JOSH KIRBY : TIME WARRIOR ! CHAPITRE 6 – LAST BATTLE FOR THE UNIVERSE (1996)

L’ultime volet de la saga du jeune « guerrier du temps » et de ses compagnons s’achève sur une note étonnamment intimiste…

JOSH KIRBY TIME WARRIOR! CHAPTER 6 : LAST BATTLE FOR THE UNIVERSE

 

1996 – USA

 

Réalisé par Frank Arnold

 

Avec Corbin Allred, Jennifer Burns, Derek Webster, Jonathan C. Kaplan, Michael C. Mahon, Stacy Sullivan, Helen Siff, Charisma Carpenter, Johnny Green

 

THEMA VOYAGES DANS LE TEMPS I NAINS ET GÉANTS I SAGA JOSH KIRBY I CHARLES BAND

Au fil de leurs aventures précédentes, le lycéen Josh Kirby (Corbin Allred), la guerrière Azabeth Siege (Jennifer Burns), le scientifique Irwin 118 (Jonathan C. Kaplan) et la petite créature Prism (une marionnette mécanique dont l’utilité scénaristique nous laisse perplexes) avaient rencontré des dinosaures transformés en montures médiévales, un bébé extra-terrestre géant, des jouets vivants, des vers gloutons, un robot carnassier et des hommes-champignons. Nous étions donc en droit de nous attendre à une apothéose pour l’ultime épisode. Or contre toute attente, le réalisateur Frank Arnold et ses scénaristes (Ethan Reiff et Cyrus Voris) décident au contraire de jouer la carte de l’intimisme. Ce choix est guidé par les très faibles moyens mis à leur disposition (toutes les créatures précédemment citées étant bricolées avec des budgets étriqués ne permettant pas de faire des merveilles) mais aussi par la tournure qu’est en train de prendre l’arc narratif de ce serial estampillé Full Moon Entertainment. C’est finalement un parti-pris judicieux, qui permet de ramener l’aventure à de plus justes proportions et de l’achever de manière inattendue.

Comme toujours, l’épisode précédent (Journey to the Magic Cavern) nous abandonnait en plein cliffhanger. Mais celui-ci était d’une nature particulière. Au lieu de jeter nos héros d’un danger à un autre en les abandonnant dans des situations particulièrement hasardeuses, il remettait en question tous les événements précédents par la grâce d’un audacieux retournement de situation. Le début de cet ultime opus nous permet de mieux comprendre la réorganisation des forces et des enjeux via une série de flash-backs complétant quelques pièces du puzzle manquant. Les pouvoirs de Josh Kirby semblant augmenter d’épisode en épisode (« je ne suis pas n’importe qui, je suis un guerrier temporel ! » affirme-t-il en oubliant momentanément toute modestie), le voilà désormais capable de se transformer littéralement en machine à voyager dans le temps. La « dernière bataille pour l’univers » que nous promet le sous-titre de ce sixième épisode se prépare donc. Le fait que l’intrigue se situe désormais dans les années 80 offre de très intéressants paradoxes temporels, le moindre n’étant pas la rencontre de Josh avec un bébé qui n’est autre que lui-même ou avec une mère qu’il n’a jamais connue. Ces situations permettent pour la première fois de doter la série d’un atout émotionnel qui lui était jusqu’alors rigoureusement inconnu. Et c’est manifestement la plus grande force de cet épisode.

La fin de l’aventure

Les moments les plus intimistes sont donc les plus réussis, d’autant que les effets visuels restent l’une des grandes faiblesses de la série (images de synthèse approximatives, plans composites hasardeux, effets numériques ratés). Chaque fois que la mise en scène les sollicite, le caractère « cheap » de l’entreprise saute aux yeux. Reste l’armure de Zoetrope, une création toujours aussi impressionnante, même si la première partie du film s’amuse à l’incruster de manière très maladroite dans des extraits des épisodes précédents pour visualiser son voyage temporel à rebours. On regrette aussi l’extrême mollesse du combat final opposant le vilain en armure et Josh – déguisé en chevalier médiéval avec un dé à coudre géant en guise de heaume ! Il n’empêche que les personnages restent attachants et que l’épilogue – qui doit beaucoup à Retour vers le futur – boucle habilement la boucle entamée avec le premier épisode. Ainsi s’achève la saga Josh Kirby, une longue aventure épique qui aura su faire fi de ses moyens très limités pour s’offrir de belles ambitions et ravir le jeune public américain de l’époque. Ces six films n’arrivèrent pas jusqu’à nous, leur circuit de distribution étant resté limité, et il faut bien reconnaître qu’ils n’ont pas bien passé le cap des années, leur style et leurs effets étant fatalement très datés aujourd’hui. Ils s’inscrivent malgré tout dans le haut du panier des productions de Charles Band destinées à un public familial, aux côtés d’un Prehysteria, d’un Jack et le haricot magique ou d’un Château du petit dragon.

 

© Gilles Penso

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VOIX PROFONDES (1991)

Une jeune femme communique avec la voix de son défunt père pour tenter d’élucider le mystère qui entoure sa mort…

VOCI DAL PROFONDO / VOICES FROM BEYOND

 

1991 – ITALIE

 

Réalisé par Lucio Fulci

 

Avec Duilio del Prete, Karina Huff, Pascal Persiano, Laurence Flaherty, Bettina Giovannini, Paolo Paoloni, Sacha Darwin, Frances Nacman, Antonella Tinazzo

 

THEMA POUVOIRS PARANORMAUX I MORT

Connu aussi sous le titre Voix d’outre-tombe, Voix profondes est l’avant-dernier long-métrage de Lucio Fulci, dont la carrière commença à décliner lentement mais sûrement à partir du milieu des années 80, malgré quelques fulgurances encore impressionnantes rappelant l’immense cinéaste qu’il fut. L’intrigue de ce mélange étrange de film policier et de film d’horreur s’inspire d’une nouvelle que Fulci écrivit pour le journal La Gazetta di Firenze. L’intrigue est développée par le réalisateur et Daniele Stroppa, en vue d’une adaptation à l’écran, avant que Piero Regnoli entre en scène pour aider à lui donner la forme finale d’un scénario. D’abord titré Urla dal profondo (« Les cris des profondeurs »), le film s’appellera finalement Voci dal profondo (« Les voix des profondeurs »), le titre international Voices from Beyond, quant à lui, se référant volontairement à L’Au-delà, l’un des plus grands succès de Fulci. Visant le marché international, Voix profondes est entièrement tourné en anglais, l’ensemble du film étant ensuite post-synchronisé pour son exploitation en Italie. Le film connaît par ailleurs quelques déboires de distribution. Tourné en 1991, il ne sort en effet que trois ans plus tard dans un nombre très limité de salles avant d’atterrir sur le marché vidéo.

