RE-ANIMATOR (1985)

Stuart Gordon éclabousse l'écran de gore, d'humour noir et d'érotisme à l'occasion de cette adaptation très libre de l'univers d'H.P. Lovecraft

RE-ANIMATOR

1985 – USA

Réalisé par Stuart Gordon

Avec Jeffrey Combs, Bruce Abbott, Barbara Crampton, David Gale, Robert Sampson, Gerry Black, Carolyn Purdy-Gordon 

THEMA ZOMBIES I MEDECINE EN FOLIE I SAGA RE-ANIMATOR CHARLES BAND

Porter à l’écran l’écrivain H.P. Lovecraft, réputé « maître de l’indicible », n’était pas une tâche aisée. Le réalisateur Stuart Gordon, le producteur Brian Yuzna et les scénaristes Dennis Paoli et William Norris ont relevé le défi avec culot, en reprenant les personnages et les événements décrits dans le roman à épisodes « Herbert West, réanimateur », publié en 1921. Afin d’adapter le récit initial aux goûts de l’époque, Gordon et son équipe ont resserré les péripéties dans le temps (la nouvelle s’étale sur 16 ans) et les ont transposées en 1985. Pour couronner le tout, le cinéaste a insufflé à son film deux éléments résolument étrangers à l’univers lovecraftien : la comédie et le sexe. Même si, convenons-en, l’humour est ici très noir et l’érotisme plutôt morbide. Le style de l’écrivain n’est donc pas fidèlement restitué, mais le résultat est une vraie réjouissance, accommodée de surcroît aux débordements du gore cher aux années 80, via une accumulation de séquences d’horreur trop excessives pour ne pas être drôles. La réussite de Re-Animator est d’autant plus remarquable qu’il s’agit du premier long-métrage de cinéma de Stuart Gordon, jusqu’alors connu pour ses activités théâtrales au sein de l’Organic Theater Company de Chicago.

Le personnage central, Herbert West, jeune étudiant en médecine, débarque fraîchement à l’université d’Arkham. Il a trouvé le moyen de ressusciter les morts mais préfère pour l’instant en garder le secret. Assez rapidement, West se choisit une demeure qu’il va partager avec Dan, un autre étudiant, et couve déjà d’un œil cupide la cave qui servira à ses hérétiques expériences. Il s’en prend d’abord au chat de la maison qui, de cadavre conservé au frigo, se transforme bientôt en bête meurtrière avant d’être écrabouillé. Devant Dan, West démontre l’efficacité de son produit fluorescent qui, par simple injection, fait revenir à la vie le cadavre mutilé. Bien qu’il soit effrayé, Dan accepte d’aider West. Un corps robuste est donc réanimé à la morgue de l’université et se jette frénétiquement sur Alan Halsey, père de la fiancée de Dan et administrateur de l’école. West élimine le mort-vivant avec un trépan électrique et ressuscite aussitôt Halsey. Mais les morts, après leur résurrection, n’ont plus du tout le comportement qu’ils avaient de leur vivant. D’où une cascade de situations virant du vaudeville au cauchemar le plus intense. 

La folie d'Herbert West

Dans la peau de l’ambigu Herbert West, personnage très sombre mais qui, peu à peu, gagne la sympathie des spectateurs, Jeffrey Combs révèle un grand talent, trouvant là indiscutablement le rôle de sa vie. Pour Stuart Gordon, Re-Animator est également une œuvre d’exception, sans doute la plus aboutie de toute sa carrière. La compagnie Empire produisant le film, Charles Band eut son mot à dire sur plusieurs aspects du long-métrage, imposant notamment le chef opérateur Mac Ahlberg et le compositeur Richard Band (son propre frère). Autre familier des productions Empire, John Buechler agrémente le film d’effets spéciaux gore particulièrement spectaculaires. Au cours du climax, sommet de frénésie et de démesure, West est carrément attaqué par les entrailles d’un cadavre qui tentent de l’étouffer comme un anaconda ! « Le premier montage de Re-Animator montrait un film très sérieux, sans humour du tout », nous explique Brian Yuzna. « Mais dès que Richard Band a composé la bande originale, certaines séquences ont pris un second degré comique, lorgnant même parfois du côté du cartoon. » (1) Quant au thème du générique, c’est un hommage très appuyé à celui de Psychose. Le sujet du film évoque irrésistiblement Frankenstein, et la suite, réalisée par Yuzna en personne, officialisera quasiment cette parenté. 

