S.O.S. FANTÔMES (2016)

Un remake de la comédie fantastique culte d'Ivan Reitman qui inverse le sexe de ses personnages ? Pourquoi pas. Encore eut-il fallu que le film soit drôle…

GHOSTBUSTERS

2016 – USA

Réalisé par Paul Feig

Avec Kristen Wiig, Melissa McCarthy, Kate McKinnon, Chris Hemsworth, Leslie Jones, Neil Casey, Cecily Strong, Andy Garcia

THEMA FANTÔMES I SAGA S.O.S. FANTÔMES

Même si son image a été quelque peu écornée par la séquelle paresseuse dont Ivan Reitman l’a affublé de mauvaise grâce en 1989, le S.O.S. Fantômes original n’a rien perdu de son aura. Fruit d’une alchimie quasi-miraculeuse,  c’est une de ces œuvres cultes dont la connivence avec le public ne fait que se cimenter au fil des ans, comme si les premiers émois ressentis à l’époque s’étaient renforcés d’une solide couche de nostalgie jusqu’à la rendre intouchable. L’idée d’un remake tardif allait forcément faire grincer les dents des aficionados, surtout face à la féminisation systématique du casting principal. On ne peut s’empêcher de soulever un sourcil perplexe devant ce choix étrange qui prend des allures de « discrimination positive » assujettie à une tendance excessive au politiquement correct (celle qui incite à mettre un « e » à la fin du mot « auteur » lorsqu’une femme porte la plume). Honnêtement, passée la surprise, ce changement de sexe ne choque pas et prend même les atours d’un rafraîchissement inattendu. Les prémisses du film sont d’ailleurs emplis de promesse. Kristen Wiig est très drôle en conférencière assumant très mal son passé de « chasseuse » des phénomènes paranormaux, et ses retrouvailles amères avec son ancienne amie campée par Melissa McCarthy ne manque pas de sel.

Mais le rire tourne court lorsque le film abandonne au bout d’un quart d’heure toute ambition pour cumuler les passages obligatoires et cligner bêtement de l’œil vers le premier S.O.S. Fantômes, accumulant les références jusqu’à l’indigestion et convoquant la majorité du casting original pour une série d’apparitions éclair navrantes.  Anonyme, la réalisation de Paul Feig assure le service minimum sans la moindre conviction. Certes, la mise en scène d’Ivan Reitman ne brillait pas non plus par son style, mais la personnalité forte de Bill Muray, Dan Aykroyd et Harold Ramis (et quelque part le fantôme farceur de John Belushi) habitaient chacune des séquences du premier S.O.S. Fantômes, le muant en film quasi-experimental mixant l’humour absurde et référentiel du Saturday Night Live aux canons d’une superproduction hollywoodienne à grand spectacle.

Une décalque machinale et scolaire

Mais la spontanéité et le grain de folie n’ont plus cours ici. A force d’essayer de retrouver mécaniquement les recettes qui firent le succès de son modèle, le S.O.S. Fantômes de 2016 ne cache même plus sa nature intrinsèque : le cahier des charges d’un studio dont chaque case est soigneusement cochée. Adieu fraicheur et sincérité, place à la décalque machinale et scolaire. Même les effets spéciaux trahissent ce cruel manque d’âme. En 1984, Steve Johnson, Randy Cook et l’équipe de Boss Films rivalisaient d’ingéniosité pour donner corps aux folies du scénario d’Aykroyd et Ramis. Derrière les grimaces en caoutchouc de Slimer, les cavalcades en stop-motion des Chiens de la Terreur et les déambulations titanesques du Bibendum Chamallow, l’inventivité et l’expressivité de ces artistes au tempérament fort transparaissaient sans cesse. Dans le remake, aucun style n’émerge des spectres propres et froids débités par des centaines d’infographistes enchaînés à leurs ordinateurs. Bref, encore un remake qui brille par son inutilité et sa vacuité abyssale.

 

© Gilles Penso

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LE BON GROS GEANT (2016)

Steven Spielberg s'empare d'un célèbre roman pour enfants de Roald Dahl et en tire un film féerique plus grand que nature

THE BIG FRIENDLY GIANT

2016 – USA

Réalisé par Steven Spielberg

Avec Ruby Barnhill, Mark Rylance, Penelope Wilton, Rebecca Hall, rafe Spall, Jemaine Clement, Bill Hader, Adam Godley

THEMA CONTES I NAINS ET GEANTS I SAGA STEVEN SPIELBERG

Tout au long de sa carrière, Steven Spielberg n’aura cessé de décliner le motif récurrent du fils perdu et de la quête du père. Le Bon Gros Géant ne déroge pas à cette règle, même si le cinéaste s’efforce ici de faire coïncider son propre univers à celui – déjà très codifié – du romancier Roald Dahl. S’il s’était agi d’un scénario original, nul doute que la petite orpheline Sophie emmenée au pays des géants aurait été un jeune garçon, mais « Le Bon Gros Géant » est un roman trop célèbre et trop populaire pour laisser beaucoup de marge de manœuvre au cinéaste. Spielberg doit donc composer avec un personnage principal féminin tout en insistant sur son statut d’orpheline, son titanesque kidnappeur se muant progressivement en père de substitution.