L’histoire de Voix profondes tourne autour de Giorgio Mainardi (Duilio del Prete), un homme d’affaires puissant, riche et en bonne santé. Pourtant, le voilà soudain victime d’une mystérieuse hémorragie gastrique qui provoque sa mort. Le médecin demande une autopsie pour déterminer la cause du décès (Lucio Fulci s’amusant à jouer lui-même le pathologiste qui pratique l’examen post-mortem). Alors que la fille du défunt, l’étudiante Rosy Mainardi (Karina Huff), rentre à la maison pour les funérailles, chaque membre de la famille médite sur ses propres griefs avec Giorgio. Sa femme Lucia (Bettina Giovannini) a eu une relation amoureuse avec son demi-frère et pense que Giorgio savait que son fils Davide (Daliano Azzos) n’était pas de lui. Sa belle-mère Hilda (Frances Nacman), qui a épousé son père infirme et muet, n’a toujours pas digéré qu’il ait restreint ses ressources financières. Son demi-frère Mario (Pascal Persiano) se souvient s’être vu refuser l’affectation à un poste de direction dans l’administration familiale. Sa maîtresse Rita (Antonella Tinazzo) a quant à elle été humiliée lors de leur dernière rencontre dans un restaurant. Au milieu de cet imbroglio digne d’un soap opera, Rosy est soudain contactée par une voix d’outre-tombe : celle de son père qui lui demande depuis l’au-delà d’élucider sa mort…

Télépathie macabre

Il faut reconnaître à Voix profondes l’originalité de son concept, mêlant les codes du « whodunit » hérités d’Agatha Christie avec un argument purement fantastique. Voir dialoguer par télépathie un corps en décomposition avec une jeune femme est un spectacle insolite et macabrement surréaliste. Pour donner corps à ce récit surprenant, Fulci laisse la caméra coller de près aux personnages, les accompagnant dans le moindre de leurs mouvements et se livrant à quelques acrobaties virtuoses. Mais ces touches d’originalité ne suffisent pas à rendre le film convaincant. Voix profondes souffre d’une narration accidentée, d’une musique hors sujet de Stelvio Cipriani et d’acteurs bien peu convaincants. Fulci lui-même gardera un souvenir mitigé du tournage. « C’est un film que j’aime beaucoup mais qui a un mauvais casting », avouera-t-il peu après. « Karina Huff était désagréable, Duilio del Prete était complètement à côté du rôle et Frances Nacman jouait une belle-mère beaucoup trop caricaturale » (1). Sans doute ce décalage entre les intentions du réalisateur et la performance de ses comédiens joua-t-il en défaveur du résultat final. Au cours du générique, Fulci se fend d’une mention étonnante : « Ce film est dédié à mes quelques vrais amis, en particulier à Clive Barker et Claudio Carabba. » Barker affirma en effet souvent avoir été inspiré par ses classiques horrifiques des années 80 (notamment Frayeurs, La Maison près du cimetière et L’Au-delà) tandis que Carabba fut l’un des rares critiques italiens à prendre son travail au sérieux. De là à les mentionner comme ses « quelques vrais amis », avouons que le constat est un peu triste.

 

(1) Extrait d’un entretien cité dans Splintered Visions : Lucio Fulci and His Films de Troy Howarth (2015)

 

© Gilles Penso

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UZUMAKI (2000)

Dans une petite ville du Japon, les habitants deviennent l’un après l’autre obsédés par tout ce qui a une forme de spirale…

UZUMAKI

 

2000 – JAPON

 

Réalisé par Higuchinsky

 

Avec Eriko Hatsune, Fhi Fan, Hinako Saeki, Shin Eun-kyung, Keiko Takahashi, Ren Ôsugi, Denden, Masami Horiuchi, Tarô Suwa, Tôru Tezuka, Sadao Abe, Asumi Miwa

 

THEMA MUTATIONS

Inclassable, déroutant, vertigineux, Uzumaki est de ces films qui laissent ses spectateurs dans un état mi-troublé mi-euphorique, persuadés d’avoir visionné quelque chose d’unique et d’incomparable. Avant le film, il y a un manga écrit et dessiné par Junji Ito. Son idée : reprendre le motif visuel de la spirale, habituellement associé à des choses positives et enjouées, pour le muer en vecteur de cauchemar. « Dans les dessins animés humoristiques japonais, les spirales marquent généralement les joues des personnages et représentent un effet de chaleur », explique-t-il. « Je me suis dit qu’il serait intéressant de détourner cette image en la dessinant différemment pour la faire basculer vers l’horreur. » (1). En découvrant les dessins de Ito, emplis de langues monstrueusement entortillées, de chevelures dignes de celles des Gorgones, de regards hagards et de portails circulaires ouverts vers d’autres dimensions, l’univers de H.P. Lovecraft nous vient naturellement à l’esprit, une influence que l’auteur assume pleinement. Le réalisateur japonais Akihiro Higuchi (plus connu sous son pseudonyme Higuchinsky) se voit confier la transposition du manga en prises de vues réelles. Le défi est de taille, d’autant qu’il s’agit de son premier long-métrage. Mais comment refuser une telle proposition ?

