AGENTS DU SHIELD (LES) (2013-2020)

Le Marvel Cinematic Universe débarque sur les petits écrans…

MARVEL’S AGENTS OF SHIELD

2013-2020 – USA

Créée par Joss Whedon, Jed Whedon et Maurissa Tancharoen

Avec Clark Gregg, Ming-Na Wen, Chloe Bennet, Ian de Caestecker, Elisabeth Hentsridge, Brett Dalton, Henry Simmons, Adrianne Palicki, Nick Blood, Natalia Cordova-Buckley, Kyle Mac-Laclan, John Hannah

THEMA SUPER-HEROS I SAGA MARVEL

Au cours de la spectaculaire bataille à bord de l’héliporteur dans le tout premier Avengers, nous avions assisté impuissants au décès de l’agent Phil Coulson. Celui qui est un grand admirateur de Captain America est lâchement assassiné par le dieu Loki qui le transperce avec son sceptre. Mais le SHIELD ayant des ressources secrètes, le directeur Nick Fury parvient à remettre sur pied son fidèle bras droit qui reprend du service pour l’agence. Cette fois-ci, pas question pour Coulson de rejoindre les Avengers, qui ne sont pas informés de sa résurrection. Il se voit donc confier par le directeur Fury le commandement d’une toute nouvelle équipe d’enquêteurs qu’il dirige à partir d’un QG volant, un Boeing C-17 Globemaster entièrement refondu par les services techniques du SHIELD. Parmi leurs missions figure bien entendu la lutte contre Hydra ainsi que d’autres menaces susceptibles de provoquer le chaos sur Terre. Ce groupe hétéroclite est composé des scientifiques Gemma Simmons et Leopold Fitz, de l’aviatrice experte en arts martiaux Melinda May et de Grant Ward, agent rompu aux missions tactiques les plus délicates. Mais cette équipe intègre également dans ses rangs la jeune Skye, une pirate informatique membre d’un groupe de hackeurs prônant la liberté d’expression, qui va nouer très rapidement un rapport père-fille avec l’agent Coulson.

Agents du Shield

Le passage d’un univers cinématographique à la télévision pourrait susciter bien des méfiances. La série issue des films La Planète des Singes dans les années 70 en est l’illustration. Pour éviter le même genre d’écueil, Marvel a fait le pari de la continuité en faisant appel à Joss Whedon, créateur de Buffy et surtout réalisateur des deux premiers Avengers, pour la conception des Agents du SHIELD. Et c’est un pari réussi, car le point de départ de cette déclinaison télévisée de l’univers Marvel est l’agent Coulson lui-même, sur qui repose l’intrigue de départ (et toute la série). Dès le début, le tempo imprimé permet à l’épisode pilote de démarrer sur les chapeaux de roue. Pour ne pas déstabiliser les nombreux fans de la franchise, la série s’appuie également sur des éléments connus. Il faut bien sûr garder de la cohérence avec les films. Tout au long de la série, il est ainsi fait allusion à plusieurs des métrages du MCU dont Iron Man 3Avengers : l’ère d’Ultron ou encore Captain America : le Soldat de l’Hiver pour ne citer qu’eux. Certains personnages connus, et moins connus, aperçus dans les films, font également une apparition en début de série. Mais si celle-ci se rapproche de l’univers familier du MCU, elle sait également s’en éloigner. L’action est omniprésente, les temps morts sont (très) rares, les personnages n’ont pas le temps de souffler et sont très souvent malmenés. L’univers dans lequel ils évoluent est en permanence remis en question. C’est donc un doux euphémisme de dire que les apparences sont souvent trompeuses dans Les Agents du SHIELD.

Tempo soutenu et renouveau permanent…

Si ce show doit beaucoup à ses scénaristes, il repose aussi grandement sur ses interprètes, à commencer par Clark Gregg qui réendosse le costume de l’agent Coulson pour notre plus grand plaisir. Son personnage, sous son apparence de fonctionnaire propre sur lui, au sourire naturel, cache en réalité un être complexe et déterminé, prêt à franchir les limites si cela s’avère nécessaire. Ming-Na Wen, qui incarne son bras droit, est parfaite dans le rôle de l’agent May et n’a absolument pas à rougir d’une comparaison avec Scarlett Johansson (la Veuve Noire). L’alchimie du duo Elisabeth Henstridge (Simmons) – Ian de Caestecker (Fitz) fonctionne elle aussi très bien. Pour sa part, Brett Dalton prête ses traits au « ténébreux » agent Ward. Quant à Chloé Bennet, elle fait merveille dans le rôle de Skye – Daisy Johnson dont le personnage ne cesse de s’étoffer au fil des saisons jusqu’à faire jeu égal avec Coulson et May. D’autres personnages viennent renforcer l’équipe, dont la sublime Adrianne Palicki qui personnifie l’agent Barbara Morse (« Mocking Bird ») et Nick Blood dans le rôle de son ex-mari l’agent Lance Hunter. Ce duo apporte une touche d’humour appréciable et on peut regretter leur (émouvant) départ au cours de la saison 3. Mais le tempo soutenu de la série, qui propose une intrigue par saison et pas des histoires différentes à chaque épisode, impose un renouveau permanent. Ce même rythme s’est finalement s’interrompu au terme de la septième saison dont les épisodes devaient être diffusés à partir de la fin du mois de mai 2020.

