GHOST POKER (2007)

Le stakhanoviste Charles Band produit et réalise cette histoire horrifique anecdotique située dans un vieux casino de Las Vegas au passé sanglant

DEAD MAN’S HAND: CASINO OF THE DAMNED

USA – 2007

Réalisé par Charles Band

Avec Was Armstrong, Michael Berryman, Kristyn Green, Sid Haig, Jack Maturin, Jessica Morris, Lily Rains, Kavan Reece

THEMA FANTÔMES I SAGA CHARLES BAND

Avec plus de 250 titres à son actif, le producteur/réalisateur Charles Band est l’un des plus grands pourvoyeurs de films d’horreur de tous les temps, alignant depuis les années 70 les shockers à petit budget avec une assiduité confinant à la boulimie. Parmi ses titres de gloire, on se souviendra surtout de Re-AnimatorFrom BeyondDolls ou encore la « saga » Puppet Master. Titanesque, sa filmographie est surtout constituée de curiosités s’efforçant d’exploiter des concepts originaux sans vraiment parvenir à s’en donner les moyens. Ghost Poker, 29ème long-métrage de Band en tant que réalisateur, appartient délibérément à cette catégorie certes sympathique mais très anecdotique. Les prémisses du scénario écrit par August White se laissent gagner par un certain esthétisme, mais à force d’attarder sa caméra dans des décors décrépits emplis de toiles d’araignée et baignées d’une chiche lumière lugubre, à force de laisser ses protagonistes y errer, une lampe de poche à la main, pendant d’interminables minutes dénuées de la moindre action, le prolifique cinéaste engourdit les sens de ses spectateurs. Certes, les deux morts violentes qui marquent la fin du prologue (le visage effrayé d’une victime qui se mue quasiment en plan-séquence en crâne décharné, la tête d’une femme qui heurte à plusieurs reprises un hublot dans d’abondantes gerbes de sang) ne manquent pas d’impact, mais est-ce suffisamment prometteur ?

La brochette de héros que le film nous présente ensuite (le beau gosse qui a hérité d’un vieux casino de Las Vegas, sa jolie petite amie, le geek idiot, l’intellectuelle à lunettes, le macho impuissant, la bimbo échaudée) plonge tête baissée dans un tel amas de clichés absurdes qu’elle ne laisse rien augurer de bon. Bientôt, le concept de Ghost Poker se fait jour. Le casino en question fut jadis le théâtre d’un véritable massacre. Mais les joueurs et mafieux qui y trépassèrent hantent encore les lieux, avides de vengeance. Or Matthew Dragna, « l’heureux » héritier, se trouve être le descendant de l’homme qui tua tout ce beau monde. Un joli carnage s’annonce donc au milieu des jackpots rouillés et des tables de jeu branlantes. Hélas, le film s’avère extrêmement bavard, gorgé de dialogues insipides soutenus par une musique synthétique omniprésente, et finalement très avare en séquences choc.

Visions surprenantes et seconds couteaux

A peine retient-on quelques visions surprenantes, comme ce spectre hurlant dont les yeux s’animent à la manière des écrans d’une machine à sous ou ce croupier qui se mue en créature obèse au regard fluorescent. Inventifs, les effets spéciaux combinent des maquettes (certaines vues extérieures du casino), des maquillages spéciaux conçus par Brannon Wright (Critters 2) et images de synthèse à petit budget concoctées par John Lechago (Mimic 2). Pour égayer un peu la morosité ambiante, Charles band fait appel à deux seconds couteaux savoureux, Sid Haig (le clown tueur de The Devil’s Rejects) et Michael Berryman (le mutant anthropophage de La Colline a des yeux), sans que le métrage n’y gagne sensiblement en intérêt. Le seul véritable mérite du film aura été d’intégrer les codes du film d’horreur à un contexte nouveau, en l’occurrence celui du jeu de poker, qui sévissait jusqu’alors dans d’autres univers cinématographiques (de L’Homme au bras d’or à Casino Royale en passant par Le Kid de Cincinatti, Il était une fois dans l’Ouest, L’Arnaque, Casino, Titanic ou Ocean’s Eleven). Charles Band ressortira le film en 2011 sous un autre titre : The Haunted Casino.