Le film ajoute cependant un élément plus personnel : un petit garçon que le BGG avait capturé avant Sophie, avec qui s’était établi un lien très fort et interdépendant, jusqu’à ce que l’enfant ne soit dévoré par le redoutable Avaleur de Chair Fraîche. La découverte de la chambre jadis occupée par ce « fils adoptif », tapissée de dessins et de souvenirs, est probablement la scène la plus forte et la plus émouvante du film, celle où Spielberg peut le mieux affirmer sa personnalité. Assez curieusement, la mise en scène du père d’E.T. n’est pas immédiatement identifiable dans Le Bon Gros Géant, comme si ses effets de style étaient contraints de s’effacer quelque peu derrière la prodigieuse technologie développée par les équipes surdouées de Weta.  Plus étrange encore : lorsque le film bascule dans la comédie pure au cours des séquences se déroulant au palais de Buckingham, le réalisateur opte pour un académisme désarmant.

Un grain de folie édulcoré

C’est probablement là que le bât blesse : un refus d’entrer en phase avec le grain de folie du livre, sa gausserie permanente, sa critique acerbe des hommes qui, en filigrane, n’est pas sans rappeler le verbe acide de Jonathan Swift dans « Les Voyages de Gulliver ». Sans doute trop sage et trop axé sur une narration au premier degré, le film préfère l’émerveillement à l’ironie et finit du coup par rater le coche. Car le livre était conçu comme une histoire que l’on lit au coucher, construite quasiment comme si elle s’improvisait au fur et à mesure de son élaboration. D’où une série de collages surréalistes et ludiques comme les nombreux rêves délirants que le BGG a enfermé dans des bocaux, et que le dessinateur Quentin Blake illustra à l’origine avec la poésie épurée d’un Sempé. Cette scène aurait pu donner lieu à un enchaînement de vignettes absurdes, drôles et cocasses, mais il eut sans doute fallu un Terry Gilliam ou un Jean-Pierre Jeunet pour leur donner corps avec toute l’espièglerie requise. On sent bien que Spielberg n’est pas très à l’aise avec la « non dramaturgie » du livre et qu’il cherche par tous les moyens à en rationaliser la structure pour mieux la conformer à son approche cinématographique. Comme tous les travaux du cinéaste, le film contient son lot de surprises, de tours de force et de fulgurances, mais il restera sans doute dans les mémoires comme une œuvre mineure de son auteur… ce qui est un comble au regard de la taille de la majorité de ses personnages !

 

© Gilles Penso

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RAYON LASER (1977)

Engagés dans une course-poursuite, des extra-terrestres reptiliens oublient sur notre planète une arme redoutable qui atterrit entre les mains d'un jeune homme solitaire…

LASERBLAST

1977 – USA

Réalisé par Michael Rae

Avec Kim Milford, Cheryl Smith, Gianni Russo, Ron Masak, Dennis Burkley, Barry Cutler, Mike Bobenko

THEMA EXTRA-TERRESTRES I SAGA CHARLES BAND

Charles Band, grand fan de science-fiction et d’effets spéciaux, est à l’origine de presque tous les scénarios des films qu’il produit. Pour Rayon Laser, il a eu une petite idée amusante, certes, mais un peu courte pour en tirer un film d’une heure et demie. Tout commence lorsque deux extra-terrestres reptiliens en poursuivent un troisième aux allures humanoïdes jusque sur la Terre, où ils le désintègrent. Ils repartent en oubliant le canon laser que portait leur ennemi. Un jeune homme, brimé et rejeté par les siens, découvre l’arme. Son acquisition le métamorphose en un monstre avide de meurtres et ivre de vengeance auprès de tous ceux qui l’ont humilié… Voilà pour le scénario de Rayon Laser, qui pourrait aisément tenir sur un timbre-poste. Comme en outre les comédiens sont de toute évidence des amateurs «dirigés» par un réalisateur qui l’est visiblement lui aussi, que la qualité de l’image est à peu près celle d’un film super 8, que le travail sur l’éclairage est inexistant et que les décors sont d’une banalité extrême, Rayon Laser ne serait qu’une curiosité anonyme tombée dans l’oubli si David Allen et Randy Cook, spécialistes de l’animation image par image et des effets visuels, ne l’avaient agrémenté de quelques séquences mémorables, lesquelles viennent régulièrement ponctuer le récit.

Ces passages mettent en scène les deux créatures extra-terrestres qui sont involontairement à l’origine du «drame». « Ce n’était pas un film passionnant c’est le moins qu’on puisse dire », nous avouait Randy Cook, « mais les créatures, sculptées par Jon Berg, étaient très réussies et avaient beaucoup de caractère. » (1) Celles-ci, affublées de longs cous et d’une queue atrophiée, ont des allures de tortues bipèdes sans carapace. Leurs yeux globuleux clignent comme ceux des oiseaux et leurs mains reptiliennes sont ornées de trois doigts griffus. « Charles Band aimait beaucoup l’animation et notamment les films de Ray Harryhausen », nous expliquait David Allen. « De toute évidence, des acteurs costumés auraient coûté moins cher que des figurines animées, mais cette solution aurait été moins originale et moins imaginative. » (2) Franchir le pas de la stop-motion pour Charles Band n’est pas simple, dans la mesure où le jeune producteur aime tourner ses films très vite. Or le procédé de l’animation est très lent. Mais l’enthousiasme de David Allen – qui deviendra l’un de ses collaborateurs de longue date -, l’énorme effort financier que ce dernier concède pour entrer dans le budget très modeste du film et le souvenir ému des films de Ray Harryhausen emportent le morceau.

