VOYAGE AU FOND DES MERS (1964-1968)

Un sous-marin atomique explore les fonds marins et y découvre toutes sortes de menaces bizarres et de créatures improbables…

VOYAGE TO THE BOTTOM OF THE SEA

 

1964/1968 – USA

 

Créée par Irwin Allen

 

Avec Richard Basehart, David Hedison, Robert Dowdell, Richard Bull, Henry Kulky, Terru Becker, Del Monrore, Paul Trinka, Arch Whiting, Ralph Garrett

 

THEMA MONSTRES MARINS

Le producteur/réalisateur Irwin Allen a de la suite dans les idées. Après avoir mis en chantier Le Sous-marin de l’apocalypse, il se dit que les sommes importantes nécessitées par ce long-métrage mêlant la politique-fiction, le genre catastrophe et la science-fiction pourraient être amorties dans une série télévisée. D’où la naissance de Voyage au fond des mers qui se veut le prolongement logique du film. En version originale, la version cinéma et le show télévisé portent d’ailleurs le même titre : Voyage to the Bottom of the Sea. À l’exception de Del Monroe, qui incarne quasiment le même matelot sur le grand et le petit écran (avec une petite variante sur son nom, Kowski ici, Kowalski là), l’ensemble du casting change. Si l’amiral Harriman Nelson et le capitaine Lee Crane sont toujours présents, leurs interprètes originaux Walter Pidgeon et Robert Sterling cèdent ici le pas à Richard Basehart (qui côtoyait déjà les fonds marins dans Moby Dick) et David Hedison (qu’Irwin Allen dirigeait en 1960 dans Le Monde perdu). Pour faire des économies, Allen réutilise tout ce qu’il peut : des costumes, des accessoires, des éléments de décor et surtout de nombreux effets spéciaux du Sous-marin de l’apocalypse, notamment les séquences tournées en miniature dans lesquelles le submersible surgit au milieu des

En toute logique, Voyage au fond des mers reprend le concept du long-métrage qui l’inspire. Nous voilà donc à bord du sous-marin Neptune (ou Seaview pour les anglophones), un précieux engin expérimental de recherche océanographique dont le look a été légèrement modifié par rapport au film. Son équipement dernier cri comprend une petite soucoupe aquatique, des bathyscaphes, une cloche de plongée mais aussi des lance-missiles et des lance-torpilles. Car si le Neptune n’a pas vocation d’être utilisé pour des missions militaires, on n’est jamais trop prudent. En effet, l’exploration des fonds marins et la quête des mystères de la mer révèlent souvent des menaces contre lesquelles il convient d’être solidement armé. La série étant futuriste (nous sommes dans les années 70 puis 80, soit quelques décennies après son entrée en production) et le contexte étant celui de la guerre froide, l’ennemi a bien souvent des allures communistes, même si les scénarios prennent garde de ne pas les nommer comme tels.

Abysses bis

Pendant les deux premières saisons de Voyage au fond des mers, les intrigues s’efforcent de conserver une certaine « crédibilité », favorisant les sujets autour des dangers du nucléaire, des problèmes environnementaux ou de la prévention contre l’espionnage international. Mais les dirigeants de la chaîne ABC s’inquiètent de cette tonalité trop sérieuse et réclament plus de divertissement. Irwin Allen n’y va alors pas avec le dos de la cuiller. Bientôt, l’amiral Nelson et son équipage croisent les créatures aquatiques les plus improbables de tous les temps : des extra-terrestres, des monstres marins, des dinosaures, des momies, des loups-garous, des lutins maléfiques, des hommes-crustacés, des torches humaines, des fossiles vivants… Les amateurs de bébêtes en caoutchouc sont alors aux anges, s’impatientant d’un épisode à l’autre de découvrir à chaque fois le look toujours plus invraisemblable du « monstre de la semaine ». Régulièrement secoués lors des batailles par des vibrations qui les font trembler à l’intérieur du Neptune, les héros s’agitent en tous sens dans un décor qu’on devine parfaitement immobile, ce qui provoque quelques éclats de rire involontaires de la part des téléspectateurs (cet effet de mise en scène naïf sera repris tel quel dans Star Trek, dont Voyage au fond des mers constitue une sorte de précurseur marin). Malgré – ou justement grâce à – ces incursions souvent absurdes ou grotesques dans une science-fiction exubérante, la série d’Allen a su conquérir le cœur des téléspectateurs du monde entier, poussant son créateur à en produire plusieurs autres : Perdus dans l’espace, Au cœur du temps et Au pays des géants.

 

© Gilles Penso


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V (1983-1985)

De sympathiques visiteurs extra-terrestres débarquent sur Terre pour partager leur savoir… Sympathiques ? Vraiment ?

V

 

1983/1985 – USA

 

Créée par Kenneth Johnson

 

Avec Marc Singer, Jane Badler, Faye Grant, Blair Tefkin, Robert Englund, Richard Herd, Bonnie Bartlett, Diane Cary, Richard Lawson, Michael Ironside

 

THEMA EXTRA-TERRESTRES

Depuis qu’il a déplacé massivement les foules devant leurs postes de télévision en créant tour à tour L’Homme qui valait trois milliards, Super Jaimie et L’Incroyable Hulk, Kenneth Johnson est un homme respecté par toutes les chaînes américaines. Pour autant, il a beaucoup de mal à convaincre NBC de se lancer dans la série TV Storm Warning qu’il a en tête. Le concept, inspiré par le roman « Impossible ici » de Sinclair Lewis (publié en 1935), consiste à raconter la montée progressive d’un régime fasciste aux États-Unis jusqu’à l’instauration d’une dictature. Jugé trop anxiogène et pas assez distrayant pour le public américain, le projet est gentiment écarté de la main. Mais Johnson est un malin. Lorsqu’il revient à la charge, c’est avec ce qui semble être une toute autre idée : des extra-terrestres, des vaisseaux spatiaux, des rayons laser, des hommes-lézards, le tout sous l’influence évidente de Star Wars. Cette fois-ci, la chaîne accepte avec enthousiasme. Pourtant, le concept de V est exactement le même que celui de Storm Warning, si ce n’est que les fascistes américains ont été remplacés par des aliens. Véritable « cheval de Troie », la mini-série (constituée de deux épisodes de 100 minutes chacun) cache donc sous ses allures de show de science-fiction une réflexion implacable sur la montée du nazisme. Ce sera, sans conteste, le chef d’œuvre de Kenneth Johnson.