Structuré en quatre chapitres (« Prémonition », « Érosion », « Visitation » et « Transmigration »), Uzumaki se déroule dans une petite ville japonaise et choisit comme protagoniste Kirie Goshima (Eriko Hatsune), une étudiante sans histoire dont le monde s’apprête à basculer irrémédiablement. Un jour, elle surprend le père de son petit ami en train de filmer pendant des heures un escargot sur un mur. L’homme semble en transe, focalisant son regard sur la coquille de l’animal. « Quand je vois une spirale, je sens un profond mystère », dira-t-il plus tard. Son obsession incompréhensible pour les formes hélicoïdales prend une tournure de plus en plus étrange, voire inquiétante. Mais il n’est pas le seul dans cette situation. Petit à petit, tous les habitants semblent voir des spirales partout, tandis que leur comportement et leur morphologie s’altèrent. Les cheveux s’entortillent, les yeux se révulsent, les dos se recourbent, comme si un univers parallèle fait de courbes infinies était en train de s’inviter dans le nôtre…

Spiromaniac

En adéquation avec le thème obsessionnel de son film, Higuchinsky n’en finit plus de décliner les formes de spirales : les gros plan sur la roue d’un vélo qui roule, les moulinets de la matraque d’un policier, les effets de transition en iris circulaire, les affiches sur les devantures des magasins, les nuages dans le ciel, une poterie sur un tour, un escalier en colimaçon, les mouvements circulaires de la caméra, le ressort d’un diable dans une boite, les ronds dans l’eau, les empreintes digitales, les cheveux bouclés, un éclat de pare-brise… Le vertige gagne donc peu à peu le spectateur, mais ce n’est qu’un prélude au surgissement d’une série d’images fantastiques hallucinantes, de l’homme qui fait tourner ses yeux en spirale au corps entortillé dans une machine à laver en passant par les hommes-escargots géants qui rampent sur le mur de l’école ! Ici, le body horror prend une tournure surréaliste que seuls gâchent quelques effets numériques dénués de finesse. Dans Uzumaki, l’apocalypse prend donc des allures de vortex qui n’en finit plus de tourner sur lui-même, comme en témoigne ce grand final nihiliste éloigné de celui du manga, dans la mesure où Junji Ito n’avait pas terminé son écriture lorsque le film était en production. En 2024, une mini-série animée adaptera à son tour le sujet.

 

(1) Extrait d’une interview parue dans Wayback Machine en mars 2006.

 

© Gilles Penso

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L’ANGE DE LA VENGEANCE (1981)

Après avoir été doublement agressée, une jeune femme muette se transforme en tueuse psychopathe massacrant tous les hommes qu’elle croise…

MS.45 / ANGEL OF VENGEANCE

 

1981 – USA

 

Réalisé par Abel Ferrara

 

Avec Zoe Tamerlis, Albert Sinkys, Darlene Stuto, Helen McGara, Nike Zachmanoglou, Abel Ferrara, Peter Yellen, Editta Sherman, Vincent Gruppi

 

THEMA TUEURS

Lorsqu’Abel Ferrara tourne Driller Killer en 1979, c’est avec la volonté de s’engouffrer dans la vogue montante du cinéma d’horreur moderne tel qu’il fut redéfini par Massacre à la tronçonneuse, avec un budget minuscule et un gros potentiel commercial. L’affaire s’avère plutôt rentable, poussant Ferrara, son scénariste Nicholas St John et le producteur Arthur Weiseberg à retenter une aventure similaire. Mais pour L’Ange de la vengeance (dont le titre original Ms.45 se réfère au calibre de l’arme qu’utilise l’héroïne), Ferrara et St John souhaitent toucher un public moins confidentiel et tourner dans des conditions plus professionnelles. Si le réalisateur jouait lui-même le rôle principal de Driller Killer – faute de trouver quelqu’un de disponible -, il lui faut cette fois-ci une jeune femme en tête d’affiche. La perle rare lui est présentée par des amis qui la dénichent lors d’un casting pour le film musical Times Square. Il s’agit de Zoë Tamerlis, âgé alors de 17 ans. Ferrara est séduit par son visage d’ange, sa vive intelligence et sa sensibilité à fleur de peau. Il l’engage sur le champ et en fera l’une de ses collaboratrices régulières. Plus tard, elle écrira notamment le scénario du chef d’œuvre torturé Bad Lieutenant. Zoë Tamerlis (entretemps devenue Zoë Lund) mourra hélas prématurément à l’âge de 37 ans, victime de ses nombreuses addictions.

L’héroïne de L’Ange de la vengeance est Thana, une jeune femme dont le prénom n’a pas été choisi au hasard puisqu’il se réfère à Thanatos, le dieu grec de la mort. Muette de naissance, introvertie, elle travaille dans un atelier de couture auprès de collègues féminines bienveillantes et émancipées. Un soir, alors qu’elle rentre chez elle, un homme l’entraîne de force dans une ruelle sombre et la viole. Cette agression est tellement soudaine et tellement rapide qu’elle ressemble presque à un cauchemar, d’autant que le violeur (que joue Ferrara) porte un masque qui le fait ressembler à un monstre. Recroquevillée sur le trottoir sale, au milieu des poubelles, Thana semble ne pas réaliser ce qui vient de lui arriver. C’est en état de choc, débraillée, sale, le visage livide, qu’elle regagne son appartement. Là, le spectateur a un coup d’avance car il sait qu’un cambrioleur s’est introduit chez elle. Or cet intrus la viole à son tour. La deuxième agression est plus pénible encore, parce qu’elle dure longtemps et que Thana semble dans un état de sidération qui l’empêche de réagir, son mutisme accroissant davantage le sentiment d’impuissance qui la gagne. Soudain, dans un réflexe d’autodéfense et de survie, elle saisit un presse papier et frappe son agresseur, puis l’achève à coups de fer à repasser…