Des tortues géantes en stop-motion

Les créatures extra-terrestres sont animées avec une certaine subtilité, communiquant entre elles en émettant des bruits étranges. Ce sont elle qui ont permis à Rayon Laser de passer à la postérité et de générer un certain culte. Après le prologue, les aliens interviennent régulièrement toutes les vingt minutes en simples spectateurs du haut de leur vaisseau spatial, histoire de tirer le public de sa torpeur, avant de survenir au bout d’un temps jugé suffisamment long par les scénaristes afin de donner au récit une fin abrupte, déchirante pour les protagonistes et quelque peu secourable pour le spectateur. Car celui-ci, entre les trop brefs plans d’animation, aura été obligé de subir des séquences un tantinet soporifique, parfois égayées par l’apparition de Roddy McDowall, échoué là pour une raison qu’on ignore. Pour l’anecdote, Charles Band entend parler de La Guerre des étoiles pendant le tournage de Rayon Laser et en découvre la bande-annonce grâce à un ami monteur. Epoustouflé par ces images, il décide de concocter un petit clin d’œil et imagine donc la fameuse scène dans laquelle Kim Milford pulvérise avec son bras-laser une grande affiche de Star Wars. Sympathique nanar, Rayon Laser peut s’apprécier comme un plaisir coupable. Il fut accompagné lors de sa sortie d’un magnifique poster maintes fois décliné lors de ses distributions successives en VHS puis en DVD.

 

(1) Propos recueillis par votre serviteur en mai 1999

(2) Propos recueillis par votre humble narrateur en avril 1998

 

© Gilles Penso

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BATMAN V SUPERMAN (2016)

Zack Snyder prend la suite directe de Man of Steel pour conter l'affrontement titanesque entre le Chevalier Noir et l'Homme d'Acier

BATMAN V SUPERMAN

2016 – USA

Réalisé par Zack Snyder

Avec Henry Cavill, Ben Affleck, Gal Gadot, Jesse Eisenberg, Amy Adams, Jeremy Irons

THEMA SUPER-HEROS I EXTRA-TERRESTRES I SAGA DC COMICS I SUPERMAN I BATMAN

Le cas Snyder : véritable auteur visionnaire pour certains, abominable bourrin pour d’autres. Enfermé depuis 300 dans l’enfer des adaptations de comics et constamment conspué par l’impitoyable communauté geek, l’homme tente à nouveau d’imposer son style si particulier à l’univers DC après un Man of Steel en demi-teinte. Le cahier des charges est de taille : renouveler le personnage de Batman après tant d’incarnations différentes, étoffer son propre Superman, faire la nique au concurrent Marvel qui explose régulièrement le box-office, et annoncer les univers parallèles à venir. Pari relevé qui alterne ici les fulgurances et les déceptions. Dès l’introduction, Snyder est bel et bien là. On voit immédiatement que le « Dark Knight Returns » de Frank Miller est l’influence principale (quitte à le piller sans vergogne ni royalties), notamment sur l’inévitable séquence de la mort des parents de Bruce Wayne et de la découverte de la Batcave. Mais loin de se borner à décalquer bêtement les cases de la BD (cruel manque de point de vue du Rodriguez de Sin City), le réalisateur insuffle une ampleur tragique très puissante au trauma du futur justicier. 

L’excellente idée de refaire la séquence finale de Man of Steel du point de vue de Wayne réussit à la fois à justifier en un éclair le profond antagonisme en titre, à poser un regard distancié de spectateur sur les agissements de Superman et à instaurer un réalisme glaçant. Nous sommes loin de la glorification primaire et adolescente des Avengers. Outre ce traitement plus adulte et cette mise en scène solide et inventive qui le caractérise, Snyder se démarque encore plus de la concurrence dans l’épaisseur qu’il confère aux personnages, aidé il est vrai par un casting impliqué. Ben Affleck en premier s’impose avec classe, et une présence physique impressionnante : le Chevalier Noir de Miller, c’est bel et bien lui, large, dépressif et effrayant. Henry Cavill est toujours aussi touchant, rappelant souvent le fragile et inoubliable Christopher Reeve, et Amy Adams trouve enfin sa place en Loïs Lane. Dans les nouveaux venus, Jeremy Irons compose un Alfred idéal (très proche encore une fois du majordome cynique et hilarant de Miller), et Gal Gadot incarne Wonder Woman en véritable Walkyrie. Surprise, Kevin Costner fait même un coucou émouvant. Seul bémol niveau interprétation, Jesse Eisenberg qui rate complètement la cible Luthor, en totale roue libre et desservi par des dialogues over the top soulignés par les ridicules envolées emphatiques de Zimmer et Junkie XL (ce dernier pousse même le vice jusqu’à nous ressortir quasiment le thème de Fury Road sur une vision post-apo !). 