© Antoine Meunier

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MANDALORIAN (THE) (2019-2023)

La première série « live » dérivée de l'univers Star Wars nous plonge dans une étrange atmosphère de western spaghetti…

THE MANDALORIAN

2019/2023 – USA

Créée par Jon Favreau

Avec Pedro Pascal, Gina Carano, Carl Weathers, Nick Nolte, Werner Herzog, Taïka Waititi, Emily Swallow, Omid Abtahi, Ming-Na Wen, Giancarlo Esposito

THEMA SPACE OPERASAGA STAR WARS

Depuis que Lucasfilm est passée dans le giron de Disney en 2012, les produits estampillés Star Wars ont méthodiquement poussé comme des champignons. Trois épisodes supplémentaires, dont les scénarios sont franchement médiocres, sont venus enrichir l’univers classique. Deux autres long-métrages « spin-off » ont également été réalisés : le très bon Rogue One (en 2016) situé immédiatement avant l’Episode IV et le fort moyen Solo (en 2018), qui revient sur la jeunesse de notre chasseur de primes préféré. Quant à l’idée d’une série télévisée en prises de vue réelles de l’univers Star Wars, elle n’est pas nouvelle. Elle fut évoquée par George Lucas, lui-même, lors de la promotion du quatrième Indiana Jones en 2008. Cette série, baptisée Star Wars Underworld, devait se passer entre les épisodes III (La Revanche des Sith) et IV (Un Nouvel Espoir). Pour des raisons de coûts, le créateur de la saga galactique la plus célèbre du cinéma n’a malheureusement pas concrétisé cet autre segment de son univers, malgré l’attente évidente des fans. Mais avec l’arrivée de The Mandalorian, l’absence d’une série télévisée dans l’univers Star Wars est maintenant comblée.

The Mandalorian est situé juste après Le Retour du Jedi. Cinq ans se sont écoulés depuis la bataille d’Endor et l’Empire n’en finit plus de s’effondrer. La nouvelle république tente de restaurer la démocratie face à l’émergence de multiples seigneurs de guerre qui tentent de s’approprier le pouvoir. Dans cet univers en décomposition, à l’atmosphère de western, nous faisons la connaissance sur la planète Nevarro de Mando, un chasseur de primes mandalorien qui exécute de basses besognes pour survivre. Moyennant une prime très élevée, il se voit un jour assigné comme mission de récupérer un enfant de la même espèce que Yoda (tout de même âgé de 50 ans) pour un commanditaire protégé par une meute de stormtroopers désœuvrée, et visiblement ancien officier de l’Empire. Après avoir livré sa proie et touché sa prime, Mando finit par se raviser et revient sauver l’enfant qui, à la grande surprise du chasseur de primes, parait maitriser la Force. Dès lors, Mando devient la cible de tous les chasseurs de primes de la galaxie qui se lancent à sa poursuite. Il parvient à quitter d’extrême justesse la planète Nevarro pour un road trip à travers la galaxie où il va croiser de multiples personnages qui tentent, eux aussi, de se reconstruire après le terme du conflit entre l’Alliance Rebelle et les force de l’Empire. Mention particulière à Gina Carano qui joue la sculpturale Cara Dune et Carl Weathers qui interprète l’ambigu Greef Karga, ex-magistrat et chef peu scrupuleux de la guilde des chasseurs de primes.

Cinq ans après Le Retour du Jedi

Créé par Jon Favreau, que l’on connait bien sous les traits de Happy Hogan, l’attachant garde du corps de Tony Stark dans le MCU, The Mandalorian s’avère être une excellente surprise. La production est particulièrement soignée. L’univers visuel mélange savamment les CGI et les personnages réels. Les aliens par exemple sont incarnés par des comédiens déguisés. Le pari était risqué mais la série parvient à retrouver le charme de la trilogie originale. D’indispensables éléments familiers, qui constituent autant de clins d’œil, sont présents tout au long de cette courte saison de huit épisodes. Il faut satisfaire les attentes des fans de la franchise qui restent particulièrement exigeants. Le rythme est lent, les épisodes ne s’embarrassent pas de fioritures et vont à l’essentiel et…ça marche ! En avançant dans la série, on se surprend à s’attacher à cet énigmatique chasseur de primes qui, comme Django Fett et son fils Boba, garde ostensiblement sa tête couverte par son casque. Mais le personnage qui lui vole la vedette est incontestablement « The Child », la petite marionnette affectueusement rebaptisée « Baby Yoda » par les fans, enjeu de bien des convoitises dans cette galaxie lointaine. Les deux protagonistes principaux que sont Mando et Baby Yoda forment un improbable duo que tout oppose mais que les aventures communes vont rendre interdépendants. Réussite scénaristique et artistique, The Mandalorian devrait s’étaler sur au moins trois saisons. 

 

© Antoine Meunier

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TONNERRE MÉCANIQUE (1985)

Un policier/agent secret enfourche la moto du futur pour partir combattre le crime dans les rues de Los Angeles

STREET HAWK

1985 – USA

Créée par Robert Wolterstorff, Paul Belous, Bruce Lansbury

Avec Rex Smith, Joe Regalbuto, Richard Venture, Jeannie Wilson, Georges Clooney, Christopher Lloyd, Charles Napier, Dennis Franz

THEMA ESPIONNAGE ET SCIENCE-FICTION

Une voiture qui parle, un policier holographique, un hélicoptère supersonique ou encore une moto que n’aurait pas renié James Bond, les séries télévisées mettant en vedette des éléments technologiques ont poussé comme des champignons au cours des années 80. Tonnerre Mécanique, ou Street Hawk en anglais, fait partie de ce paysage audiovisuel high-tech. Le personnage principal s’appelle Jesse Mach, un motard de la police de Los Angeles blessé lors d’une opération. Il sera dès lors muté au service de presse de la police de la Cité des Anges. Mais en parallèle, il est recruté par une agence ultra secrète des États-Unis et va œuvrer pour combattre le crime en pilotant le Tonnerre Mécanique, « un engin d’une conception révolutionnaire capable de dépasser les 500 km/h », selon le pitch d’introduction en début de chaque épisode. Il est supervisé dans sa mission par l’agent fédéral Norman Tuttle, le seul au courant de la vraie nature de la mission de Jesse Mach. Vêtu d’une combinaison et d’un casque intégral masquant son visage pour masquer son identité, notre héros affrontera des révolutionnaires sud-américains en exil, des gangs de banlieue, des braqueurs de banque, et protègera une chanteuse de rock victime d’un maitre-chanteur.

