I, FRANKENSTEIN (2014)

Cette vague adaptation d'un comics lui-même vaguement inspiré du roman de Mary Shelley n'aura pas convaincu grand-monde

I, FRANKENSTEIN

2014 – USA / AUSTRALIE

Réalisé par Stuart Beattie

Avec Aaron Eckhart, Miranda Otto, Bill Nighy, Jai Courtney, Caitlin Stasey, Yvonne Strahovski

THEMA FRANKENSTEIN

Après Underworld 3 I, Frankenstein, adaptation du comic book de Kevin Grevioux (scénariste des Underworld), devait être le second long métrage du maquilleur Patrick Tatopulos en tant que réalisateur. Auteur d’effets spéciaux qui dépotent dans des films qui ne dépotent pas toujours autant (Stargate, Godzilla, Silent Hill, Je suis une Légende), le frenchie a malheureusement perdu le poste au profit de Stuart Beattie, réalisateur du pas si mal Demain, quand la guerre a commencé mais aussi scénariste sur la saga Pirates des Caraïbes. Un revirement probablement décisif pour ce qui s’apparente au final au premier gros nanar de 2014. Que reste-t-il véritablement du classique de Mary Shelley dans cette adaptation d’un comics déjà très librement inspiré du mythe du Prométhée moderne ? Rien, ou pas grand-chose si l’on compte une intro nous décrivant en 3 minutes chrono la fin tragique de ce chef d’œuvre de la littérature. Très rapidement donc, on retrouve la créature de Frankenstein confrontée à des démons et une secte de gargouilles se faisant la guerre dans un cadre gothique qui n’est pas sans rappeler Underworld. Sauf qu’Adam (rebaptisé ainsi par les chimères) se pose des questions sur sa nature, questions auxquelles des scientifiques, qui tentent de réactiver des corps sans vie sous les ordres d’un démon supérieur, pourraient bien apporter des réponses.

Rarement aura-t-on vu une telle injure au roman original. Revisiter Frankenstein, pourquoi pas : Terence Fisher en a fait des déclinaisons parfois remarquables (Le Retour de Frankenstein), Mel Brooks a signé une parodie succulente en 1974 (Frankenstein Junior), la créature a rencontré d’autres monstres sacrés au fil des années (Dracula, le loup-garou,…) et Tim Burton a même déliré sur une version canine (Frankenweenie). Mais le faire avec si peu d’égard, de talent et d’idée, c’est juste insupportable ! Prévisible de bout en bout, le tensiomètre à zéro, la mise en scène sur-découpée, une créature qui s’apparente à un bien fade anti-héros de plus dont les caractéristiques et l’ambiguïté ne sont jamais exploitées…

L'impardonnable profanation d'un classique

I, Frankenstein est réellement sans intérêt. Et ce n’est pas la présence d’Aaron Eckhart, dont la carrière part en vrille dans des DTV et autres purges du genre, ni celle de Bill Nighy en mode « je ne me casse pas plus le cul que dans Underworld, de toute façon c’est moins bien », qui changent la donne : aux côtés d’autres acteurs mono-expressifs façonnés pour jouer dans ce genre de production (Jai Courtney et Kevin Grevioux himself), ils ne dénotent pas, bien au contraire. Quelle pitié ! Et vous ai-je signalé que même visuellement c’était immonde, avec bouillie d’effets numériques indigeste et maquillages copiés sur ceux de la série Buffy contre les vampires au menu ? En dessous de  Van Helsing  et d’Underworld, on placera désormais I, Frankenstein, profanateur d’un classique de la littérature pourtant déjà maintes fois adapté et retourné dans tous les sens.

 

© Samuel Tubez

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LES GUERRIERS DU BRONX (1982)

L'une des plus populaires imitations italiennes de Mad Max 2 et New York 1997, avec en prime un soupçon de Guerriers de la nuit…

1990 THE BRONX WARRIORS

1982 – ITALIE

Réalisé par Enzo G. Castellari

Avec Vic Morrow, Christopher Connelly, Mark Gregory, Fred Williamson, Stefania Girolami, George Eastman