 

(1) Propos recueillis par votre serviteur en février 1994

 

© Gilles Penso

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EVIL DEAD (1981)

Avec ce premier long-métrage, Sam Raimi déclare son amour au cinéma d'horreur en le marquant d'un style très personnel

THE EVIL DEAD

1981 – USA

Réalisé par Sam Raimi

Avec Bruce Campbell, Ellen Sandweiss, Hal Delrich, Betsy Baker, Sarah York

THEMA ZOMBIES I DIABLE ET DEMONS I SAGA EVIL DEAD

Evil Dead est le premier et sans doute le meilleur film de Sam Raimi, le mètre étalon du cinéma d’épouvante des années 80, un véritable phénomène salué à l’époque par des commentaires dithyrambiques de Stephen King en personne. Et pourtant, qui aurait misé sur un scénario aussi basique et convenu ? Les protagonistes sont cinq amis (deux couples et une jeune femme un peu solitaire) qui ont loué une cabane dans la montagne. L’endroit est sinistre, recouvert d’une épaisse brume et envahi par une végétation très dense. Dans la cave de la maison, où l’horloge s’est subitement arrêtée, ils découvrent un vieux grimoire dont la couverture grimaçante semble être faite avec de la peau humaine, un gros magnétophone et une bande enregistrée par le dernier locataire. Celui-ci faisait des études sur la sorcellerie, et a vraisemblablement provoqué la colère de démons qui hantent l’endroit. En remettant en marche le magnétophone, une formule rappelant les démons est prononcée à voix haute. La chose monstrueuse qui vient de se réveiller dans les bois va transformer le séjour en véritable cauchemar. Les arbres, soudain animés d’une vie propre, violent Cheryl, mutilent Scott, et tous deux se muent bientôt en morts-vivants, tout comme Linda et Shelley. Seul survivant, Ash devra farouchement lutter contre ses anciens amis transformés en monstres hideux et hystériques…

On dit que tout le talent d’un auteur transparaît déjà à travers sa première œuvre, fut-ce un petit film d’horreur tourné avec une équipe de jeunes amateurs, du matériel 16 mm et un budget étriqué. Evil Dead confirme l’assertion, tant le résultat, étonnamment maîtrisé, recèle déjà en substance le génie de Sam Raimi et la quintessence de ses travaux futurs. Recyclant un thème d’une banalité pourtant effarante, Evil Dead se détourne bien vite des mécanismes d’un Vendredi 13 auquel son prologue peut faire penser pour faire monter lentement l’épouvante à coups de chocs visuels surprenants, dont certains semblent s’inspirer de L’Exorciste, jusqu’à une explosion d’horreur où les scènes les plus éprouvantes ne sont pas épargnées au spectateur. Le décor réel extrêmement sobre, les acteurs débutants au jeu très effacé, le grain de l’image, tout concourt à faire d’Evil Dead un film au climat très anxiogène.

L'opéra de la terreur

Mais c’est surtout la manière révolutionnaire qu’adopte Sam Raimi pour filmer son histoire qui restera dans les mémoires : travellings vertigineux accompagnés de rugissements indéterminés pour montrer la vision subjective du démon, panoramiques étonnants conçus en boucles fermées, très gros plans, angles de prise de vue des plus inattendus, jeux constants sur les effets sonores (la voiture qui avance silencieusement au milieu des arbres qui craquent, la balançoire qui frappe la porte de la cabane dans un vacarme assourdissant)… Tout ce déploiement de techniques insolites, déjà expérimenté dans le court-métrage Within the Woods qui servit de brouillon du film, sera utilisé comme leitmotiv dans l’œuvre ultérieure de Raimi. Notons qu’Ethan Coen, futur réalisateur de talent (Sang pour sang, Fargo, Le Grand saut), fit lui aussi ses premières armes sur Evil DeadEvil Dead fera sensation en 1982 au marché du film de Cannes et au Festival du Film Fantastique de Paris, puis deviendra un hit des vidéoclubs, alors en pleine expansion. Porté par le succès inattendu de son film, Sam Raimi en réalisera deux séquelles officielles, exploitant le caractère comique de l’intrigue sans se priver d’horreur graphique et d’outrances visuelles.

 

© Gilles Penso

 

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LA NUIT DES MORTS-VIVANTS (1968)

George Romero s'inscrit dans les préoccupations de la société de la fin des années 60 et invente le cinéma d'horreur moderne

NIGHT OF THE LIVING DEAD

1968 – USA

Réalisé par George A. Romero

Avec Duane Jones, Judith O’Dea, Karl Hardman, Marilyn Eastman, keith Wayne, Judith Ridley, Kyra Schon 