© Gilles Penso

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DARKMAN (1990)

Sam Raimi transforme Liam Neeson en super-héros sombre, torturé et horriblement défiguré

DARKMAN

1990 – USA

Réalisé par Sam Raimi

Avec Liam Neeson, Frances McDormand, Colin Friels, Larry Drake, Nelson Mashita, Jessie Lawrence Ferguson, Rafael H. Robledo 

THEMA SUPER-HEROS I SAGA DARKMAN

Quatrième long-métrage de Sam Raimi, Darkman est un film hybride qui semble hésiter entre plusieurs styles. Cet état de fait s’explique en partie par sa genèse. Raimi avait créé un événement avec Evil Dead, mais sa tentative d’aborder la comédie noire par le biais de Mort sur le grill ne fut pas accueillie avec l’enthousiasme attendu. D’où un retour aux sources avec Evil Dead 2 et un nouveau succès planétaire. Pour prouver qu’il était capable de raconter autre chose que l’affrontement de Bruce Campbell avec des démons ancestraux, le cinéaste décida d’aborder un autre de ses sujets de prédilection : le super-héros. Avec la bénédiction du studio Universal, il envisagea dans un premier temps l’adaptation de « The Shadow », célèbre justicier masqué créé par Walter B. Gibson au début des années 30. Incapable d’obtenir les droits du personnage, il s’en inspira donc largement pour créer de toutes pièces un héros d’un nouveau genre baptisé Darkman, autrement dit « l’homme sombre ».

Au départ, il s’agit d’un scientifique nommé Peyton Westlake, au travail sur un projet de peau humaine synthétique. Si les premiers essais sont concluants, la peau artificielle obtenue se désagrège hélas au bout de 99 minutes. La petite amie de Peyton, Julie, est avocate, et laisse un soir des documents compromettants dans le laboratoire de son scientifique chéri. Or un mafieux psychopathe est prêt à tout pour récupérer ces documents, quitte à mettre le feu au laboratoire et à laisser Peyton pour mort. Notre homme survit par miracle, mais il est horriblement défiguré. Grâce à sa peau synthétique, il se confectionne désormais toutes sortes de visages et se mue en justicier nocturne et vengeur. Au-delà de « The Shadow », d’autres influences classiques parsèment l’intrigue et le look de ce nouvel anti-héros : Docteur X de Michael Curtiz, Le Fantôme de l’opéra de Charles Lubin, et surtout L’Homme au masque de cire d’André de Toth, auquel Darkman doit beaucoup. Les ruptures de ton brutales du film (le mélodrame et l’humour cartoonesque s’y enchaînent sans préavis) peuvent s’avérer déstabilisantes, mais la sincérité de Sam Raimi transparaît derrière chaque photogramme.

Le justicier schizophrène

Le cinéaste en profite pour concocter une fois de plus des séquences étourdissantes reposant sur le suspense (le compte à rebours avant la désintégration du premier masque que se fabrique notre héros), l’action échevelée (la poursuite en hélicoptère) ou la poésie visuelle imprégnée de gothisme (Darkman accroupi sur une corniche qui surplombe la ville tel une gargouille). Le casting fut l’objet d’une véritable partie de chaises musicales. Raimi envisageait tout naturellement Bruce Campbell dans le rôle titre, mais le studio lui préféra Bill Paxton, jusqu’à ce que Liam Neeson, pas encore porté aux nues par La Liste de Schindler, n’hérite de ce justicier schizophrène. Sa petite amie, quant à elle, faillit être Julia Roberts, mais celle-ci opta finalement pour Pretty Woman qui la mua en superstar. C’est donc Frances McDormand, actrice fétiche des frères Coen, qui lui donna corps. Attachant malgré –ou à cause de – ses imperfections, Darkman peut s’appréhender rétrospectivement comme le premier jet de la saga super-héroïque que Raimi signera onze ans plus tard avec Spider-Man

 

© Gilles Penso

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LA PROMISE (1985)

Une relecture élégante et sensible de La Fiancée de Frankenstein illuminée par un magnifique trio d'acteurs

THE BRIDE

1985 – GB

Réalisé par Franc Roddam

Avec Sting, Jennifer Beals, Clancy Brown, Anthony Higgins, David Rappaport, Geraldine Page, Alexei Sayle, Phil Daniels, Veruschka