A l’image de Supercopter et K2000Tonnerre Mécanique fut pour la première fois diffusé sur feu La Cinq, chaque vendredi soir dans « A fond la Caisse » en 1986. Et le succès fut immense dans nos contrées. Un succès qui doit beaucoup au thème musical électronique du groupe de rock électronique allemand Tangerine Dream. Au cours de chaque épisode, la partition (qui résonne toujours dans nos têtes 35 ans plus tard… !) illustre entre autres les moments où la moto et son pilote se déplacent à très grande vitesse dans les rues de Los Angeles. Des moments qui n’utilisaient aucun effet spécial mais principalement des effets d’accéléré. Dotée d’un arsenal digne d’un hélicoptère de combat, la moto pouvait également accomplir des bonds de dix mètres de haut. Une prouesse qui était obtenue grâce à un judicieux positionnement de la caméra. L’absence du moindre effet spécial dans la série témoigne malheureusement d’un budget bien maigre.

Une seule saison pour le « Faucon des rues »

Peut-être plus à l’aise devant un micro (il a notamment joué Danny Zuko dans la comédie musicale Grease), Rex Smith prête ses traits à l’inspecteur Jesse Mach. Il détient également le privilège d’avoir été le premier acteur à personnifier l’avocat aveugle Matt Murdock alias Daredevil dans le téléfilm de 1989 Le procès de l’incroyable Hulk, avec le regretté Bill Bixby dans le rôle du docteur Banner. Véritable phénomène à sa diffusion, Tonnerre Mécanique ne durera qu’une courte saison de treize épisodes. Les scénarios s’avèrent assez peu convaincants et c’est donc assez logiquement qu’elle disparait de l’antenne américaine, une fois le dernier épisode diffusé le 16 mai 1985. Malgré son passage éclair dans le paysage audiovisuel, la série peut tout de même se targuer d’avoir accueilli des acteurs connus dont Christopher Lloyd (Retour vers le Futur) ou encore Dennis Franz (NYPD Blues). Elle aura également donné sa chance à un jeune comédien en devenir qui s’illustrera quelques années plus tard en médecin urgentiste à la télévision et en chef de bande au cinéma : un certain Georges Clooney.
 
© Antoine Meunier

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ENVAHISSEURS (LES) (1967-1968)

La série TV qui a transformé Roy Thinnes en superstar et tous les téléspectateurs en paranoïaques aigus…

THE INVADERS

1967/1968 – USA

Créée par Larry Cohen et Quinn Martin

Avec Roy Thinnes, William Woodson, Kent Smith, Suzanne Pleshette, Harold Gould, Max Kleven, Linn McCarthy, Alfred Ryder

THEMA EXTRA-TERRESTRES

« Les Envahisseurs, des êtres étranges venus d’une autre planète. Leur destination : la Terre. Leur but : s’y établir et en faire leur univers. David Vincent les a vus. Pour lui, cela a commencé pendant une triste nuit, le long d’une route solitaire de campagne, alors qu’il cherchait un raccourci que jamais il ne trouva. Cela a commencé par une auberge abandonnée et un homme trop fatigué par le manque de sommeil pour continuer son voyage. Cela a commencé par l’atterrissage d’un vaisseau spatial. À présent, David Vincent sait que les envahisseurs sont là, qu’ils ont pris forme humaine et il lui reste à convaincre un monde incrédule que le cauchemar a déjà commencé… » Difficile d’imaginer un texte d’introduction plus accrocheur ! À l’origine des Envahiseurs, il y a Larry Cohen, scénariste et réalisateur débordant d’idées originales avec un goût prononcé pour le fantastique et la science-fiction. Futur réalisateur de Le Monstre est vivantMeurtres sous ContrôleEpouvante sur New York ou encore L’Ambulance, Cohen développe l’idée d’un héros solitaire alerté par la présence d’extra-terrestres sur Terre, dissimulés par une apparence humaine et donc indétectables. Ce concept, dérivé de L’Invasion des Profanateurs de Sépultures, se prête à merveille aux mentalités inquiètes et paranoïaques de la société américaine du milieu des années 60, au cœur de la guerre froide et de la guerre du Vietnam. Les Envahisseurs se concrétise lorsque la chaîne ABC s’y intéresse et lorsque Quinn Martin accepte d’en devenir le producteur exécutif. Ce dernier est déjà un vieux routier de la télévision, aguerri par son expérience sur Les IncorruptiblesSur la piste du crime et Le Fugitif

Pour fructueuse qu’elle soit, la collaboration entre Cohen et Martin n’est pas simple, le second modifiant drastiquement les scénarios du premier pour les ramener à une durée de 52 minutes par épisode (au lieu des 26 minutes initialement prévues) et mieux les adapter à sa propre sensibilité. Si le sujet de la série saura attirer le public friand de science-fiction (principalement masculin), Martin ne veut pas pour autant laisser de côté les téléspectatrices. Il choisit donc un comédien principal au charme magnétique indéniable. Roy Thinnes devient ainsi David Vincent, prototype du héros paranoïaque dont on retrouvera des traces bien des années plus tard chez le Fox Mulder de X-Files. Réalisé par le vétéran Joseph Sargent (Lassie, Gunsmoke, Des Agents très spéciauxLe Fugitif), le pilote des Envahisseurs donne l’impulsion de la série, qui commence sa diffusion sur ABC le 10 janvier 1967. 

