L’INCROYABLE HULK (2008)

Cinq ans à peine après la version de Ang Lee, Louis Leterrier réinvente le Titan Vert de Stan Lee pour l'intégrer dans le Marvel Cinematic Universe

THE INCREDIBLE HULK

2008 – USA

Réalisé par Louis Leterrier

Avec Edward Norton, Liv Tyler, Tim Roth, William Hurt, Tim Blake Nelson, Ty Burrell, Lou Ferrigno

THEMA SUPER-HEROS I SAGA HULK I AVENGERS I MARVEL

Le Hulk d’Ang Lee n’ayant pas convaincu grand monde, les dirigeants du studio Marvel décidèrent de tout effacer et de reprendre les choses à zéro avec un nouveau réalisateur, un nouveau casting et surtout une nouvelle approche du personnage. Spécialiste du cinéma d’action estampillé Europacorp (Le Transporteur, Danny the Dog), Louis Leterrier fut chargé de redorer le blason du géant vert. Dès le générique de début, on comprend que L’Incroyable Hulk ne nous racontera pas les origines du personnage, expédiées en quelques plans elliptiques, mais s’attachera directement aux tourments du docteur Bruce Banner (Edward Norton), fuyant les autorités pour trouver l’antidote au mal qui le transforme en monstre chaque fois qu’un accès de colère le gagne. Réfugié dans une favela brésilienne, il est bientôt retrouvé par l’opiniâtre général Ross (William Hurt) qui met tout en œuvre pour le capturer. Or deux facteurs humains vont compliquer les choses : Betty Ross (Liv Tyler), la fille du général, toujours amoureuse de Bruce et prête à tout pour l’aider ; et Emil Blansky (Tim Roth), un soldat avide de pouvoir qui s’injecte le sang de Banner pour se transformer en un monstre hideux répondant au doux nom d’Abomination…

Curieusement, cet Incroyable Hulk puise moins son inspiration dans le comic book original que dans la populaire série télévisée des années 70, dont on retrouve ici de nombreux échos en forme de clins d’œil : l’expérience au cours de laquelle Banner est exposé aux rayons Gamma, la dilatation de ses pupilles avant chaque transformation, le thème musical qui accompagne ses errances de fugitif, et même le poster qui reproduit celui du téléfilm diffusé en 1977. Quant à Lou Ferrigno, il fait une petite apparition dans le rôle d’un vigile mais prête également sa voix caverneuse au géant vert.

Une créature désespérément digitale

Le monstre lui-même, on s’en doute, est une création 100% numérique, confiée cette fois à la compagnie Rythm & Hues. Impressionnant, rugissant, destructeur, le colosse émeraude est très fidèle à son modèle dessiné, mais il a toutes les peines du monde à nous faire oublier ses origines numériques. Malgré la qualité de son animation (obtenue la plupart du temps par le biais de la motion capture) et le soin tout particulier apporté à la texture de sa peau et à sa structure musculaire, il s’appréhende moins comme un personnage que comme un effet spécial. Cette sensation handicape quelque peu l’affrontement entre Hulk et Abomination. Si elle est généreuse en cascades, en pyrotechnie et en démolitions, cette bataille finale a surtout les allures d’une animatique de jeu vidéo, et une grande partie de son impact émotionnel en pâtit. D’autant que son déroulement semble obéir à une mécanique calquée sur celle d’Iron Man, se privant du même coup de surprise et de spontanéité. Restent les acteurs, charismatiques en diable et débordant d’émotions contenues. Grâce à eux, la cavale de Bruce et Betty nous émeut, et le défi raté par Ang Lee s’avère ici remporté haut la main. Quant à la scène finale, elle annonce la mode des clins d’œil post-génériques du Marvel Cinematic Universe et met en évidence la naissance de cette gigantesque saga dont Iron Man et L’Incroyable Hulk sont les premiers jalons.

© Gilles Penso

 

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L’INCROYABLE HULK (1977)

Kenneth Johnson s'empare du Titan Vert créé par Stan Lee pour offrir à l'univers Marvel sa première adaptation à l'écran

THE INCREDIBLE HULK

1977 – USA

Réalisé par Kenneth Johnson

Avec Bill Bixby, Lou Ferrigno, Susan Sullivan, Jack Colvin, Susan Batson, Mario Gallo, Eric Server, Charles Siebert, Terence Locke

THEMA SUPER-HEROS I DOUBLESSAGA HULK I MARVEL

Créé en 1962 par Stan Lee et Jack Kirby pour le Marvel Comics Group, Hulk s’inspire de deux classiques de la littérature fantastique : « Frankenstein » de Mary Shelley et « Docteur Jekyll et Mister Hyde » de Robert Louis Stevenson. Quinze ans après sa naissance, le téléaste Kenneth Johnson (L’Homme qui valait trois milliards, Super Jaimie), décide d’écrire, de produire et de réaliser une adaptation des aventures du géant vert pour le petit écran. Ce téléfilm aura un tel succès qu’il sera distribué en salles dans toute l’Europe et donnera naissance à une série TV très populaire. Le secret de sa réussite réside en grande partie dans son approche psychologique et dans son casting. « Nous pouvons tous faire preuve d’une rage puissante et folle » nous annonce un texte en exergue. Quelques images d’épinal (aujourd’hui extrêmement datées) nous montrent le bonheur paisible dans lequel nagent le docteur David Bruce Banner et son épouse Laura, jusqu’à un accident de la route au cours duquel le savant perd son épouse.