Moments d'anthologie et passages obligatoires

La première heure du film se tient donc très bien, cultivant une alternance équilibrée entre les deux super-héros et installant une atmosphère captivante. En deuxième partie, ça se gâte… Car Snyder semble se faire rattraper par les exécutifs de Warner et ce satané cahier des charges anti-artistique. Il faut absolument aiguiser l’intérêt des fans DC sur les autres films à venir, et annoncer l’arrivée des personnages de la Justice League, Aquaman, Flash et consorts. Cependant, là où un yes man lambda remplirait simplement la basse besogne, Snyder insère des mini-teasers sous la forme de vidéos dans le film. Pied de nez génial et cynique sur la génération youtube ? A chacun de le prendre comme il le désire. Les passages obligés ne s’arrêtent pas là, le face-à-face avec le gros Doomsday tire à la ligne dans des destructions massives rebattues chez Marvel, même si la mise en scène est comme toujours truffée de trouvailles jouissives. Le scénario se prend soudain lui aussi les pieds dans le tapis, mélangeant maladroitement des visions du futur et du passé, perdant le rythme dans son va-et-vient entre les protagonistes, coupant court quand il faudrait s’étendre et insistant sur une lourde symbolique christique déjà étayée dans Man of Steel. On prend donc peur, le summum étant atteint sur le bête moment du « prénom » qui unit les deux ennemis. L’idée de ce rapprochement Œdipien et Fordien pourrait toucher au cœur, mais on se croirait plus dans un ZAZ à cet instant. Dommage. Le réalisateur de Watchmen reprend heureusement le contrôle dans les moments intimes entre Loïs et Clark, et dans les séquences d’action impliquant Batman (là où Christopher Nolan échouait à cadrer correctement un coup de pied) : le travelling circulaire qui oppose la chauve-souris et des monstres dignes d’Harryhausen, la puissante et stylée Batmobile, la violence du clash avec Superman, et surtout le démentiel et brutal sauvetage de Martha Kent (qui s’accompagne d’un humour bienvenu très old school)… Autant de moments d’anthologie réjouissants. On attend donc avec impatience un Director’s Cut (ce qui manquait cruellement à Man of steel) pour rétablir la balance, donner du corps à un ensemble parfois brouillon, et démontrer à ceux qui en doutent encore que Zack Snyder fait du bien dans le maelström Hollywoodien.

© Julien Cassarino

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LE RETOUR DE L’HOMME INVISIBLE (1940)

Sept ans après le chef d'œuvre de James Whale, un nouvel homme invisible fait son apparition, incarné cette fois par Vincent Price

THE INVISIBLE MAN RETURNS

1940 – USA

Réalisé par Joe May

Avec Vincent Price, John Sutton, Sir Cedric Hardwicke, Nan Grey, Cecil Kellaway, Alan Napier, Forrester Harvey

THEMA HOMMES INVISIBLES I SAGA UNIVERSAL MONSTERS

C’est à Curt Siodmak, scénariste jamais à court d’idées en matière de science-fiction, que nous devons l’écriture de cette séquelle du chef d’œuvre de James Whale. Jack Griffin étant bel et bien mort à la fin de L’Homme Invisible sept ans plus tôt, il n’était guère envisageable de le ressusciter à la manière de Dracula ou du Monstre de Frankenstein. C’est donc son frère Frank qui prend ici le relais, poursuivant les recherches de feu Jack. Interprété par John Sutton, ce scientifique bien intentionné applique son sérum à Geoffrey Radcliffe, un homme accusé d’un meurtre dont il est innocent. L’invisibilité lui permet d’échapper à la pendaison in extremis. Désormais en cavale, il doit retrouver et confondre le véritable coupable, au nez et à la barbe de Sampson (Cecil Kellaway), un inspecteur opiniâtre de Scotland Yard qui cherche à lui mettre la main dessus pour lui faire reprendre illico le chemin du gibet. Le tout à l’aide des effets spéciaux toujours aussi étonnants de John P. Fulton, qui permettent aux bandelettes de révéler un visage transparent, aux verres de se vider seuls ou aux cordes de s’animer pour ligoter les individus gênants (grâce à l’animation image par image).

Si les séquences de déshabillage, pour remarquables qu’elles demeurent, ont perdu leur caractère inédit, et si certains effets souffrent d’indéniables maladresses (les lignes de cache qui tremblotent, les fils qui soutiennent un pistolet), le film offre à ses spectateurs de nouvelles idées visuelles surprenantes, notamment lorsque Griffin tente de rendre sa visibilité à un de ses cobayes. D’abord transparent, l’animal apparaît progressivement sous la forme d’un squelette, puis dans son intégralité, avant de périr suite à un mauvais dosage des ingrédients du sérum. Ainsi, tandis que l’homme invisible mène l’enquête, le savant s’efforce de trouver un remède miracle qui permet non seulement de redevenir visible mais aussi d’éviter les accès de folie inhérents à l’invisibilité. A ce double « time lock » se greffe une intrigue amoureuse, dans la mesure où Helen (Nan Gray), la jolie fiancée de Geoffrey, est courtisée par le businessman Richard Cobb (Cedric Hardwicke).

