PRIMEVAL (2007)

Un producteur de télévision et son caméraman s’enfoncent dans la jungle africaine à la recherche d’un redoutable crocodile mangeur d’hommes…

PRIMEVAL

 

2007 – USA

 

Réalisé par Michael Katleman

 

Avec Dominic Purcell, Orlando Jones, Brooke Langton, Jurgen Prochnow, Gideon Emery, Dumisani Mbebe, Gabriel Malema, Patrick Lyster, Linda Mpondo

 

THEMA REPTILES ET VOLATILES

Lorsque Primeval sort en 2007, les crocodiles tueurs semblent être les nouvelles stars des écrans. Entre les très efficace Solitaire et Black Water, le dispensable Lake Placid 2 et les ultra-cheaps Croc et Supercroc, les sauriens aux grandes dents ne manquent pas cette année-là. Malgré son titre, Primeval n’a donc aucun lien avec la série britannique homonyme diffusée la même année sur ITV mais nous propose lui aussi un croco qui a les crocs. Le scénario s’inspire librement d’une histoire vraie : celle de Gustave (ainsi nommé par l’herpétologue Patrice Faye), un redoutable crocodile du Nil de plus de six mètres de long et de près d’une tonne, accusé d’avoir tué des centaines de personnes en Afrique de l’est. Réalisé par Michael Katleman, dont c’est le tout premier long métrage après une carrière bien remplie à la télévision, le film est écrit par John Brancato et Michael Ferris, duo à l’origine de thrillers et de films d’action et de suspense à la qualité très variable comme The Game, Traque sur Internet, Terminator 3 ou Catwoman. À la croisée des genres, Primeval est un film de monstre croisé avec un thriller politique. Le projet ne manque pas d’ambition mais aura toutes les peines du monde à convaincre le public. Accablé par une salve de critiques négatives, le film sera un flop au box-office mondial.

Primeval s’intéresse à une équipe de reporters américains menée par le producteur Tim Manfrey (Dominic Purcell) et le caméraman Steven Johnson (Orlando Jones). Alertés par la présence du vorace Gustave et par ses méfaits aux confins de la jungle africaine, ils décident de partir à sa recherche. Leur mission : filmer la terrifiante créature et, si possible, la capturer vivante. Mais très vite, ce qui devait être un simple reportage se transforme en cauchemar. Sur place, ils découvrent un pays ravagé par la guerre civile, à la frontière du Burundi et du Rwanda, où la violence des hommes rivalise avec celle de la nature. Quant à Gustave, habitué au goût de la chair humaine, c’est un prédateur incroyablement rusé et dangereux. Comme si cela ne suffisait pas, un dictateur local qui se fait appeler Little Gustave (Dumisani Mbebe) fait régner sa propre terreur. Traqués à la fois par l’animal et par des miliciens sans pitié, Tim et son équipe vont vite réaliser que leur mission n’a rien d’une partie de plaisir…

Le croco a les crocs

Primeval tire parti de superbes extérieurs naturels captés en Afrique et se distingue par un contexte politique qui lui donne une autre dimension que les simples péripéties d’un « monster movie » classique. On ne se contente donc pas ici de fuir une bête sanguinaire : la violence humaine, bien réelle celle-là, rôde aussi hors-champ. Quelques images choc restent en mémoire après le visionnage du film, comme cette séquence glaçante où le crocodile engloutit un enfant dans la rivière. Michael Katleman nous offre une poignée de scènes de suspense et d’action réussies, notamment la poursuite haletante d’Orlando Jones dans les hautes herbes ou le climax très tendu dans une voiture embourbée. Les apparitions du croco sont souvent impressionnantes, mises en scène avec efficacité et brutalité. Bref, le bilan est plutôt positif de ce côté-là. Mais le film pèche sérieusement du côté de ses personnages, tous très stéréotypés. Jurgen Prochnow campe une espèce d’Achab moderne hanté par la mort de son épouse, Brooke Langton joue la belle journaliste qui n’a pas froid aux yeux, Purcell endosse le rôle du héros taciturne et Orlando Jones assure la touche d’humour sous la défroque du cameraman rigolo. Difficile de s’attacher à ces « clichés sur pattes », d’autant que la direction d’acteurs reste évasive et que les dialogues peinent à convaincre. Primeval pèche donc par manque de finesse, même s’il faut lui reconnaître son efficacité indiscutable.

 

© Gilles Penso

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THE WHISPERER IN DARKNESS (2011)

Un professeur de l’université de Miskatonic enquête sur une race de crustacés extra-terrestres qui se seraient installés dans le Vermont…

THE WHISPERER IN DARKNESS

 

2011 – USA

 

Réalisé par Sean Branney

 

Avec Matt Foyer, Barry Lynch, Stephen Blackehart, Autumn Wendel, Zack Gold, P.J. King, Casey Kramer, Annie Abrams, Andrew Leman, Matt Lagan, Daniel Kaemon

 

THEMA EXTRA-TERRESTRES

Si La Couleur tombée du ciel est sans conteste le plus célèbre des récits de H.P. Lovecraft consacré aux horreurs venues du cosmos, ce n’est pas le seul. En 1931, très impressionné par la découverte encore toute récente de Pluton par l’astronome Clyde William Tombaugh, l’écrivain se lance dans Celui qui chuchotait dans les ténèbres. Cette histoire insensée s’intéresse à une race d’hommes-crabes géants d’outre-espace s’étant établis dans une région reculée du Vermont depuis leur base située sur la planète « Yuggoth », autrement dit Pluton. Mais l’auteur s’empresse de dire que l’origine de ces monstres est encore plus lointaine. « Yuggoth n’est qu’un avant-poste », dit-il. « La plupart de ces êtres habitent dans des abîmes curieusement organisés, entièrement inconcevables pour l’esprit humain. » Habituellement chiche en descriptions pour laisser l’imagination des lecteurs vagabonder, Lovecraft se veut un peu plus précis lorsqu’il s’agit de tracer les contours de ces arthropodes venus d’ailleurs. « C’étaient des créatures rosâtres d’environ cinq pieds de long », détaille-t-il. « Leur corps crustacéen portait une paire de vastes nageoires dorsales ou d’ailes membraneuses, et plusieurs groupes de membres articulés ; une espèce d’ellipsoïde couvert d’une multitude de courtes antennes leur tenait lieu de tête. »