Obsédé par l’idée qu’il aurait pu la sauver s’il avait eu la force nécessaire pour soulever sa voiture en flammes, Banner passe ses nuits à travailler à l’institut Culver dans l’espoir de concrétiser les incroyables réserves de forces que chaque être humain possède sans forcément parvenir à les utiliser. Après avoir recueilli de nombreux témoignages, il étudie les rayons gamma, qui se trouvent en très grande quantité dans l’atmosphère mais qui n’influencent que très rarement les êtres humains.Il décide d’être le propre cobaye de ses expériences en s’exposant à une forte dose de rayons gamma grâce à une machine de son labo. Mais rien ne semble avoir changé. Irrité par cet échec, il entre dans une rage éclatante alors qu’il vient de crever un pneu sous la pluie, et se transforme aussitôt en un gigantesque monstre vert, à la force stupéfiante.

Architecte de son propre malheur

Ainsi, contrairement à la bande dessinée originale, dans laquelle l’irradiation du savant survenait par accident (il tentait de sauver un jeune homme sur le champ de tir de la bombe G), il est ici à l’initiative de sa mutation, et donc architecte de son propre malheur. Ce parti pris permet de renforcer le conflit intérieur de Banner tout en rapprochant davantage son personnage de celui de Robert Stevenson (auquel il fait lui même allusion, déclarant : « Je veux être le docteur Banner, pas le docteur Jekyll »). Mary Shelley elle-même est convoquée dans le film, par hommage au Frankenstein de James Whale interposé, lorsque le colosse rencontre une petite fille au bord d’un lac. Si Kenneth Johnson a immédiatement jeté son dévolu sur Bill Bixby pour incarner Banner, Arnold Schwarzenegger (alors inconnu du grand public) et Richard Kiel (le requin de L’Espion qui m’aimait) furent tour à tour envisagés dans le rôle de Hulk. Mais le premier fut jugé trop petit, le second pas assez musclé, et c’est finalement le culturiste Lou Ferrigno qui hérita du personnage, très convainquant sous son maquillage néanderthalien signé Norman T. Leavitt. Le film s’achève sur une tragédie, soutenue par un beau thème musical composé par Joseph Harnell, et met en place le motif d’un héros fugitif qui deviendra le leitmotiv de la série.

 

© Gilles Penso

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CHRISTINE (1983)

Entre horreur et rock'n roll, l'association des univers de Stephen King et John Carpenter fait des étincelles

CHRISTINE

1983 – USA

Réalisé par John Carpenter

Avec Keith Gordon, John Stockwell, Alexandra Paul, Robert Prosky, Harry Dean Stanton, Christine Belford

THEMA OBJETS VIVANTS I SAGA STEPHEN KING I JOHN CARPENTER

Sensibilisé par les succès de Carrie et Shining, le producteur Richard Kobritz se lança à son tour dans l’adaptation d’un roman de Stephen King. S’il jeta son dévolu sur « Christine », alors que le roman n’était pas encore publié, c’est qu’il y trouva trois composantes propres à lui attirer les faveurs d’un large public américain : l’adolescence, le rock’n roll et les voitures. A peine remis de l’échec ô combien injuste de The Thing, John Carpenter s’installa sur le fauteuil du réalisateur. Christine raconte l’histoire d’Arnie Cunningham, un jeune lycéen américain timide et complexé, qui semble être l’exact opposé de son ami Dennis, sportif, populaire et courtisé par les filles. Un beau jour, Arnie tombe littéralement sous le charme d’une vieille voiture qui traîne comme une épave rouillée dans l’arrière-cour d’un garage sinistre. Dennis tente de le dissuader de faire une folie, mais Arnie a le coup de foudre : il achète cette Plymouth Fury vieille de 21 ans, qui répond au doux nom de Christine, et passe dès lors tout son temps libre à la restaurer. Bientôt, la voiture retrouve miraculeusement sa jeunesse. Sa carrosserie brille d’un rouge vif flamboyant, son moteur rugit comme s’il sortait de l’usine, et sa vieille radio chante joyeusement les tubes de 1957. Mais peu à peu, l’âme diabolique de la voiture possède Arnie et s’acharne à détruire quiconque s’interpose entre elle et le jeune homme…