THEMA ZOMBIES I SAGA LES ZOMBIES DE ROMERO

Après plusieurs décennies de zombies créés par des savants fous émules du docteur Frankenstein, praticiens du vaudou ou apprenti sorciers jouant avec l’atome, George Romero propose sa propre version du mythe, le révolutionnant à tout jamais en y injectant une bonne dose de satire sociale très en accord avec les mentalités de cette fin des années 60. « J’ai emprunté l’idée au roman « Je suis une légende » de Richard Matheson », avoue Romero. « Le livre commençait alors qu’il ne restait plus qu’un seul homme sur terre. Je me suis donc dit qu’il serait intéressant de raconter ce qui a pu se passer avant cette situation critique. » (1) Le film s’amorce assez abruptement. Alors qu’ils se rendent au cimetière, Barbara et son frère Johnny sont attaqués par un zombie qui tue Johnny, carrément. Barbara, terrifiée, s’enfuit avec sa voiture mais un accident la rend inutilisable. Elle poursuit sa course à pied et trouve refuge dans une maison abandonnée où elle rencontre Ben, qui résiste lui aussi contre une horde de morts ranimés soudainement sans explication logique. La radio évoque bien une expérience atomique, ou les retombées d’un satellite envoyé par la Terre, mais rien n’est confirmé. Ce qui est sûr, c’est que toute personne blessée ou tuée par un des morts-vivants devient l’un des leurs. Dans la cave de la vieille maison se sont réfugiés deux couples et une petite fille. Les survivants devront donc à la fois lutter contre les cadavres ambulants qui les assaillent, mais aussi régler les guerres intestines qui, peu à peu, se développent au sein de l’angoissant huis-clos.

La photographie achrome et les cadrages à l’épaule donnent à La Nuit des morts-vivants une patine réaliste et pseudo-documentaire qui a le don de singulièrement déranger le spectateur. Malgré un argument de science-fiction qui ne constitue à vrai dire qu’un prétexte, l’invasion des morts-vivants est traitée avec une sobriété et une crédibilité qui rendent très palpable la terreur des protagonistes. Point d’effet de mise en scène appuyé (si l’on excepte la tonitruante partition musicale) ni d’effets spéciaux spectaculaires (quelques impacts de balle et des maquillages blafards surexposés) ne viennent troubler cette sensation de réalisme. Romero joue ainsi la carte de la retenue et de l’austérité. 

Romero s'inspire d'Orson Welles

« J’ai cadré le film moi-même », raconte-t-il, « et j’avais en tête les films d’Orson Welles, notamment ses adaptations de Shakespeare aux images noir et blanc contrastées et aux longues ombres portées. » (2) L’aspect volontairement anecdotique du récit (nous ne nous intéressons qu’à une poignée de personnages sans savoir ce que devient le monde pendant ce temps) et le choix d’un décor étouffant et étriqué décuplent le potentiel angoissant du récit. Et comme Romero ne se fait guère d’illusions sur la nature humaine, il nous montre les survivants s’entredéchirer au lieu de se soutenir, et les chasseurs courser les zombies comme du gibier avec une bonne humeur inquiétante. Quant à la chute finale, monstrueusement injuste, elle laisse pantois. Maintes fois copié et plagié, La Nuit des morts-vivants connaîtra plusieurs suites signées par Romero lui-même, et un nombre incalculable de fausses séquelles et de remakes en tout genres.

 

(1) et (2) Propos recueillis par votre serviteur en juillet 2005

 

© Gilles Penso

 

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REC (2008)

Jaume Balaguero et Paco Plaza relancent la vogue du « found footage » avec cette histoire de zombies en caméra subjective

[REC]

2008 – ESPAGNE

Réalisé par Jaume Balaguero et Paco Plaza

Avec Manuela Velasco, Ferran Terraza, Jorge Yamam, Carlos Lasarte, Pablo Rosso, David Vert, Vicente Gil, Martha Carbonell

THEMA ZOMBIES CINEMA ET TELEVISION I SAGA [REC]

Aussi étrange que cela puisse paraître, c’est en tournant ensemble un documentaire sur un jeu de télé-réalité – l’équivalent espagnol de notre « Star Academy » – que Jaume Balaguero et Paco Plaza, talentueux défenseurs d’un cinéma fantastique décomplexé (Fragile pour l’un, L’Enfer des loups pour l’autre), trouvent l’idée de co-réaliser un film d’horreur en vidéo haute définition. « Le but initial était de faire le film le plus terrifiant possible en adoptant un point de vue inhabituel », raconte Balaguero. « Nous voulions plonger le spectateur à l’intérieur du film, le rendre acteur, faire du visionnage de [Rec] une véritable expérience. Nous nous sommes laissés influencer par les jeux vidéo, qui apportent une véritable interactivité. » (1) Prenant la relève de Cannibal Holocaust et Le Projet Blair Witch, et s’inscrivant dans une nouvelle vogue du « cinéma à la première personne » mis en application quasi-simultanément dans Cloverfield et Diary of the Dead[Rec] s’intéresse à Angela, journaliste pour une télévision locale barcelonaise qui, accompagnée de son cameraman, relate le quotidien de ceux qui travaillent la nuit. Ce soir, elle a choisi de s’intéresser à une caserne de pompiers. La nuit s’annonce désespérément calme, jusqu’à un énigmatique appel au secours en provenance d’un vieil immeuble. Sur place, Angela, son cadreur et les pompiers découvrent des voisins paniqués et perçoivent des cris inquiétants qui proviennent des étages supérieurs. Le cauchemar est sur le point de commencer…