Moments forts et visions surréalistes

Vincent Price en personne, alors tout débutant, a l’honneur de remplacer Claude Rains dans le rôle de ce second homme invisible qui bascule de l’euphorie vers la démence, au cours d’une scène de dîner mémorable où le comédien fait déjà montre de son immense talent, avec comme seuls supports sa voix et sa gestuelle. Sans jamais atteindre  le génie du premier Homme Invisible, cette séquelle regorge cependant de moments forts, comme l’affrontement final au milieu des chariots d’une mine, la vision surréaliste d’un épouvantail dépouillé de ses habits par notre protagoniste frileux, ou l’ultime apparition du visage de Vincent Price, annonciatrice de L’Homme Sans Ombre, où un lacis de veine surgit du néant, se recouvrant peu à peu d’os, de tissus musculaires et enfin de chair. Le succès du Retour de l’Homme Invisible sera suffisamment conséquent pour qu’Universal poursuive la franchise, abandonnant peu à peu tous les aspects dramatiques du concept d’H.G. Wells pour en conserver principalement le potentiel distrayant et récréatif.

 

© Gilles Penso

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THE WITCH (2015)

Pour son premier long-métrage, Robert Eggers nous offre un récit d'épouvante qui s'inscrit dans un cadre historique extrêmement réaliste

THE WITCH

2015 – USA

Réalisé par Robert Eggers

Avec Anya Taylor-Joy, Ralph Ineson, Kate Dickie, Harvey Scrimshaw, Ellie Grainger, Lucas Dawson, Bathsheba Garnett

THEMA SORCELLERIE ET MAGIE

Ancien directeur artistique pour le cinéma et le théâtre, metteur en scène de plusieurs pièces, auteur d’une poignée de courts-métrages audacieux, Robert Eggers a décidé d’aborder son premier film sous un angle surprenant, le définissant lui-même comme « un cauchemar puritain ». Dans la Nouvelle-Angleterre du dix-septième siècle, William et Katherine, un couple dévot à la pratique religieuse stricte, décident de s’établir à la limite de la civilisation, menant une vie austère et pieuse avec leurs cinq enfants en cultivant leur petit lopin de terre au milieu d’une forêt sauvage et isolée. Soudain, leur nouveau-né disparaît dans les bois, prélude à un cauchemar qui s’immisce sournoisement au sein de la cellule familiale pour la détruire de l’intérieur… La première chose qui frappe, dans The Witch, est la rigueur de sa reconstitution historique. Ce degré d’authenticité et de vérisme est le fruit de quatre ans de recherches intensives, au cours desquelles le cinéaste étudia les livres de prière, les courriers et les documents religieux, les méthodes agricoles, les vêtements et les outils fermiers du 17ème siècle. 

Poussant la minutie à l’extrême, Eggers demanda à son compositeur Mark Korven d’utiliser des instruments d’époque pour la musique du film, et à son directeur de la photographie Jarin Blaschke de privilégier les lumières naturelles. Un tel degré de perfectionnisme permet à The Witch de bénéficier d’un remarquable réalisme. Du coup, lorsque le surnaturel y fait irruption, son impact s’en retrouve décuplé. Le point de rupture entre le réel et le fantastique crée un malaise intense dans la mesure où le spectateur y croit immédiatement et sans entrave. L’enfant possédé, la sorcière dans les bois, le bouc noir devenu vecteur du démon échappent ainsi aux lieux communs pour s’inscrire dans un contexte où la suspension d’incrédulité fonctionne à plein régime. La terreur que provoque The Witch n’a rien à voir avec les codes habituels du cinéma d’horreur. 

Le point de rupture entre le réel et le fantastique

Le gore n’est pas de mise, pas plus que les déflagrations sonores à répétitions conçues pour faire sursauter le public à un rythme métronomique ou les effets spéciaux spectaculaires visualisant à grande échelle les phénomènes paranormaux. Ici, tout est insidieux, pernicieux et insaisissable. Ce sont donc nos peurs primales que convoque Robert Eggers, avec un talent qui laisse présager de futures œuvres fort prometteuses. Extrêmement élégant dans sa mise en image (certains plans ressemblent à des tableaux de Rembrandt), pointilleux dans sa direction d’acteurs (avec une mention spéciale pour Ralph Ineson, dont le monolithisme apparent masque de nombreuses failles), le cinéaste se laisse bien plus influencer par des œuvres picturales, musicales et littéraires que par d’autres films, même si l’ombre de Kubrick et d’Ingmar Bergman plane parfois sur The Witch. Au fil de ce récit tourmenté, Robert Eggers nous offre surtout une vision très critique de la bigoterie religieuse, vécue ici comme une maladie qui gangrène et détruit peu à peu une famille dont les principes moraux s’étiolent et se désagrègent. Quelques visions cauchemardesques scandent régulièrement le métrage, jusqu’à un final à la fois beau, triste et effrayant, concluant avec panache ce qu’il faut sans doute considérer comme l’un des meilleurs films d’épouvante de ces dernières années.