Le roman de Stephen King adoptait un mode de narration inhabituel, chacun de ses actes étant conté à la première personne par un protagoniste différent. Sans aller jusqu’à opter pour le même procédé, le scénario de Bill Phillips s’avère remarquablement fidèle au texte initial, malgré quelques épurations nécessaires dues à la taille du texte initial, et l’expurgation du fantôme hantant Christine. Du coup, le film parle moins d’une voiture hantée que d’un objet maléfique doté d’une personnalité propre. A sa maîtrise de l’épouvante, Carpenter ajoute ici une autre de ses passions : le rock’n roll. « J’ai pour habitude de fredonner régulièrement des chansons des Beatles lorsque j’arrive sur les plateaux de tournage », nous avoue-t-il (1). La bande originale du réalisateur/compositeur, synthétique et sommaire comme à son habitude, se mêle donc avec bonheur aux tubes des fifties qui ponctuent le film, ceux-là mêmes qui se trouvaient, par extraits interposés, en exergue de chaque chapitre du roman de King.

Tôle froissée

L’un des aspects les plus fascinants du film est la métamorphose psychologique et physique de son « héros ». Cette mutation suit en toute logique celle de la voiture elle-même, vieille guimbarde rouillée et pitoyable changée en un bolide flambant neuf doté d’une « force de caractère » étonnante. Si le trucage employé pour visualiser les « résurrections » de Christine est d’une simplissime efficacité – les plans de froissage de tôle sont montés à l’envers – la concrétisation technique du film n’alla pas sans mal, nécessitant l’achat à prix d’or de vingt-trois Plymouth Fury et la destruction de la plupart d’entre elles. Pas aussi prestigieuse que les œuvres de Brian de Palma et de Stanley Kubrick, Christine est pourtant sans conteste l’une des adaptations les plus réussies de l’œuvre de Stephen King.

(1) Propos recueillis par votre serviteur en février 1995

 

© Gilles Penso

 

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LA COLLINE A DES YEUX (2006)

Alexandre Aja s'empare du classique de Wes Craven et en tire un remake de très haut niveau

THE HILLS HAVE EYES

2006 – USA

Réalisé par Alexandre Aja

Avec Aaron Stanford, Kathleen Quinlan, Vinessa Shaw, Emilie de Ravin, Ted Levine, Dan Byrd, Tom Bower, Billy Drago, Robert Joy

THEMA TUEURS I CANNIBALES I SAGA LA COLLINE A DES YEUX  I ALEXANDRE AJA

 

Film d’horreur brut et sans concession, Haute tension séduisit suffisamment les studios hollywoodiens pour que le réalisateur Alexandre Aja et son complice co-scénariste Grégory Levasseur se voient proposer moult propositions plus alléchantes les unes que les autres. S’ils jetèrent leur dévolu sur le remake de La Colline a des yeux, c’est d’abord parce que leur admiration pour le père de Freddy Kruger est sans limites, et ensuite parce que ce dernier leur laissa une liberté quasi totale sur la réécriture de son scénario initial. Respectueux de leur modèle, Aja et Levasseur en reprennent fidèlement la trame. Cette nouvelle Colline a des yeux porte pourtant indubitablement le seau de ses deux talentueux auteurs. Et ce dès l’entrée en matière, qui accentue un aspect passionnant du récit : les conséquences des essais nucléaires du gouvernement américain pendant les années 50.

Ainsi, après un prologue choc au cours duquel des chercheurs équipés de compteurs geiger sont massacrés à coup de hache avec une violence inouïe, le générique de début instille un malaise croissant. Des images d’archives d’explosions atomiques y côtoient des clichés de fœtus malformés, le tout aux accents d’une chansonnette optimiste typique des fifties. Plus le film avance, plus le pamphlet anti-atomique prend corps, jusqu’à un climax situé dans un village test créé par l’armée, dans lequel les maisons de banlieue sont peuplées de mannequins souriants. Digne d’un épisode de La Quatrième dimension, ce décor surréaliste est une excellente trouvaille. Non content de parer le film d’un environnement résolument original, il multiplie à loisir le jeu des contrastes.

Le manichéisme recule pas à pas

Ce remake ne comporte donc pas deux familles antagonistes mais bien trois : les « normaux » équilibrés et citadins, les mutants sauvages et cannibales, et enfin la famille « idéale » et fantasmée telle que la décrivaient les films publicitaires des années 50, et ici réduite à l’état de mannequins stupidement hilares. Les amateurs d’incorrection politique apprécieront d’ailleurs l’usage que le film fait du drapeau américain, de l’hymne national des Etats-Unis et du fameux tube « California Dreamin’ ». Soucieux de préserver la brutalité du film original et d’en décupler les effets, Alexandre Aja a donné libre cours aux maquilleurs spéciaux de l’équipe de KNB. 