Si le scénario de [Rec], une fois mis à plat, se démarque à peine des innombrables films de zombies ayant éclaboussé les écrans du monde entier dans le sillage du travail de George Romero, l’extrême méticulosité de sa mise en scène et le naturel désarmant de ses comédiens le dotent d’un statut tout à fait à part. En obligeant le spectateur à adopter le point de vue d’un cameraman ignorant tout du drame qui couve, Balaguero et Plaza créent un véritable train fantôme qui ne cesse de surprendre et s’avère extrêmement effrayant. Quoi de plus inquiétant qu’un lent travelling avant dans un couloir sombre et silencieux d’où ne tardera pas à surgir un monstre vorace et hystérique ? Calquant leurs méthodes sur celles d’un William Friedkin, les deux cinéastes réservent une large part du tournage aux improvisations, ne donnent pas toutes les informations aux comédiens et au cadreur, et obtiennent ainsi des réactions d’une très grande justesse.

La double influence de Romero et Lovecraft

L’exploit de [Rec] réside du coup dans sa capacité à s’extraire des codes habituels du genre (effets de montage, musique stressante, lumières travaillées) tout en décuplant l’impact de ses séquences horrifiques, articulées au sein de longs plans séquence. La dernière partie du film, particulièrement oppressante, ajoute à l’influence de Romero celle d’H.P. Lovecraft. « J’ai lu « L’Affaire Charles Dexter Ward » un mois avant le tournage », raconte Paco Plaza. « La manière dont Lovecraft écrit, avec ces petites notes, ces extraits de journaux et de carnets intimes, nous a inspiré le décor final » (2). Réalisé avec des moyens très réduits et tourné en vingt jours, [Rec] partage avec L’Orphelinat le titre de plus gros succès cinématographique espagnol de l’année 2007, entraînant aussitôt la mise en chantier d’un remake américain.

 

(1) et (2) Propos recueillis par votre serviteur en avril 2008

 

© Gilles Penso

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JASON ET LES ARGONAUTES (1963)

Le chef d'œuvre de Ray Harryhausen est une adaptation flamboyante des monstres et merveilles de la mythologie grecque

JASON AND THE ARGONAUTS

1963 – GB

Réalisé par Don Chaffey

Avec Todd Armstrong, Nancy Kovack, Gary Raymond, Laurence Naismith, Niall MacGinnis, Michael Gwynn, Douglas Wilmer

THEMA MYTHOLOGIE

L’idée de porter à l’écran les démêlés des dieux et des héros grecs titillait l’as des effets spéciaux Ray Harryhausen depuis longtemps. « Les histoires de la mythologie son difficiles à adapter, parce que leur structure est très éclatée », nous explique-t-il. « Il s’agit souvent d’une série d’épisodes indépendants. Avec l’histoire de Jason, nous avions la chance de bénéficier d’une intrigue linéaire et fluide, structurée par la quête de la Toison d’Or et les obstacles rencontrés en chemin. » (1) Dans le scénario, la déesse Héra donne à Jason la mission de rapporter en Grèce la Toison d’Or du bélier fabuleux gardée en Colchide par le roi Aiétès. Lorsqu’il leur demande de le seconder dans sa quête de la Toison d’Or, ses compagnons accourent et l’équipage s’embarque sur le navire Argo dont la proue est douée de la parole prophétique de Héra. Les grands moments du film sont alors liés à l’apparition des créatures monstrueuses. La première est aussi la plus spectaculaire. Il s’agit de la statue Talos, haute d’une cinquantaine de mètres, qui s’anime soudain de mouvements mécaniques sur l’île de Bronze. « Talos était présent dans la légende de Jason, mais j’ai augmenté sa taille pour qu’il évoque le Colosse de Rhodes », nous raconte Harryhausen. « Je me suis efforcé de lui donner le regard vide et glaçant des statues grecques. » (2)

Les Argonautes débarquent ensuite en Thrace, où ils délivrent le devin aveugle Phinée des harpies. Ces hideuses créatures ailées ne ressemblent pas à de vieilles mégères au corps de rapace, comme dans la mythologie, mais plutôt à des gargouilles vivantes aux ailes de chauves-souris. En libérant Phinée, les aventuriers reçoivent de lui le secret du danger que constituent sur leur route les « Rochers Broyants », des montagnes mouvantes qui s’abattent sur les navires. Ils seront sauvés de ce péril par le dieu Triton qui surgit des flots pour leur libérer le passage. Cette fois, cette créature hybride, mi-homme mi-poisson, n’est pas une figurine animée mais un nageur professionnel grimé, affublé d’une queue de poisson.