Si elle inspire de manière très lointaine le troisième segment du film à sketches Necronomicon co-réalisé par Brian Yuzna, Christophe Gans et Shusuke Kaneko, la nouvelle attend encore son adaptation officielle. C’est la très respectable H.P. Lovecraft Historical Society qui va s’en charger en 2011. Déjà responsable du très réussi The Call of Cthulhu, qui transposait à l’écran l’un des plus fameux mythes lovecraftiens en adoptant la mise en forme d’un film muet des années 20, la HPLHS produit cette fois-ci un long-métrage imitant les classiques de l’épouvante en noir et blanc des années 30, pour se conformer une fois de plus à la date de publication du texte original. C’est donc dans une atmosphère héritée des Universal Monsters que s’inscrit The Whisperer in Darkness. Matt Foyer entre dans la peau d’Albert Wilmarth, professeur de folklore à l’université Miskatonic, parti enquêter sur les légendes des étranges créatures qui habiteraient les montagnes les plus reculées de la Nouvelle Angleterre. Ses investigations le poussent d’abord à entamer une relation épistolaire avec Henry Akeley (Barry Lynch), un autochtone harcelé par les monstres dans sa maison isolée, puis à se rendre lui-même sur place. Ce qu’il va découvrir va sérieusement mettre à mal sa santé mentale…

Attack of the Crab Monsters

Même si le pseudo-orchestre symphonique qui agrémente sa bande originale fait un peu fausse note, The Whisperer in Darkness joue avec beaucoup de talent la carte de l’imitation des codes du cinéma d’époque, notamment via sa photographie achrome très atmosphérique et sa mise en scène ample masquant l’étroitesse de son budget (estimé à environ 350 000 dollars). Le scénario de Sean Branney et Andrew Leman choisit d’enrichir le matériau initial en ajoutant plusieurs séquences, notamment une joute radiophonique entre le héros et l’un de ses plus farouches opposants, et surtout un climax en plein ciel extrêmement ambitieux au cours duquel les monstres (créations biomécaniques surprenantes sollicitant tour à tour des marionnettes, de la stop-motion et des images de synthèse) attaquent un avion au-dessus des montagnes nocturnes. Sans doute le rythme du film aurait-il gagné à être resserré et le recours à certains artifices narratifs (notamment la voix off peu convaincante de Matt Foyer) aurait-il pu être évité. C’est notamment le cas lorsque le mystérieux Ashley chuchote de terribles vérités à l’oreille de notre protagoniste. Au lieu de laisser travailler l’imagination du spectateur, le narrateur se sent obligé de surligner les choses en déclarant « Il était épouvantable d’entendre les cauchemars les plus répugnants de la mythologie secrète dévoilés dans des termes aussi concrets ». Or ce qui marche en littérature nécessite généralement d’être retranscrit en termes cinématographiques pour en conserver l’impact. Mais ces réserves n’empêchent pas The Whisperer in Darkness d’être une très honorable réussite, surtout si l’on tient compte des faibles moyens à la disposition de cette production indépendante portée à bout de bras par des passionnés bouillonnant d’enthousiasme.

 

© Gilles Penso

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WILLA (2012)

Cette adaptation méconnue d’une nouvelle de Stephen King suit les pas d’un jeune couple marqué par une catastrophe ferroviaire…

WILLA

 

2012 – USA

 

Réalisé par Christopher Birk

 

Avec Clayton Watson, Sara Hogrefe, Theodore Bouloukos, Gregory M. Brown, Jane Brown, Felix Flores, Jennifer Fouche, Susan Kirby, Barbara Linton

 

THEMA FANTÔMES I SAGA STEPHEN KING

Willa est une nouvelle de Stephen King parue dans le magazine Playboy en 2006 puis intégrée dans le recueil Juste avant le crépuscule deux ans plus tard. Après le déraillement d’un train, les « naufragés » attendent sur le quai de la gare qu’une navette vienne les chercher. David, lui, s’éloigne dans les bois pour retrouver sa fiancée Willa qui a disparu. Il la retrouve dans un bar où des autochtones habillés en cowboys et cowgirls dansent au son d’un groupe de country appelé « Les Dérailleurs ». Le jeune homme ne tarde pas à comprendre qu’ils sont morts tous les deux, qu’ils ne sont plus que des fantômes. « Ils nous sentent, pensa David », raconte King en adoptant le point de vue de son héros. « Comme un souffle d’air froid. Voilà ce que nous sommes pour eux, maintenant. » Dans cette nouvelle envoûtante, il est question de perception, d’illusion, de force de la volonté capable de changer le regard des fantômes, tour à tour baignés dans l’illusion de la vie ou contemplant l’horrible réalité de ce qu’ils sont devenus : des cadavres calcinés dans une gare en ruines.

« Mon plus grand espoir est que l’amour survive à la mort » affirme King dans la postface du recueil, explicitant ainsi les raisons qui l’ont poussées à écrire ce texte. Le film qu’en tire l’auteur et réalisateur Christopher Birk est produit dans des conditions tellement sommaires et avec un budget si maigre qu’on ne peut que saluer l’ambition de cette démarche, même si elle peine à convaincre les spectateurs les plus compréhensifs. Les quatre minutes de générique situées dans les bois laissent comprendre qu’il va falloir s’armer de patience pour apprécier ce film. Car le rythme s’y étire plus que de raison, preuve que ce court récit n’était pas adapté à la durée d’un long-métrage. D’autant que tout est un peu trop approximatif pour convaincre, de la direction des acteurs à la photographie en passant par les cadrages, le montage ou le mixage. Il nous semble en réalité visionner un court métrage amateur qui aurait été rallongé artificiellement sur une durée de 80 minutes.