« Nous avons fait des recherches sur les enfants de Tchernobyl, les effets du gaz orange au Viet-Nam et toutes les altérations génétiques d’êtres humains dues à des agents chimiques ou radioactifs », explique le cinéaste. « Nous avons trouvé des images qui vont au-delà de tout ce qu’on peut imaginer. Greg Nicotero s’en est servi de référence pour créer les prothèses des mutants. » (1) Chaque fois que le sang coule, le manichéisme recule d’un pas, le remake reprenant à son compte la thématique majeure de son modèle, que l’on pourrait résumer en une maxime universelle : « la violence engendre la violence ». A ce titre, Aaron Stanford campe un anti-héros mémorable, à mi-chemin entre le Dustin Hoffmann des Chiens de paille et le Jon Voight de Délivrance, ivre de vengeance et basculant finalement dans la bestialité qu’il voulait combattre.

(1) Propos recueillis par votre serviteur en mai 2006

© Gilles Penso

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FIREFOX (1982)

Pour sa huitième réalisation, Clint Eastwood se transforme en agent secret aux commandes d'un avion futuriste soviétique

FIREFOX

1982 – USA

Réalisé par Clint Eastwood

Avec Clint Eastwood, Freddie Jones, David Huffman, Warren Clarke, Ronald Lacey, Kenneth Colley

THEMA ESPIONNAGE ET SCIENCE-FICTION

Passé derrière la caméra dès 1972, Clint Eastwood s’était déjà essayé au thriller (Un Frisson dans la nuit), au drame (Breezy), au film policier (La Sanction, L’Epreuve de force), à l’aventure (Bronco Billy) et au western (L’Homme des hautes plaines, Josey Wales hors la loi). Avec Firefox, tiré du roman homonyme de Craig Thomas, il s’attaque cette fois à l’espionnage mâtiné de science-fiction et livre un pur produit de l’Amérique paranoïaque des années 80. Des deux côtés de la caméra, Eastwood incarne le colonel Mitchell Grant, un as du pilotage traumatisé par la guerre du Vietnam qui, tel John Rambo, vit reclus dans sa campagne. Refrain connu, sa retraite anticipée s’interrompt le jour où le gouvernement américain lui demande de reprendre du service. L’armée russe a en effet mis au point un bombardier futuriste capable de voler jusqu’à Mach 6 et obéissant directement aux ondes mentales émises par le cerveau de son pilote. Invisible aux radars, ce redoutable oiseau de proie répond au nom de code de Mig 31, ou « Firefox » pour les intimes. « Si les Soviets pouvaient le fabriquer en série, cela changerait la structure de notre monde » s’inquiète-t-on en haut lieu. La mission de Grant consiste à se rendre en Russie, à endosser différentes identités, à dénicher le Mig 31, surveillé de près par un bataillon armé jusqu’aux dents, et à le voler !

Grant n’étant pas 007, l’aventure n’a rien d’une partie de plaisir exotique garnie de gadgets inventifs et de jolies filles en maillot de bain, mais s’apparente plutôt à un parcours du combattant dont Eastwood parvient à rendre palpable la tension et le sentiment de danger à travers une mise en scène brute et réaliste inspirée des films d’espionnage de la décennie précédente. Quand notre pilote s’empare enfin du bombardier high-tech et fait route vers les États-Unis, Firefox délaisse ses oripeaux de thriller oppressant pour prendre la forme d’une course-poursuite aérienne sollicitant largement les effets spéciaux. Car Grant est dès lors pris en chasse par des avions, des missiles, des hélicoptères, des croiseurs, et finalement un second Mig 31 avec aux commandes l’as des pilotes de l’armée soviétique.

L'influence de Star Wars

Maquettes, pyrotechnie et incrustations (souvent maladroites, hélas) sont donc mises à contribution dans des séquences de batailles volantes directement inspirées de celles de La Guerre des étoiles, notamment lorsque nos deux belligérants aériens empruntent à vive allure un canyon filmé exactement comme les tranchées de l’Etoile Noire. L’analogie n’est pas innocente, puisque le superviseur des effets visuels de Firefox n’est autre que John Dykstra, l’homme qui orchestra les nombreux trucages du space opéra de George Lucas. Quant à la partition de Maurice Jarre, elle puise directement son inspiration dans les compositions les plus héroïques de John Williams. Nanti d’un budget de 21 millions de dollars, le neuvième long-métrage de Clint Eastwood est finalement une œuvre un peu bancale, souffrant à la fois d’un rythme un peu déséquilibré, d’un manque de subtilité fréquent et d’accents anticommunistes passablement dépassés. Reste le savoir-faire indiscutable d’un cinéaste en béton armé n’ayant cessé depuis d’affiner son art.