L'hydre à sept têtes et les squelettes escrimeurs

Le périple des Argonautes s’achève en Colchide, où Jason doit affronter une Hydre à sept têtes (échappée de la légende d’Hercule) pour récupérer la Toison d’Or. Mais le morceau de bravoure du film, et de la carrière de Harryhausen tout entière, reste à venir. Après la mort de l’Hydre, le roi de Colchide plante dans le sol les dents du monstre, et bientôt sept squelettes armés émergent des entrailles de la terre en ricanant, prêts à affronter Jason et deux de ses hommes. « Il m’a fallu quatre mois et demi pour animer cette séquence qui dure à l’écran cinq minutes », nous raconte Harryhausen (3). Jason et les Argonautes fut hélas un échec commercial retentissant. Le public, en croyant avoir affaire à un énième péplum italien, passa ainsi à côté d’un véritable enchantement, d’un festival de poésie pure transposé sur grand écran. Même la profession ignora le film, préférant remettre l’Oscar des meilleurs effets visuels à Cléopatre ! Depuis, Jason et les Argonautes a été reconnu à sa juste valeur. Les enfants n’en finissent plus de s’émerveiller en le regardant à la télévision, et les génies actuels des effets spéciaux ne cessent d’y puiser leur inspiration.

(1), (2) et (3) Propos recueillis par votre serviteur en février 2004. 

 

© Gilles Penso

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LE FANTOME DE L’OPERA (1925)

Cette adaptation muette du roman de Gaston Leroux offre à Lon Chaney l'une de ses prestations les plus incroyables

THE PHANTOM OF THE OPERA

1925 – USA

Réalisé par Rupert Julian

Avec Lon Chaney, Norman Kerry, Mary Philbin, Arthur Edmund Carewe, Gibson Gowland, John Sainpolis

THEMA SUPER-VILAINS I SAGA UNIVERSAL MONSTERS

Journaliste, écrivain et poète, Gaston Leroux écrivit en 1908 « Le Fantôme de l’Opéra », un conte qui lui fut inspiré par les représentations du « Faust » de Gounod auxquelles il assista à l’Opéra Garnier à la fin du 19ème siècle. Le succès colossal du roman lui attira les faveurs d’Hollywood, et Universal en tira une flamboyante adaptation qui permit au légendaire acteur-maquilleur Lon Chaney, déjà porté aux nues dans Le Bossu de Notre-Dame, d’offrir à nouveau une inoubliable prestation. Le carton d’introduction nous apprend que l’Opéra de Paris est bâti sur des salles de torture médiévales et des cachots aujourd’hui oubliés. Des prestigieux directeurs jusqu’aux plus modestes ballerines, tous ceux qui œuvrent dans ce vénérable bâtiment sont effrayés par un fantôme censé hanter la loge numéro 5.

Surnaturel ou non, ce personnage semble tangible, puisqu’il envoie des lettres demandant instamment que la cantatrice Christine Daaé interprète Faust à la place de l’orgueilleuse Carlotta. Mais cette dernière refuse de céder à la menace, sous la pression de sa mère. Et le soir de la représentation, un gigantesque lustre s’écroule sur l’assistance. Profitant de la panique, le fantôme communique avec Christine, lui demandant de renoncer à son fiancé Raoul pour se consacrer pleinement à sa carrière. Comme hypnotisée, la chanteuse le rejoint via un passage secret derrière le miroir de sa loge. Affublé d’un masque étrange sans bouche, le fantôme accueille Christine dans son repaire souterrain, un lieu très photogénique à mi-chemin entre l’expressionnisme et le surréalisme où l’on trouve pêle-mêle un cheval obéissant, des arcades, des escaliers, des passerelles, un lac noir que l’on traverse en gondole, une chambre avec un grand lit à baldaquin et un piano. C’est là que l’étrange individu déclare sa flamme à Christine, lui affirmant que la haine de l’homme l’a transformé en fantôme et que seul l’amour peut le sauver.

La tête de mort du Fantôme

La belle passe la nuit dans l’antre de cet ancien musicien interné pour démence qui se prénomme Eric. Lorsqu’au matin elle l’écoute jouer au piano le « Don Juan triomphant », elle ne peut s’empêcher de lui arracher son masque. Entrée dans la légende, cette séquence nous offre un spectacle inoubliable, révélant un faciès hideux en tout point fidèle au texte de Leroux. « Il est d’une prodigieuse maigreur et son habit noir flotte sur une charpente squelettique », racontait l’écrivain. « Ses yeux sont si profonds qu’on ne distingue pas bien les prunelles immobiles. On ne voit, en somme, que deux grands trous noirs comme aux crânes des morts. » C’est à une véritable torture physique que se plia Lon Chaney pour que son visage prenne des traits macabres, utilisant un faux front, un dentier, des fils de fer écartant ses narines et du fond de teint en abondance. L’autre scène mythique intervient lorsque le Fantôme se déguise en la Mort elle-même et traque Christine et Raoul dans un grand bal masqué. Tout s’achève frénétiquement par une course-poursuite en calèche et par un lynchage final sur les quais de la Seine. Le film ressortit sur les écrans au début des années 30, assorti d’une bande son adaptée aux premiers babillements du cinéma parlant.