L’exterminatrice

Ferrara installe un cadre très réaliste en début de métrage. Comme à l’époque de Driller Killer, les images sont souvent « volées » dans les rues de New York avec de vrais passants. La violence qui s’apprête à éclater n’en semblera que plus réaliste, plus quotidienne, plus crue. D’autant que le cinéaste choisit les quartiers les plus pauvres, les plus sales et les plus miteux de la ville. L’Ange de la vengeance emprunte frontalement plusieurs effets de style au cinéma d’horreur, notamment lors des visions post-traumatiques de Thana (qui imagine la main d’un agresseur saisir sa poitrine ou croit voir dans le miroir le violeur masqué qui surgit derrière elle) ou lorsqu’elle découpe le cadavre de sa première victime au couteau de cuisine. Certes, Ferrara préfère ici la suggestion au gore, mais la séquence reste très suggestive. D’autant que quelques détails graphiques ultérieurs (des bouts d’entrailles qui bouchent la baignoire, une main tranchée dans une poubelle, une tête dans un sac) rendent cette horreur très concrète. L’humour noir n’est pas exclu pour autant, comme lorsque Thana donne à manger quelques morceaux du cadavre finement hachés au petit chien de sa voisine envahissante. Bientôt, la jeune héroïne ne supporte plus le moindre contact physique avec les hommes. En ce sens, son déséquilibre n’est pas sans évoquer Répulsion de Roman Polanski, avec lequel L’Ange de la vengeance présente de nombreux points communs. Dragueurs minables, photographes de mode, proxénètes, voyous, milliardaires saoudiens, tous ceux qui ont la mauvaise idée de l’approcher de trop près passent l’arme à gauche. Une métamorphose physique s’opère par ailleurs chez elle, la couturière timide et renfermée se muant en femme fatale sophistiquée à la beauté glaciale. Sa tenue la plus iconique reste cependant celle d’une nonne, que Ferrara choisit à la fois pour sacrifier aux codes du cinéma d’exploitation mais aussi et surtout pour jouer avec l’imagerie de la morale judéo-chrétienne. Car la frontière entre le bien et le mal n’en finit plus de s’estomper tandis que le film avance vers son final explosif et nihiliste.

 

© Gilles Penso

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LUI ET MOI (1988)

Un beau jour, un homme ordinaire à la vie bien rangée découvre que son sexe a une conscience autonome et commence à lui parler…

ME AND HIM / ICH UND ER

 

1988 – USA / ALLEMAGNE

 

Réalisé par Doris Dörrie

 

Avec Griffin Dunne, Carey Lowell, Craig T. Nelson, Eilen Greene, Kelly Bishop, Kim Flowers, Bill Raymond, David Alan Grier, Kara Glover, Rocco Sisto, Nancy Giles

 

THEMA DOUBLES

Bernd Eichinger a commencé sa carrière de producteur au milieu des années 70 et s’est rapidement imposé comme un nom important de la cinématographie non seulement allemande mais aussi internationale. En 1988, lorsqu’il décide de se lancer dans Lui et moi, il a déjà à son actif des films de la trempe de L’Histoire sans fin ou Le Nom de la rose. Sa source d’inspiration vient cette fois-ci d’un roman grivois d’Alberto Moravia, Io e Lui, qui fit déjà l’objet d’une adaptation en 1973 à l’occasion du film homonyme de Luciana Salce, avec Lando Buzzanca et Bulle Ogier. Eichinger cherche à remettre cette histoire salace au goût du jour par le biais d’une co-production germano-américaine qui donne la vedette à un acteur comique populaire, en l’occurrence Griffin Dunne (Le Loup-garou de Londres, After Hours, Who’s That Girl, Cheeseburger Film Sandwich). Son patron sera incarné par le charismatique Craig T. Nelson (Poltergeist) et sa nouvelle collègue de travail prendra les atours séduisants de Carey Lowell (James Bond Girl dans Permis de tuer). C’est Doris Dörrie, réalisatrice allemande spécialisée dans les comédies, les drames et les romances depuis le début des années 80, qui se charge de la mise en scène, tournant ici son premier long-métrage en langue anglaise.

Dunne incarne comme souvent un homme ordinaire dont la vie simple et rangée s’apprête à basculer irrémédiablement. Il entre ici dans la peau de Bert Uttanzi, un architecte de New York marié et père d’un enfant, dont le vœu le plus cher est de concrétiser son nouveau projet afin de pouvoir offrir à sa famille la maison de leurs rêves. Mais le soir de son anniversaire, sans crier gare, il entend son pénis qui s’adresse à lui ! La crise de panique bien compréhensible qui le frappe soudain sollicite l’intervention d’une ambulance. Lorsque le médecin à qui il explique son malaise tente de résumer la situation (« Vous me dites que la voix que vous pensez entendre provient de votre zone génitale ? »), le caractère absurde de la situation n’échappe à personne. Pourtant, Bert doit se rendre à l’évidence : son sexe lui parle. Affamé, le capricieux pénis se met à titiller Bert pour le pousser à balayer d’un revers de main sa vie tranquille et à multiplier les aventures avec toutes les femmes attirantes qui croiseront son chemin. Comment gérer une telle soif de libido ? Le jour où une ravissante nouvelle collègue de travail débarque dans le cabinet où il travaille, les choses commencent sérieusement à se compliquer…

Occasion manquée

Avec un postulat pareil, deux options se profilaient à l’horizon : la slapstick sophistiqué façon Blake Edwards ou la comédie graveleuse et potache. Les deux possibilités offraient un potentiel intéressant, mais bizarrement Doris Dörrie n’en choisit aucune. Lui et moi est en effet un film désespérément tiède qui ne sait visiblement que faire de son concept. L’humour que déploie le scénario laisse perplexe dans la mesure où la plupart des gags tombent à plat, soit parce que les personnages adoptent des comportement parfaitement incohérents (notamment toutes les femmes qui tombent comme des mouches face aux techniques de drague pourtant grossières du protagoniste), soit parce que le timing est à côté de la plaque (l’enterrement imaginaire du pénis de Bert par exemple). Sans parler de ces nombreux moments embarrassants (la première rencontre entre Griffin Dunne et Carey Lowell dans la bibliothèque, le numéro musical final). Il y avait pourtant matière à tourner en dérision les incompatibilités apparentes des raisonnements masculins et féminins (ce que fera habilement Nancy Meyers dans Ce que veulent les femmes) et surtout à créer une infinité de quiproquos avec un homme parlant à son sexe dont il est seul à entendre la voix. On repense à cette scène de L’Aventure intérieure où Martin Short discutait avec Dennis Quaid miniaturisé dans les toilettes publiques. En quelques secondes, Joe Dante nous déridait avec beaucoup plus d’efficacité que n’y arrive Doris Dörrie en 90 minutes. Lui et moi est donc une occasion manquée. Bernd Eichinger ne lâchera pourtant pas l’affaire et produira en 2000 une autre adaptation du roman de Moravia, Ils ne pensent qu’à ça ! de Marc Rothemund.