THEMA FRANKENSTEIN

La Promise commence exactement là où s’arrêtait La Fiancée de Frankenstein (d’où la référence au film de James Whale présente dans le titre original). Le prologue ne s’embarrasse pas d’explication quant à la situation (que tout le monde connaît) et démarre dans le feu de l’action. Un soir d’orage, dans la tour de son château, le jeune baron Charles Frankenstein (interprété par le chanteur Sting, très médiatisé pour sa petite prestation dans Dune l’année précédente) s’apprête à offrir une fiancée à la créature artificielle qu’il a créée quelques mois plus tôt (Clancy Brown, l’inoubliable Kurgan d’Highlander). Mais lorsque la jeune femme (Jennifer Beals, la star de Flashdance) surgit du néant, elle ne peut supporter la vue du monstre. Celui-ci, par dépit, détruit le laboratoire de Frankenstein puis prend la fuite. Or le baron s’aperçoit que la créature femelle à qui il vient de donner la vie est d’une grande beauté. Il la prénomme Eva et décide de faire d’elle son égale. Autrement dit une femme qui serait comme lui libre, cultivée et indépendante. Une fois son éducation achevée, il sera fier de la présenter à la haute société. « Le problème avec les femmes libres, Charles, c’est qu’elles sont libres de nous mépriser », dira à Frankenstein son collègue Clerval. « C’est un risque que je trouve inacceptable. » Pendant ce temps, le monstre, en fuite, erre à travers la campagne et rencontre le nain Rinaldo (David Rappaport). Celui-ci le prend en amitié et le nomme Viktor. Tous deux partent pour Budapest où ils sont engagés dans un cirque.

Ainsi, après une introduction référentielle évoquant les films de la période Universal, La Promise échappe à ses influences pour embarquer ses spectateurs sur un territoire bien moins balisé, le scénario s’attachant à décrire parallèlement l’apprentissage de la vie des deux créatures de Frankenstein. Pour Eva, c’est une éducation glaciale, sclérosée, voire hypocrite, alors que les expériences de Viktor sont vivantes, colorées, empreintes de joie ou de tristesse. La photographie de Stephen Burum s’en ressent, optant tour à tour pour des tonalités froides/bleutées ou chaudes/orangées. Franc Roddam et le scénariste Lloyd Fonvielle exploitent l’argument fantastique au profit du drame humain et introduisent subtilement une sorte de télépathie, un partage des émotions des deux créatures malgré la distance qui les sépare.

L'éveil de deux âmes

Quant au baron Frankenstein, le film nous en dresse un portrait guère reluisant. Orgueilleux, jaloux, possessif, il devient rapidement insupportable. L’humanité et la sensibilité d’Eva et Viktor ne s’en ressentent que davantage. Et lorsque le savant s’avère trop entreprenant avec sa féminine création, celle-ci se rebelle aussi sec. « Vous pouvez faire ce qui vous chante ! », lui crie-t-elle. « Vous pouvez défaire le corps que vous avez assemblé, vous pouvez oter la vie que vous m’avez donnée, mais vous ne me posséderez pas. Jamais. Même si vous me tuez pour me ressusciter un millier de fois, vous ne me possèderez pas. » Cette variation sur un thème pourtant bien usé brille ainsi par son intelligence et sa nouveauté. Car au-delà de la science-fiction et de l’épouvante inhérentes à l’histoire, La Promise conte avant tout l’éveil de deux âmes.

 

© Gilles Penso

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INSENSIBLES (2012)

Un film d'épouvante à cheval entre deux époque qui, contrairement à ce que son titre pourrait laisser penser, fait preuve d'une grande sensibilité

INSENSIBLES

2012 – FRANCE / ESPAGNE / PORTUGAL

Réalisé par Juan Carlos Medina

Avec Alex Brendemühl, Tomas Lemarquis, Irene Montalà, Silvia Bel, Derek de Lint

THEMA FANTÔMES

Si Insensibles est une production majoritairement française, il n’en demeure pas moins, et avant tout, un film authentiquement espagnol, une oeuvre si imprégnée de l’histoire contemporaine de son pays qu’aucune autre nationalité ne pourrait lui être attribuée.  Un film qui mêle aussi faits avérés et fantastiques,  comme, d’ailleurs, L’Echine du Diable et Le Labyrinthe de Pan, dans un registre à la fois différent et proche. Entre deux époques, les années 2010 et les années 30/40, il constitue à la fois une leçon d’histoire, une métaphore, une fable cruelle, un exercice de mémoire. Démarche certes ambitieuse pour un premier long-métrage, mais son réalisateur et scénariste, Juan Carlos Medina, possède les aptitudes nécessaires pour relever le défi qu’il s’était fixé.