Au cours d’un prologue qui a inspiré de toute évidence celui d’Independence Day, cinquante gigantesques soucoupes volantes surgissent du jour au lendemain au-dessus des grandes villes de notre planète. Les occupants de ces vaisseaux ressemblent à des humains, si ce n’est qu’ils portent des lunettes spéciales pour protéger leurs yeux et que leur voix a une résonance particulière. Ces aliens aux intentions pacifiques cherchent l’aide des humains pour obtenir des produits chimiques et des minéraux afin d’aider leur planète. En échange, ils promettent de partager leur technologie avancée avec l’humanité. Les gouvernements de la Terre acceptent l’arrangement et les Visiteurs, commandés par leur chef John (Richard Herd) et son adjointe Diana (Jane Badler), commencent à acquérir une influence considérable sur les autorités humaines. Ils sont désormais partout, occupent les médias, séduisent le grand public, apparaissent sur des campagnes d’affiches publicitaires, enrôlent la jeunesse terrienne dans leurs programmes de formation… Bientôt, la communauté scientifique commence à s’interroger sur la véritable nature de ces voisins d’outre-espace. Mais c’est un journaliste de terrain, Mike Donovan (Marc Singer), qui finit par percer leur terrible secret.

Nous venons en paix

Kenneth Johnson ne cherche jamais à cacher la parabole qui sous-tend le scénario de V. Les Visiteurs portent un uniforme dont l’emblème reprend la forme de la croix gammée, leurs armes sont des variantes futuristes de Luger allemands, le mouvement des « amis des Visiteurs » s’inspire des jeunesses hitlériennes… L’utilisation habile de la propagande, l’incitation à la collaboration et à la délation, la formation de mouvements de résistance, tout dans la série se veut un reflet de ce que fut l’Europe occupée pendant la seconde guerre mondiale, avec en filigrane la question fatidique : et si ça recommençait ? Le V du titre désigne alors non seulement les Visiteurs mais aussi le V de la victoire qui sert de signe de ralliement aux nouveaux maquisards. Le jeu du miroir déformant est d’autant plus efficace que V déploie par ailleurs une mise en forme très récréative assumant pleinement sa nature de récit de science-fiction. D’où l’emploi d’effets visuels très ambitieux pour montrer les soucoupes géantes et les vaisseaux de chasse, ainsi que des maquillages spéciaux spectaculaires lorsque le visage des Visiteurs révèle leur véritable morphologie de reptiles extra-terrestres. Après la première mini-série V et sa suite V : la bataille finale (trois épisodes de 90 minutes), l’histoire aurait dû s’arrêter là, laissant le public accroché à un cliffhanger habile. Mais le succès mérité de ce show remarquable (assurément l’un des plus importants de son époque) donna naissance à une suite déployant sur 19 épisodes des aventures efficaces mais beaucoup moins subtiles, laissant la science-fiction prendre largement le pas sur la métaphore historico-politique. Kenneth Johnson, lui, quitta le navire à mi-parcours, suite à un désaccord avec NBC.

 

© Gilles Penso


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UNDER THE DOME (2013-2015)

Stephen King et Steven Spielberg collaborent pour la première fois à l’occasion de cette série de SF/catastrophe au postulat très intriguant…

UNDER THE DOME

 

2013/2015 – USA

 

Créée par Brian K. Vaughan

 

Avec Mike Vogel, Rachelle Lefèvre, Alexander Koch, Colin Ford, Mackenzie Lintz, Dean Norris, Natalie Martinez, Britt Robertson, Aisha Hinds, Jeff Fahey

 

THEMA EXTRA-TERRESTRES I SAGA STEPHEN KING

La rencontre artistique de Stephen King et Steven Spielberg faillit se concrétiser à plusieurs reprises, mais les deux hommes ne parvinrent pas à accorder leurs violons sur la série Histoires fantastiques ni sur le téléfilm Rose Red. Selon l’adage populaire, la troisième tentative est la bonne. Elle prend forme à l’occasion de Under the Dome, adaptation télévisée du roman fleuve « Dome », publié en 2009, dans lequel une gigantesque cloche transparente se pose inexplicablement sur la petite ville imaginaire de Chester’s Mill, dans le Maine, isolant ses habitants et suscitant des tensions croissantes. Produite par la compagnie Amblin, la série affirme sa personnalité forte et son style marqué dès le premier plan du pilote réalisé par Niels Arden Oplev, au cours duquel un globe qui ressemble à la planète Terre s’avère être un œuf duquel éclot soudain un oiseau, symbole de l’avènement d’une nouvelle ère… « C’est un roman génial qui arrive sur le petit écran sous d’excellents auspices et dont les qualités de production vont permettre de créer un événement dans la programmation estivale » (1) annonce à l’époque Neal Tassler, producteur sous contrat chez CBS et showrunner de la série, très confiant dans son succès à venir.