 

© Gilles Penso

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LIVRE DE SANG (2009)

Dans cette adaptation d’une courte nouvelle de Clive Barker, une parapsychologue, son assistant et un étudiant enquêtent sur une maison hantée…

BOOK OF BLOOD

 

2009 – GB

 

Réalisé par John Harrison

 

Avec Jonas Armstrong, Sophie Ward, Clive Russell, Paul Blair, Romana Abercromby, Simon Bamford, Doug Bradley, Gowan Calder, Graham Colquhoun

 

THEMA FANTÔMES

Proche collaborateur de George Romero dans les années 80 et 90, John Harrison fut notamment le compositeur des mémorables bandes originales de Creepshow et Le Jour des morts-vivants, le scénariste de plusieurs épisodes d’Histoires de l’autre monde et des Contes de la crypte, le producteur exécutif de Diary of the Dead mais aussi – dans un tout autre registre – le scénariste du Dinosaures de Disney et le producteur des deux Dune de Denis Villeneuve. En tant que réalisateur, cet homme éclectique signa entre autres Darkside, les contes de la nuit noire et plusieurs épisodes de la mini-série Dune au début des années 2000. Avec Livre de sang, il s’attaque à l’écrivain Clive Barker et s’efforce de rester fidèle à l’univers trouble et tourmenté du père d’Hellraiser. La tâche n’est pas simple, pas tant parce que la fidélité au texte original nécessite des images très sanglantes et explicites, mais surtout parce que le texte de la nouvelle éponyme, qui inaugure une série de recueils publiés à partir de 1984, est très court : moins de vingt pages. Pour en tirer un long-métrage, Harrison puise aussi dans l’ultime nouvelle du recueil Livres de sang, Jérusalem Street, et se permet plusieurs ajouts scénaristiques étrangers à la prose de Barker. Certains vont s’avérer judicieux, d’autres moins…

« Les morts ont leurs artères », disait l’écrivain en guise de prologue. « Elles défilent, infaillibles alignements de trains fantômes, de rames de rêve, à travers la désolation qui s’étend derrière nos vies, portant un trafic éternel d’âmes envolées. » Cette poésie macabre est presque reprise mot à mot par la voix off qui inaugure le film. Après une scène introductive énigmatique au cours de laquelle un jeune homme ensanglanté et partiellement défiguré est kidnappé par un mercenaire qui est chargé de le dépecer, le cours des événements se rembobine pour nous présenter Mary Florescu (Sophie Ward), professeur de paranormal et auteur à succès qui se lance avec son partenaire Reg Fuller (Paul Blair) dans une enquête autour d’une maison marquée par de terribles événements. Une adolescente y aurait été violée, battue et assassinée par une entité invisible. Lorsqu’elle rencontre, dans l’amphithéâtre où elle prodigue ses cours, Simon McNeal (Jonas Armstrong), un étudiant visiblement doté de pouvoirs parapsychiques, elle le convainc de les aider dans leurs investigations…

Les mots des morts

L’un des éléments les plus intéressants de Livre de sang est sans doute la difficulté – pour les spectateurs comme les protagonistes – à faire la part des choses entre les manifestations surnaturelles et les supercheries, le rêve et la réalité, les hallucinations et les souvenirs, au sein d’une intrigue qui emprunte un peu la voie de La Maison du diable et de Poltergeist, en évoquant parfois le saisissant L’Emprise de Sidney J. Furie (notamment lors de la scène où Mary est empoignée par une force invisible qui laisse ses empreintes de doigts sur son visage). Mais la médaille a un revers : à trop vouloir construire une backstory pour Mary et Simon (chacun a été frappé par un traumatisme d’enfance, leur rapport aux visions de l’au-delà sont complexes), le scénario s’emmêle et perd ce qui faisait le charme du texte de Barker. Dans la nouvelle, les motivations de Simon étaient claires et le retournement de situation final en tirait toute son efficacité. Ici, le trop plein d’informations et de contre-informations amenuise l’impact du récit et gâche une partie de son potentiel. L’autre problème est lié à l’imagerie convoquée pour décrire le monde des morts : des fantômes grimaçants translucides, des panoramas infernaux en images de synthèse, bref des visions trop frontales pour convaincre, d’autant que les effets visuels maladroits manquent singulièrement de subtilité. Le bilan est donc très mitigé, même s’il faut reconnaître à John Harrison un talent indiscutable dans la construction d’une atmosphère anxiogène malsaine et dans la direction de ses comédiens, tous très convaincants. On note au passage l’apparition furtive de Doug Bradley (le Pinhead d’Hellraiser) dans une séquence de cauchemar.