Les passagers de la nuit

Certes, l’atmosphère contemplative et décalée de la nouvelle est assez bien restituée, et certaines séquences évoquent les passages les plus troublants de Carnival of Souls de Herk Harvey. Mais les dialogues trop explicatifs sonnent faux, en particulier ceux de la serveuse qui ressent le besoin d’annoncer qu’un couple de fantômes amoureux hante l’une des tables du bar. D’autant que le scénario tire à la ligne en essayant visiblement de garder pour la fin un coup de théâtre révélateur que tous les spectateurs auront deviné dès les premières minutes. Reconnaissons au film son ambiance réussie, ses maquillages spéciaux efficaces, sa bande originale envoûtante et des comédiens qui font ce qu’ils peuvent pour nous convaincre de l’intensité du drame qu’ils vivent. Après Willa, Christopher Birk poursuivra dans la voie d’un cinéma indépendant souvent confidentiel, partagé entre la fiction volontiers horrifique et le documentaire.

 

© Gilles Penso

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EVIL BONG (2006)

Quatre étudiants qui partagent un appartement désordonné font l’acquisition d’un bang supposément possédé par un démon…

EVIL BONG

 

2006 – USA

 

Réalisé par Charles Band

 

Avec David Weidoff, John Patrick Jordan, Mitch Eakins, Brian Lloyd, Robin Sydney, Kristyn Green, Tommy Chong, Michelle Mais, Jacob Witkin, Kristen Caldwell

 

THEMA DIABLE ET DÉMONS I SAGA CHARLES BAND I EVIL BONG

En 2006, Charles Band est en pleine effervescence. Producteur infatigable et patron de la mythique compagnie Full Moon, il enchaîne alors les projets avec une cadence frénétique. En quelques mois, il réalise et produit Decadent Evil, Doll Graveyard, The Gingerdead Man et Petrified. C’est dans cette dynamique d’hyperactivité créative que germe l’idée d’Evil Bong. « Je dînais avec mes deux fils cadets, Harlan et Zalman, et nous envisagerions l’idée d’un film sur la weed », raconte-t-il. « Je me suis dit : « Faisons un film loufoque dans lequel des jeunes héros défoncés trouvent un bang et se retrouvent propulsés à l’intérieur. Ce sera le prétexte pour faire des bêtises et montrer des filles à moitié nues“. » (1) Le tournage est expédié en sept jours chrono, dans un esprit aussi artisanal que déluré. Pour donner corps au projet, Band s’entoure de visages familiers. Derrière la caméra, Mac Ahlberg, légende discrète du cinéma de genre — on lui doit la photographie de Re-Animator et From Beyond — signe ici son dernier film avant de se retirer. Ahlberg, décédé en 2012 à 81 ans, laisse derrière lui un héritage visuel qui a marqué plusieurs générations de cinéphiles. Devant la caméra, Band décroche la participation de Tommy Chong, moitié du mythique duo Cheech & Chong, dont les films comme Up in Smoke ou Cheech and Chong’s Next Movie ont façonné toute une culture « stoner ».

L’intrigue d’Evil Bong nous est contée à travers les yeux d’Alistair McDowell, étudiant studieux et un brin naïf qui emménage en colocation avec trois étudiants paresseux et foutraques : Larnell, Bachman et Brett, adeptes de jeux vidéo, de fêtes bruyantes et de fumette en série. Un jour, Larnell tombe sur une étrange annonce : un bang à vendre, dont l’ancien propriétaire prétend qu’il est possédé. Intrigué, il n’hésite pas une seconde et passe la commande. L’objet maudit est livré, et le trio s’empresse de l’essayer, sous le regard dubitatif d’Alistair qui, en garçon sage, préfère s’abstenir. À peine la fumée s’élève que le bang s’anime et les aspire l’un après l’autre dans un monde parallèle, une simulation psychédélique prenant la forme d’un bar de strip-teaseuses. Là, des danseuses affriolantes leur offrent un dernier frisson avant de les massacrer, laissant derrière elles leurs cadavres inanimés dans le monde réel. Alors que les victimes s’enchaînent, piégées par l’attraction mortelle de ce bang démoniaque, Alistair décide de percer le secret de cette étrange relique pour mettre un terme à son influence maléfique…

Le monde est stone

Dès ses premières minutes, le film de Charles Band assume sa nature : une comédie potache confinée dans un unique décor de chambre en désordre. La mise en scène fonctionnelle s’assortit de petits jingles musicaux qui lui donnent des allures de sitcom pour ados. Le vrai coup de folie intervient lorsque le bang maléfique entre en scène. Projetés dans le « Bong World », les protagonistes croisent des strip-teaseuses arborant des soutien-gorge aux bonnets carnassiers : crânes, gueules de requins ou lèvres géantes prêtes à mordre. Le tout sur fond de répliques parfaitement absurdes, comme ce cri du cœur : « Nous sommes en Amérique, terre de la liberté d’être défoncé quand on le veut ! » En bonus pour les amateurs de l’univers Full Moon, la virée dans ce club surnaturel prend les allures d’une sorte de « multiverse » peuplé de plusieurs échappés des productions maison, comme la poupée guerrière Ooga Booga de Doll Graveyard (une version délurée adepte du joint et de la masturbation !), le Gingerdead Man, le Jack Deth de la saga Future Cop (Tim Thomerson, fidèle au poste), le chasseur de vampires de Decadent Evil (Phil Fondacaro) ou encore Bill Moseley reprenant son personnage Synthoid 2030. Totalement décomplexé, réalisé en roue libre par un Charles Band qui semble s’amuser comme un fou, Evil Bong sera le point de départ d’une saga aussi prolifique qu’improbable.