 

© Gilles Penso

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CAPTAIN AMERICA : CIVIL WAR (2016)

Les super-héros doivent-ils être régis par le gouvernement ou continuer d'agir indépendamment ? Deux clans se divisent et la guerre civile se prépare…

CAPTAIN AMERICA : CIVIL WAR

2016 – USA

Réalisé par Anthony et Joe Russo

Avec Chris Evans, Robert Downey Jr, Scarlett Johansson, Sebastian Stan, Chadwick Boseman, Paul Rudd, Tom Holland

THEMA SUPER-HEROS I SAGA AVENGERS I CAPTAIN AMERICA I IRON MAN I SPIDER-MAN I MARVEL

Devenu figure active du contre-pouvoir dans l’excellent Captain America : le Soldat de l’Hiver, le soldat à la bannière étoilée poursuit cette démarche dans Civil War qui marque un clivage fort entre deux groupes de super-héros soudain en proie au doute. Menés par Tony Stark, les uns acceptent de devenir une organisation officiellement pilotée par le gouvernement afin d’éviter les débordements qui ont jadis provoqué bon nombre de victimes. Sous la tutelle de Steve Rogers, les autres refusent ce chaperonnage pour pouvoir continuer à agir librement et en toute conscience. La divergence d’opinion se transforme en affrontement musclé lorsque Bucky Barnes, le Soldat de l’Hiver, est accusé d’un acte terroriste aux répercussions catastrophiques… Ecrire et réaliser un film choral, réservant un rôle privilégié à des dizaines de protagonistes aux personnalités fortes et tenant compte de tous les longs-métrages précédents de la franchise, est un exercice difficile aux nombreux écueils. Si Josh Whedon avait remarquablement relevé le défi avec le premier Avengers, il n’avait su transformer l’essai dans L’ère d’Ultron qui confinait à l’indigestion. La réussite de Captain America : Civil War est d’autant plus remarquable.

Réunissant plus de personnages que tous les autres films de la saga, les frères Russo nous offrent un spectacle foncièrement généreux. A l’exception de Thor et Hulk, tous les Vengeurs répondent à l’appel, sans compter deux nouveaux venus que les spectateurs attendaient de pied ferme : Black Panther et Spider-Man. Le premier, impeccablement incarné par Chadwick Boseman, nous offre quelques beaux moments d’action aux chorégraphies vertigineuses. Le second nous revient avec panache, balayant joyeusement les deux ratages de Marc Webb. Rajeuni sous les traits de Tom Holland, Peter Parker crève l’écran pendant une bonne demi-heure, rafraîchissant par sa présence candide et fougueuse un film à l’atmosphère relativement pesante. Le miracle de Civil War tient d’ailleurs à son équilibre et son dosage, tirant parti des caractères versatiles de chaque membre du groupe pour les harmoniser au sein d’une intrigue ne perdant jamais son homogénéité tonale.

Spider-Man et Black Panther entrent en piste

Le combat titanesque des deux armées de super-héros sur le tarmac d’un aéroport reste ainsi un morceau d’anthologie non seulement par la folle inventivité de ses péripéties mais surtout par l’agressivité mitigée des belligérants, s’affrontant à contrecœur et retenant souvent leurs coups. Cette guerre idéologique est d’autant plus complexe qu’elle divise des amis et s’appuie sur des convictions malléables. Malgré les apaisements ultérieurs, de nouveaux enjeux la relancent et l’enveniment sans cesse, face au spectateur qui assiste impuissant à ce naufrage intérieur. Aucun « deus ex-machina » n’interrompt les combattants (c’était l’un des défauts majeurs de Batman V Superman) et surtout aucun super-vilain tout-puissant n’offre la possibilité d’une focalisation de toutes les attentions vers un ennemi commun. Dans Civil War, la lutte reste intestine et laisse des marques durables. Ce troisième Captain America est donc une prodigieuse réussite, l’un des meilleurs épisodes de la longue franchise Marvel riche aujourd’hui de treize longs-métrages.

 

© Gilles Penso

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GAMERA CONTRE GUIRON (1969)

Pour sa cinquième aventure, la tortue Géante Gamera affronte un monstre extra-terrestre mi-requin mi-dinosaure

GAMERA TAI DAIJAKUJU GIRON

1969 – JAPON

Réalisé par Noriaki Yuasa

Avec Noburhiro Najima, Miyuki Akiyama, Christopher Murphy, Yuko Hamada, Eiji Funakoshi, Kon Ômura

THEMA REPTILES ET VOLATILES I EXTRA-TERRESTRES I SAGA GAMERA

Monstre redoutable et indestructible conçu pour concurrencer Godzilla, la tortue géante antédiluvienne Gamera s’est vite muée, au fil de ses aventures, en gentil protecteur de la Terre. Le quatrième film de la saga, Gamera contre Viras, semblait d’ailleurs marquer les limites du concept en frôlant dangereusement la puérilité et l’absurdité. Sa séquelle, Gamera contre Guiron, exploite hélas les mêmes ingrédients : deux garnements surdoués en guise de héros (un Japonais et un Américain pour pouvoir toucher le public le plus large), une menace extraterrestre grotesque, l’utilisation d’extraits des films précédents pour pouvoir économiser de coûteux effets spéciaux, et un nouveau monstre abracadabrant à jeter dans les pattes de Gamera. Le scénario ? Un vaisseau spatial kidnappe deux enfants de la Terre (qui crient « Banzaï » ! » toutes les cinq minutes) et les transporte sur Teato, une planète lointaine symétrique à la Terre par rapport à l’axe du soleil, et peuplée de monstres géants.