 

© Gilles Penso

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JUMPER (2008)

Hayden Christensen incarne un jeune homme qui possède la capacité de se téléporter n’importe où sur la planète en un clin d’œil…

JUMPER

 

2008 – USA

 

Réalisé par Doug Liman

 

Avec Hayden Christensen, Jamie Bell, Rachel Bilson, Diane Lane, Samuel L. Jackson, Michael Rooker, Annasophia Robb, Max Thieriot, Kristen Stewart

 

THEMA POUVOIRS PARANORMAUX

Jumper fait partie de ces gros films de studios qui seront passés par de nombreuses réécritures avant d’aboutir au résultat que les spectateurs ont découvert à l’écran. Après avoir acquis les droits d’adaptation du roman homonyme écrit par Steven Gould et publié en 1992, la compagnie New Regency Productions engage Jim Uhls (Fight Club) pour retravailler une première version de scénario rédigée par David S. Goyer (Dark City, The Dark Knight). Lorsqu’il est embauché pour réaliser le film, Doug Liman (La Mémoire dans la peau) souhaite lui-même effectuer de nombreux changements. Un troisième larron entre donc en scène, Simon Kinberg (Mr. & Mrs. Smith), pour réviser une nouvelle fois le scénario. Ces changements successifs entravent inévitablement les préparatifs du film. D’autres complications surviennent dans la foulée. Alors que Liman a choisi ses deux acteurs principaux, Tom Sturrige (Les Voyages de Gulliver) et Teresa Palmer (The Grudge 2), le producteur Tom Rothman est soudain pris d’un doute. Selon lui, des personnages trop jeunes risquent de ne pas attirer le public, qui croira avoir affaire à un film pour enfants. À deux semaines à peine du début du tournage, les deux comédiens sont donc remplacés au pied levé par Hayden Christensen (l’Anakin Skywalker de la prélogie Star Wars) et Rachel Bilson (Newport Beach). C’est donc de manière un peu chaotique que Jumper se met en branle.

Depuis l’adolescence, David Rice (Christensen) sait qu’il peut se téléporter n’importe où sur Terre, une capacité qu’il a découverte par hasard quand il était lycéen à Ann Arbor. Cette aptitude, qu’il a perfectionnée au fil des années, lui permet d’échapper à la brutalité des autres élèves et à son père alcoolique, après que sa mère les ait abandonnés lorsqu’il avait cinq ans. Grâce à ce pouvoir, David n’a désormais plus de limites. Il peut déjeuner en Égypte sur la tête du Sphinx, faire du surf en Australie, dîner à Paris et prendre le dessert au Japon. Les murs ne l’arrêtent plus et aucun coffre de banque ne lui résiste. Il vole ainsi de l’argent pour mener une vie somptueuse et aventureuse à New York, alors que tout le monde dans son ancienne vie le croit mort. Libre et insouciant, David vit donc sans contraintes, jusqu’à ce qu’il décide de revenir à Ann Arbor. Là, il cherche à renouer avec Millie Harris (Rachel Bilson), son amie et amoureuse du lycée, pour lui faire vivre les aventures de voyage dont elle a toujours rêvé. Mais ce retour dans son passé va bouleverser sa vie…

Aux quatre coins du monde

Si l’on excepte les différents opus de La Mouche et de Star Trek (et dans une moindre mesure la série Heroes), le thème de la téléportation n’aura pas souvent été décliné à l’écran, malgré les nombreuses possibilités narratives qu’il offre. Jumper nous en propose donc une approche intéressante. Nerveuse à souhait, la mise en scène de Doug Liman intègre des effets visuels d’autant plus surprenants que jusqu’alors la téléportation était surtout visualisée par de simples fondus enchaînés et un peu de rotoscopie. Or ici, le phénomène se traduit par des déplacements ultradynamiques, aux conséquences souvent destructrices, via le transfert d’une énergie qu’on imagine considérable. Les autres points forts du film sont la prestation très charismatique de Christensen (tellement impliqué sur le tournage qu’il effectue plusieurs cascades et se blesse à de nombreuses reprises), le caractère résolument dépaysant de l’intrigue (le film a été tourné aux quatre coins du monde, dans une quinzaine de pays différents) et quelques mémorables morceaux de bravoure (notamment dans le Colisée de Rome). Mais le scénario ne sait que faire de tous ces atouts et stagne rapidement. Comme en outre Samuel L. Jackson peine à représenter la moindre menace crédible (il se la joue décontracté sans jamais susciter la moindre inquiétude), les enjeux du film tournent court et nous finissons par nous détacher de ce film certes distrayant mais pas franchement passionnant.

 

© Gilles Penso

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LE FEU DE L’AU-DELÀ (1989)

Tobe Hooper met en scène Brad Dourif dans le rôle d’un homme possédant le pouvoir de transformer en torches humaines tous ceux qui s’opposent à lui…

SPONTANEOUS COMBUSTION

 

1989 – USA

 

Réalisé par Tobe Hooper

 

Avec Brad Dourif, Cynthia Bain, Jon Cypher, William Prince, Melinda Dillon, Dey Young, Tegan West, Michael Keys Hall, Dale Dye, Dick Butkus, Joe Mays

 

THEMA POUVOIRS PARANORMAUX

Après Lifeforce, L’Invasion vient de Mars et Massacre à la tronçonneuse 2, tous trois produits par Cannon Group, Tobe Hooper se tourne vers le petit écran, réalisant une poignée d’épisodes pour Histoires fantastiques, Equalizer et Les Cauchemars de Freddy. À partir de là, un net infléchissement de sa carrière se fait hélas ressentir, Le Feu de l’au-delà marquant le point de départ de cette inéluctable chute qualitative. Le scénario de ce thriller de SF horrifique, qu’il co-écrit avec Howard Goldberg d’après une histoire originale de son cru, s’intéresse à un phénomène fascinant qui reste à ce jour inexpliqué : la combustion spontanée, autrement dit la calcination de corps dont la cause demeure inconnue. Tourné en huit semaines avec un budget de 5,5 millions de dollars, Le Feu de l’au-delà est produit dans des conditions relativement confortables, sous l’égide d’Henry Bushkin (bras droit de la star de la TV américaine Johnny Carson) et Arthur Sarkissian (producteur de Mort ou vif de Gary Sherman). Le résultat manque pourtant d’envergure et de panache, malgré quelques fulgurances furtives. Le film sera donc un échec cuisant au box-office, entaché il est vrai par une distribution chaotique et une exploitation en salles très limitée.