THEMA FUTUR

Si Les Guerriers du Bronx est l’une des plus fameuses imitations italiennes de New York 1997 et Mad Max 2, c’est moins pour les qualités intrinsèques du film que pour les éléments insolites qui émaillent son scénario. Car Enzo G. Castellari y recycle tout et n’importe quoi avec une étonnante désinvolture. Nous sommes en 1990, soit neuf ans dans le futur pour les spectateurs de 1982, et le quartier du Bronx a été décrété zone dangereuse. Aucun new-yorkais n’ose s’y aventurer, la police a cessé depuis longtemps d’y faire régner la loi, et d’improbables bandes rivales s’y font continuellement la guerre : les Riders, des loubards à moto maquillés comme dans Starmania et menés par le bien nommé Trash (un Mark Gregory aux allures de Rambo mou désespérément dénué de charisme) ; les Zombies, des bandits de grand chemin en tenue de joueurs de hockey dont le boss porte le joli sobriquet de Golem (George Eastman, acteur fétiche de Joe d’Amato) ; les Tigers, des mafieux noirs coiffés de borsalinos et circulant en voitures des années 30, chapeautés par le tout-puissant Ogre (Fred Williamson, vieux routier du cinéma blaxploitation des années 70) ; les Iron Men, des danseurs de claquettes maquillés comme le mime Marceau ; ou encore les Scavengers, des guerriers hirsutes et troglodytes armés de gourdins.

Au milieu de ces guerriers pittoresques et pas crédibles pour un sou débarque un jour Ann, une jeune fille de la haute société new-yorkaise, héritière d’un conglomérat financier spécialisé dans l’armement, la Manhattan Corporation. Fuyant un destin qu’elle n’a pas choisi, la belle échappe de peu aux griffes des Zombies et trouve refuge auprès de Trash, qui tombe raide amoureux d’elle, ce qui n’est pas du goût de tous les membres de son équipée sauvage. Le ver est dès lors dans le fruit, d’autant que mercenaire Hammer (cette bonne vieille trogne de Vic Morrow), engagé par la Manhattan Corporation, déploie dès lors tous les moyens à sa disposition pour récupérer Ann et liguer les bandes rivales les unes contre les autres.

« Le Bronx est une terre particulière… »

On l’aura compris, le film vaut moins pour son scénario, qui lorgne aussi du côté des Guerriers de la nuit de Walter Hill, que pour sa collection de séquences extravagantes et colorées. Car en la matière, Enzo Castellari n’hésite pas à en faire des tonnes, accumulant les passages exagérément emphatiques (les funérailles du couple assassiné) et les moments gentiment surréalistes (l’homme qui joue de la batterie sous le pont de Brooklyn pendant un rendez-vous entre deux gangs). Les Guerriers du Bronx se distingue aussi par ses répliques absurdes, notamment celles de l’inexpressif Trash, du genre : « Le Bronx est une terre particulière, où les pires choses arrivent parce qu’elles doivent arriver. » Les nombreux combats qui scandent le film manquent singulièrement de dynamisme, à l’exception de l’assaut final des chevaliers armés de lance-flammes, qui s’avère plutôt impressionnant. Malgré tout, cette œuvrette force la sympathie, ne serait-ce que pour son grain de folie et son manque de prétention, et connut suffisamment de succès pour engendrer une séquelle dès l’année suivante.

 

© Gilles Penso

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L’AUTRE (1972)

L'enfance monstrueuse et les troubles liés à la gémellité sont au cœur de ce film d'épouvante glaçant

THE OTHER

1972 – USA

Réalisé par Robert Mulligan

Avec Chris Udvarnoky, Martin Udvarnoky, Uta Hagen, Diana Muldaur, Lou Frizzel, Norma Connolly, Victor French

THEMA DOUBLES I ENFANTS

Deux thématiques fortes du cinéma d’épouvante cohabitent au sein de L’Autre : l’enfance monstrueuse et les troubles psychiques engendrés par une gémellité trop fusionnelle. Le film est dur, éprouvant, parfois même insoutenable, et l’un des traits de génie de Robert Mulligan aura été de contredire cette âpreté en optant pour une mise en forme douce, élégante et apaisante. Ainsi le réalisateur de Du Silence et des ombres et Un été 42 fait-il appel aux violons lyriques de Jerry Goldmsith (qui avait déjà composé une cinquantaine de bandes originales à l’époque, dont La Canonnière du Yang-Tsé, La Planète des singes et Patton) et aux chaudes lumières estivales du directeur de la photographie Robert Surtees (Quo VadisBen-Hur, Le Lauréat). C’est donc nimbé de délicatesse que s’amorce le récit de L’Autre, dans un petit village du Connecticut du milieu des années trente. Niles et Holland Perry sont deux frères jumeaux unis par une relation quelque peu exclusive. Ils partagent leurs jeux, leurs secrets, leur intimité, mais leurs caractères sont radicalement opposés. A l’ingénuité candide et rêveuse de Niles s’oppose la sournoiserie agressive et dissimulatrice d’Holland, son aîné de vingt minutes. Le premier vit visiblement sous la domination du second, et l’inconfort généré par cette situation est accentué par les partis pris de Mulligan qui ne cadre jamais ensemble les deux personnages (incarnés avec une remarquable sensibilité par Chris et Martin Udvarnorky). 