Le casting solide nous présente une série de protagonistes disparates, sur le mode éprouvé du film catastrophe : les policiers, les adolescents, le politicien, la journaliste, ainsi qu’un ancien militaire aux motivations floues. Tout ce beau monde se retrouve isolé par un titanesque dôme qui les enferme soudain dans la ville. Le surgissement de cet objet mystérieux et translucide se traduit à l’écran par une série de saynètes choc et spectaculaires : un tremblement de terre généralisé, une vache littéralement coupée en deux dans le sens de la longueur, des oiseaux qui tombent du ciel, un avion de tourisme qui s’écrase contre une barrière invisible, des véhicules qui s’aplatissent en une orgie surréaliste de tôles froissées. Passée cette entrée en matière musclée, la série peut prendre le temps d’installer les situations. Le huis clos révèle les caractères, redéfinit les rôles et redistribue les cartes. Tandis que les forces militaires, le gouvernement et les médias commencent à se positionner à l’extérieur de la barrière pour tenter de la faire tomber, les habitants piégés à l’intérieur du dôme trouvent leurs propres moyens de survie avec des ressources qui diminuent et des tensions qui augmentent…

La vie sous cloche

Soignée et bénéficiant d’un budget confortable, la série est développée par Brian K. Vaughan et diffusée sur CBS à partir du 24 juin 2013, rencontrant des audiences plus que satisfaisantes. Forte de ce démarrage en beauté (13,5 millions de spectateurs dès le pilote), Under the Dome se développe sur 39 épisodes de 40 minutes pendant trois saisons. La confrontation tant attendue entre l’auteur King et le producteur Spielberg est donc un succès incontestable. Du moins dans sa première saison, très appréciée du public et saluée par ma critique. Mais dès la seconde, les choses se gâtent, comme si les scénaristes ne parvenaient pas à gérer sur la longueur le principe du huis-clos imposé par le postulat du roman original. Les intrigues finissent donc par se répéter, les personnages par manquer de crédibilité et les péripéties par ressembler à des prétextes artificiels pour maintenir la tension. Ce problème court sur la troisième saison qui sera la dernière du show, dont le démarrage en beauté était riche en promesses qui ne seront pas toutes tenues.

 

(1) Extraits d’une interview publiée dans « Deadline » en novembre 2012.

 

© Gilles Penso


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TWIN PEAKS (1990-1991)

L’horreur, l’enquête policière, le fantastique, la comédie et la romance s’entremêlent dans cette série fascinante créée par Mark Frost et David Lynch…

TWIN PEAKS

 

1990/1991 – David Lynch et Mark Frost

 

Réalisé par Real

 

Avec Kyle MacLachlan, Lara Flynn Boyle, Sherilyn Fenn, Everett McGill, Jack Nance, Ray Wise, Joan Chen, Dana Ashbrook, Piper Laurie, Sheryl Lee

 

THEMA TUEURS I DIABLE ET DÉMONS I SAGA DAVID LYNCH TWIN PEAKS

C’est en travaillant sur deux projets qui ne virent jamais le jour, une biographie romancée de Marilyn Monroe (The Goddess) et une comédie fantastique absurde (One Saliva Bubble), que David Lynch (qui sort alors de Blue velvet) et Mark Frost (scénariste de Hill Street Blues et Les Envoûtés) se lient d’amitié. Désireux de collaborer ensemble sur une série télévisée (sous les conseils de Tony Krantz, l’agent de Lynch), les deux hommes discutent à bâtons rompus et se focalisent sur une première image : le corps sans vie d’une jeune femme échoué au bord de l’eau, dans une petite ville américaine. Tout part de là. « Le projet était de mélanger une enquête policière avec la vie ordinaire de plusieurs personnages », raconte David Lynch. « On avait dessiné un plan de la ville. On savait où tout était situé, ce qui nous a aidé à déterminer l’atmosphère générale et ce qu’il pouvait s’y passer. Je crois qu’il est difficile de dire ce qui a fait de Twin Peaks, Twin Peaks. Je ne crois pas que nous ayons su nous-mêmes ce que c’était ! En tout cas la chaîne ABC a accepté de produire le pilote » (1). Tourné à Snoqualmie, dans l’État de Washington, et baptisé « Qui a tué Laura Palmer ? », ce premier épisode donne tout de suite le ton.

En 1989, un pêcheur découvre un cadavre nu enveloppé dans du plastique sur la rive d’une rivière à l’extérieur de la ville de Twin Peaks. Lorsque le shérif Harry S. Truman (Michael Ontkean), ses adjoints et le médecin Will Hayward (Warren Frost) arrivent, le corps est identifié comme étant celui de Laura Palmer. L’émotion qui saisit la population locale est alors immense. Comment cette adorable lycéenne, reine du bal de fin d’année et fille modèle, a-t-elle pu finir comme ça ? Qui est coupable d’un tel crime ? Une deuxième jeune fille, Ronette Pulaski (Phoebe Augustine), est bientôt découverte grièvement blessée et désorientée juste de l’autre côté de la frontière de l’État. Face à une telle situation, le FBI décide de dépêcher sur place l’agent spécial Dale Cooper (Kyle MacLachlan). Cet homme aux méthodes peu orthodoxes examine le corps de Laura et découvre une minuscule lettre dactylographiée, « R », insérée sous l’ongle de la jeune fille. Cooper informe alors les habitants que la mort de Laura correspond à la signature d’un tueur qui a assassiné une autre fille dans le sud-ouest de l’État de Washington l’année précédente, et que plusieurs preuves indiquent que le tueur vit à Twin Peaks…

Qui a tué Laura Palmer ?