© Gilles Penso

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FRANKENSTEIN (1994)

Kenneth Branagh suit la trace du Dracula de Francis Coppola pour tenter une adaptation fidèle du roman de Mary Shelley

MARY SHELLY’S FRANKENSTEIN

1994 – USA

Réalisé par Kenneth Branagh

Avec Kenneth Branagh, Robert De Niro, Helena Bonham Carter, Tom Hulce, Aidan Quinn, Ian Holm, Richard Briers, John Cleese

THEMA FRANKENSTEIN

Comme il le fit pour son Dracula, Francis Ford Coppola a annoncé ce Frankenstein comme l’adaptation la plus fidèle qui soit au texte initial. Le film de Kenneth Branagh est certes très proche du roman de Mary Shelley, la seule grosse dérogation concernant la fabrication de la compagne du monstre (une concession au texte initial entrée dans les mœurs depuis La Fiancée de Frankenstein). Mais la fidélité absolue est-elle un gage de réussite ? A vrai dire, les excès romantiques du 19ème siècle, que le roman cultive jusqu’à l’excès (sentiments exacerbés, sensibilité à fleur de peau, longs monologues grandiloquents), passe mal le cap de l’écrit à l’écran. Du coup, les larmoyances de Kenneth Branagh, endossant lui-même le rôle du jeune Victor Frankenstein, et les violons omniprésents du compositeur Patrick Doyle prennent une tournure anachronique. « Kenneth Branagh est l’homme le plus drôle que je connaisse », nous affirme pourtant Doyle. « Je suis régulièrement pris de fous rires à ses côtés. Mais les gens drôles sont souvent capables de faire des choses étonnamment sérieuses. Souvent, c’est des ténèbres qu’ils tirent leur humour. Après tout, la vie est à la fois drôle et tragique. » (1) 

Frankenstein aurait pu jouer de cette dualité, mais il s’avère désespérément monocorde. La théâtralisation qui le caractérise fonctionnait dans Beaucoup de bruit pour rien, dans la mesure où le film prenait les allures enjouées d’un conte, mais pas dans un Frankenstein visant la crédibilité historique et le réalisme brut. D’autre part, le passé nous a prouvé que les adaptations les plus réussies du texte de Shelley étaient souvent celles qui s’éloignaient du verbe pour n’en conserver que l’esprit (en particulier les classiques de James Whale et Terence Fisher). Il faut malgré tout reconnaître que les effets de style de Branagh insufflent une belle énergie aux scènes clefs du film, comme la frénésie des expériences de Frankenstein (les tournoiements incessants du steadicam traduisant le vertige dans lequel Victor, aveuglé par ses travaux, est entraîné), l’émergence de la créature mâle (où, comme dans un cauchemar, le savant et le monstre n’en finissent plus de perdre l’équilibre dans le liquide amniotique au sein d’un plan séquence truffé de jump-cuts), ou la pendaison du cul-de-jatte raccordée dans le mouvement avec un verre posé brusquement sur une table.

Entre réalisme brut et épure théâtrale

Mais ces moments inspirés ne sont qu’épisodiques, cette inégalité se répercutant sur tous les aspects artistiques du film. C’est notamment le cas des décors qui oscillent entre le réalisme brut (les rues d’Ingolstadt), la carte postale grandiose (les montagnes de Genève) ou l’épure digne d’une scène de théâtre (la maison des Frankenstein). Même le casting laisse perplexe. Car Branagh n’est pas le plus convaincant des docteurs Frankenstein, et Robert De Niro, couturé par de grossières cicatrices qui se résorbent progressivement, offre une prestation très en deçà des capacités que nous lui connaissons. Les bonnes surprises viennent plutôt des seconds rôles, comme Ian Holm en père de Victor, Tom Hulce en Henry Clerval ou John Cleese méconnaissable sous la défroque du professeur Waldman.

(1) Propos recueillis par votre serviteur en janvier 2007

 

© Gilles Penso

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DRACULA (1992)

Francis Ford Coppola réinvente le classique de Bram Stoker et transforme Gary Oldman en impressionnant vampire

BRAM STOKER’S DRACULA

1992 – USA

Réalisé par Francis Ford Coppola

Avec Gary Oldman, Winona Ryder, Anthony Hopkins, Keanu Reeves, Richard E. Grant, Sadie Frost

THEMA DRACULA I VAMPIRES

En s’efforçant d’adapter le plus fidèlement possible le roman de Bram Stoker, on aurait pu penser que Francis Ford Coppola cherche à tendre vers une certaine forme de réalisme et de minimalisme. Or le réalisateur d’Apocalypse Now opte au contraire pour une stylisation extrême et une théâtralisation assumant son caractère artificiel. Par son choix d’un tournage intégralement en studio, ses couleurs saturées, ses trucages à l’ancienne, ses fumigènes et ses toiles d’araignées, ce Dracula évoque du coup les classiques horrifiques des années 60, ceux de Terence Fisher, Roger Corman, et surtout Mario Bava. Tout, dans le film, s’avère superbement outrancier : le château de Dracula, aux allures de sinistre roi déchu assis sur son trône, l’ombre facétieuse du comte qui s’évertue à ne pas bouger en synchronisme avec lui, le jeu emprunté de Gary Oldman – à côté de qui Bela Lugosi semble presque sobre ! – assorti d’un maquillage et d’un costume grandiloquents hérités du théâtre kabuki…