Une histoire sans fin…

Les gimmicks qui ponctuent le programme (la musique anxiogène de Dominic Frontiere, le petit doigt dressé qui permet de repérer les extra-terrestres, leur mort spectaculaire sous forme d’une dissolution rougeâtre, les décors désertiques et désaffectés qui contribuent à une atmosphère oppressante) deviennent instantanément des objets de culte. Après 17 épisodes, une seconde saison est lancée en septembre 1967. Elle se termine en mars de l’année suivante sans proposer un épisode final digne de ce nom. Les événements restent en suspens, provoquant une frustration d’autant plus forte qu’elle semble inexplicable. Le succès de la série est en effet croissant, et se déploie en France où Les Envahisseurs se mue littéralement en phénomène de société dès ses premières diffusions en 1969 sur TF1. L’interruption brutale de la série semble être due à une mésentente visiblement insoluble entre Quinn Martin et les dirigeants du réseau ABC. Mais finalement, la non résolution de cette intrigue finit par contribuer à sa légende et à accroître le sentiment d’angoisse et d’insécurité que voulait véhiculer Larry Cohen dès ses premiers jets scénaristiques.
 
© Gilles Penso

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SUPERCOPTER (1984-1987)

Jan-Michael Vincent et Ernest Borgnine s'envolent à bord de l'hélicoptère le plus sophistiqué de tous les temps pour sauver le monde

AIRWOLF

1984/1987 – USA

Créée par Donald P. Bellisario

Avec Jan-Michael Vincent, Ernest Borgnine, Jean-Bruce Scott, Alex Cord, Deborah Pratt, David Hemmings, Belinda Bauer, Barry Van Dyke, Michelle Scarabelli, Geraint Wyn Davies

THEMA ESPIONNAGE ET SCIENCE-FICTION

En 1983, John Badham réalise Tonnerre de Feu, peut-être l’un de ses meilleurs films avec War Games. Ce long-métrage met en scène Roy Scheider dans le rôle d’un pilote de la police de Los Angeles, chargé d’évaluer un hélicoptère surarmé et destiné à la surveillance de la ville dans la perspective des Jeux Olympiques l’année suivante. Une adaptation en série télévisée, avec James Farentino dans le rôle-titre, en sera tirée mais ne connaitra pas le succès. Quasiment à la même époque, et alors qu’il se trouve sur le tournage d’un épisode de la mythique série Magnum, le producteur Donald P. Bellisario a l’idée de Supercopter, avec comme personnage central un hélicoptère aux capacités révolutionnaires. L’épisode pilote, écrit et réalisé par Bellisario, présente Stringfellow Hawke (Springfellow en français), ancien pilote de chasse de l’US Air Force et vétéran de la Guerre du Vietnam, et son mentor Dominic Santini, également pilote d’hélicoptère, chargés par Michael Goldsmith-Brigss III (dit Archangel), chef de l’organisation FIRM, de récupérer ledit hélicoptère qui a été vendu par son inventeur, le sinistre docteur Charles Henri Moffet (David Hemmings), à la Libye. Les deux héros récupèrent l’appareil mais Hawke décide de le conserver et de le cacher afin de soutirer des informations à Archangel sur le sort de son frère St John, porté disparu au Vietnam. En échange, ils accompliront toutes sortes de missions pour le compte de leur patron borgne, éternellement vêtu d’un costume trois pièces blanc.

S’installant sur la petite lucarne américaine à partir du 22 janvier 1984, Supercopter surfe sur la mode des justiciers dotés d’une technologie de pointe pour réaliser leurs missions (K 2000 et Tonnerre Mécanique obéissaient également à cette logique). La série ne débarque sur nos écrans qu’à partir du 24 décembre 1985 dans les programmes de feu La Cinq. A 19h30, chaque lundi soir, le public embarquait à bord de cet hélicoptère noir, capable de rivaliser avec un avion de chasse en filant à travers le ciel à Mach 2. Ce qui est, bien évidemment, totalement impossible dans la réalité. Le budget trop restreint de la production ne permettait malheureusement pas d’envisager des scènes de combat aériens à la Top Gun, d’autant que la série ne bénéficiait d’aucun soutien matériel du département de la défense américain (DoD). L’usage répétitif de stock-shots, provenant notamment de l’US Air Force, amenait souvent à revoir les mêmes plans aériens d’un épisode à l’autre. Malgré tout, la série a su restituer le sentiment de paranoïa qui régnait dans les années 80. Rappelons que la Guerre Froide battait son plein. Le monde (donc l’Amérique) avait besoin de héros. Le ténébreux Jan-Michael Vincent (Le FlingueurLes Survivants de la Fin du Monde) prête ses traits à Springfellow Hawke et le vétéran Ernest Borgnine, que l’on ne présente plus, joue quant à lui le rôle de Dominic Santini, mentor du héros. Durant trois saisons, le duo accomplira les missions les plus délicates à bord de l’appareil, aidé à partir de la seconde saison par Caitlin O’Shannesy, incarnée par Jean Bruce-Scott. Alex Cord est quant à lui Archangel, et Deborah Pratt incarne Marella, son assistante, également tout de blanc vêtue.

Plus dure sera la chute…

Supercopter connaîtra un immense succès qui sera malheureusement interrompu par les excès de son interprète principal, régulièrement sous l’emprise de l’alcool. Une conduite tellement excessive à partir de la seconde saison que sur les plateaux de tournage, l’acteur doit être doublé pour la moindre scène d’action. La série s’arrête en 1986 après 56 épisodes, du moins dans sa forme initiale. Les producteurs de USA Network, désireux de sauver le show, en rachètent les droits à CBS. Pour la quatrième et dernière saison, Barry Van Dyke, dans le rôle de St John, le frère disparu de Springfellow, reprend les commandes de l’hélicoptère supersonique. Mais c’est en fait toute l’équipe de comédiens qui est remplacée à la suite du comportement autodestructeur de Jan-Michael Vincent, dont la carrière sera malheureusement définitivement brisée. Au terme d’une quatrième et fort moyenne saison, Supercopter s’arrête définitivement, mais elle est aujourd’hui définitivement entrée dans la légende des séries télévisées.
 