Diffusée une première fois en France sous le titre de Mystères à Twin Peaks avant d’être rebaptisée sous son label international Twin Peaks, cette série insaisissable reste aujourd’hui encore une énigme. Sa capacité à mixer en un tout cohérent les codes du soap opera, du feuilleton policier et de la série d’épouvante tout en y injectant une bonne dose d’humour et de surréalisme continue à nous surprendre par la sublime alchimie de ses ingrédients disparates, alchimie que personne, y compris Lynch et Frost, ne parvint à reproduire par la suite. Pour donner corps à leur récit excentrique, Lynch et Frost s’offrent un casting de premier ordre. Car Twin Peaks est avant tout une œuvre chorale, dominée par un Kyle MacLachlan qui, après s’être frotté à Lynch dans Dune et Blue Velvet, trouve là le meilleur rôle de sa carrière. Cet agent du FBI jovial qui se fie autant à ses rêves et à ses intuitions qu’aux preuves qu’il récolte, sorte d’inspecteur Columbo new age qui s’enthousiasme avec excès pour une tarte aux cerises ou un café tout en résolvant le plus étrange des crimes, est depuis entré dans la légende. Le surnaturel s’invite très tôt dans la série, au fil de séquences d’épouvante redoutablement efficaces (ah, les fameux surgissements du terrifiant Bob !) et de scènes oniriques récurrentes situées dans une chambre rouge où Cooper tente de glaner de précieux indices. Ce chef d’œuvre télévisuel en deux saisons, dont l’atmosphère repose beaucoup sur la langoureuse musique d’Angelo Badalamenti, sera suivi d’un long-métrage en 1992, Twin Peaks : Fire Walks With Me, puis d’une troisième saison tardive en 2017. Lynch y tente – un peu en vain – de retrouver la magie de cette série somptueuse, effrayante, fascinante, drôle, triste et déstabilisante.

 

(1) Propos extraits du livre « David Lynch, entretiens avec Chris Rodley », 1997

 

© Gilles Penso

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MYSTÈRES DE HAVEN (LES) (2010-2015)

Librement inspirée par un roman de Stephen King, cette série fantastico-policière plonge son héroïne dans un entrelacs de phénomènes paranormaux…

HAVEN

 

2010/2015 – USA

 

Créée par Sam Ernst et Jim Dunn

 

Avec Emily Rose, Lucas Bryant, Eric Balfour, Nicholas Campbell, Mary-Colin Chisholm, Michelle Monteith

 

THEMA POUVOIRS PARANORMAUX I SAGA STEPHEN KING

Suite au succès de la série Dead Zone, la même équipe se lance dans Les Mystères de Haven, adaptation du court roman « Colorado Kid » de Stephen King. Publié en 2005, le livre est lui-même librement inspiré des exactions d’un véritable tueur australien dans les années 40. Ce texte étant difficilement adaptable tel quel, les scénaristes s’en éloignent considérablement pour imaginer 78 épisodes n’ayant pas grand-chose à voir avec Stephen King, malgré de nombreuses références à son œuvre tout au long des cinq saisons de la série. Les villes imaginaires de Castle Rock et Derry, par exemple, y sont régulièrement citées. Sans compter les clins d’œil répétés à « Ça », « Shawshank Redemption », « Le Fléau », « La Tour sombre », « Christine », Maximum Overdrive et « Misery ». Engagés pour écrire le pilote puis pour développer l’ensemble de la série, les scénaristes Sam Ernst et Jim Dunn envisagent d’abord un show policier teinté de suspense et d’épouvante mais dénué de tout élément fantastique. « Où sont les éléments surnaturels ? » s’empresse alors de réagir Stephen King, les poussant de fait à revoir leur copie.

L’héroïne du show, Audrey Parker (Emily Rose), agent du FBI, traque un fugitif dans la petite ville de Haven, au cœur du Maine, dont la rue principale parait échappée d’un western et où l’activité principale semble être la pêche. Elle y rencontre un policier local, Nathan Wuornos (Lucas Bryant), qui la sauve dès son arrivée dans Haven, une fissure créée soudainement dans le sol précipitant sa voiture au bord d’une falaise. Wuornos a une particularité physique pour le moins inhabituelle : il ne ressent pas la douleur. Sur place, Audrey trouve le cadavre du fugitif qu’elle poursuivait, mort dans des conditions inexpliquées, ainsi qu’un duo de vénérables journalistes du Haven Herald, rescapés du roman de Stephen King. Elle apprend alors qu’elle est personnellement reliée aux secrets enfouis dans les tréfonds de cette ville côtière. Au bout d’un moment, elle finira même par quitter le FBI pour rejoindre la police locale et réaliser que son arrivée à Haven a peut-être été organisée à l’avance. Et si son nom et ses souvenirs ne lui appartenaient pas ?

Catastrophes (sur)naturelles

Dès le premier épisode, les extravagances saturent les lieux. Des aberrations météorologiques (un brouillard extrêmement épais qui surgit de nulle part puis disparaît aussi sec, une soudaine pluie de grêle, une chute de neige furtive) semblent être liées à une femme dont les émotions provoquent des intempéries. Ce n’est que le prélude d’une foule de phénomènes paranormaux qui frappent Haven d’épisode en épisode, comme ce fut visiblement le cas autrefois, longtemps avant l’arrivée d’Audrey dans la ville. « Quand on a tout écarté, il faut accepter ce qui reste » affirme-t-elle, comme si elle mixait à elle seule les personnalités de Fox Mulder et Dana Scully. De fait, X-Files semble être l’une des sources d’inspiration majeures des Mystères de Haven, tout comme Twin Peaks, les séries de Chris Carter et David Lynch figurant parmi les shows télévisés préférés de Stephen King depuis la fin des années 80. Mais la spontanéité n’est pas vraiment de mise et l’humour lié au tempérament désinvolte d’Audrey Parker et à ses répliques cinglantes semble un peu forcé. La série est tout de même un succès, puisqu’elle est diffusée pendant cinq années consécutives sur la chaine SyFy aux États-Unis et sur Showcase au Canada. On note un thème musical envoûtant de Shawn Pierce qui n’est pas sans évoquer celui de Candyman composé par Philip Glass.