Là sévissent deux femmes extra-terrestres qui rêvent d’asservir la Terre. Les garçons, qui découvrent les plans machiavéliques de leurs geôlières, réveillent Gamera pour prendre part à une bataille finale mortelle contre le monstre de l’espace… Autant l’avouer tout de suite : la mayonnaise ne prend guère, même pour les jeunes téléspectateurs, et seuls les friands de kitsch et d’humour au second degré trouveront leur compte dans ce cinquième Gamera. Le Guiron du titre, qui joue le rôle de chien de chasse des deux jolies aliennes, est une créature étrange, qu’on pourrait décrire comme une sorte de dinosaure mixé avec un requin. Réfugié sous terre, il surgit de temps en temps pour chasser les ptérodactyles du coin (les Gyaos, échappés du troisième film de la saga) et bien sûr pour affronter Gamera. Son museau, aussi tranchant qu’un couteau, est son arme la plus redoutable. Plusieurs Gyaos en font d’ailleurs les frais, mutilés et découpés sans pitié au début du film ! Guiron dispose aussi d’espèces d’étoiles ninja qu’il cache dans ses narines et qu’il projette à tout va ! 

Barre fixe et pas de danse

Quant aux extraterrestres, il s’agit de deux jolies Japonaises engoncées dans des combinaisons bariolées et répondant aux noms de Barbella et Flobella. Derrière leur comportement affable se cachent en réalité deux prédatrices qui envisagent de manger le cerveau de leurs otages terriens pour acquérir leurs connaissances et se protéger des bactéries de la Terre ! Ajoutez à ce cocktail des trucages très approximatifs (maquettes bon marché, décors en carton-pâte, rétroprojections approximatives sur des écrans sales et tachés), des dialogues confondant de naïveté (« Donnons à la Terre la paix ! ») et un humour très particulier (Gamera fait de la barre fixe pour impressionner son adversaire puis entame quelques pas de danse !) et vous obtenez un opus assez dispensable, qui s’achève comme il se doit par la chanson « Go Gamera ! ».

 

© Gilles Penso

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DEADPOOL (2016)

Ryan Reynolds et Tim Miller s'amusent à parodier les films de super-héros mais finissent par tomber dans les clichés qu'ils pastichent

DEADPOOL

2016 – USA

Réalisé par Tim Miller

Avec Ryan Reynolds, Morenna Baccarin, Ed Skrein, Stefan Kapicic, Brianna Hildebrand, T.J. Miller, Gina Carano

THEMA SUPER-HEROS I SAGA MARVEL

Généralement, le public décide si un film est culte ou non. C’est l’ordre naturel des choses, et parfois il faut laisser le temps apposer sa patine. A l’époque de leur conception, qui aurait bien pu prévoir que des œuvres aussi disparates qu’Orange Mécanique, The Rocky Horror Picture Show ou Phantom of the Paradise acquerraient un tel statut ? Mais dans le cas de Deadpool, c’est le studio a qui a décidé de choisir à la place des spectateurs. Humour décalé, clins d’œil incessants, références à la culture pop, usage abondant du sexe, de la violence et de la vulgarité… Tous les ingrédients semblent réunis pour que ce film de super-héros déjanté défraye la chronique, accompagné d’un doux parfum de scandale, et occupe une place particulière dans le cœur des fans du genre. Sauf que les choses ne fonctionnent pas comme ça : une œuvre culte ne se fabrique pas de toutes pièces, elle le devient naturellement.

Derrière chaque écart « subversif » du film, on sent le calcul des auteurs et des producteurs. A travers chaque gag graveleux, on imagine le cahier des charges qui se remplit. Deadpool déborde tant d’autosuffisance qu’il ne se contente pas d’essayer de faire rire, il ne cesse de prendre le spectateur à parti pour lui faire confirmer sa drôlerie. Au lieu de simplement « briser le quatrième mur » de la narration en s’adressant directement au public, Ryan Reynolds se sent obligé de dire : « Vous avez vu les gars ? Je brise le quatrième mur ! » Au lieu de nous surprendre en basculant soudain dans la violence gratuite, la voix off juge bon d’ajouter : « Vous pensiez voir un film de super-héros classique ? Et bien non, je viens d’embrocher un gars avec mes épées ! » Tout le film est à l’avenant, surlignant ses effets comiques pour s’assurer que chacun a bien entendu toutes les blagues. Il ne manque plus que le panneaux « rire » et les éclats de rire enregistrés !