© Gilles Penso

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LE PRIX DU DANGER (1983)

Une chasse à l'homme impitoyable qui annonce les dérives les plus extrêmes de la télé-réalité

LE PRIX DU DANGER

1983 – FRANCE

Réalisé par Yves Boisset

Avec Gérard Lanvin, Michel Piccoli, Marie-France Pisier, Bruno Cremer, Andrea Ferreol, Jean-Claude Dreyfus, Gabrielle Lazure

THEMA CINEMA ET TELEVISION

Très en avance sur son temps, l’auteur de science-fiction Robert Sheckley avait imaginé dès les années 50 les dérives de la télé-réalité. En 1953, il écrivait la nouvelle « The Seventh Victim », portée à l’écran douze ans plus tard par Elio Petri. En 1958, il enfonçait le clou avec « The Prize of Peril », que le réalisateur Yves Boisset se réappropria pour signer l’un de ses films les plus cinglants. Car si La Dixième victime de Petri était une farce futuriste volontiers portée sur la gaudriole, Le Prix du danger ne prête à sourire qu’au second degré, tant l’univers décrit par le film s’avère désespérément cynique. Atroce de duplicité et d’hypocrisie, Michel Piccoli incarne Frédéric Mallaire, animateur du jeu télévisé « Le Prix du Danger » que la chaîne CTV a lancé sur les ondes depuis quelques mois et qui bat tous les records d’audience. Le principe est une variante des Chasses du comte Zaroff diffusé sur les écrans du monde entier pour le plus grand plaisir de téléspectateurs avides d’émotions fortes. 

Le candidat, sélectionné parmi les chômeurs et les besogneux, a quatre heures pour rejoindre un endroit secret en évitant les cinq tueurs lancés à ses trousses. S’il réussit, il empoche la coquette somme d’un million de dollars. Mais personne n’y est encore parvenu. Les trois hommes ayant jusqu’alors tenté leur chance ont respectivement terminé leur course précipité du haut d’un immeuble, écrasé par une moto ou massacré à coup de rames. François Jacquemard (Gérard Lanvin) est tout de même prêt à essayer, malgré les violentes protestations de sa fiancée Marianne (Gabrielle Lazure). La première épreuve éliminatoire n’est déjà pas piquée par les vers, puisqu’il s’agit pour les trois finalistes de faire atterrir un avion sans s’écraser, alors qu’aucun d’eux n’a la moindre notion de pilotage ! François y parvient in extremis. La chasse à l’homme télévisée peut alors commencer…

Un constat désenchanté sur la nature humaine

Le Prix du danger tire au mieux parti d’un casting exceptionnel. Lanvin est l’idéale incarnation de l’homme seul contre tous dont rien ne semble entailler la détermination, Piccoli caricature avec délectation l’animateur vedette de l’époque Jacques Martin (qui apprécia très mal le pastiche !), Bruno Cremer s’avère détestable en directeur de chaîne dénué du moindre sentiment, Marie-France Pisier est la productrice en proie à quelques états d’âme, et Jean-Claude Dreyfus nous concocte la savoureuse prestation d’un tueur stupide. Changeant de registre, le compositeur Vladimir Cosma écrit ici une partition inspirée par celle de La Mort aux trousses« Yves Boisset était très influencé par le cinéma d’action américain », explique Cosma. « Je ne sais plus si Bernard Herrmann et Alfred Hitchcock faisaient partie de nos discussions, mais ce qui est sûr, c’est que la musique que vous entendez est le résultat de nos conversations et de nos influences respectives. » (1) Constat désenchanté sur la nature humaine, Le Prix du danger prône un réalisme plus grand que certaines œuvres voisines telles que Rollerball ou La Course à la mort de l’an 2000. La réalité ayant presque rattrapé la fiction entre-temps, cette salve violente contre l’escalade d’une télé-poubelle gorgée d’argent, de sponsors et d’arrogance n’en est que plus inquiétante.


(1) Propos recueillis par votre serviteur en mai 2005

© Gilles Penso

 

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LE REDOUTABLE HOMME DES NEIGES (1957)

Peter Cushing au sommet des montagnes de l'Himalaya à la recherche du Yéti dans cette production Hammer atypique

THE ABOMINABLE SNOWMAN

1957 – GB

Réalisé par Val Guest

Avec Peter Cushing, Forrest Tucker, Maureen Connell, Richard Wattis, Robert Brown, Michael Brill, Wolfe Morris, Arnold Marlé

THEMA YETIS ET CHAÎNONS MANQUANTS

L’équipe qui nous gratifia des deux premières aventures cinématographiques du professeur Quatermass, Le Monstre et La Marque, décidèrent dans la foulée de s’attaquer au mythe du yéti. La compagnie Hammer, le scénariste Nigel Kneale et le réalisateur Val Guest se retrouvèrent donc aux commandes d’un film fort ambitieux, peu complexé par son modeste budget. Adapté de la pièce télévisée The Creature de la BBC, le scénario emprunte des voies inattendues, même s’il semble à priori présenter de nombreuses similitudes avec l’anecdotique Abominable homme des neiges de Lee Wilder. Peter Cushing interprète ici John Rollason, un botaniste hébergé avec sa femme et son assistant dans le temple d’un lama tibétain. Lorsqu’une expédition menée par l’opiniâtre Tom Friend (excellent Forrest Tucker) décide d’explorer les montagnes de l’Himalaya à la recherche du fameux abominable homme des neiges, Rollason s’embarque avec eux, contre l’avis de son épouse et de son hôte.