 

(1) Propos extraits du livre « It Came From the Video Aisle ! » (2017)

 

© Gilles Penso

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D-WAR : LA GUERRE DES DRAGONS (2007)

Échappés d’une légende ancestrale, un serpent géant et un dragon colossal s’affrontent en plein Los Angeles…

D-WAR

 

2007 – CORÉE DU SUD / USA

 

Réalisé par Hyung-rae Shim

 

Avec Jason Behr, Amanda Brooks, Robert Forster, Jesse Jam Miranda, Craig Robinson, Aimee Garcia, Chris Mulkey

 

THEMA REPTILES ET VOLATILES I DRAGONS

Initialement baptisé Dragon Wars, D-War n’aura pas été simple à concrétiser. Lancé en 2001 par le réalisateur sud-coréen Shim Hyung-rae — signataire d’un calamiteux Yonggary — le projet s’annonce comme un blockbuster aux très grandes ambitions. Prévu avec un budget de 30 milliards de wons (environ 35 millions de dollars), le film explose très vite les compteurs. À tel point que certaines estimations évoquent un coût final flirtant avec les 75 millions… voire 99 millions de dollars. Pour toucher un public international, Shim mise sur un casting majoritairement américain. Pendant trois longues années, l’équipe de Younggu-Art Movies, la société dirigée par le réalisateur, se consacre entièrement à la création des effets spéciaux, réalisés en interne. Ce tour de force technique sera dévoilé en avant-première lors de l’American Film Market début 2007, avant une sortie en Corée du Sud programmée le 1er août. Présenté dans un premier temps dans une version de 110 minutes (notamment à Berlin en février 2007), D-War est finalement resserré à 92 minutes pour sa diffusion en salles, après des projections tests pas particulièrement enthousiastes. Malgré ces coupes, le film est loin d’avoir le succès escompté. Les critiques sont globalement assassines et ses bénéfices mondiaux ne lui permettent pas de rembourser sa donne initiale. D-War ne manque pourtant pas d’attraits.

Dans la Corée du 16ème siècle, une jeune fille portant en elle une force mystique doit être sacrifiée à un serpent légendaire. Mais lorsque le maléfique Buraki attaque le village pour s’emparer de ce pouvoir, les deux jeunes élus, Narin (Hyojin Ban) et Haram (Hyun Jin), préfèrent mourir ensemble plutôt que de se plier à leur destin. Le sacrifice n’ayant pas lieu, la prophétie est suspendue. La légende refait alors surface dans le Los Angeles des années 2000. Ethan Kendrick (Jason Behr), reporter télé, enquête sur d’étranges phénomènes qui plongent la ville dans le chaos. Au fil de ses investigations, il découvre que la jeune femme au cœur de ces événements, Sarah Daniels (Amanda Brooks), est en réalité la réincarnation de Narin — et lui-même celle de Haram. Ensemble, ils doivent affronter Buraki, revenu pour finir ce qu’il avait commencé. Alors que la ville est envahie par l’armée monstrueuse du dragon noir, composée de créatures mythiques et de forces destructrices, Ethan et Sarah doivent faire un choix : répéter le sacrifice d’antan ou tenter de briser la boucle du destin…

De sang froid

Face au spectacle démentiel de cet affrontement dantesque entre un serpent géant et un dragon en plein Los Angeles, symbole de la lutte éternelle du bien contre le mal, les amateurs de monstres géants ne peuvent que s’enthousiasmer. Les créatures sont superbes et le film regorge de morceaux d’anthologie, comme la voiture poursuivie par le serpent titanesque dans le parking ou l’assaut par l’armée du monstre juché sur un building, variante du climax de King Kong. Tous les réalisateurs des Godzilla des années 50 à 90 (et même Roland Emmerich) auraient probablement rêvé à l’époque de pouvoir bénéficier d’effets visuels aussi impressionnants. Pour gonfler d’emphase cette épopée aux grandes ambitions, Hyung-rae Shim couple aux compositions électro-orchestrales de Steve Jablonsky (The Island, Transformers) l’usage récurrent du « Dies Irae », ce fameux chant liturgique du 13ème siècle symbolisant habituellement la mort, le jugement et la tragédie (décliné dans des films aussi divers que Citizen Kane, L’Exorciste, Shining, Sleepy Hollow ou Le Roi Lion). Bref, D-War est pétri d’atouts et de belles choses. Le problème est que le scénario lui-même n’a pas beaucoup d’intérêt et que les personnages ne nous importent guère. Malgré son casting occidental et ses seconds rôles familiers, dans le but d’assurer au film un succès international, D-War n’a donc guère conquis le monde. La suite longtemps annoncée, D-War II : Mysteries of the Dragon, est toujours en suspens à ce jour.

© Gilles Penso

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I SPIT ON YOUR GRAVE 3 : VENGEANCE IS MINE (2015)

L’héroïne du premier film est de retour dans cette suite, s’efforçant de panser ses blessures tout en réfrénant ses pulsions homicides…

I SPIT ON YOUR GRAVE 3 : VENGEANCE IS MINE

 

ANNEE – USA

 

Réalisé par Richard Schenkman

 

Avec Sarah Butler, Jennifer Landon, Doug McKeon, Garbriel Hogan, Harley Jane Kozak, Michelle Hurd, Russell Charles Pitts, Walter Perez, Karen Strassman

 

THEMA TUEURS I SAGA I SPIT ON YOUR GRAVE

Contrairement à I Spit on your Grave 2, qui déclinait les mêmes thèmes que le premier film sans présenter de lien narratif direct avec celui-ci, I Spit on your Grave 3 est la suite directe du film de 2010, lui-même remake du I Spit on your Grave de 1978. Nous retrouvons donc ici le personnage de Jennifer Hills, toujours incarnée par Sarah Butler, encore marquée – et on la comprend – par la violente agression dont elle fut victime et qui la mua en bourreau vengeur. Steven R. Monroe, qui avait réalisé les deux films précédents, cède cette fois-ci la place à Richard Schenkman (The Man From Earth, Abraham Lincoln tueur de zombies), qui signe cette suite sous le pseudonyme de R.D. Braunstein. Avec le scénariste Daniel Gilboy (co-producteur des deux films précédents), Schenkman tient cette fois-ci à explorer les conséquences à long terme du traumatisme de Jennifer, en montrant sa lutte pour retrouver une vie normale tout en étant hantée par son passé. Produit par CineTel Films et distribué par Anchor Bay Films, le film est tourné avec un budget très restreint. Ses résultats au box-office seront plus modestes que ceux de ses prédécesseurs, ce qui n’empêchera pas la mise en chantier d’un quatrième opus en 2019.