Un peu à l’écart de son entourage, Niles joue parfois au « grand jeu » que lui a enseigné sa grand-mère Ada (Uta Hagen), et qui consiste à projeter son esprit dans celui d’un objet ou d’un animal. Bientôt, les drames à répétition frappent la famille Perry et son voisinage. Holland serait-il responsable de ces « accidents » parfois mortels ? Niles serait-il son complice involontaire ? Comment expliquer l’état dépressif dans lequel végète la mère des deux jumeaux (Diana Muldaur, arborant tout au long du film un beau visage mélacolique), où l’étrange culpabilité qui semble embuer le regard de la vénérable Ada ? « Il est méchant, c’est plus fort que lui ! », s’écrie Niles en parlant de son frère. Mais est-il totalement innocent lui-même ? Un coup de théâtre majeur réoriente subitement le récit au bout d’une heure de métrage, mais ce « twist » n’a pas pour objectif prioritaire de surprendre le spectateur.

Nihiliste et inéluctable

De nombreux indices disséminés tout au long du film permettent en effet de le prévoir assez précisément, d’autant que le roman de Thomas Tyron qui sert de support au scénario (adapté par l’écrivain lui-même) ne laissait guère d’ambigüité sur la nature de cette révélation. Ainsi mis à jour, le ressort dramatique sert surtout de révélateur pour tous les acteurs du drame. Et dès lors, les rebondissements ultérieurs frappent par leur dureté. Tour à tour glacé d’épouvante par l’ultime exaction des jumeaux, stupéfait par un climax terriblement nihiliste et médusé par une chute inéluctable, le spectateur est mis à rude épreuve par la dernière demi-heure de L’Autre, et gardera longtemps en mémoire les visages angéliques de Niles et Holland, prisonniers d’une situation les ayant peu à peu déconnectés de la réalité et de tout sens moral.

 

© Gilles Penso

2019, APRES LA CHUTE DE NEW YORK (1983)

Dans un futur post-apocalyptique où la stérilité s'est généralisée, un sous-Mad Max au regard d'acier part en quête de la dernière femme fertile…

2019 DOPO LA CADUTA DI NEW YORK

ANNEE – PAYS

Réalisé par Sergio Martino

Avec George Eastman, Valentine Monnier, Anna Kanakis, Michael Sopriw

THEMA FUTUR

Voilà le mixage parfait entre New York 1997 et Mad Max 2, le mètre étalon de toutes les copies italiennes des deux classiques de John Carpenter et George Miller. Dans le champ de ruines qu’est devenue la ville de New York (reconstituée par l’entremise d’une belle maquette) erre un homme solitaire au long manteau qui joue de la trompette. Le ton est donné. Vingt ans après la guerre atomique, la terre est contaminée et les survivants y errent pathétiquement. Un régime monarchique s’est mis en place (avec des soldats capés de noir, masqués comme des escrimeurs et montés sur de fiers chevaux blancs) et la stérilité généralisée est devenue la principale préoccupation du gouvernement, aucune naissance n’ayant eu lieu depuis des décennies. Des espèces de Guerriers de la nuit, mercenaires à la solde des vilains, capturent donc des rescapés aux visages plus ou moins ravagés par les radiations pour qu’on pratique sur eux des expériences génétiques. D’où quelques séquences d’action façon Les Guerriers du Bronx avec des assauts au fusil, à l’arbalète et au lance-flammes.

Pendant ce temps, dans le désert du Nevada, on organise des courses de voitures customisées, le champion de la discipline étant Parsifal, un sous-Mad Max au regard d’acier. Kidnappé, Parsifal est emmené jusqu’en Alaska où le président des Etats-Unis, présumé mort, a organisé la confédération panaméricaine. « L’ordinateur génétique a révélé qu’une femme non stérile vivait quelque part à New York » révèle-t-il à notre héros. « Nous savons qu’elle est jeune, donc très féconde. Elle peut avoir environ 500 ovulations ». Parsifal a pour mission de la retrouver avant les vils Euraks, puis de la faire quitter la Terre avec sa descendance vers la constellation Alpha du Centaure, pour redonner une chance à l’humanité. Parsifal sera accompagné par deux guerriers, des durs à cuire, l’un avec un crochet à la place de la main, l’autre avec un bandeau sur l’œil.