 

© Gilles Penso


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22-11-63 (2016)

Un professeur d’anglais découvre une faille spatio-temporelle qui pourrait lui permettre d’empêcher l’assassinat de JFK…

11-22-63

 

2016 – USA

 

Créée par Bridget Carpenter

 

Avec James Franco, Chris Cooper, Sarah Gadon, George MacKay, Lucy Fry, Daniel Webber, Cherry Jones

 

THEMA VOYAGES DANS LE TEMPS I SAGA STEPHEN KING

Au fil de ses écrits – fictifs ou non – Stephen King évoque très souvent l’assassinat du président Kennedy, qui marqua un tournant décisif dans sa vie et dans sa perception du monde. « Presque tous mes contemporains se souviennent de ce qu’ils faisaient lorsqu’ils ont appris l’assassinat de Kennedy », dit-il. « Cet événement tragique et les trois jours de deuil qui ont suivi sont sans doute ce qui se rapproche le plus dans l’Histoire d’une période de conscience de masse, d’empathie de masse et – avec le recul – de mémoire de masse : deux cent millions de personnes tétanisées par le choc » (1). Il finit par tirer un roman de cette histoire, qu’il mâtine de science-fiction. Baptisé « 22/11/63 » (date du drame), le livre sort en librairie en 2011. Sur plus de 900 pages, King raconte l’histoire palpitante d’un homme qui tente d’empêcher l’assassinat de JFK en voyageant dans le temps et qui tombe amoureux d’une jeune femme des années 60. Pour étayer son récit, King effectue un nombre considérable de recherches, étudie toutes les théories relatives à l’événement, visite les lieux du drame et rencontre un grand nombre d’experts sur le sujet. Il souhaite en effet coller le plus près possible à la réalité.

Riche en rebondissements, le roman est d’abord censé servir de base à une adaptation cinématographique sous la direction de Jonathan Demme (Le Silence des agneaux). Mais ce dernier ne parvient pas à s’entendre avec Stephen King et passe son tour. 22-11-23 devient finalement une mini-série de neuf épisodes produite par Bridget Carpenter, J.J. Abrams, Stephen King et Bryan Burk. James Franco y incarne Jake Epping, un professeur d’anglais du Maine récemment divorcé découvrant dans l’arrière-boutique d’un restaurant un passage temporel lui permettant de se retrouver dans le passé, plus précisément en 1958. C’est le patron du snack, son ami Al Templeton (Chris Cooper), qui lui fait part de cette bizarrerie spatio-temporelle. En utilisant cette faille, Al planifie depuis longtemps une stratégie visant à empêcher Lee Harvey Oswald d’assassiner Kennedy afin de modifier le cours du temps et d’empêcher notamment la guerre du Vietnam. Mais Al souffre d’un cancer et demande à Jack de reprendre sa mission. Après bien des hésitations, Jake accepte et se retrouve dans un passé dont il ne connaît rien…

La faille

Remarquable, la série développe plusieurs idées passionnantes, comme celle du passé qui repousse ceux qui veulent le modifier, ajoutant des éléments de suspense inattendus, ou encore du voyageur temporel qui est resté coincé dans une boucle. Au sein de cette superbe reconstitution de l’Amérique des années 60 (qui réutilise certaines archives réelles de la campagne de JFK), James Franco nous offre une interprétation pleine de sensibilité et d’exaltation. Quelques subtils clins d’œil à l’œuvre de Stephen King jalonnent le récit sans ostentation, à la grande joie des fans de l’écrivain : la Plymouth Fury rouge de Christine, un passant qui ressemble au Randall Flagg du Fléau, le nom de plusieurs établissements présents dans Carrie, une réplique de Misery, l’inscription « Redrum » héritée de Shining… Mélangeant les genres, 22-11-63 manie la science-fiction, le suspense, l’humour, l’épouvante (avec quelques portraits d’hommes violents à glacer le sang, comme le boucher qui assassine sa famille à coups de marteau ou l’époux qui mutile sa femme infidèle) et surtout beaucoup d’émotion, notamment au moment d’un final empreint de mélancolie.

 

(1) Extrait de l’essai « Écriture : mémoires d’un métier » de Stephen King, paru en 2000.

© Gilles Penso


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SUPERMINDS (1985-1986)

Les aventures délirantes d’une jeune équipe de super-héros parmi lesquels on découvre une toute jeune Courteney Cox…

MISFITS OF SCIENCE

 

1985/1986 – USA

 

Créée par James D. Parriott

 

Avec Dean Paul Martin, Kevin Peter Hall, Mark Thomas Miller, Courteney Cox, Diane Civita, Jennifer Holmes, Max Wright, Mickey Jones

 

THEMA SUPER-HÉROS

C’est Brandon Tartikoff, à l’époque président de NBC Entertainment, qui a l’idée de la série Misfits of Science et en trouve même le titre (autrement dit « Les Marginaux de la science », bizarrement traduit par Superminds en France). « Nous nous sommes un peu inspirés de la dynamique de groupe que nous avons découverte dans S.O.S. fantômes », raconte-t-il. « Nous cherchions à créer une série moderne qui donne un coup de fouet aux téléspectateurs en changeant leurs habitudes » (1). Au-delà de l’influence de Ghostbusters, encore dans toutes les mémoires un an après sa sortie, Superminds semble aussi chercher l’inspiration du côté des X-Men créés par Stan Lee et Jack Kirby, dont il constitue une sorte de variante légère et burlesque. Car Misfits of Science ne se prend jamais au sérieux et s’amuse à détourner les clichés des histoires de super-héros. En tête d’affiche, quelques noms ressortent du lot : Dean Paul Martin (connu surtout pour être le fils du crooner Dean Martin), Kevin Peter Hall (dont la taille impressionnante lui permettra d’incarner plus tard les créatures de Predator, Predator 2 et Bigfoot et les Henderson) ou encore une toute jeune Courteney Cox (venue à l’époque pour participer au casting de la série d’espionnage Code Name : Foxfire, et finalement parachutée dans Superminds).