Le prologue s’efforce d’assurer le lien entre le personnage réel de Vlad Tepes et le Dracula du roman, décrivant les tourments du fier guerrier roumain face au cadavre de sa bien-aimée qui se donna la mort en le croyant tombé sur le champ de bataille. Rejetant violemment le christianisme, se damnant pour l’éternité, nous le retrouvons des siècles plus tard sous les traits vieillissants d’un aristocrate excentrique, ordonnant au jeune clerc de notaire Jonathan Harker (Keanu Reeves) d’orchestrer son emménagement à Londres. Aux figures imposées par le récit, Coppola adjoint une bonne dose d’érotisme morbide, notamment lorsque les trois femmes vampires s’en prennent au pauvre Jonathan, ou lorsque Mina (Winona Ryder), la fiancée de Jonathan, découvre son amie Lucy violée par un homme-loup grimaçant qui n’est autre que Dracula en personne ! Et Anthony Hopkins, sous les traits d’un Van Helsing exubérant, de lancer : « veillez sur Lucy, ou elle deviendra une traînée du démon ! ».

« J'ai traversé des océans d'éternité pour vous retrouver »

Mais lorsque notre comte, soudain rajeuni, fait la rencontre de Mina en qui il reconnaît la réincarnation de sa bien-aimée, la trivialité cède le pas à une romance trouble et envoûtante. « J’ai traversé des océans d’éternité pour vous trouver » lui avoue-t-il, tandis que Mina, laissant affleurer à sa mémoire des images d’une vie antérieure, décrit le visage de la princesse qu’elle fut quatre siècles plus tôt comme « un fleuve empli de larmes, de tristesse et de désespoir », le tout porté par une magnifique partition de Wojciech Kilar. Se laissant souvent tenter par des facéties visuelles inventives (la morsure du vampire s’enchaîne avec des yeux de loup, un cercle de bougies se mue en soleil couchant), Coppola ne se réfrène pas non plus en matière d’effets spéciaux très explicites (au-delà de ses transformations en loup-garou, Dracula devient aussi une fumée vivace ou un homme-chauve-souris très impressionnant). Malgré toutes ses audaces, ce Dracula reste moins terrifiant que les versions de Terence Fisher et moins émouvant que la relecture de John Badham, que nous aurons donc tendance à lui préférer.

 

© Gilles Penso

 

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CARNOSAUR (1993)

Plus opportuniste que jamais, Roger Corman anticipe le succès de Jurassic Park en produisant dans l'urgence son propre film de dinosaures

CARNOSAUR

1993 – USA

Réalisé par Adam Simon

Avec Diane Ladd, Raphael Sbarge, Jennifer Runyon, Clint Howard, Harrison Page, Ned Bellamy, Frank Novak, Ed Williams

THEMA DINOSAURES I SAGA CARNOSAUR

Roger Corman est un malin. Lorsqu’il entend parler du projet Jurassic Park, il remue ciel et terre pour produire à la vitesse grand V son propre film de dinosaure et se lance comme défi de sortir le sien avant celui de Spielberg, histoire de passer pour un visionnaire plutôt qu’un vulgaire plagieur (comme si sa réputation en la matière était encore à faire !). Ne poussant pas les recherches trop loin, il décide de mettre en scène les mêmes dinosaures carnivores que Jurassic Park (un tyrannosaurus rex et un proche cousin du vélociraptor, le deinonychus), utilise lui aussi un prétexte génétique pour expliquer leur naissance, et se pare d’une once de respectabilité en adaptant un roman (en l’occurrence un livre de John Brosnan se camouflant sous le pseudonyme d’Harry Adam Knight). Héroïne de Carnosaur, la scientifique Jane Tiptree décide d’arrêter les travaux à vocation militaire que lui commande le secteur privé. Persuadée que la race humaine est la pire chose qui soit jamais arrivée sur Terre, elle se met carrément en tête de l’anéantir. Sous couvert de recherches sur les poulets d’élevage, elle crée donc génétiquement une nouvelle race de dinosaures en injectant de l’ADN reptilienne dans des embryons de poulets. Le résultat est un duo de carnosaures redoutables qui sèment dès lors la panique dans une petite ville avoisinante.

Fort de ce scénario pour le moins aberrant, Carnosaur veut se donner un aspect high-tech en affichant des données (pourcentages, comptes à rebours, etc.) avant chaque scène. Ce parti pris systématique devient vite exaspérant, d’autant que les actions parallèles créent d’emblée une énorme confusion. Les dinosaures, accouchés comme dans Alien par des femmes contaminées, sont franchement pitoyables. A trop vouloir préparer et tourner son film dans l’urgence, Corman a rejeté l’animation image par image au profit de marionnettes mécaniques très caoutchouteuses et maladroitement animées, œuvre d’un John Buechler qu’on connut plus inspiré (Re-Animator, From Beyond). La vraie nouveauté du film est d’associer les dinosaures au gore, en particulier dans la scène où le deinonychus massacre les écologistes enchaînés aux bulldozers avec force gerbes de sang et mutilations en tout genre.