« Elle peut avoir environ 500 ovulations ! »

La suite du film enchaîne dès lors les combats moyennement palpitants contre des gangs énervés, des clochards décrépits ou une tribu de mangeurs de rats. Pour égayer un peu le métrage, Sergio Martino ne recule devant aucun effet gore en gros plans (hache dans un crâne, yeux crevés, tête qui explose, eviscération, décapitations), mais c’est surtout la prestation de George Eastman qui vaut le détour. Dans le rôle de Big Ape, il incarne un colosse au visage simiesque et velu, engoncé dans une tenue échappée d’un épisode de Sandokan. Ce barbare vigoureux veut à tout prix mettre la main sur cette hypothétique femme fertile, car il rêve de descendance (quand on voit sa figure hideuse, on aurait pourtant tendance à vouloir l’en dissuader !). Après une poursuite en voiture fort bien troussée, au beau milieu d’un tunnel truffé de pièges, nos héros découvrent enfin l’objet de leur convoitise qui, inconsciente dans son cercueil de verre, évoque irrésistiblement Blanche Neige et la Belle au Bois Dormant. Le final de 2019 prend une tournure franchement captivante, pas très éloigné du dénouement du Choc des Mondes, et le dernier plan (l’éveil en gros plan de la belle endormie) a même quelque chose d’étrangement touchant.

 

© Gilles Penso

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KRULL (1983)

Une fusion entre le conte de fées et le space opera gorgée d'effets spéciaux pleins de charme et magnifiée par une splendide partition de James Horner

KRULL

1983 – GB

Réalisé par Peter Yates

Avec Ken Marshall, Lysette Anthony, Freddie Jones, Francesca Annis, Alun Armstrong, Bernard Bresslaw, David Battley

THEMA CONTES I HEROIC FANTASY I SPACE OPERA

A l’aube des années 80, le grand public ne jure plus que par La Guerre des étoiles et L’Empire contre-attaque qui sont devenus les nouvelles références en matière d’aventure fantastique. Pour profiter de cette vogue incontournable, le scénariste Stanford Sherman, vétéran de la série télévisée Batman, imagine un conte de fée médiéval tout à fait classique transposé dans l’espace. Ce mélange pour le moins surprenant donne naissance à Krull, dont la réalisation est confiée à Peter Yates, metteur en scène du mythique Bullit. Voici les grandes lignes du scénario de Sherman : sur la planète Krull règne une bête maléfique dont nul n’a jamais vu les traits, et qui se dissimule au cœur d’un gigantesque bloc de granit, la Forteresse Noire (aucun lien avec celle de Michael Mann). Pour lutter contre la Bête, les deux royaumes longtemps ennemis de Krull décident d’unir leurs forces en mariant le prince Colwyn (Ken Marshall) à la jeune princesse Lyssa (Lysette Anthony). Mais la cérémonie est brutalement interrompue par les sbires de la Bête, qui s’emparent de la jeune fille après avoir décimé ses gardes et la plupart des invités. Un vieux magicien à la Obi-Wan Kenobi, Ynyr (Freddie Jones), sauve Colwyn, grièvement blessé, et l’encourage à affronter la Bête pour lui arracher Lyssa.

Avec son budget de vingt millions de dollars, cette fantaisie britannique s’octroie les talents de nombreux artistes anglo-américains, notamment James Horner (futur compositeur de Titanic et Le Masque de Zorro) qui écrit à l’occasion l’une de ses partitions les plus flamboyantes, et Derek Meddings (maître d’œuvre des trucages de nombreux James Bond) qui réalise là de très beaux effets visuels reposant en grande partie sur les maquettes. Plusieurs créatures évoquent les films de Ray Harryhausen, notamment les chevaux ailés (réminiscence du Pégase du Choc des Titans) et le cyclope (l’un des monstres clefs du 7ème Voyage de Sinbad), mais les effets qui leur donnent vie sont bien moins performants : de vrais chevaux incrustés pour les uns, un comédien maquillé par Nick Maley pour l’autre.

L'araignée de cristal

L’animation image par image intervient tout de même dans l’une des séquences les plus impressionnantes de Krull, celle où Ynyr rend visite à la Veuve de la Toile (Francesca Annis). Celle-ci vit au milieu d’une gigantesque toile d’araignée habitée par un splendide et immense arachnide en cristal. Le travail d’animation, œuvre de Steve Archer, est absolument extraordinaire, l’araignée aux pattes et à l’abdomen translucide se mouvant avec beaucoup de réalisme. Le comportement animal est tellement crédible qu’on jurerait par moments assister aux évolutions d’une araignée réelle. « La figurine mesurait environ 90 centimètres », raconte Archer. « Elle était fabriquée en plexiglas avec des câbles métalliques à chaque articulation » (1). La scène semble s’inspirer de l’un des spectaculaires affrontements qui émaillaient le fameux Voleur de Bagdad de 1940. Malgré toutes les prouesses artistiques et techniques qu’il combine, Krull demeure un semi-échec, notamment à cause d’une intrigue trop peu surprenante, d’une mise en scène mollassonne et de comédiens pas vraiment convaincants.

 

(1) Propos recueillis par votre serviteur en février 1999.