Superminds met en scène une équipe hors du commun dirigée par le docteur Billy Hayes (Martin), un jeune chercheur de l’Institut Humanidyne spécialisé dans les « anomalies humaines ». Si Hayes ne possède aucun super-pouvoir, on ne peut pas en dire autant de ses compagnons. Le docteur Elvin Lincoln (Hall) a la capacité de rétrécir pendant quelques minutes pour atteindre une taille de 28 centimètres grâce à des traitements hormonaux qu’il active en appuyant sur un nerf à l’arrière de son cou. Johnny Bukowski (Mark Thomas Miller), lui, est un musicien de rock’n roll qui, suite à une électrocution sur scène, a la capacité de contrôler l’électricité (et qui porte des lunettes de soleil pour cacher ses yeux qui brillent lorsqu’il est complètement chargé). Quant à Gloria DInallo (Cox), il s’agit d’une adolescente perturbée, avec des antécédents de délinquance juvénile, qui possède des pouvoirs télékinétiques. Au départ, la série met aussi en scène Ice Man (Mickey Jones), un homme capable de geler tout ce qu’il touche, mais sa trop forte ressemblance avec l’Iceberg des X-Men pousse les producteurs à supprimer le personnage après l’épisode pilote. Les héros conserveront malgré tout comme moyen de locomotion leur camion de crème glacée (justifié initialement par la présence de cet Ice Man).

Trésor maya, aliens, dauphins parlants et hamburgers irradiés

Les aventures de ces « Misfits » se déploient au fil de 16 épisodes au rythme soutenu au cours desquels ils cherchent à exhumer un trésor maya caché sous Beverly Hills, à entrer en contact avec des extra-terrestres, à identifier un homme primitif apparu sur Venice Beach, à empêcher des gangsters d’utiliser des dauphins parlants pour mettre la main sur leur butin, à venir en aide à un agent de la CIA bionique, à enrayer une épidémie provoquée par un lapin contaminé ou à réfréner les effets de hamburgers irradiés dotant leurs consommateurs de super-pouvoirs ! On le voit, la série part un peu dans tous les sens et finit par déstabiliser le public qui peine à s’y attacher pleinement. Les audiences baissent donc peu à peu et NBC décide d’en interrompre la diffusion en février 1986. En France, la série génèrera un petit culte grâce à son apparition sur les chaînes éphémères TV6 et La Cinq. L’Allemagne lui réservera de son côté un accueil très chaleureux. Superminds aura en tout cas servi de pied à l’étrier à Courteney Cox, future star de Friends et Scream, mais aussi au scénariste Tim Kring, qui lancera plus tard une série au sujet voisin : Heroes.

 

(1) Extrait d’une interview publiée dans le « Palm Beach Post » en juillet 1985.

 

© Gilles Penso


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SUPER JAIMIE (1976-1978)

Après L’Homme qui valait trois milliards, voici la femme bionique, largement aussi populaire que son homologue masculin…

THE BIONIC WOMAN

 

1976/1978 – USA

 

Créée par Kenneth Johnson

 

Avec Lindsay Wagner, Richard Anderson, Martin E. Brooks, Ford Rainey, Sam Chew Jr., Jennifer Darling, Martha Scott, Lee Majors, Christopher Stone

 

THEMA SUPER-HÉROS I ESPIONNAGE ET SCIENCE-FICTION

À l’origine, le personnage de Jaimie Sommers (Lindsay Wagner) était simplement conçu pour faire une apparition éphémère dans un épisode en deux parties de L’Homme qui valait trois milliards produit en 1975, « La femme bionique ». Dans ce double programme, Steve Austin (Lee Majors) retourne dans sa ville natale d’Ojai, en Californie, et renoue avec son amour de lycée, Jaimie, devenue entre-temps l’une des cinq meilleures joueuses de tennis des États-Unis. Victime d’un accident de parachute, celle-ci tombe de plusieurs centaines de mètres et se retrouve entre la vie et la mort. Bouleversé, Steve supplie alors son patron, le bon vieil Oscar Goldman (Richard Anderson), de la rendre bionique comme lui, en échange de quoi ils en feront un agent actif de l’OSI (Office of Scientific Intelligence). Malgré ses réticences, Goldman finit par accepter et charge le docteur Rudy Wells (Alan Oppenheimer) de « réparer » la jeune femme. Grâce à des implants cybernétiques, Jaimie possède peu ou prou les mêmes pouvoirs que Steve Austin, autrement dit deux nouvelles jambes qui lui permettent de courir ou de sauter plus vite et plus haut que n’importe qui ainsi qu’un bras droit d’une force surhumaine. La différence se situe au niveau du visage. Alors que Steve peut voir très loin grâce à son œil bionique, Jaimie est dotée d’une ouïe extrêmement fine. Nos deux agents secrets s’en vont bientôt bras dessus bras dessous lutter contre un redoutable faux monnayeur. Mais le corps de Jaimie finit par rejeter ses implants et provoque son trépas. Fin du double épisode. Exit la femme bionique.

Mais les téléspectateurs ne sont pas d’accord. Cette Jaimie Sommers leur a tapé dans l’œil et ils veulent à tout prix la voir revenir. Les producteurs de la série comprennent qu’ils ont sans doute tué trop tôt la poule aux œufs d’or et décident donc de faire revenir Jaimie Sommers dans un nouveau double épisode (« Le Retour de la femme bionique ») avant de lui offrir sa propre série. Ainsi naît Super Jaimie. L’actrice Lindsay Wagner pensait solder son contrat avec Universal avec un rôle censé n’être que provisoire et temporaire. Or la voilà désormais star d’un show ultra-populaire qui durera jusqu’en 1978. Son personnage devient donc membre officiel de l’OSI. Sous couverture officielle de son métier d’enseignante auprès de collégiens et de lycéens sur une base de l’air force, elle participe à toutes sortes de missions secrètes qui l’amènent à parcourir le monde sous les identités les plus variées. Richard Anderson continue à incarner son boss Oscar Goldman, assurant le lien entre les deux séries. Quant à Lee Majors, il viendra de temps en temps jouer les guest-stars dans Super Jaimie, Lindsay Wagner lui rendant la politesse en montrant parfois sa frimousse dans L’Homme qui valait trois milliards.