© Antoine Meunier

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HOMME QUI VALAIT TROIS MILLIARDS (L’) (1974-1978)

Lee Majors entre dans la peau bio-ionique du super-héros télévisé le plus populaire de tous les temps

THE SIX MILLION DOLLAR MAN

1974/1978 – USA

Créée par Kenneth Johnson

Avec Lee Majors, Richard Anderson, Alan Oppenheimer, Martin E. Brooks, Darren McGavin, Lindsay Wagner

THEMA SUPER-HEROS I ESPIONNAGE ET SCIENCE-FICTION

« Steve Austin, astronaute. Un homme tout juste vivant. Messieurs, nous pouvons le reconstruire. Nous en avons la possibilité technique. Nous sommes capables de donner naissance au premier homme bio-ionique. Steve Austin deviendra cet homme. Il sera supérieur à ce qu’il était avant l’accident. Le plus fort, le plus rapide, en un mot, le meilleur ! ». Véritable madeleine de Proust pour des générations de téléspectateurs bercés par les exploits de Steve Austin, bien avant que la vogue des super-héros ne s’empare de tous les écrans au début des années 2000, ce texte d’introduction en voix-off ouvre chaque épisode de L’Homme qui valait trois milliards, l’une des séries les plus populaires des années 70. Tout est né dans l’esprit de Richard Irving, alors vice-président d’Universal Télévision. En lisant le roman « Cyborg » de Martin Caidin, il entrevoit le potentiel d’un téléfilm à succès. Le scénario nous familiarise avec un astronaute de la NASA (Lee Majors), très grièvement blessé après le crash de son avion. Laissé pour mort, il est opéré par le docteur Rudy Wells (Martin Balsam) qui remplace ses jambes, son bras droit et son œil gauche par des éléments robotiques, augmentant de manière considérable ses capacités physiques. 

Désormais, il court à toute vitesse, effectue des sauts spectaculaires, possède une force musculaire accrue (avec son bras droit) et voit très loin (de l’œil gauche). Écrit par Terrence McDonnell et réalisé par Richard Irving, le téléfilm est diffusé sur ABC en mars 1973 et remporte un grand succès. Deux téléfilms suivront, avant le lancement de la série chapeautée par Kenneth Johnson. Si le docteur Wells change d’interprète à plusieurs reprises au fil des ans (Alan Oppenheimer, Martin E. Brooks), un membre incontournable du casting s’impose : Oscar Goldman, incarné par Richard Anderson. Figure autoritaire et paternelle, il supervise les missions de Steve Austin, désormais agent spécial au service de l’OSI (Office of Scientific Information) pour lutter contre les criminels et les espions ennemis. Bien sûr, le succès de la série doit beaucoup à la présence magnétique de Lee Majors, qui effectue lui-même la grande majorité de ses cascades (comme il le fera plus tard dans L’Homme qui tombe à pic) et tente parfois des changements de look plus ou moins heureux (sa petite moustache en début de quatrième saison ne sera pas du goût de tout le monde). 

L'homme qui courait au ralenti

Autre élément indissociable du culte généré par L’Homme qui valait trois milliards : sa gestion originale des super-pouvoirs. Alors que les effets spéciaux ne permettent pas encore de faire des miracles, surtout dans le cadre d’un programme télévisé, l’inventivité prend le relais. Contre toute attente, la rapidité de la course de l’homme bio-ionique est traitée au ralenti, ses sauts prodigieux sont filmés à l’envers et chacune de ses démonstrations de force s’accompagne d’un bruitage entré dans la légende. La popularité inattendue d’un personnage secondaire, Jamie Sommers, donnera naissance en 1976 à un spin-off à succès : Super Jaimie. Héros préféré des jeunes téléspectateurs du monde entier, L’Homme qui valait trois milliards cessera ses activités en 1978, ce qui ne l’empêchera pas de revenir ponctuellement aux côtés de son alter-ego féminin à l’occasion des téléfilms Le Retour de l’homme qui valait trois milliards et de Super Jaimie (1987), L’Espion bionique (1989) et Mariage Bionique (1994).
 
© Gilles Penso

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INCROYABLE HULK (L’) (1977-1982)

À la fin des années 70, l'univers de Marvel surgissait pour la première fois sur les petits écrans sous les traits sauvages du Titan Vert

THE INCREDIBLE HULK

1977/1982 – USA

Créée par Kenneth Johnson

Avec Bill Bixby, Lou Ferrigno, Jack Colvin, Charles Napier, Michael Santiago, Gerard McRaney, Charlie Picerni, Laurie Prange, Mark Alaimo, Walter Brooke