© Gilles Penso

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SHARKNADO (2013)

Une gigantesque tornade arrache des milliers de requins à l'océan et les projette parmi les habitants de Los Angeles ! Un concept délirant et le début d'une longue franchise…

SHARKNADO

2013 – USA

Réalisé par Anthony C. Ferrante

Avec Ian Ziering, Tara Reid, John Heard, Cassie Scerbo, Jaason Simmons, Alex Arleo, Neil H. Berkow, Heather Jocelyn Blair

THEMA MONSTRES MARINS I CATASTROPHES I SAGA SHARKNADO

Quand ils ne copient pas les blockbusters du moment avec des budgets anémiques (La Guerre des Mondes 2, Da Vinci Treasure, Transmorphers), les petits malins de la compagnie de production Asylum mettent en scène des monstres marins, et tout particulièrement des requins, devenus leurs véritables mascottes. Après les inénarrables Mega Shark vs. Giant OctopusMega Shark vs. Crocosaurus ou le bien nommé L’Attaque du requin à 2 têtes, les bougres contre-attaquent avec l’impensable Sharknado, qu’on pourrait définir comme un mixage entre Les Dents de la mer et Twister. Le concept du film est résumé dans le premier plan du film : des milliers de requins en plein océan Pacifique fuient une monstrueuse tornade qui les emporte dans son vortex et se dirige dangereusement vers la ville la plus proche, autrement dit Los Angeles. Des nuées de squales vivants et affamés se mettent bientôt à pleuvoir sur la cité des anges, dévorant tout ce qui passe à leur portée, tandis que trois tornades titanesques ravagent la ville. Le titre du film et le slogan qui apparaît sur sa jaquette originale (« Enough said ! », autrement dit « Pas besoin d’en dire plus ! ») pourraient laisser imaginer que nous avons affaire à une parodie, ou tout du moins une œuvrette potache versant volontiers dans le second degré. Or si Sharknado n’est pas dénué d’humour, ce n’est pas son moteur narratif principal.

Le réalisateur Anthony C. Ferrante assume totalement le concept fou de son long-métrage et dirige ses comédiens avec autant de conviction que possible, truffant le film de morceaux de bravoure spectaculaires comme s’il s’agissait d’un blockbuster à gros budget. Le scénario ne se refuse donc rien : des vagues énormes qui submergent les bâtiments et les infestent de poissons mangeurs d’homme, les lettres du sigle Hollywood qui se détachent et s’envolent dans un ciel noir de nuages, la grande roue de la jetée de Santa Monica qui se détache et s’écrase contre un immeuble, le sauvetage vertigineux d’un bus scolaire… Certes, les effets visuels ne font pas toujours dans la finesse, mais si l’on tient compte des moyens étriqués du film (18 jours de tournage et un budget d’un million de dollars), on ne peut que saluer  ses folles ambitions, Sharknado s’avérant beaucoup plus soigné que la majorité des autres productions Asylum.

Des squales comme s'il en pleuvait…

La vision surréaliste de centaines de requins nageant dans les rues inondées de Los Angeles, le combat mano a mano entre nos héros et un énorme squale dans une maison immergée (reposant sur l’emploi d’une créature animatronique conçue par l’atelier Synapse FX), les effets gore décomplexés qui ponctuent le métrage et son climax totalement démentiel s’avèrent franchement réjouissants pour les amateurs goulus de « creatures features » que nous sommes. Alors tant pis si certains comédiens jouent comme des savates ou si le rebondissement final plonge la tête la première dans le ridicule. Accompagné d’une campagne de promotion virale très efficace, Sharknado provoqua un véritable raz de marée lors de sa première diffusion en juillet 2013 sur la chaine américaine SyFy, au point qu’Asylum initia aussitôt une séquelle située cette fois ci en plein New York.

 

© Gilles Penso

L’HOMME ALLIGATOR (1959)

Cobaye d'une expérience médicale révolutionnaire, un homme se transforme en alligator bipède !

THE ALLIGATOR PEOPLE

1959 – USA

Réalisé par Roy del Ruth

Avec Richard Crane, Beverly Garland, Bruce Bennett, Lon Chaney Jr, George Mac Ready, Frieda Inescort