Girl Power

Super Jaimie possède à peu près autant d’attrait que L’Homme qui valait trois milliards, les deux séries devant leur succès autant à leur concept audacieux (inspiré par le roman « Cyborg » de Martin Caidin) qu’à leurs acteurs principaux. Dans la peau de Jaimie Sommers, Lindsay Wagner est parfaite. Son capital sympathie, son charme et son charisme emportent immédiatement l’adhésion de tous. La mise en scène de ses super-pouvoirs recycle logiquement les gimmicks associés à Steve Austin (les prises de vues au ralenti et le fameux bruitage à base d’échos métalliques répétés). Les épisodes, de leur côté, alternent la lutte contre des criminels ordinaires avec le surgissement d’éléments de science-fiction joyeusement excessifs, notamment les fameuses femmes robots aux visages bourrés de dispositifs électroniques (qui effraieront d’ailleurs les associations de parents d’élèves, inquiètes que leurs bambins ne soient traumatisés par de telles créatures contre-nature). Lorsque Kenneth Johnson quitte la série à la fin de la deuxième saison pour s’occuper de L’Incroyable Hulk, la qualité des scripts décline progressivement et le show s’arrête en mai 78, ce qui ne l’empêchera pas d’être rediffusé dans le monde entier avec un succès jamais démenti. Trois téléfilms mettront en scène Steve Austin et Jaimie Sommers entre la fin des années 80 et le milieu des années 90, avant la mise en chantier d’un remake de Super Jaimie, Bionic Woman, en 2007

 

© Gilles Penso

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SPECTREMAN (1971-1972)

L’un des super-héros les plus involontairement drôles de l’histoire de la télévision affronte des monstres impensables lâchés sur notre planète…

SUPERKUTORUMAN

 

1971/1972 – JAPON

 

Créée par Ushio Shoji

 

Avec Tetsuo Narikawa, Toru Ohira, Kazuo Arai, Machiko Konish, Gara Takatori, Takanobu Toya, Koji Uenishi, Koji Ozaki, Yoko Shin, Takamitsu Watanabe

 

THEMA SUPER-HÉROS I EXTRA-TERRESTRES

« La planète Terre… La ville Tokyo… Comme toutes les villes à la surface du globe, Tokyo est en train de perdre la bataille contre ses deux ennemis les plus mortels : la dégradation de la nature et la pollution. En dépit des efforts désespérés de toutes les nations, l’air, la mer, les continents, perdent de plus en plus leur capacité à entretenir toute forme de vie… Quel est leur dernier recours ? Spectreman ! » Après ce texte d’introduction sentencieux et un poil inquiétant, la chanson du générique démarre sur un tempo joyeusement disco, gorgé de paroles d’une sublime poésie : « Plus rapide qu’un missile, audacieux, inflexible, mystérieux et invincible… Spectreman ! » Les téléspectateurs français qui découvrirent cette série invraisemblable en 1982 sur la défunte chaîne Antenne 2 n’étaient tous simplement pas prêts. San Ku Kaï avait pourtant déjà préparé le terrain, déclinant la vogue du space opera provoquée par la sortie de La Guerre des étoiles. Mais Spectreman, c’est autre chose : un super-héros gigotant au casque en pointe, des maquettes risibles suspendues par des fils bien visibles, une avalanche de monstres en caoutchouc grotesques… Contrairement à ce que sa diffusion hexagonale peut laisser imaginer, Spectreman est d’ailleurs antérieur à San Ku Kaï et s’inscrit dans la directe lignée d’une autre série de science-fiction nippone alors parfaitement inconnue en nos contrées : Ultraman.

La série se déroule dans un futur proche où la pollution est devenue un problème global qui affole toutes les nations. Le sujet peut sembler en avance sur son temps, mais les prises de consciences environnementales étaient déjà très présentes à l’aube des années 70, surtout à Tokyo considérée à l’époque comme la ville la plus polluée du monde. Au moment où Spectreman entrait en production sortait d’ailleurs sur les grands écrans Godzilla contre Hedora, où le célèbre dinosaure radioactif affrontait un monstre en perpétuelle mutation né d’une accumulation de déchets et d’ordures. Dans Spectreman, le grand méchant est Gori, un homme singe extra-terrestre au masque en plastique figé (ancêtre du Siman de San Ku Kaï ?) qui cherche à dominer la Terre en créant des monstres à partir de la pollution. La Fédération Galactique décide alors d’envoyer sur notre planète le cyborg Spectreman. Comme tout super-héros qui se respecte, ce dernier se dissimule sous une identité ordinaire, celle d’un sympathique et maladroit employé de bureau. Mais dès que le devoir l’appelle, il se transforme en ninja volant à taille variable et se bat contre les créatures géantes conçues par Gori…

Gare au Gori !