Plusieurs flash-backs furtifs nous permettent de revoir brièvement le calvaire enduré par Jennifer dans le premier film. De retour à la civilisation sous le nom d’Angela Jitrenka, la jeune femme tente difficilement d’effacer son traumatisme. Très méfiante envers les hommes, elle vivote grâce à un petit travail routinier dans un bureau et suit une thérapie. « La justice n’est pas une chose qu’on reçoit mais qu’on donne », dit-elle à sa psychologue, avant d’ajouter : « Le monde est empli de prédateurs et de proies. Vous êtes soit l’un, soit l’autre ». Généreuse en aphorismes de cet acabit, la jeune femme est devenue un être solitaire et misanthrope, trimballant dans son sac un taser – au cas où. Lorsqu’elle rejoint un groupe de parole pour victimes de viol, elle se lie d’amitié avec Marla (Jennifer Landon), une militante radicale qui prône une réponse musclée aux hommes irrespectueux. L’engrenage de la violence s’enclenche bientôt, et le sang ne va pas tarder à couler à nouveau…

L’ange de la vengeance

L’image de l’ange exterminateur est évoquée au détour d’une conversation liée au pseudonyme choisi par l’héroïne. Car Jitrenka signifie en tchèque « l’étoile du matin », expression à l’origine du nom de Lucifer, le « porteur de lumière ». La chute de Jennifer dans le premier film puis sa résurrection symboliseraient-elles donc la transformation d’un ange en démon ? Les visions qui frappent notre héroïne à intervalles réguliers, la montrant massacrer ceux qui la contrarient, tendent effectivement à prouver qu’un monstre sommeille toujours en elle. L’originalité de ce troisième épisode est de s’éloigner du schéma habituel du « rape and revenge » pour tenter un pas de côté. Il est certes toujours question de viol et de vengeance, mais l’intrigue n’obéit pas à la mécanique traditionnelle dictée par le film original de Meir Zarchi. Il eut de toute façon été vain de tenter de surenchérir sur I Spit on your Grave 2 qui poussait déjà très loin la visualisation d’abus physique et de violences faites aux femmes. Si les agressions sexuelles sont ici abordées de manière moins démonstrative (le film les évoque mais ne les montre pas), l’engrenage de l’auto-justice, lui, ne s’interdit aucun débordement douloureux et sanglant. Les multiples rebondissements du scénario sont efficaces et inattendus, même si l’on ne peut s’empêcher de penser – mais ce reproche est imputable à la « saga » tout entière – que le message féministe n’est qu’un prétexte pour s’adonner au « torture porn » et procurer aux amateurs d’hémoglobine leur lot de frissons.

 

© Gilles Penso

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MUTRONICS (1991)

Un jeune homme découvre une technologie extra-terrestre, se transforme en super-héros cuirassé et affronte une horde de mutants monstrueux…

THE GUYVER

 

1991 – USA / JAPON

 

Réalisé par Screaming Mad George et Steve Wang

 

Avec Jack Armstrong, Mark Hamill, Vivian Wu, David Gale, Michael Berryman, Jimmie Walker, Peter Spellos, Spice Williams Crosby, Jeffrey Combs, Linnea Quigley

 

THEMA MUTATIONS I SUPER-HÉROS

Créé par Yoshiki Takaya, le manga Guyver fait ses premiers pas en 1985 dans les pages du magazine Shonen Captain et atteint rapidement un statut d’œuvre culte, mêlant allègrement le gore et la science-fiction autour des thèmes de la biotechnologie, de la mutation et des artefacts extra-terrestres. En 1989, une adaptation sous forme de série animée est confiée au réalisateur Kôichi Ishiguro. En faisant l’acquisition des droits cinématographiques du manga, le studio New Line souhaite de son côté se lancer dans un long-métrage en prises de vues réelles. Pour en créer les innombrables effets spéciaux, deux noms s’imposent : Screaming Mad George (Le Cauchemar de Freddy, Society, Re-Animator 2) et Steve Wang (Predator, Monster Squad, Gremlins 2). Les deux hommes, qui n’ont pas leur pareil pour concevoir des créatures délirantes et des séquences de métamorphoses mémorables, acceptent le défi et proposent d’assurer eux-mêmes la réalisation du film, avec la bénédiction de Brian Yuzna promu producteur du projet. Malgré le budget très raisonnable de 3 millions de dollars à leur disposition, les deux réalisateurs entendent bien en mettre plein la vue aux spectateurs. La série animée étant encore diffusée à l’époque de la mise en chantier du long-métrage, le film se veut différent. « La version animée est beaucoup plus sérieuse et destinée aux adultes », confirme George. « Elle contient beaucoup de violence et de sang. Lorsque nous avons commencé à développer le scénario, nous avons décidé de le destiner à un public plus large. » (1)