THEMA MEDECINE EN FOLIE I REPTILES ET VOLATILES

Si le titre Alligator People évoque celui de Cat People (La Féline), les deux films n’ont en commun que la transformation de leur protagoniste en animal, le classique de Jacques Tourneur faisant appel à une malédiction ancestrale alors que celui-ci obéit au schéma plus classique des expérimentations d’un apprenti-sorcier. En ce sens, L’Homme Alligator se rapprocherait davantage de La Mouche Noire, sorti l’année précédente sur les écrans, avec lequel il présente en outre un autre point commun : la mésaventure du héros nous est narrée du point de vue de son épouse. Ici, il s’agit de la belle Joyce Webster interprétée par Beverly Garland. Alors qu’elle s’apprête à partir en voyage de noces avec son époux Paul (Richard Crane), ce dernier disparaît sans laisser de trace. L’enquête longue et difficile qu’entame dès lors la malheureuse la conduit jusqu’en Louisiane, où elle fait connaissance avec le docteur Mark Sinclair (George Mac Ready). Féru de médecine expérimentale, cet éminent scientifique a trouvé un moyen miraculeux pour guérir les fractures et les défigurations apparemment irréversibles : un sérum contenant des glandes d’alligator. Le problème, c’est qu’au bout d’un an, les patients connaissent de fâcheux effets secondaires. Paul Webster est l’un des cobayes volontaires de Sinclair, car il fut jadis victime d’un terrible crash d’avion, et lorsque sa jeune épouse le revoit enfin, il est quasiment méconnaissable, son visage et ses mains étant désormais couverts d’écailles reptiliennes.

Fort efficace, ce maquillage est l’œuvre de Ben Nye (La Mouche Noire justement) et du jeune Dick Smith (future superstar des effets cosmétiques grâce à Little Big Man, au Parrain et à L’Exorciste). Acceptant de tenter l’essai de la dernière chance, Paul se soumet à des rayons savamment dosés par Sinclair. Mais l’intervention impromptue d’un autochtone passablement éméché (incarné par Lon Chaney Jr, le visage patibulaire et un crochet à la place de la main), ruine l’expérience. Et voilà notre pauvre cobaye affublé d’un torse écailleux et d’une tête d’alligator ! L’effet s’avère spectaculaire, même si le costume en latex plisse largement aux articulations… Il n’est pas improbable que Stan Lee se soit laissé influencer par ce script étonnant pour créer le personnage du Lézard, l’un des plus fameux ennemis de Spider-Man.

L'ancêtre du Lézard de Spider-Man ?

Serti dans un magnifique Cinémascope noir et blanc, L’Homme Alligator s’est taillé une petite réputation de classique de la science-fiction et de l’épouvante. Reposant beaucoup sur la mise en scène soignée de Roy del Ruth (Le Faucon Maltais, Ziegfeld Follies) et sur l’interprétation solide de Beverly Garland, le film collectionne les séquences mémorables et surprenantes, comme lorsque Joyce traverse au beau milieu de la nuit un marais infesté d’alligator, en quête désespérée de son époux. Dommage que les scénaristes Orville Hampton et Charles O’Neal se soient sentis obligés de faire raconter l’histoire à l’héroïne sous hypnose, par le biais d’un inutile flash-back à tiroir empruntant quasiment le même procédé narratif que The Undead de Roger Corman.

 

© Gilles Penso

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TEENAGE FRANKENSTEIN (1957)

Le monstre de Frankenstein le plus laid de l'histoire du cinéma s'anime dans une histoire absurde et rocambolesque

I WAS A TEENAGE FRANKENSTEIN

1957 – USA

Réalisé par Herbert L. Strock

Avec Whit Bissell, Gary Conway, Phyllis Coates, Robert Burton, George Lynn, John Cliff

THEMA FRANKENSTEIN

Dans la foulée de I Was a Teenage Werewolf et Blood of Dracula, l’astucieux producteur Herman Cohen poursuivit sa série de petits films d’horreurs formatés au goût des adolescents des fifties avec I Was a Teenage Frankenstein. Ici, un descendant britannique du docteur Frankenstein (Whit Bissel) choque ses confrères londoniens en leur affirmant qu’il est capable de réutiliser des morceaux de cadavres pour donner naissance à un être humain bien vivant. Le hasard faisant souvent bien les choses au royaume des scénarios déficients, un accident de voiture survient juste sous les fenêtres du savant, à deux pas de son laboratoire. Pour prouver ses théories, Frankenstein récupère ces cadavres servis sur un plateau et les assemble, obtenant un homme au buste de bodybuilder mais au visage grotesque. Le maquillage spécial, œuvre de Philip Scheer, se limite en effet à une espèce de masque en latex grimaçant digne d’un magasin de farces et attrapes. Et pour éviter de raccorder le cou du masque avec le corps du comédien, Scheer affuble le monstre d’une minerve bien pratique. 