La traque s’avère plus difficile que prévue, et malgré toutes les précautions prises par Friend, deux membres du groupe trouvent la mort dans d’étranges circonstance, et leur guide Kusang prend la fuite. Ils parviennent malgré tout à cerner un Yéti et à l’abattre. La gigantesque dépouille de l’animal est alors entreposée à l’intérieur d’une grotte, dans l’espoir d’attirer d’autres spécimens. Friend, qui s’avère n’être qu’un forain exploitant le sensationnalisme du public, compte en effet ramener un yéti vivant à la civilisation, ce qui n’est pas du goût de Rollason. Mais la suite des événements va lui échapper totalement… Les créatures n’apparaissent ici que très tardivement, d’abord sous forme d’une main velue géante qui fouille les armes de l’expédition sous la tente. Le trucage, fort simple mais très efficace, emploie un gant maquillé et une reconstitution à l’échelle réduite du matériel. Et nous n’en verrons guère plus, sauf au moment du climax où Cushing aperçoit deux ombres colossales et un faciès simiesque dont le regard semble étrangement paisible et bienveillant.

Un voyage avant tout initiatique

Les amateurs de films de monstres sont donc légitimement frustrés, car l’intérêt du film réside ailleurs. Le voyage des héros est avant tout initiatique, et la recherche du yéti se mue peu à peu en quête métaphysique, qui se résume en une question cruciale : quelle est la place de l’homme dans la chaîne de l’évolution ? Les scientifiques considèrent que les grands singes et les humains descendent d’un même ancêtre primate. Et s’il existait une troisième branche ? Ne nous sommes-nous pas surestimés en nous octroyant le rôle de stade ultime de l’évolution des espèces ? Partant de cette interrogation, le scénario dote les yétis d’une intelligence hors du commun et d’un pouvoir télépathique. Des voix mystérieuses s’adressent ainsi aux membres de l’expédition, notamment celle d’une radio cassée et d’un collègue décédé (ce qui évoque L’Attaque des crabes géants réalisé la même année par Roger Corman). Sous ses allures de monster movie, Le Redoutable homme des neiges nous prend donc par surprise et s’avère tout à fait digne du talent hors norme de ses initiateurs Val Guest et Nigel Kneale.

 

© Gilles Penso

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ZOMBIE (1978)

Avec cette variante sur les thématiques de La Nuit des morts-vivants qui brocarde la société de consommation, George Romero signe le film de zombies ultime

DAWN OF THE DEAD

1978 – USA

Réalisé par George A. Romero

Avec David Emge, Ken Foree, Scott H. Reiniger, Gaylen Ross, David Crawford, David Early, Richard France, Tom Savini

THEMA ZOMBIES I SAGA LES ZOMBIES DE ROMERO

Avec La Nuit des morts-vivants, on pensait que George Romero avait fait le tour de la question des zombies remis aux goûts du jour et modernisés. Or « La Nuit » n’était que le début, et en s’attaquant à « L’Aube », le cinéaste crée une suite/remake qui deviendra le film ultime sur les morts-vivants, la référence absolue en la matière. Les distributeurs européens ne s’y trompent guère, en le rebaptisant tout simplement Zombie. Ici, comme l’amorçait La Nuit des morts-vivants, les cadavres ressuscités ont envahi la terre et le monde bascule dans l’horreur. Fran, qui travaille pour la télévision, Stephen, pilote d’hélicoptère, Roger et Peter, policiers, décident de fuir loin de la ville. Malgré les attaques des morts-vivants, les quatre survivants parviennent à trouver refuge dans un centre commercial abandonné. La vie s’organise, parsemée de raids contre les zombies et de luttes pour assurer leur survie. La situation dégénère brutalement lorsqu’une horde de Hell’s Angels vient piller le supermarché…

Film d’action reposant surtout sur son rythme effréné, Zombie utilise l’horreur comme prétexte, le véritable dessein de l’œuvre étant une cinglante satire sociale. La société de consommation est banalisée (par le biais du supermarché dans lequel les héros peuvent disposer de tout ce qu’ils désirent) puis ridiculisée (par l’intermédiaire des zombies qui, en traînant sur les escaliers roulants, en se collant aux vitrines, en errant entre les rayons, sont des caricatures des humains et de leur instinct consumériste grégaire). Romero se moque de ses semblables et de leurs déambulations sans but, dénonce les répressions violentes de l’armée et de la police, condamne les politiciens et leurs projets aberrants (du style nourrir les morts-vivants jusqu’à ce qu’ils soient rassasiés ou faire exploser des bombes atomiques dans les villes où ils sont concentrés). Le rythme, d’une constance remarquable, sert magistralement le pamphlet social.