Le Dr Tetsu Segawa (Greg Paik), généticien pour la compagnie Chronos, prend la fuite après avoir volé un artefact extraterrestre : le Guyver, qu’il décrit comme « la technologie la plus dangereuse depuis la bombe atomique ». Mais il est rapidement rattrapé par Lisker (ce bon vieux Michael Berryman, échappé de La Colline a des yeux), bras droit du président de Chronos, Fulton Balcus (David Gale, le grand méchant de Re-Animator). Aussitôt, Lisker se transforme en Zoanoïde — un humain génétiquement modifié — et abat Segawa, qui vient lui aussi de révéler sa nature de Zoanoïde. Mais lorsqu’il remet la mallette à son patron, Lisker découvre qu’elle ne contient qu’un grille-pain : Segawa avait en effet dissimulé le Guyver dans une décharge avant d’être capturé. Or Sean Barker (Jack Armstrong), petit ami de la fille de Segawa, Mizuki (Vivian Wu), découvre par hasard l’unité Guyver sur les lieux du crime. Il la glisse dans son sac à dos sans se douter de ce qu’elle renferme. Plus tard, son scooter tombe en panne dans une ruelle où un gang l’agresse. L’unité s’active soudainement et fusionne avec Sean, qui se transforme en une redoutable machine de combat. Sous l’armure du Guyver, il élimine ses agresseurs avec une puissance surhumaine. Ce sera désormais lui, le seul rempart possible contre la menace que fait peser sur le monde le vil Balcus…

Moitié homme moitié robot

Aujourd’hui, Mutronics (« traduction » française de Guyver) est généralement considéré comme un nanar sympathique et caoutchouteux. Certes, nous sommes loin du chef d’œuvre. Pour autant, comment ne pas s’enthousiasmer face à cette profusion non-stop d’effets spéciaux « old school » tous plus excessifs les uns que les autres ? Entremêlant les morphologies des humains, des poissons, des reptiles, des rapaces, des éléphants, des dinosaures, des gorilles, des boucs et même des Gremlins, les mutants qui se déchaînent dans le film sont un régal pour les amateurs de monstres en latex. Tout comme le « metal hero » qui s’oppose à eux, dans une armure ma foi très seyante. Les scènes de métamorphoses impensables abondent, avec au moment du climax le surgissement d’un affreux homme-insecte (qui nous rappelle l’une des scènes les plus folles du Cauchemar de Freddy) puis d’un mutant dragon géant ! Les combats eux-mêmes sont amusants mais – avouons-le – pas beaucoup plus excitants que ceux d’un épisode de X-Or ou des Power Rangers. Les acteurs costumés gesticulent donc maladroitement, sautent dans les airs et se collent des mandales. Si David Gale et Michael Berryman sont de savoureux super-vilains cartoonesques, et si Jeffrey Combs nous offre une petite apparition réjouissante en docteur East (clin d’œil manifeste à Herbert West), Mark Hamill joue un agent de la CIA sans beaucoup de conviction, Vivian Wu n’a pas grand-chose à défendre et Jack Armstrong campe un héros très insipide. Mutronics n’est pas non plus aidé par ses traits d’humour balourds. Le film aura tout de même droit à une suite en 1994, Guyver : La Sentinelle de l’ombre.

 

(1) Extrait d’une interview publiée dans Cinefantastique en février 1992

 

© Gilles Penso

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TREMORS 5 BLOODLINE (2015)

Flanqué d’un caméraman qui veut faire de lui une star, Burt Gummer part en Afrique pour lutter contre de nouveaux monstres carnivores…

TREMORS 5 BLOODLINE

 

2015 – USA

 

Réalisé par Don Michael Paul

 

Avec Michael Gross, Jamie Kennedy, Daniel Janks, Pearl Thusi, Brandon Auret, Sello Sebotsane, Natalie Becker, Lawrence Joffe, Emmanuel Castis

 

THEMA INSECTES ET INVERTÉBRÉS I SAGA TREMORS

Onze ans après Tremors 4, les vers géants et leurs progénitures refont enfin leur apparition à l’écran. L’idée d’un cinquième volet est pourtant née dès 2004. Après le tournage du quatrième volet, les créateurs originels de la saga, S.S. Wilson et Brent Maddock, couchent en effet sur papier un nouvel épisode situé en Australie, qu’ils baptisent Gummer Down Under. Malgré leur enthousiasme et une première ébauche prometteuse, le développement patine et le projet s’enlise. Lorsque le studio Universal relance enfin la machine, Maddock et Wilson sont associés comme producteurs. Mais en réalisant qu’ils n’auront que peu de prise sur le processus créatif, les duettistes préfèrent se retirer. La barre est alors confiée à John Whelpley, déjà scénariste du troisième volet, qui réoriente l’action vers une nouvelle terre sauvage : l’Afrique du Sud. Tourné dans une réserve naturelle réelle, le film bénéficie de l’aide précieuse de bénévoles sur place, chargés de tenir les chevaux, déplacer des cages à lions… voire prêter leur propre logement comme décor. Côté casting, les fans espéraient un retour de Kevin Bacon, star du tout premier Tremors. Or s’il manifeste son intérêt dans un premier temps, l’acteur finit par décliner. C’est donc Michael Gross, fidèle au poste, qui reprend son rôle de fou de la gâchette dans une Afrique infestée d’invertébrés géants et mutants.

Force est de constater que Burt Gummer n’a pas beaucoup changé depuis le premier Tremors, si ce n’est son crâne lisse comme un œuf. Notre homme passe désormais ses journées à tourner des vidéos de survivalisme pour montrer comment s’en sortir dans la nature hostile, construire des fours improvisés, boire du jus de cactus et manger des serpents grillés. Après deux ou trois cascades de motocross qui alimentent le générique de début, le fougueux cameraman Travis Welker (Jamie Kennedy) vient à sa rencontre en plein désert du Nevada pour lui proposer d’augmenter sa popularité et de transformer son statut de « solitaire paranoïaque » en véritable star des réseaux sociaux. C’est le moment que choisit Erich Van Wyk (Daniel Janks), un envoyé du « ministère de la vie sauvage d’Afrique du Sud », pour solliciter ses talents. Une attaque de créatures voraces (les fameux « culs flambeurs » vus dans Tremors 3) a en effet été signalée à Grauteng, le « berceau de l’humanité ». Sur place, Gummer se joint à une petite équipe et se lance dans son activité préférée : la chasse aux monstres.