I Was a Teenage Frankenstein part donc avec de sérieux handicaps, question crédibilité, mais se rachète par un humour au second degré en phase avec les préoccupations des jeunes spectateurs de l’époque, victimes d’un fossé générationnel les éloignant du monde adulte et de ses conventions. D’où certains dialogues joyeusement absurdes, comme lorsque Frankenstein demande à sa créature : « peux-tu parler ? ». « Oui », rétorque stoïquement le monstre. « Oui Monsieur », corrige alors le vénérable savant, avant d’ajouter « les jeunes n’ont plus de respect pour leurs aînés ! » Un peu lassée d’être soumise à ces ridicules leçons de bienséance, la créature s’échappe du laboratoire et sème la panique aux alentours, avant de revenir au bercail et de lâcher à son créateur en guise d’excuse : « je voulais voir du monde ». Lorsque sa fiancée Margaret (Phyllis Coates) commence à montrer des signes agaçants de curiosité, le bon docteur perd de son flegme et ordonne à sa créature de l’assassiner, avant de jeter le cadavre en pâture à un crocodile qui attend tranquillement dans une cuve camouflée sous un pan de mur du laboratoire.

« Les jeunes n'ont plus de respect pour leurs aînés ! »

Frankenstein et son monstre errent ensuite bras dessus bras dessous dans les rues nocturnes de la ville, afin que la créature puisse choisir elle-même sa nouvelle tête ! Le malheureux élu est le bellâtre Bob (Gary Conway), qui se retrouve décapité avant d’avoir eu le temps de dire ouf. L’opération est un succès, mais le monstre se souvient soudain de ses classiques et se révolte finalement contre son créateur, le jetant dans la cuve du crocodile avant de s’électrocuter lui-même. Et soudain, sans préavis, l’image du film, jusqu’alors en noir et blanc, passe en couleurs pour la dernière minute de métrage. Le plus étrange demeure probablement le fait que cet absurde I Was a Teenage Frankenstein sortit sur les écrans la même année que le magnifique Frankenstein s’est échappé de Terence Fisher, preuve de l’incroyable versatilité du cinéma fantastique, capable de proposer tout et son contraire à partir d’un matériau littéraire pourtant identique.

 

© Gilles Penso

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LA MARQUE DU DIABLE (1970)

Chasse aux sorcières, fanatisme religieux et tortures sanglantes sont au programme de ce film sans concession

HEXEN BIS AUFS BLUT GEQUÄLT / MARK OF THE DEVIL

1970 – ALLEMAGNE

Réalisé par Michael Armstrong

Avec Udo Kier, Herbert Lom, Reggie Nalder, OliveraVuco, Herbert Fux, Johannes Buzalski, Michael Maien

THEMA SORCELLERIE ET MAGIE

A la fin des années 60, les mœurs se libérèrent suffisamment pour que le champ des possibles du cinéma d’horreur s’élargisse et pour que de nouveaux thèmes s’y taillent une place de choix. Après les vampires et les monstres classiques magnifiés par la Hammer, les atrocités bien réelles de l’inquisition s’invitèrent donc sur les écrans, comme en témoigne l’impact du Grand inquisiteur de Michael Reeves. Désireux de surfer sur cette vague, le producteur Adrian Hoven concocta La Marque du Diable et Reeves fut même envisagé pour le réaliser, mais il décéda avant de pouvoir se lancer dans ce projet. Michael Armstrong (qui fut l’assistant de Reeves sur Le Grand inquisiteur) lui succéda donc et développa un scénario particulièrement audacieux. Dans un petit village européen, le sinistre évêque Albino (Reggie Nalder, dont le visage de rapace glace le sang), auto-proclamé chasseur de sorcières, torture et brûle à tout va, établissant sans scrupule de faux actes d’accusation pour mettre sur le bûcher les femmes qui refusent ses avances.

Lorsque le jeune juge Christian von Meruh (Udo Kier) débarque avec ses grands yeux clairs et son visage d’ange, un semblant de paix semble revenir sur les lieux, car cet homme d’église entend bien ramener un peu de justice et de morale en attendant l’arrivée de son maître, le vénérable Lord Cumberland (Herbert Lom, débordant de charisme). « Je vis pour servir Dieu et pour chasser le mal de ce monde », affirme-t-il d’ailleurs avec ferveur. Mais la tentation de la chair a raison de ses belles aspirations, et Christian succombe vite aux charmes de Vanessa Benedikt (Olivera Vuco), la plantureuse serveuse de l’auberge locale. Lorsque Cumberland s’installe dans le village, sa politique semble ferme mais juste. Moins charitable que Christian mais moins fanatique qu’Albino, il s’efforce de ne pas condamner ses prochains à la légère. Jusqu’au jour où quelqu’un remet en cause sa vigueur sexuelle et le fait sortir de ses gongs. Le juge durcit soudainement ses positions, accuse tout son entourage de sorcellerie et se laisse peu à peu aller aux tentations les plus viles…

Des sacs à vomi distribués dans les salles de cinéma !

