight m’avaient envoyé une copie de leur film avant qu’il soit distribué aux Etats-Unis. J’ai trouvé ça extraordinaire, hilarant et en même temps très respectueux du genre. Du coup, je les ai fait venir tous les deux sur le tournage de Land of the Dead pour leur faire jouer des zombies ! » (1)

(1) Propos recueillis par votre serviteur en juillet 2005

 

© Gilles Penso

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LES MERCENAIRES DE L’ESPACE (1980)

Le producteur Roger Corman surfe sur le succès de Star Wars en initiant une version spatiale des Sept mercenaires

BATTLE BEYOND THE STARS

1980 – USA

Réalisé par Jimmy T. Murakami

Avec Richard Thomas, Robert Vaughn, John Saxon, George Peppard, Darlanne Fluegel, Sybil Danning, Sam Jaffe, Jeff Corey

THEMA SPACE OPERA

Adepte de l’imitation des grands succès cinématographiques de son temps, Roger Corman ne pouvait décemment passer à côté du phénomène La Guerre des étoiles. A l’instar des Evadés de l’espace de Kinji Fukasaku (qui donna naissance à la mythique série San Ku Kaï), il s’est ainsi lancé dans un habile mixage entre le scénario du space opera de George Lucas et celui des Sept mercenaires de John Sturges, en s’appuyant sur un scénario de John Sayles (Piranhas, L’Incroyable alligator, Hurlements). D’où un titre français marquant clairement les deux références. John Saxon interprète ici un substitut de Dark Vador, qui porte le nom de Sador et fait régner la terreur dans la galaxie, à bord de son vaste vaisseau en forme de requin-marteau. Lorsqu’il rend visite aux pacifiques habitants de la planète Akir, il leur lance un redoutable ultimatum : « Je suis venu avec mes troupes pour vous conquérir », lâche-t-il avec emphase. « Si vous résistez, je vous écraserai. Je possède un convertisseur stellaire, l’arme la plus puissante de l’univers. Vous ne pouvez pas me résister. Je veux coloniser votre planète. » Voilà qui a le mérite d’être clair.

Mais les habitants d’Akir décident de ne pas se laisser faire. Ils envoient donc dans l’espace Shad (Richard Thomas), un jeune émissaire en quête de mercenaires prêts à lutter à leurs côtés contre l’infâme Sador. Le film prend dès lors la tournure d’une promenade interstellaire pittoresque, l’intervention de chaque nouveau mercenaire s’apparentant presque au segment autonome d’un film à sketches. Au fil de ses pérégrinations, Shad rallie donc à sa cause une belle informaticienne spécialisée dans la réparation des androïdes, cinq entités blafardes aux pouvoirs paranormaux, un homme-serpent et ses deux assistants nains, une valkyrie pugnace (la sculpturale Sybill Danning), un cow-boy débonnaire (ce bon vieux George Peppard) et un hors-la-loi recherché aux quatre coins de la galaxie (Robert Vaughn, qui faisait déjà partie du casting des Sept mercenaires vingt ans plus tôt et y jouait un rôle très similaire).

Une direction artistique signée James Cameron

Tout ce beau monde s’installe sur Akir (le nom de cette planète est manifestement un hommage à Akira Kurosawa, qui réalisa Les Sept samouraïs), et le film vire alors à la bataille spatiale conventionnelle, qui aurait tendance à traîner en longueur et à se répéter. L’intrigue des Mercenaires de l’espace n’échappe donc à aucun cliché et s’affuble de dialogues volontiers puérils. Mais le film vaut tout de même le coup d’œil pour ses créatures insolites, ses effets miniatures inventifs, sa direction artistique originale confiée à un James Cameron alors débutant, et sa partition emphatique signée James Horner, qui amorçait là des trouvailles musicales appelées à resservir dans Star Trek 2 et Krull. Très fier de ces Mercenaires de l’espace, tournés en à peine cinq semaines dans un studio flambant neuf qu’il venait alors d’acquérir, Roger Corman décida d’en amortir les dépenses (le film coûta deux millions de dollars, son plus gros budget à l’époque) en recyclant les décors, les maquettes et des extraits de la partition pour bon nombre d’autres films de science-fiction produits dans la foulée, notamment Space Raiders d’Howard R. Cohen.