Des monstres 100% numériques

Après le Mexique du second épisode, celui-ci dépayse donc une nouvelle fois les spectateurs en leur offrant de beaux extérieurs captés en Afrique. Le film joue d’ailleurs la carte de la couleur locale jusqu’à l’excès (images d’animaux sauvages dans la savane, danses des indigènes autour du feu…). Même les personnages africains véhiculent certains clichés, quand ils ne deviennent pas improbables comme la paisible doctoresse (Pearl Thusi) qui, en un clin d’œil, se mue en émule de Lara Croft pour sauver sa fille des griffes des monstres. Les images de synthèse ayant fait de gros progrès depuis les épisodes précédents, l’animatronique a définitivement déserté la saga au profit de créatures numériques conçues par la talentueuse équipe bulgare de la compagnie Cinemotion. Les « culs flambeurs » s’animent ainsi dans une série de séquences très dynamiques, y compris un moment de suspense situé dans une grande cuisine qui évoque irrésistiblement Jurassic Park (le clin d’œil est assumé avec le gros plan des pattes griffues sur le carrelage). Le film paie aussi son tribut à Alien et Aliens avec sa grotte pleine d’œufs de monstres prêts à éclore. Les graboïds eux-mêmes sont de retour avec une petite nouveauté : les tentacules en forme de serpent qui jaillissent de leurs gueules sont désormais capables de se déplacer de manière autonome, multipliant la menace et les massacres potentiels. Pour enrichir l’intrigue, plusieurs personnages clés cachent des secrets qui émergent au fil du récit, justifiant le sous-titre Bloodline, qui concerne à la fois les monstres et les humains. Derrière la caméra, le spécialiste des suites à petit budget Don Michael Paul (Lake Placid : The Final Chapter, Death Race : Anarchy, Le Roi Scorpion : Le Livre des âmes), assure une mise en scène nerveuse et efficace, à défaut de lui imprimer beaucoup de personnalité. Il rempilera d’ailleurs pour les deux épisodes suivants de la saga.

 

© Gilles Penso

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LA TERREUR DES MORTS-VIVANTS (1978)

Victime d’une malédiction lancée par une sorcière au 18ème siècle, un réalisateur de films voit son entourage mourir de manière violente…

TERROR

 

1978 – GB

 

Réalisé par Norman J. Warren

 

Avec John Nolan, Carolyn Courage, James Aubrey, Sarah Keller, Tricia Walsh, Glynis Barber, Michael Craze, Rosie Collins, Chuck Julian, Elaine Ives-Cameron

 

THEMA SORCELLERIE ET MAGIE

Contrairement à ce que pourrait faire croire son titre français, Terror n’a aucun rapport avec les morts-vivants, les distributeurs s’étant sans doute laissés porter par l’impact des films de George Romero. Il s’agit en réalité d’une histoire de sorcellerie empruntant les codes du slasher. Spécialisé dans le cinéma d’horreur à petit budget (L’Esclave de Satan, Le Zombie venu d’ailleurs), Norman J. Warren puise ici son inspiration dans le travail de Dario Argento. « Suspiria m’a soufflé », avoue-t-il. « Je n’avais jamais vu un film pareil. Il n’y avait pas vraiment d’histoire, la photographie était folle et la bande-son incroyable. J’ai su à ce moment-là que mon prochain film serait dans le même style. Terror est donc un hommage à Suspiria, pas une copie, mais il est conçu dans un style similaire » (1). Warren place donc la barre assez haut. Le tournage de Terror se fait dans l’urgence, souvent de nuit, dans des conditions précaires. L’équipe improvise avec des ressources limitées, réutilisant des décors, des costumes, et intégrant même des séquences inspirées de véritables rêves du réalisateur. « Terror a toujours été mon préféré parmi mes propres films », ajoute-t-il. « Tous ceux qui y ont participé ont dit que c’était le tournage le plus agréable qu’ils aient jamais connu. Il a fallu quatre semaines pour le tourner, il n’y avait pas d’argent et nous l’avons traité comme une grande fête » (2).

Le film s’ouvre sur une forêt brumeuse du XVIIIe siècle. Une sorcière, traquée par des villageois en furie armés de torches, est piégée dans un collet à loup. Capturée, elle est condamnée au bûcher. Mais avant de périr dans les flammes, elle invoque Satan. Aussitôt, les flammes se retournent contre le bourreau, tandis qu’elle maudit toutes les générations à venir. Une scène classique, presque attendue. Sauf que ce n’est qu’un film dans le film. Ce que nous venons de voir est une projection privée, présentée dans un manoir par son réalisateur, James Garrick (John Nolan), à une poignée d’amis. Garrick affirme que le scénario s’inspire d’événements réels liés à sa propre lignée. L’audience oscille entre scepticisme poli et fascination inquiète. Or la soirée ne tarde pas à basculer. D’étranges phénomènes se manifestent, et bientôt, la mort se met à frapper dans l’entourage de ceux qui ont participé à cette petite réunion. Est-ce l’œuvre d’un tueur dissimulé dans l’ombre ? Ou les rouages d’une malédiction ancestrale qui s’est remise en marche ?