La Marque du Diable est surtout connu pour ses scènes de tortures répétées et éprouvantes, dont le point d’orgue est la fameuse langue arrachée qui orne la plupart des posters du film. La campagne promotionnelle de cette production germanique abonda généreusement dans ce sens, jusqu’à la distribution de sacs à vomi dans les salles de cinéma ! Mais on ne peut réduire La Marque du Diable à ces gimmicks commerciaux. Le film est avant tout un violent pamphlet contre l’abus de pouvoir, dressant un portrait détestable du mâle dominant (lequel violente le sexe opposé pour tenter d’affirmer sa virilité défaillante) et du fanatisme religieux (l’église y est décrite comme spoliatrice et perfide). Débordant d’idées visuelles, Michael Armstrong fut jugé trop lent pour pouvoir respecter les délais imposés par la production. C’est donc Adrian Hoven qui termina le film à sa place en s’efforçant de respecter sa vision première et de conserver la terrible noirceur de cette œuvre troublante et vénéneuse.

 

© Gilles Penso

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QUEEN KONG (1976)

Égalité des sexes oblige, voici la version féminine de King Kong, dans une parodie délirante qui faillit faire de l'ombre à Dino de Laurentiis…

QUEEN KONG

1976 – GB

Réalisé par Frank Agrama

Avec Robin Askwith, Rula Lenska, Valerie Leon, Roger Hammond, John Clive, Carol Drinkwater, Brian Godfrey, Anthony Morton

THEMA SINGES I DINOSAURES

Lorsqu’il se lança joyeusement dans une parodie de King Kong, le réalisateur d’origine égyptienne Frank Agrama se heurta à un obstacle de taille : le colossal remake produit par Dino de Laurentiis. Le producteur italien ayant misé des sommes faramineuses sur son blockbuster, il était pour lui hors de question qu’un pastiche à petit budget lui fasse de l’ombre. Prêt à en découdre à grands coups de procès et d’avocats, il eut raison d’Agrama. Queen Kong ne sortit donc pas sur les écrans et demeura à ce point confidentiel que beaucoup doutèrent de son existence. C’est d’autant plus dommage que nous avons affaire là à un film très réjouissant, qui compense ses maladresses et ses problèmes de rythme par une sincérité manifeste. Le principe même de Queen Kong consiste à reprendre fidèlement la trame du King Kong de 1933 en la transposant dans les années 70 et surtout en inversant le sexe de tous les personnages. Le cinéaste Carl Denham a donc été remplacé par la réalisatrice Luce Habit (Rula Lenska), qui se met cette fois-ci en quête d’un acteur blond pour son prochain film. Elle jette son dévolu sur Ray Fay (Robin Askwith), un grand benêt surpris en train de voler un poster de King Kong sur la place d’un marché public.

Les voilà donc embarqués à bord du navire « Liberated Lady », avec un équipage exclusivement féminin (qui pousse une chansonnette très inspirée des « musicals » des années 50), en direction de l’île de Mazanga, au cœur de l’Afrique. Là, ils tombent sur une cérémonie indigène vouée à la déesse Queen Kong. L’autel sacrificiel a ici été remplacé par une chaise et une table géantes, où trône un gros gâteau fort appétissant. Ray Fay finit inévitablement dans la main de la titanesque guenon (un acteur costumé avec une coupe de cheveux façon choucroute et une volumineuse poitrine !). Tandis que les filles partent à la rescousse de Ray, croisant au passage des fleurs géantes carnivores qui pincent les fesses, Queen Kong affronte un tyrannosaure en caoutchouc (Ray le compare à Jimmy Carter à cause de ses dents) qu’elle vainc en lui assénant un coup de pied dans les parties, puis un ptérodactyle aux allures de Rodan.

L'émancipation de la guenon !

Les trucages à base de costumes évasifs, d’incrustations, de maquettes et de caches, ne sont pas beaucoup moins convaincants que ceux du King Kong de De Laurentiis, et les dialogues de Ray Fay valent bien ceux de Jessica Lange. Ramenée à Londres, la guenon géante est exhibée au cours d’un spectacle qui évoque bien plus Woodstock que Broadway, seventies obligent. Mine de rien, Queen Kong annonce quelque peu les délires des ZAZ avec quelques gags qu’on croirait issus de Y’a-t-il un Pilote dans l’Avion ? ou Top Secret !, notamment la pub pour Konga Kola, la scène de panique dans le village où chacun s’enfuit avec un objet absurde (arrêt de bus, téléphone, lunette de WC) ou encore la parodie d’Airport avec une none chantante et un curé nerveux. Au détour de son intrigue absurde, le film pastiche aussi les grands succès du moment (L’ExorcisteLes Dents de la mer) jusqu’à un final apocalyptique au sommet de Big Ben où Ray clame l’innocence de Queen Kong, gigantesque symbole à ses yeux de l’émancipation de la femme !

 

© Gilles Penso

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