 

© Gilles Penso

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ROLLERBALL (1975)

Ces jeux du cirque transposés dans le futur prouvent que les instincts primaires de la nature humaine n'évoluent guère avec le temps

ROLLERBALL

1975 – USA

Réalisé par Norman Jewison

Avec James Caan, John Houseman, Maud Adams, John Beck, Moses Gunn, Pamela Hensley, Barbara Trantham

THEMA FUTUR

Réalisateur de films aussi dissemblables que Dans la chaleur de la nuit, L’Affaire Thomas Crown ou Un Violon sur le toit, Norman Jewison s’est attaqué au milieu des années 70 à une fable futuriste tirée d’un roman homonyme de William Harrison. Nous sommes à l’aube du vingt et unième siècle, en une ère prospère où la guerre et le crime ont été éradiqués. Le monde est désormais dirigé par de puissantes multinationales qui ont instauré un véritable retour des jeux du cirque pour canaliser la violence du peuple. Les gladiateurs ont été remplacés par des sportifs de haut niveau, s’entredéchirant sur les arènes du monde entier lors de chaque rencontre de « Rollerball ». Ultra-violent, ce sport barbare mixe le football américain, le motocross et le hockey. L’enjeu de chaque partie est une balle métallique que les joueurs doivent saisir pour marquer des points. Rollerball s’érige donc d’emblée en satire sociale tirant à boulets rouges sur le milieu du sport, de l’entreprise, de la politique, de la haute société, et dénonçant avant l’heure une mondialisation croissante.

Mais le film de Jewison s’apprécie aussi et surtout comme un farouche plaidoyer pour l’individualisme, une thématique récurrente des œuvres d’anticipations qui se concentre ici autour du personnage de Jonathan E, incarné avec toute la finesse qui se doit par un tout jeune James Caan pas encore popularisé par son rôle de Sonny Corleone dans Le Parrain. Jonathan est le champion de Rollerball de l’équipe de Houston, mais ses exploits l’ont popularisé aux quatre coins du monde, développant autour de lui un véritable culte de la personnalité. Cet état de fait n’est pas du goût des dirigeants du « consortium de l’énergie », organisateur mondial du Rollerball, et Jonathan subit d’insistantes pressions pour se retirer du jeu. Refusant cette retraite forcée, l’athlétique vedette comprend bientôt les enjeux qui se tissent autour de lui, lorsque son employeur lui déclare imperturbablement : « aucun sportif n’est plus grand que le sport lui-même ».

« Les privilèges nous démobilisent… »

Ainsi, non content de servir d’exutoire à la colère et la frustration du plus grand nombre, le « jeu » a surtout pour vocation de prouver l’inutilité de tout effort individuel. Or Jonathan est en train de démontrer le contraire aux yeux du public. « Les privilèges nous démobilisent » constate-t-il avec amertume, dans ce futur où le confort a été préféré à la liberté. Ponctué par de fulgurantes séquences de match dont la violence va crescendo, Rollerball se pare également de moments savoureusement vitriolés, notamment cette soirée mondaine dégoulinante d’hypocrisie qui s’achève au petit matin par un défouloir innommable : la mise à feu des arbres de la forêt pour le simple plaisir des yeux des dames de la belle société. Dommage que l’efficacité du discours soit amenuisée par la terrible froideur du film. Partant du principe que les personnages et leurs relations doivent être aussi glaciaux que l’univers dans lequel ils évoluent, Jewison prive les spectateurs d’un véritable facteur d’identification. Le climax de Rollerball se déroule au cours d’un affrontement Houston/New York qui tourne au massacre sanglant, et s’achève sur une image emblématique, celle de la victoire de l’individu sur le nombre, aux inoubliables accents de la Toccata de Bach.

 

© Gilles Penso

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