Prometteur mais bâclé

Dès le début, le manque de moyens de Norman J. Warren saute aux yeux : une forêt très peu touffue dans laquelle l’actrice essaie de nous faire croire qu’elle se perd, un peu de fumigènes pour créer de l’atmosphère, des projecteurs bleus pour simuler les éclairs dans le ciel. Mais ce manque de réalisme finit presque par jouer en faveur du film, le dotant d’une plastique étrange qui n’est pas sans rappeler le cinéma gothique italien des années 60. Cette approche esthétique est justifiée par le caractère fictif du prologue du film. Lorsque l’intrigue s’inscrit dans le monde réel et contemporain, l’influence assumée du cinéma de Dario Argento affleure, avec des mains gantées et des armes blanches héritées du giallo. À partir de là, les clichés s’enchaînent, le film souffrant d’acteurs très moyennement convaincants et d’une musique peu subtile. C’est d’autant plus dommage qu’en de rares instants inspirés, Norman J. Warren stylise sa mise en scène et tente des choses originales, comme cette séquence dans laquelle un plateau de tournage semble en proie à un poltergeist. Mais l’ensemble reste trop approximatif et erratique pour convaincre, plombé par de longues scènes inutiles qui ne mènent nulle part (la femme qui tombe en panne dans la forêt). Le réalisateur tente bien de pimenter son film avec un soupçon d’horreur graphique (une décapitation à l’épée, un corps déchiqueté dans une benne à ordures) et avec quelques clins d’œil adressés aux connaisseurs (le poster de L’Esclave de Satan et de Crime à froid) mais rien n’y fait. La Terreur des morts-vivants est à l’image des autres films d’horreur de Warren : prometteur mais bâclé.

 

(1) Extrait d’un entretien publié dans Rock! Shock! Pop! en juillet 2012

(2) Extrait d’un entretien publié dans British Horror Films en mai 2011

 

© Gilles Penso

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OPÉRATION GOLDMAN (1966)

Un agent secret enquête sur le sabotage de plusieurs fusées en partance pour la Lune et met à jour le complot d’un redoutable super-vilain…

OPER AZIONE GOLDMAN

 

1966 – ITALIE / ESPAGNE

 

Réalisé par Antonio Margheriti

 

Avec Anthony Eisley, Wandisa Guida, Diana Lorys, Luisa Rivelli, Folco Lulli, Francisco Sanz, José Maria Caffarel, Renato Montalbano, Oreste Palella

 

THEMA ESPIONNAGE ET SCIENCE-FICTION

Coup sur coup, James Bond contre docteur No, Bons baisers de Russie, Goldfinger et Opération tonnerre secouent le box-office mondial dans les années 60. Aussitôt, la « spy mania » gagne les cinématographies de la planète entière. En ce domaine, l’Italie n’est pas en reste. D’où cette co-production avec l’Espagne qui permet à Antonio Margheriti, habitué à l’horreur (La Vierge de Nuremberg, Danse macabre, La Sorcière sanglante) et à la science-fiction (Le Vainqueur de l’espace, La Planète des hommes perdus), de se plier à son tour aux codes du genre, sous son pseudonyme habituel d’Anthony Dawson. En tête d’affiche, le cinéaste dirige deux familiers du cinéma bis : l’Américain Anthony Eisley (La Femme guêpe, The Mighty Gorga, Dracula contre Frankenstein, L’Invasion des cocons) et l’Espagnole Diana Lorys (L’Horrible docteur Orloff, Superargo contre les robots, Malenka la vampire, Les Cauchemars naissent la nuit). Le titre Opération Goldman reste un mystère dans la mesure où personne ne porte ce nom dans le film. Sans doute est-ce une allusion aux crédits financiers sans limite dont bénéficie le héros, doublée d’un clin d’œil à Goldfinger (comme le fit l’année précédente le Dr Goldfoot). Les Américains, eux, rebaptisent le film Lightning Bolt et se réfèrent à Opération tonnerre avec le slogan « he strikes like a ball of thunder » (« il frappe comme un coup de tonnerre »).

À Cap Kennedy, six lancements de fusées vers la Lune ont échoué l’un après l’autre dans des circonstances étranges. Inquiet d’un possible sabotage aux répercussions internationales, le département « S » de la Commission fédérale de sécurité mandate l’agent secret Harry Senneth (Anthony Eisley) pour mener l’enquête. Contrairement à sa supérieure, la rigoureuse capitaine Patricia Flanagan (Diana Lorys), qui privilégie les méthodes musclées, Senneth préfère les solutions élégantes : costumes de luxe, humour caustique et chéquier illimité de la banque fédérale. Un style bien à lui pour infiltrer les milieux suspects. L’affaire se complique avec la mystérieuse disparition du Dr Rooney (Francisco Sanz), un éminent scientifique du programme spatial. Avant de s’évanouir dans la nature, Rooney avait détecté d’inquiétants signaux de radiation provenant des fonds marins, près du centre spatial. Il soupçonnait que ces anomalies déviaient les fusées de leur trajectoire, provoquant leur destruction. Au fil de leurs investigations, Flanagan et Senneth remontent la piste jusqu’à un baron de la bière aux ambitions démesurées…

L’espion qui mimait

Pas franchement charismatique, Anthony Eisley campe ici un espion désinvolte à la Matt Helm auquel il est bien difficile de s’attacher, tant il semble lui-même peu concerné par ce qui se passe autour de lui, se contentant de mimer mécaniquement la prestation de Sean Connery. Diana Lorys est bien mieux lotie, quoique très sous-exploitée dans le film. La maîtrise des arts-martiaux dont est dotée son personnage n’est en effet jamais mise à contribution, l’agent qu’elle incarne disparaissant au beau milieu de l’intrigue pour ne réapparaître qu’à la toute fin. Opération Goldman ne manque pas de séquences d’action ambitieuses (la tentative de noyade dans le silo, la poursuite automobile à Cap Kennedy, le combat contre les chariots élévateurs), même si elles sont parfois entravées par des trucages approximatifs (incrustations hasardeuses, maquettes très identifiables). L’amateur de science-fiction se délectera surtout de la seconde partie du métrage au cours de laquelle toutes les folies sont autorisées, des camions de bière qui cachent des rayons laser à la grande cité sous-marine en passant par les volcans aquatiques artificiels, les scientifiques en hibernation ou encore le canon laser sur le point d’être installé sur la Lune et commandé par un cerveau électronique. Margheriti s’offre même quelques écarts horrifiques au moment où les hibernés se décomposent un à un dans leurs cylindres translucides. Le tout s’achève comme il se doit par un grand feu d’artifice final détruisant dans les flammes le superbe repaire du super-vilain.

 

© Gilles Penso

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