Dino-gore

Mais le gore est facile, et Buechler n’est pas un novice en la matière. En revanche, il s’avère bien plus difficile de faire peur ou de créer une action palpitante. Et dans ce domaine, le réalisateur Adam Simon échoue systématiquement. La scène finale du combat entre le tyrannosaure et la pelleteuse, empruntée à Dinosaurus et The Crater Lake Monster et surtout calquée sur le final d’Aliens, est découpée et montée avec tellement de confusion – probablement pour camoufler la maladresse des effets spéciaux – qu’elle tombe complètement à plat. Seul le dénouement réussit à surprendre. Enfin presque, parce que George Romero en avait inventé un similaire quinze ans auparavant dans La Nuit des Morts Vivants. Suffisamment rentable, Carnosaur connaîtra deux séquelles, respectivement réalisées par Louis Morneau et Jonathan Winfrey, tandis que les dinosaures eux-mêmes resserviront dans d’autres productions Corman.

© Gilles Penso

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LE SIXIEME CONTINENT (1974)

Kevin Connor adapte le mythique cycle "Caspak" d'Edgar Rice Burroughs en immergeant les occupants d'un sous-marin dans un monde préhistorique

THE LAND THAT TIME FORGOT

1974 – GB

Réalisé par Kevin Connor

Avec Doug McClure, John McEnery, Susan Penhaligon, Keith Barron, Anthony Ainley, Declan Mulholland, Godfrey James

THEMA DINOSAURES

La première fois que Kevin Connor collabore avec la compagnie Amicus, c’est en 1974 à l’occasion du film d’épouvante Frissons d’outre-tombe qui est aussi son premier long-métrage en tant que réalisateur après de longues années de pratique du montage. Mais l’association Connor/Amicus restera surtout mémorable grâce à une source d’inspiration très différente : Edgar Rice Burroughs. Au-delà du personnage de Tarzan qui l’a rendu célèbre, Burroughs est l’auteur de plusieurs cycles fantastiques délicieusement « pulp », notamment les cycles de Mars, Pellucidar, Vénus et Caspak. Un an après Frissons d’outre-tombe, Kevin Connor s’embarque ainsi dans l’adaptation à grand spectacle du premier volume de la série Caspak, La Terre que le temps avait oublié, publié initialement en 1918. En France, le film portera comme titre Le Sixième continent. En s’attaquant à un tel univers, la compagnie Amicus sait qu’elle va devoir réunir un budget beaucoup plus conséquent qu’à l’accoutumée. Le Sixième continent sera donc coproduit par Lion International et distribué aux États-Unis par American International Pictures. L’adaptation est l’œuvre du romancier de science-fiction Michael Moorcock, qui souhaite rester fidèle au roman de Burroughs mais va devoir s’éloigner du texte initial à la demande de la production. Autre concession exigée cette fois-ci par le distributeur : le remplacement du comédien principal Stuart Whitman par Doug McClure. Le film se situe pendant la première guerre mondiale. 

 

Après que le sous-marin allemand Montrose ait coulé un navire civil anglais, les survivants prennent d’assaut le submersible et torpillent un bateau de ravitaillement germanique. L’équipage allemand parvient à redevenir maître de la situation et le Montrose, entraîné par des courants sous le pôle, s’échoue sur le continent inconnu de Caprona. Sur cette île, l’évolution est si lente que les dinosaures et les hommes des cavernes vivent parallèlement. Anglais et Allemands, obligés de s’allier par la force des choses, luttent contre les êtres préhistoriques de ce continent oublié et tentent, grâce à une source de pétrole, de refaire le plein de carburant pour repartir vers la civilisation. Ahm, de la tribu des Bo-Lu, accepte de devenir leur guide dans la jungle inhospitalière de Caprona. Mais il est bientôt happé par les mâchoires d’un ptéranodon.  Et pour couronner le tout, la terre gronde et des volcans commencent à entrer en éruption… La première partie du film, qui décrit l’affrontement entre Anglais et Allemands dans le huis-clos d’un sous-marin germanique, agrémentée de splendides maquettes de navires signées Derek Meddings, laisse présager une suite pleine d’intérêt. On note d’emblée un judicieux rejet de tout manichéisme chez les opposants. Mais dès que l’action se transporte sur l’île de Caprona, la crédibilité disparaît partiellement et le rythme s’essouffle. Les protagonistes y contemplent des dinosaures pas vraiment convaincants. 