Le Feu de l’au-delà démarre en 1955. Brian et Peggy Bell prennent part au « projet Samson », une expérimentation orchestrée par l’armée américaine dans le désert du Nevada. Installés dans un bunker souterrain sous l’épicentre d’une explosion nucléaire, ils servent de sujets tests pour un sérum censé protéger des radiations. L’essai est concluant, et quelques mois plus tard, Peggy met au monde un garçon, Sam, né le 6 août 1955, exactement dix ans après le bombardement d’Hiroshima. Mais peu après, Brian et Peggy meurent de façon inexpliquée, consumés par une combustion spontanée. Trente-cinq ans plus tard, leur fils David mène une existence ordinaire d’enseignant dans un lycée, bien qu’il souffre régulièrement de violentes migraines. Lorsqu’il apprend la disparition troublante d’une femme retrouvée calcinée après une vive altercation avec lui, il comprend avec effroi qu’il détient un pouvoir de pyrokinésie…

Flammes fatales

Si le scénario rappelle beaucoup Furie et surtout Firestarter, là n’est pas son pire travers. Le film se révèle en effet bardé de confusions et d’invraisemblances. Les dialogues improbables et les acteurs qui jouent en roue libre sans la moindre retenue n’aident pas. Brad Dourif n’a certes jamais été un modèle de sobriété, et c’est justement dans ses outrances qu’il séduit généralement ses fans. Mais ici, rien ne va plus : il passe son temps à hurler, à gesticuler, à écarquiller les yeux sans garde-fou, provoquant chez les spectateurs un mélange d’exaspération et d’hilarité. « Ce film n’a pas de sens », avouera l’acteur un an après sa sortie « J’ai l’impression que ce sont les producteurs qui l’ont détruit. Tobe aurait pu faire trois films différents avec le matériel dont il disposait, et chacun aurait fonctionné. Mais là, nous passons d’une histoire d’amour à un thriller à suspense, puis à un film sur un type qui devient fou et dont la force destructrice va anéantir l’humanité. Mon jeu est à peu près cohérent au début, puis ça ne va plus du tout, parce que je me suis retrouvé à la merci de gens qui ne savaient pas ce qu’ils faisaient » (1). Restent les scènes pyrotechniques, stupéfiantes de réalisme et d’étrangeté – les bras des victimes se transforment en véritables lance-flammes, leurs visages se consument en fumant –, et quelques scènes amusantes comme l’apparition de John Landis dans le rôle d’un technicien radio qui finit en flammes comme la majorité du casting. Ça ne suffit évidemment pas à faire un bon film.

 

(1) Extrait d’une interview parue dans Fangoria en 1990

 

© Gilles Penso

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JOSH KIRBY : TIME WARRIOR ! CHAPITRE 5 – MAGIC CAVERN (1996)

Dans cette cinquième aventure, le jeune voyageur temporel et ses compagnons se retrouvent dans une caverne peuplée d’hommes-champignons…

JOSH KIRBY TIME WARRIOR! CHAPTER 5: MAGIC CAVERN

 

1996 – USA

 

Réalisé par Ernest D. Farino

 

Avec Corbin Allred, Jennifer Burns, Derek Webster, Barrie Ingham, Matt Winston, Nick De Gruccio, Cindy Sorenson, Michael Hagiwara, Lomax Study

 

THEMA VOYAGES DANS LE TEMPS I SAGA JOSH KIRBY I CHARLES BAND

Pour finir la saga Josh Kirby, entamée en 1995, le producteur Charles Band est obligé de resserrer les cordons de la bourse. Paramount Vidéo a en effet décidé de cesser son association avec lui et donc la distribution des vidéocassettes des produits estampillés Full Moon. Les budgets de cette série de films de SF pour jeune public étant déjà très réduits, les choses vont de mal en pis pour les réalisateurs, obligés malgré tout d’assurer le spectacle. Signataire des deux premiers opus, Ernest Farino rempile et fait ce qu’il peut. La grande majorité de l’intrigue de ce cinquième chapitre se situant dans une grotte souterraine, il profite d’un immense décor déjà construit pour les besoins de l’épopée fantastique The Primevals de David Allen. « Malheureusement, ce décor, qui faisait environ la moitié de la longueur d’un terrain de football, n’avait pas de toit », raconte Farino. « Nous avons donc demandé qu’un toit soit ajouté, ou au moins une toile, puisque notre histoire se déroulait sous terre, et nous étions conscients que l’objectif était de tourner ces films en deux semaines. Le coût d’un toit ou d’une couverture a été estimé à 12 000 dollars et cette idée a été rejetée. » (1) Farino tourne donc principalement de nuit, avec un acteur principal mineur dont les heures de travail sont rigoureusement réglementées. Résultat : le tournage prend trois semaines de retard et entraîne un surcoût de 25 000 dollars. Mauvais calcul du côté des comptables de Full Moon !

Josh Kirby, le scientifique Irwin 1138 et la guerrière Azabeth Siege poursuivent leur quête à travers le temps et l’espace pour récupérer avant le sinistre Dr Zoetrope les composants du Nullifier, un artefact extra-terrestre très puissant et potentiellement très dangereux. Leur voyage les mène sous terre, sur une planète peuplée d’hommes-champignons, qui parlent anglais avec des accents variés (italien, japonais, français) et portent des noms évocateurs tels que Porcini, Shitake ou Truffe. Ces créatures bizarroïdes mais sympathiques, fascinées par Prism (la petite créature facétieuse qui accompagne nos héros partout), le vénèrent comme une divinité. Les choses tournent mal lorsque l’état de santé d’Azabeth commence à décliner après qu’elle ait mordu un morceau de champignon. Irwin, inquiet, lui explique que « la frontière entre aucun effet du tout et une dose mortelle est très fine », ce qui n’est évidemment pas très rassurant. Pour tenter de sauver la jeune guerrière, le roi des champignons fait appel à son médecin, mais celui-ci se montre impuissant. Le seul espoir réside désormais dans la quête d’un antidote, qu’ils doivent partir dénicher dans une zone très dangereuse baptisée Nightmare Hollow…

Gare aux morilles !