Même en s’interdisant tout cynisme et en s’efforçant de conserver la nostalgie de nos jeunes années post-San Ku Kaï et pré-X-Or, il est très difficile de revoir aujourd’hui un épisode de Spectreman sans être secoué de fous rires. Cette hilarité incontrôlable n’est pas tant due à l’absurdité des scénarios, à la pauvreté des cascades ou au jeu outré des comédiens, mais s’explique surtout par le fait que Spectreman est une véritable collection des monstres les plus ridicules jamais montrés sur un écran. Même avec des yeux d’enfant, le spectacle se révélait déjà aberrant. Pour autant, Spectreman put jouir d’un succès populaire à grande échelle, peut-être justement parce que les gamins se prêtaient au jeu avec une sorte d’assentiment complice. Voir toutes ces bestioles incarnées par des acteurs dans des combinaisons fort peu seyantes, ce super-héros jouant les justiciers dans sa panoplie en plastique ou ces engins extra-terrestres ne cachant jamais leur nature de maquettes miniatures, c’était une manière de s’amuser avec les réalisateurs et les acteurs, pour pouvoir ensuite, après la diffusion de chaque épisode, en reproduire les péripéties à l’aide de dinosaures en plastique et de petits soldats. Les effets spéciaux ratés en deviendraient presque des atouts, poussant par leur caractère tactile les jeunes téléspectateurs à tenter de les reproduire chez eux, comme face aux poupées des Thunderbirds. Un nombre impressionnant de produits dérivés fut commercialisé à l’époque de la diffusion (albums d’images, verres à moutarde, bandes dessinées, romans) et s’arrachent aujourd’hui à prix d’or chez les collectionneurs.

 

© Gilles Penso


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SEAQUEST, POLICE DES MERS (1993-1996)

Dans un futur proche, un submersible militaire dernier cri est reconverti en véhicule d’exploration des fonds marins…

SEAQUEST

 

1993/1996 – USA

 

Créée par Rockne S. O’Bannon

 

Avec Roy Scheider, Jonathan Brandis, Stephanie Beacham, Don Franklin, Michael Ironside, Ted Raimi, Marco Sanchez, Frank Welker, Peter DeLuise

 

THEMA FUTUR

« Qu’elle soit organique, animale ou végétale, toute forme de vie est issue de la mer. Il est d’ailleurs établi qui nous avons le même pourcentage de sel dans notre sang. La mer fait partie de nous. Nous devons la respecter. Lorsque nous revenons vers elle, que ce soit pour la contempler, y nager, y naviguer, nous effectuons un retour aux sources… » C’est sur ce texte que commence le premier épisode de Seaquest, une série TV écologiste, on l’aura compris, mais aussi futuriste, puisqu’elle se déroule en l’an 2018 (soit 25 ans après son année de réalisation). Les pays du monde se sont groupés en Union des États Océaniques et le Seaquest DSV (Deep Submergence Vehicle en VO, Division Sous-marine de Vérification en VF), un gigantesque vaisseau sous-marin militaire, s’est reconverti dans la sécurité. Le créateur du Seaquest est Nathan Bridger, interprété par Roy Scheider, qui fut vingt ans plus tôt le shérif des Dents de la mer, un personnage qui détestait l’eau ! Bridger est sollicité par l’amirauté pour devenir le nouveau commandant du vaisseau, mais depuis que son fils est mort en mer, il refuse de s’embarquer et mène une vie de reclus aux Caraïbes en compagnie de son dauphin Darwin. Les agissements criminels d’un sous-marin rebelle et l’absence de commandant à bord du Seaquest vont pousser Bridger à reprendre les commandes. Et l’aventure commence, avec un petit air de Star Trek sûrement pas involontaire.

Les séquences sous-marines de la série impliquent une grande quantité d’effets spéciaux. Mais les créateurs de Seaquest sont des habitués de la question, puisque le producteur exécutif n’est autre que Steven Spielberg et que le réalisateur du premier épisode est Irvin Kershner, metteur en scène de L’Empire contre-attaque et Robocop 2. Au lieu d’utiliser des maquettes de submersibles, des décors miniatures, des peintures sur verre et d’autres techniques traditionnelles, (comme c’était par exemple le cas dans Abyss), le choix se porte directement sur l’image de synthèse. C’est dans l’air du temps. Réalisée quasi-simultanément, la série de SF Babylon 5 optait pour un choix similaire, profitant des dernières avancées technologiques en la matière. C’est donc digitalement que sont conçus les engins futuristes du show comme le Seaquest lui-même, dont la forme allongée évoque un peu le submersible de L’Homme de l’Atlantide, mais aussi le Delta 4, un vaste sous-marin rebelle, le Whiskers, un véhicule d’observation sphérique, ou encore l’hydroprospecteur, une sonde quadrupède télécommandée. Les décors immergés tels que l’imposante exploitation minière, la Centrale de Gedrit ou l’exploitation agricole de West Ridge, sont également des créations numériques. Tout comme le dauphin Darwin lorsqu’il traverse l’océan en plan large, propulsé dans un lance torpilles, pour déposer une balise explosive sur un sous-marin rebelle. Dans les plans serrés, l’aimable mammifère est une création animatronique conçue par Walt Conti, grand spécialiste de cette discipline.

Sous l’océan…

Visuellement, Seaquest est donc un spectacle grandiose se donnant les moyens de ses ambitions. Son approche initialement réaliste se teinte progressivement d’éléments de pure fantaisie. D’où l’intervention de créatures extra-terrestres, de civilisations perdues et même du dieu des océans Neptune. La série finit donc par ressembler à une variante modernisée de Voyage au fond des mers. En coulisses, le climat n’est pas au beau fixe. Les producteurs, les cadres de la chaîne NBC et les acteurs ne cessent d’entrer en discorde. Les mésententes atteignent leur point culminant au cours de la saison 3 (rebaptisée Seaquest 2023 en version originale), pour laquelle Roy Scheider tire sa révérence, cédant la place à Michael Ironside. Ce changement de casting s’accompagne d’une nette baisse d’audience qui entraîne l’interruption de la série en cours de saison. C’est dommage, parce que malgré des scénarios pas toujours aboutis et un certain manque de constance dans la cohésion des différentes saisons, Seaquest était une série pleine de promesses et d’idées passionnantes. Les amateurs du commandant Cousteau et du capitaine Kirk en gardent un souvenir nostalgique…

 

© Gilles Penso


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