 

Les monstres de Caprona

Créés par Roger Dicken, ce sont la plupart du temps des marionnettes d’environ un mètre de long assez limitées dans leurs mouvements. Inspirées par les peintures de Zdenek Burian, ces créatures auraient méritées d’être animées en stop-motion, comme celles de Quand les dinosaures dominaient le monde sculptées elles aussi par Roger Dicken. Mais l’animation mécanique est préférée pour gagner du temps, réduire les délais de post-production et obtenir un résultat plus fluide (cette dernière demande est celle de Kevin Connor, qui souhaite pouvoir « diriger » les monstres en direct). Les rétroprojections et les décors miniatures y sont tout de même très soignés, et certains plans sont de vraies réussites graphiques, notamment la silhouette du styracosaure dans les flammes, le gros plan des allosaures ou la bave réaliste du cératosaure en plein combat. La grosse erreur est surtout d’avoir utilisé une maquette grandeur nature complètement immobile d’un ptérodactyle géant suspendu par des câbles, qui détruit toute illusion. Seule sa bouche remue, et il vole sans battre des ailes à la manière d’un deltaplane. Les décors de Caprona, souvent peints sur verre, sont parfois magnifiques, mais il ne s’y passe hélas rien de très palpitant. Le spectateur regarde donc distraitement Allemands et Anglais qui luttent main dans la main contre toutes sortes de monstres antédiluviens et contre plusieurs tribus d’hommes préhistoriques. Il faudra attendre le spectaculaire cataclysme final, symbole récurrent du bouleversement du cycle naturel du continent préhistorique par l’intervention de l’homme civilisé, pour que le film retrouve un trop tardif souffle épique.

 

© Gilles Penso

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VOYAGE AU CENTRE DE LA TERRE (2008)

Brendan Fraser est la star de cette relecture très libre du classique de Jules Verne conçue surtout pour aligner les séquences spectaculaires en relief

JOURNEY TO THE CENTER OF THE EARTH 3D

2008 – USA

Réalisé par Eric Brevig

Avec Brendan Fraser, Josh Hutcherson, Anita Briem, Seth Meyers, Jane Wheeler, Jean Michel Pare

THEMA EXOTISME FANTASTIQUE I DINOSAURES I MONSTRES MARINS I VEGETAUX

Ce Voyage au centre de la Terre est à la fois une adaptation modernisée du roman homonyme et une variante sur ses thématiques, dans la mesure où ici les protagonistes s’enfoncent dans les entrailles de notre planète en utilisant le classique de Jules Verne comme un guide cartographique. Trevor, le géologue incarné par Brendan Fraser, ne s’est toujours pas remis de la disparition de son frère Max au cours d’une expédition scientifique en Islande. En découvrant dans les affaires de ce dernier un exemplaire du « Voyage au Centre de la Terre » rempli d’annotations, d’indications géographiques et de calculs, Trevor en tire une conclusion surprenante : son frère a suivi à la lettre les descriptions du livre et s’est enfoncé au cœur de notre planète. Alors qu’il s’apprête à mettre en place une nouvelle expédition, notre savant se souvient qu’il a promis de garder son neveu Sean pendant une semaine. Il l’embarque donc avec lui jusqu’en Islande, où la jolie Hannah accepte de leur servir de guide.

Dès lors, des dangers inimaginables et des paysages incroyables parsèment leur périple, jusqu’à ce qu’ils atteignent le centre de la terre et y découvrent des formes de vies antédiluviennes qu’ils pensaient éteintes depuis des millions d’années. Sans compter ces formations rocheuses versatiles qui menacent de s’écrouler à tout moment et cette lave incandescente dont la température ne cesse d’augmenter… Conçu pour être projeté en relief dans certaines salles de cinéma et réalisé par un ancien ténor des effets spéciaux visuels, Voyage au centre de la Terre assume pleinement son statut d’attraction digne d’un parc à thème. Une fois ce postulat accepté, on passe outre les clichés qui parsèment le récit et la caractérisation rachitique des personnages pour profiter pleinement du spectacle.

Un tour de manège déguisé en film

Dans ce domaine, Eric Brevig ne nous prive d’aucune sensation forte, depuis la folle course des wagonnets dans la mine désaffectée (clin d’œil à Indiana Jones et le temple maudit) jusqu’au surgissement des poissons volants et des plésiosaures dans l’océan intérieur, en passant par l’intervention d’une monstrueuse plante carnivore, une chute dans le vide interminable digne d’ « Alice au Pays des Merveilles » et l’attaque d’un impressionnant gigantosaure. « A l’origine, je voulais en faire un dinosaure albinos », raconte Eric Brevig. « Nous avons fait des essais, et le résultat ne nous a pas du tout convaincus : on aurait dit une image de synthèse en cours de finition. Alors nous sommes revenus à une pigmentation plus classique, et nous l’avons recouvert de poussière pour évoquer son environnement rocheux.» (1) La beauté des décors (reconstitués pour la plupart en studio à Montréal), la maîtrise des effets spéciaux numériques et l’efficacité des séquences de suspense vertigineuses s’apprécient sans modération. Certes, c’est un plaisir un peu « coupable », parce qu’on sait bien que tout ça ne vole pas très haut, que la caricature n’est jamais loin, que les bons sentiments dégoulinent sans retenue et que le happy end frôle dangereusement la niaiserie. Mais un bon «pop corn movie» sans prétention, ça ne peut pas faire de mal. Voyage au centre de la Terre se déguste donc en famille, comme un tour de manège à Disneyland.

 

(1) Propos recueillis par votre serviteur en juin 2008

© Gilles Penso

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