Comme toujours, les effets spéciaux sollicités par le scénario sont bricolés avec les moyens du bord (maquillages variés, marionnettes, maquettes, incrustations) et tiennent à peu près la route, à l’exception des affreuses images de synthèse sollicitées pour créer une nuée d’abeilles phosphorescentes. Les prothèses utilisées pour le peuple champignon sont plutôt réussies (si l’on accepte le caractère cartoonesque des personnages), le décor de la caverne apporte une précieuse plus-value visuelle et les différents périls qui surviennent au cours du périple de nos héros (sables mouvants, pont suspendu au-dessus d’une mer de lave en fusion, robot rongeur géant qui hypnotise ses proies) sont très raisonnablement distrayants. Au détour du casting, on apprécie la prestation exubérante de Matt Winston dans le rôle d’un inventeur excentrique qui a conçu une marionnette animatronique géante (ce qui ne manque pas d’ironie puisque c’est le vrai métier du père de l’acteur, Stan Winston, concepteur notamment de la reine extra-terrestre d’Aliens et du T-rex de Jurassic Park). Le dernier acte nous permet de découvrir un nouveau pouvoir de Josh (remonter le temps de quelques minutes en créant une « tempête temporelle ») et d’apprécier un clin d’œil à Star Trek (avec la reprise du fameux monologue du capitaine Kirk en version « champignon »), jusqu’à un audacieux retournement de situation final qui remet en question une partie des péripéties des opus précédents.


(1) Propos extraits du livre « It Came From the Video Aisle ! » (2017)

 

© Gilles Penso

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THE LITTLE MERMAID (2024)

La gentille petite sirène d’Andersen et Disney se transforme ici en monstre assoiffé de sang humain, sous haute influence de H.P. Lovecraft…

THE LITTLE MERMAID

 

2024 – USA

 

Réalisé par Leigh Scott

 

Avec Mike Markoff, Lydia Helen, Jeff Denton, Sean-Michael Argo, Winston Crooke, Wayne Gordon, Samuel Selman, Thomas Downey, Manon Laurent, Leigh Scott

 

THEMA MONSTRES MARINS

Leigh Scott est un grand habitué des films fantastiques aux budgets minuscules qui plagient les blockbusters du moment. Nous lui devons Le Seigneur du monde perdu, Transmorphers, Cyborg Conquest, Piranha Sharks et une trentaine d’autres séries B/Z du même acabit. The Little Mermaid s’inscrit dans une vogue différente, celle de réinventer les personnages des films pour enfant en les transformant en créatures de films d’horreur. Nous sommes donc dans un esprit voisin de Winnie the Pooh : Blood and Honey, Mickey’s Mouse Trap ou Cinderella’s Curse. Un texte dans le générique de Little Mermaid positionne le film comme une adaptation de l’histoire écrite par Hans Christian Andersen, mais il est évident que la version « live » produite par le studio Disney en 2023 est la principale motivation de la mise en chantier de cette variante horrifique du célèbre conte. L’une des scènes introductives donne le ton. Un bateau de pêche y récupère dans un filet une sirène ayant perdu connaissance. Mais celle-ci n’a pas le caractère affable et sympathique de la joviale Ariel. C’est une créature assoiffée de sang qui exhibe des crocs acérés et massacre les deux hommes à bord du bateau avant de retourner à la mer.

Le personnage principal de ce Little Mermaid est le docteur Eric Prince (Mike Markoff), qui mène des fouilles archéologiques sur une île des Caraïbes dans l’espoir de ramener la preuve de l’existence d’une société préhistorique très avancée. Mais les propriétaires des lieux voient d’un mauvais œil ces excavations et menacent à tout moment de couper court à l’autorisation de poursuivre les recherches. Lorsqu’une des étudiantes d’Eric trouve un corps momifié dans une espèce de sarcophage, accompagné de l’idole en pierre d’une divinité sumérienne, celui-ci exulte. « C’est l’une des plus grandes découvertes de l’histoire de l’archéologie depuis le trésor de Toutankhamon » s’écrie-t-il. Alors qu’il rêve déjà de prouver à la communauté scientifique que ses théories jugées farfelues sont fondées, il rencontre la mystérieuse Aurora Bey (Lydia Helen), qui possède des objets anciens de très grande valeur. Il tombe rapidement sous son charme. Mais ne cache-t-elle pas sa vraie nature ?

Quand Splash rencontre Dagon

La première partie du film s’intéresse à la romance naissante entre Eric et Aurora. « C’est comme un film de Tom Hanks ! » s’écrie même l’archéologue après avoir soupçonné la belle inconnue d’être une sirène. Leigh Scott prend visiblement son sujet au sérieux et essaie de creuser ses personnages, s’appuyant sur des performances plutôt convaincantes. Mais à part la première scène d’attaque, il faut bien reconnaître qu’il ne se passe pas grand-chose de palpitant pendant un bon moment. Lorsque l’intrigue décolle enfin, c’est pour nous surprendre agréablement. Car au lieu de s’inspirer d’Andersen ou de Disney, Leigh Scott s’appuie sur les écrits de H.P. Lovecraft, qu’il avait déjà abordés frontalement dans Necronomicon : le livre de Satan en 2008. La statuette trouvée sous terre est celle du dieu Dagon, l’un des étudiants porte un T-shirt « Miskatonic University », le mentor du héros évoque un culte démoniaque à Innsmouth, un clin d’œil tardif annonce même l’avènement de Cthulhu. Rattacher l’histoire de la petite sirène au mythe des Grands Anciens est un choix audacieux, The Little Mermaid prenant presque les allures d’une suite du Dagon de Stuart Gordon auquel il se réfère directement au cours d’une séquence de cauchemar. Avec sa mise en forme soignée, ses sites naturels très photogéniques, captés à Saint-Christophe-et-Niévès dans les Caraïbes, et le charme indiscutable de Lydia Helen, qui nous ferait presque croire à sa nature surnaturelle, The Little Mermaid est sans conteste l’un des meilleurs films de Leigh Scott. La barre n’était certes pas très haute jusqu’à présent, mais c’est tout de même une bonne surprise.

 

© Gilles Penso

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