THEMA SUPER-HEROS I SAGA MARVEL

Si les comics Marvel ont toujours eu le vent en poupe, les premières tentatives de leur transposition « live » à l’écran furent ponctuées de faux départs, de ratages mémorables ou d’essais anecdotiques tombés depuis dans l’oubli. En ce sens, la série L’Incroyable Hulk fait figure d’exception. Tout a failli commencer au début des années 70, lorsque la comédienne Angela Bowie (épouse de David Bowie) acquiert les droits du personnage de Daredevil et de sa co-équipière Natacha Romanov, alias la Veuve Noire, en vue d’une adaptation télévisée. Mais le projet ne va pas plus loin qu’une séance photo kitschissime, au grand dam de Stan Lee. Entretemps, les super-héros télévisés connaissent une heure de gloire inespérée grâce à deux séries initiées par le téléaste Kenneth Johnson : L’Homme qui valait trois milliards et Super JaimieConvaincu que Johnson est l’interlocuteur idéal pour donner corps à ses créations, Stan Lee lui propose l’adaptation des aventures de Hulk, le titan vert qui lui fut inspiré par deux « héros » de la littérature fantastique classique : le docteur Jekyll et le docteur Frankenstein.
Ainsi naît le téléfilm L’Incroyable Hulk en 1977. Kenneth Johnson jette immédiatement son dévolu sur Bill Bixby pour incarner Banner, notamment grâce à sa prestation convaincante dans la série Le Magicien. Pour son penchant bestial et vert émeraude, le choix est plus compliqué. Le culturiste Arnold Schwarzenegger (encore inconnu du public) n’est pas jugé assez grand de taille, l’impressionnant Richard Kiel (futur Requin dans L’Espion qui m’aimait et Moonraker) manque de muscles, et c’est finalement Lou Ferrigno qui hérite du personnage. Sous un maquillage néanderthalien signé Normal T. Leavitt, Ferrigno prête son corps massif à Hulk et occupe l’écran avec beaucoup de panache, Johnson ayant décidé de remplacer les dialogues basiques qu’il articule maladroitement dans la bande dessinée par des grognements de bête. Autre réadaptation du matériau original : Banner n’est pas victime d’un accident mais s’expose volontairement aux rayons Gamma pour essayer d’accroitre sa force – ce qui lui aurait permis de sauver son épouse victime d’un accident de la route. Le prénom du héros a également été modifié. Robert Bruce Banner devient donc David Bruce Banner, puis directement David Banner. Le pilote connaît un succès immédiat, à tel point qu’il sort au cinéma dans toute l’Europe. Lancée au début de l’année 1978, la série doit son succès au savoir-faire indéniable de Kenneth Johnson. 

Docteur Bixby et Mister Ferrigno

Non content d’avoir su trouver les deux acteurs idéaux pour personnifier le docteur Banner et son alter-ego rugissant (que beaucoup préfèrent encore aujourd’hui à leurs successeurs cinématographiques), Johnson parvient à se réapproprier la création de Stan Lee et Jack Kirby pour y apposer sa propre sensibilité, calquant la structure de chaque épisode sur celle du Fugitif et limitant – pour des raisons budgétaires – les fameuses métamorphoses à deux seulement par épisode. Du coup, la série entre dans une certaine routine sans toutefois perdre son charme et son pouvoir attractif. Les interventions régulières de Jack Colvin, dans le rôle d’un journaliste trop curieux inspiré du Javert des Misérables, et la belle partition de Joseph Harnell participent au culte que génère le programme auprès des téléspectateurs. Pour marquer le début de la seconde saison, Johnson décide de réaliser un téléfilm d’une heure et demie qui, à l’instar de celui qui inaugura la série en 1977, est exploité au cinéma en Europe. Ce sera Hulk Revient, accompagné d’un poster muant Hulk en émule de King Kong. La série s’achève en 1982 mais sera suivie par trois téléfilms tardifs – dans lesquels le charme s’est un peu dissipé, avouons-le – respectivement en 1988, 1989 et 1990.
 
© Gilles Penso

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SAN KU KAI (1978)

Echec cuisant au Japon, San Ku Kaï s'est transformé en objet de culte pour toute une génération de téléspectateurs français

UCHÛ KARA NO MESSÊJI – GINGA TAISEN

1978 – JAPON

Créée par Shotaro Ishimuri 

Avec Hiroyuki Sanada, Akira Oda, Ryo Nishida, Yoko Akitani, Iwao Tabuchi, Asao Koike

THEMA SPACE OPERA

À l’annonce de la sortie imminente de La Guerre des Etoiles sur le territoire japonais, le studio Toei décide de surfer sur la vague du space opera en produisant le très ambitieux Les Evadés de l’Espace, réalisé par Kinji Fukasaku et garni d’effets spéciaux sophistiqués que supervise Nobuo Yajima. Le succès du film est suffisant pour motiver une séquelle sous forme de série télévisée : Uchû kara no messêji – Ginga taisen (dont le titre international sera Message From Space Galactic Wars). Le mot « séquelle » est cependant un peu abusif, dans la mesure où l’intrigue de la série n’a rien à voir avec celle du film et que les personnages ne sont plus les mêmes. Les seuls véritables points communs sont une partie des vaisseaux spatiaux (et de nombreux plans repris directement au film), l’inspiration omniprésente de La Guerre des Etoiles et le comédien Hiroyuki Sanada. Ce dernier incarne dans la série le jeune Shiro (Hayato en version française), originaire de la planète Analis, qui se lie d’amitié avec une sorte d’émule de Han Solo baptisé Ryu et incarné par Akira Oda. Tous deux luttent contre les redoutables Gavanas (ou Stressos en VF) qui sèment la terreur dans toute la galaxie. Ils sont aidés dans leur combat par l’homme singe Baru (Siman en français), amateur de cigarillos et joué par Ryo Nishida, par le robot bavard Sidero et par la belle blonde Sophia (Eolia chez nous) qui vogue dans un navire spatial aux allures de voilier. 

Malgré la linéarité répétitive de l’intrigue, des combats acrobatiques un peu caricaturaux, des monstres caoutchouteux dignes d’Ultraman et quelques costumes improbables (les tenues de ninja des deux héros avec des lunettes de ski, des résilles blanches et des foulards sahariens sont assez surprenantes !), la série est irrésistiblement divertissante. Ses effets visuels sont souvent très impressionnants, sa direction artistique originale (les chefs des Stressos portent d’étonnantes armures de samouraïs cosmiques) et le récit multiplie les cliffhangers s’acheminant vers un grand final en forme de twist. Pourtant, le spectacle ne convainc guère le public japonais et la diffusion s’interrompt après 27 épisodes, soit deux fois moins que ce qui était initialement planifié.