Une subversion savamment calculée

D’autant que lorsqu’on le met à plat, le scénario de Deadpool est formaté comme celui de tous les films de super-héros dont il se moque allègrement : le protagoniste à la dérive, ancien membre des forces spéciales, qui tombe amoureux d’une jolie fille et accepte qu’on pratique sur lui une expérience scientifique pour le guérir de sa maladie incurable ; le méchant très très méchant qui se complaît dans sa vilénie ; le faire-valoir qui distribue les bons mots ; une poignée de scènes d’action spectaculaires à base de cascades de voitures, de fusillades et d’acrobaties en varispeed ; un climax explosif qui permet la destruction massive du repaire du vilain. C’est même probablement, de tous les films adaptant l’univers Marvel, celui qui se conforme le plus servilement au scénario codifié qu’il entend dynamiter. Pour mettre un peu d’eau dans notre vin, admettons que Deadpool sait nous dérider et qu’un grand nombre de traits d’humour font mouche (les allusions à Taken ou aux autres films de la série X-Men sont assez délectables). Regrettons simplement le manque de spontanéité de cette vaste entreprise qui, sous ses allures de « vilain petit canard », est un film de franchise aux composants savamment dosés. Dans un registre plus « sage » mais beaucoup plus sincère, on préfèrera largement le grain de folie des Gardiens de la Galaxie de James Gunn.

 

© Gilles Penso

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WAXWORK (1988)

Les tableaux macabres d'un musée de cire prennent vie et permettent un hommage généreux aux grandes figures du cinéma d'épouvante

WAXWORK

1988 – USA

Réalisé par Anthony Hickox

Avec Zach Galligan, Deborah Foreman, Michelle Johnson, Dana Ashbrook, Miles o’Keeffe, David Warner, Patrick Macnee

THEMA LOUPS-GAROUS I ZOMBIES I VAMPIRES I MOMIES I DRACULA

Ephémère coqueluche du cinéma fantastique des années 80 depuis sa prestation dans Gremlins, Zach Galligan tient la vedette de ce curieux Waxwork, écrit et réalisé par Anthony Hickox. Puisant son idée de base chez L’Homme au Masque de CireWaxwork est un film patchwork qui rend un hommage apparemment sincère aux grands mythes du cinéma d’épouvante. Hélas, ces bonnes intentions sont gâchées par un regrettable laxisme scénaristique et par une direction artistique franchement déficiente. Galligan interprète Mark Loftmore, un étudiant paresseux issu d’une famille aristocratique et richissime, qui se retrouve invité à minuit, en compagnie de trois de ses amis, pour inaugurer un musée de cire situé à deux pas du campus. A l’intérieur, des tableaux macabres mettent en scène les dix-huit êtres les plus maléfiques que la Terre ait jamais porté. Les personnages sont d’un saisissant réalisme (et pour cause, ils sont joués par de véritables comédiens comme dans le Masques de Cire de Michael Curtiz), mais il y a bien plus étrange : lorsqu’un des visiteurs franchit par mégarde le cordon de sécurité, il pénètre dans une dimension parallèle et se retrouve face à la créature du tableau. Waxwork prend dès lors les allures d’un film à sketches, chaque incursion dans l’un des tableaux fonctionnant comme un court-métrage quasi-autonome.

Tout commence avec la mésaventure de Tony (Dana Ashbrook), soudain propulsé dans une forêt étrange une nuit de pleine lune, et confronté à un loup-garou interprété par John Rhys-Davies. Seconde victime, la belle China (Michelle Johnson) participe à un repas de vampires ordonnancé par le comte Dracula en personne (Miles O’Keefe). Enquêtant sur la disparition des deux lycéens, un policier se trouve à son tour confronté au maléfice, en l’occurrence à une momie particulièrement virulente. Quant à notre héros Mark, il se retrouve dans un remake de La Nuit des Morts-Vivants, l’image virant carrément au noir et blanc, même si les zombies qui l’attaquent évoquent plus ceux du clip Thriller de Michael Jackson que les cadavres ambulants de George Romero. Dernière victime, Sarah (Deborah Foreman) tombe entre les griffes du Marquis de Sade (J. Kenneth Campbell). La cavalerie intervient finalement, dirigée par un Patrick McNee  jovial, et vient contrecarrer les plans maléfiques du directeur de ce musée vivant, interprété par le délicieusement sinistre David Warner.

Les effets spéciaux inventifs de Bob Keen

Tout s’achève donc par une bataille mettant en scène tous les monstres pré-cités en compagnie de quelques autres, notamment un monstre de Frankenstein, un Fantôme de l’Opéra, un homme invisible et un extra-terrestre. Incapable de créer une atmosphère d’épouvante gothique digne de ce nom, Hickox compense en sacrifiant au gore, ses créatures s’avérant bien plus sanglantes que leurs classiques modèles. Le loup-garou déchire en deux ses victimes humaines, les vampires rongent la jambe d’un infortuné humain jusqu’à l’os, la momie écrase sous son pied la tête d’un importun, le tout avec force gerbes de sang… Le film vaut donc principalement pour son indiscutable potentiel distractif et pour les effets spéciaux inventifs de Bob Keen, car côté scénario et mise en scène, le spectateur reste quelque peu sur sa faim.

 

© Gilles Penso

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