Le désordre perdure jusqu'au bout

Après l’épouvante quasi-documentaire de La Nuit des morts-vivantsZombie change donc de style, affichant ici ouvertement les horreurs visuelles (têtes qui explosent, tournevis dans l’oreille, machette dans un crâne, amputations en tout genres). « Je voulais donner au film l’aspect d’un comic book », avoue Romero. « D’un point de vue stylistique, j’ai tenté de refléter un peu le type de cinéma qu’on faisait à cette époque. Voilà pourquoi il y a des couleurs éclatantes et brillantes comme dans les films d’action des seventies. » (1) Le film se distingue aussi par une structure narrative inhabituelle, relatant un épisode parmi d’autres d’une situation cauchemardesque qui s’est amorcée bien avant les premières images et s’avère loin d’être terminée après le dénouement. « Dans la plupart des films fantastiques, le monde est perturbé par un élément surnaturel, mais à la fin l’ordre est rétabli », conclue Romero. « Dans mes films, le désordre perdure jusqu’au bout, le problème existe toujours. » (2)

(1) et (2) Propos recueillis par votre serviteur en juillet 2005

© Gilles Penso

 

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DOOMSDAY (2008)

Le réalisateur de The Descent conçoit une aventure post-apocalyptique se référant directement aux deux fleurons du genre : Mad Max 2 et New York 1997

DOOMSDAY

2008 – GB

Réalisé par Neil Marshall

Avec Rhona Mitra, Bob Hoskins, Adrian Lester, Alexander Siddiq, David O’Hara, Malcolm McDowell, Craig Conway, Emma Cleasby 

THEMA FUTUR I CANNIBALES

Dog Soldiers nous avait enchantés, The Descent nous avait époustouflés… Autant dire que Doomsday, troisième incursion de Neil Marshall dans le cinéma fantastique, était attendu avec espoir par les amateurs du genre. Ô joie, le résultat comble tous les désirs, s’affirmant ouvertement comme une série B jouissive bourrée de références. Les prémisses du film évoquent irrésistiblement 28 semaines plus tard, dans la mesure où un nouveau virus, surnommé « La Faucheuse », vient de faire son apparition en Ecosse, annihilant la majeure partie de la population. Pour endiguer l’épidémie, le gouvernement anglais construit un mur infranchissable qui isole totalement l’Ecosse, devenue un no man’s land en ruines où les survivants sont coupés du monde. Lorsque trente ans plus tard le même virus réapparaît au coeur de Londres, un commando de choc part en mission suicide rechercher un éventuel vaccin dans une Ecosse où plusieurs gangs rivaux semblent avoir miraculeusement survécu. A la tête du commando se trouve Eden Sinclair (la splendide Rhona Mitra), une combattante émérite qui espère, à travers cette mission, retrouver des traces de sa mère, disparue trois décennies plus tôt. 
Bien vite, Marshall annonce les deux références essentielles de son film : New York 1997 et Mad Max 2, comme au bon vieux temps des Guerriers du Bronx, 2019, après la chute de New York et autres Nouveaux barbares. D’ailleurs, la violence extrême de Doomsday et son approche délibérément « rentre dedans » renvoient directement aux imitations italiennes qui proliféraient sur les écrans dans les années 80. Dès les premières minutes, c’est l’ombre de John Carpenter qui plane sur le récit. L’héroïne désabusée n’a qu’un œil (comme Snake Plissken) et passe son temps à demander des cigarettes à ceux qu’elle croise (comme le héros d’Assaut), tandis que la musique synthétique et répétitive de Tyler Bates est un hommage évident aux partitions du père d’Halloween

Surréalisme anachronique

Lorsque notre commando se heurte à une horde de barbares hystériques, punks et anthropophages, menés par l’impressionnant Sol (Craig Conway), c’est l’influence de George Miller qui prend le relais, Neil Marshall se fendant d’un vibrant hommage au cinéaste australien à travers une ébouriffante poursuite finale où cascades démentes et effets pyrotechniques à répétition lacèrent l’écran pour la plus grande joie d’un public acquis corps et âme au spectacle. En guise de clin d’œil, deux des membres du commando dirigé par Eden se nomment d’ailleurs Carpenter et Miller ! Pour autant, Doomsday ne se contente pas de juxtaposer ses références. La personnalité du réalisateur de The Descent émerge sans peine des cendres fumantes ce futur post-apocalyptique, et lorsque nos héros découvrent une communauté médiévale dirigée par le souverain Kane (Malcolm McDowell, impérial), le film bascule dans un surréalisme anachronique tout à fait inattendu. La vraie révélation de Doomsday demeure Rhona Mitra, qui n’est pas inconnue des amateurs de cinéma d’action, mais qui livre ici une de ses performances les plus physiques, sans que jamais son charisme et son charme n’en soient entachés, bien au contraire.
 
© Gilles Penso

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