Ravalement de façade

Lorsque Jacqueline Joubert, alors directrice des programmes d’Antenne 2, découvre des extraits de la série, elle est immédiatement séduite et sait que les jeunes téléspectateurs français, à qui elle avait fait découvrir Goldorak un an plus tôt, sauront lui réserver l’accueil qu’elle mérite, moyennant quelques réadaptations. Outre le nom des personnages, le titre est modifié (c’est Bruno-René Huchez, patron de la compagnie IDDH, qui choisit San Ku Kaï) et la musique entièrement réécrite. Le chanteur Eric Charden, qui triomphait alors dans les hit-parades en accumulant les disques d’or, est donc chargé de remplacer la bande originale de Shunsuke Kikuchi. Malgré la naïveté des paroles écrites par Didier Barbelivien, la chanson que Charden a composé pour le générique reste aujourd’hui encore une référence, mêlant des sonorités disco (une ligne de basse ultra dynamique, une section rythmique syncopée, des riffs de guitare nerveux), des nappes électroniques, des chœurs graves et des claquements de castagnettes. Ce générique d’anthologie s’assortit de quatre morceaux tout autant déroutants par leur approche atypique : le martial « La Guerre », le psychédélique « Les Trois Etoiles » et l’envoûtant « Eolia » pour piano et synthétiseur. Ce ravalement de façade s’avère payant : lorsque San Ku Kaï fait son apparition sur les petits écrans français le 15 septembre 1979, le succès est colossal, à tel point qu’une flopée de produits dérivés accompagne bientôt le programme. Totalement oubliées au Japon, les aventures d’Hayato et Ryu contre le maléfique Golem XIII font paradoxalement partie de la culture populaire française depuis la fin des années 70 et ne semblent pas prêtes d’en disparaître.
 
© Gilles Penso

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BATES MOTEL (2013-2017)

Qui était le jeune Norman Bates avant de devenir le tueur désaxé mis en scène par Alfred Hitchcock dans Psychose ?

TITRE ORIGINAL

2013/2017 – USA

Réalisé par Carlton Cruse, Kerry Ehrin et Anthony Cipriano

Avec Vera Farmiga, Freddie Highmore, Max Thieriot, Olivia Cooke, Nestor Carbonell, Nicola Peltz, Kenny Johnson

THEMA TUEURS I SAGA PSYCHOSE

Le téléfilm Bates Motel de 1987 ayant sombré dans les limbes de l’oubli sans jamais engendrer le show télévisé qu’il était censé précéder, il pouvait sembler hasardeux d’initier une nouvelle série portant le même titre. Pourtant, le scénariste Anthony Cipriano tente sa chance en 2013 en écrivant un premier épisode qui séduit les producteurs Carlton Cuse (Lost) et Kerry Ehrin (Friday Night Lights). Tous trois parviennent à convaincre Universal TV et la chaîne A&E de se lancer dans l’aventure. La série Bates Motel s’intéresse aux événements survenus plusieurs années avant le drame narré dans Psychose et fait donc office de prequel, s’enfonçant dans la brèche qu’ouvrait le téléfilm de Mick Garris Psychose 4, si ce n’est que l’intrigue ne se situe pas dans les années 50 mais à notre époque. Tout commence par la mort apparemment accidentelle de Monsieur Bates. Six mois après le drame, son épouse Norma (Vera Farmiga, vue dans Esther et The Conjuring) et son fils de 17 ans Norman (Freddie Highmore, révélé par Charlie et la Chocolaterie) quittent l’Arizona et tentent un nouveau départ. Norma a acheté un motel et une maison attenante dont tous les deux vont s’occuper. 

On sent très vite une forte complicité entre Norman et sa mère. Sans doute cette dernière est-elle un peu rigide, voire parfois castratrice, avec une certaine tendance à faire culpabiliser son fils quand il n’exécute pas ses volontés ou lorsqu’il essaie de nouer des relations avec l’extérieur. Mais rien ne semble encore anormal dans cette relation fusionnelle. Toute la subtilité de la série repose justement sur la finesse du traitement de ses personnages. Les réactions impulsives et autoritaires de Norma ne s’esquissent que progressivement et finiront par se justifier à cause d’une série de traumatismes passés. Quant à Norman, il se découvre bientôt une passion – et un talent indiscutable – pour la taxidermie. Peu à peu, par petites touches subtiles, la psychose s’installe en lui. Il a des sautes d’humeur, commence à entendre ou à voir sa mère sans qu’elle soit réellement avec lui, se comporte de manière obsessive et compulsive, a parfois des absences au cours desquelles il agit sans s’en rendre compte. C’est lors de ces « blackouts » que s’effectue le transfert progressif de la personnalité de sa mère en lui. Il croit d’abord lui parler, puis finit par se prendre pour elle. Cette dernière le soupçonne bientôt de se livrer à des meurtres pendant ses absences. Comble du paradoxe, Norman est persuadé que c’est sa mère qui commet ces crimes. Mais leur amour mutuel est tellement inconditionnel que ces soupçons n’entachent pas leurs liens, au contraire. Ils s’auto-protègent jusqu’à adopter des comportements irrationnels. 

La porosité entre le bien et le mal

Modèle d’écriture et de mise en scène, Bates Motel se refuse à tout manichéisme trop tranché, non seulement à propos de ses deux personnages principaux mais aussi avec leur entourage immédiat. Le shérif Alex Romero, incarné à merveille par Nestor Carbonnell (LostThe Dark Knight), est tour à tour menaçant et protecteur, sans cesse à la lisière entre le bien et le mal. Autre figure récurrente, Caleb (Kenny Johnson, l’un des flics corrompus de The Shield), le frère de Norma, est un être torturé qui passe son temps en quête d’une rédemption impossible. Dylan Massett (Max Thieriot), le demi-frère de Norman, semble de prime abord être un malfrat de bas étage profiteur et égoïste. Mais il va s’avérer protecteur, s’efforçant d’arracher son jeune frère à l’influence d’une mère qu’il juge néfaste et malsaine. C’est l’un des rares personnages vraiment positifs – voire « purs » – de la série, avec Emma Decody (Olivia Cooke), une jeune fille atteinte de mucoviscidose dont vont s’éprendre à tour de rôle les deux frères. Des moments de suspense très forts et des rebondissements permanents secouent les téléspectateurs tout au long de la série. Assister à autant de séquences nouvelles dans un décor si familier est une expérience assez déroutante, loin de ce qu’offrent généralement les prequels. La petite ville de White Pine Bay, dans laquelle se déroule le drame, n’est pas beaucoup plus tranquille que le motel de la famille Bates. Dylan en fait les frais lorsqu’il se laisse embarquer dans le trafic de drogue local qui entraîne un certain nombre de morts violentes. Parallèlement se pratique une traite des blanches dans laquelle est impliqué un des policiers de la ville, ainsi que bon nombre d’activités illégales chapeautées par le parrain de la pègre Bob Paris (Kevin Rahm). Du coup, par moments White Pine Bay aurait presque des allures de Twin Peaks. Cette bourgade évoque aussi parfois, par son caractère côtier, la station balnéaire Bodega Bay des Oiseaux. La bande originale de Chris Bacon, de son côté, construit son propre univers tout en se référant subtilement à celle de Bernard Herrmann, en détournant certaines de ses orchestrations et de ses arrangements pour violons. Succès artistique, critique et public, Bates Motel sera diffusée pendant cinq années consécutives sur les petits écrans américains, entre 2013 et 2017.
 
© Gilles Penso

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HANNIBAL (2013-2015)

Mads Mikkelsen succède à Anthony Hopkins pour camper un Hannibal Lecter particulièrement suave et inquiétant

HANNIBAL

2013/2015 – USA

Créée par Bryan Fuller

Avec Mads Mikkelsen, Hugh Dancy, Laurence Fishburne, Caroline Dhavernas, Gillian Anderson, Gina Tores, Lara Jean Chorostecki

THEMA CANNIBALES I SAGA HANNIBAL LECTER

Au fil des trois saisons de la série Hannibal, le producteur Bryan Fuller revient aux sources du roman “Dragon Rouge” sans pour autant chercher à en respecter la trame. Avec une totale liberté narrative mais une grande fidélité dans l’esprit au texte de Thomas Harris (jusqu’à en reprendre souvent des dialogues et des expressions mot à mot), la série réinvente les événements survenus avant et pendant le premier livre de la saga. Hugh Dancy y hérite du rôle tourmenté de l’enquêteur Will Graham. En s’inspirant d’une des phrases du roman de Harris (« Dans sa tête, un pendule d’argent se balançait dans la nuit »), la série recourt régulièrement à des effets visuels et sonores surprenants pour montrer les capacités très particulières de Graham. Lorsqu’il pénètre sur une scène de crime, un balancier lumineux efface peu à peu les taches de sang et les policiers dans le décor, une pulsation sonore envahit tout l’espace. Graham prend littéralement du recul, puis revient sur les lieux en revivant le drame à travers les yeux du tueur. Ce don affecte peu à peu sa santé mentale. Hannibal, commissionné par le FBI pour être son thérapeute et faire équipe avec lui, lui dira d’ailleurs : « vous attrapez ces tueurs en vous introduisant dans leur tête, mais vous leur permettez aussi d’entrer dans la vôtre. » 

Dans le rôle de Lecter, Mads Mikkelsen excelle. Sans nous faire oublier Anthony Hopkins, il propose une incarnation différente du personnage, du haut de son imposante stature. Régulièrement, nous le voyons concocter des plats sophistiqués avec l’amour du travail bien fait, tout en écoutant de la musique classique. Amateur de chair fraiche, il conserve précieusement à l’abri dans son cabinet des fiches de recettes et des cartes de visites de gens qu’il a rencontrés. Il les assemble ensuite pour accommoder ses victimes humaines selon la recette qui l’inspire sur le moment. Autre personnage clé de la série, l’agent du FBI Jack Crawford, qui dirige l’unité de science comportementale, est incarné avec beaucoup de charisme par Lawrence Fishburne. Une journaliste de tabloïds, Freddie Lounds, vient mettre des bâtons dans les roues des enquêteurs. Elle est inspirée d’un paparazzi masculin du roman “Dragon Rouge”, que Harris décrivait comme un homme petit et repoussant. Dans la série, Lounds prend au contraire les traits de la belle Lara Jean Chorostecki. Un autre personnage a été féminisé. Il s’agit du docteur Alana Bloom (Caroline Dhavernas), qui était Alan Bloom dans le livre. 

Des visions d'horreur surréalistes

C’est avec plaisir que nous retrouvons également Gillian Anderson dans le rôle de la psychiatre d’Hannibal. Sa présence ne manque pas de sel lorsqu’on sait que le personnage de Dana Scully qu’elle incarnait dans X-Files s’inspirait fortement de Clarice Starling dans Le Silence des AgneauxHannibal puise ainsi son inspiration dans tous les romans de la série, à l’exception justement du “Silence des Agneaux“ pour des raisons de copyrights. Bryan Fuller y fait donc allusion de manière indirecte, imaginant par exemple une stagiaire du FBI, Miriam Lass, qui évoque par bien des aspects Clarice Starling. Les événements de la saga littéraire originale sont modifiés et les rôles redistribués, mais l’esprit et l’atmosphère restent intacts. Les effrayants Francis Dolarhyde et Mason Verger, respectivement incarnés par Tom Noonan dans Le Sixième Sens et Gary Oldman dans Hannibal, sont eux aussi de la partie, avec de nouveaux visages bien sûr. Très généreuse en effets spéciaux gore, la série fait abonder les visions d’horreur surréalistes. Superviseur des prothèses et des maquillages spéciaux, François Dagenais (qui s’est fait les dents sur L’Armée des MortsLand of the Dead et surtout la saga Saw) effectue là un travail remarquable. Hélas, après la troisième saison, le show est arrêté fin août 2015 par le diffuseur NBC, faute d’une audience suffisante. Bryan Fuller avait pourtant des idées pour une saison supplémentaire.
 
© Gilles Penso

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