Insensibles débute en même temps que les années 30. Quand, dans un bourg modeste, la Garde Civile et les institutions locales arrachent une douzaine de jeunes enfants à leur famille. Leur seul tort : ces gamins-là ne réagissent pas à la douleur, y compris à la combustion de leur propre corps ! Sous prétexte qu’ils seraient donc un danger pour eux-mêmes et les autres, ils sont enfermés dans une clinique qui tient plutôt du pénitencier, un lugubre nid d’aigle. Ils y dépérissent dans des cellules capitonnées jusqu’au jour où arrive un scientifique allemand, un Juif que le Troisième Reich pousse à l’exil en Espagne et auquel le directeur des lieux autorise des expériences auprès des enfants. Des dizaines d’années plus tard, c’est vers l’un d’eux – le seul survivant –  que remonte David Martel, un médecin gravement malade, à la recherche de ses vrais parents, les seuls aptes à le sauver en se pliant à un prélèvement de moelle épinière…

Une base historique tangible

Touffu, dense le scénario que Juan Carlos Medina écrit à quatre mains avec Luiso Berdejo. Le réalisateur  y évoque ses propres origines, les affaires de bébés volés puis adoptés qui défraient toujours la chronique en Espagne, la Guerre Civile, le Franquiste, son héritage actuel, une mauvaise conscience palpable… Cette réalité historique, il la mêle habilement  au surnaturel, quoi que, dans Insensibles, le moindre incartade vers le fantastique se justifie par du concret, s’appuie sur événements connus, tangibles, jamais fantaisistes. Dans ses allers retours entre présent et passé, Juan Carlos Medina ne laisse  effectivement rien au hasard. Malgré sa jeunesse, il fait preuve d’autant de maturité que de maîtrise de l’instrument cinéma. La concession, les compromis pour ratisser plus large, ce n’est pas dans son tempérament. Un peu d’humour, peut-être ? Non, car, dans tout ce que raconte Insensibles, dans tout ce qu’il remue, rien ne prête à rire, ni même à sourire. Un propos grave et une esthétique qui le porte, sombre, faite de couleurs saturées, d’éclairages diffus, de décors  soit blêmes soit souillés par le temps. Atmosphère anxiogène immédiate donc, pesante, prégnante, morbide même. Presque nihiliste tant l’auteur malmène, sacrifie des protagonistes sur les épaules desquels pèsent soixante-dix ans d’histoire. Sans doute aurait-il s’affranchir d’une scène de suicide (peu crédible telle qu’elle est exposée), mais le propos justifie les partis pris, la noirceur, les ambiances crépusculaires. Délicat dans sa manière de glisser vers un fantastique réel tout en étant moins explicite que  celui du Labyrinthe de Pan, radical à relayer par des images les secrets toujours enfouis de toute une nation, Insensibles contourne de surcroît l’écueil du sentimentalisme, des trémolos, des émotions faciles, du happy end perclus de rédemption. Ce qui le rend d’autant plus poignant dans son exemplaire manière de broyer du noir, d’exprimer sa sensibilité.

 

© Marc Toullec

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L’ÎLE MYSTERIEUSE (1961)

Le titan des effets spéciaux Ray Harryhausen transfigure le roman de Jules Verne en enrichissant le récit original de visions fantasmagoriques

MYSTERIOUS ISLAND

1961 – USA

Réalisé par Cy Endfield

Avec Michael Craig, Joan Greenwood, Michael Callan, Gary Merrill, Herbert Lom, Beth Rogan, Percy Herbert, Dan Jackson 

THEMA EXOTISME FANTASTIQUE I INSECTES ET INVERTEBRES I MONSTRES MARINS I REPTILES ET VOLATILES

Après le succès fracassant de 20 000 lieues sous les mers en 1954, Columbia décida d’adapter L’île mystérieuse de Jules Verne, tombé dans le domaine public. Comme dans le roman, tout commence en 1865 par l’évasion en ballon de cinq hommes prisonniers des Sudistes en pleine guerre de Sécession, sous une tempête tonitruante. Leur ballon s’abîme en mer et ils parviennent à rejoindre une île en apparence déserte. Peu après que le soldat Neb eut échappé à un crabe gigantesque, une barque échoue sur l’île avec à son bord Lady Fairchild et sa nièce Hélène. Les naufragés découvrent bientôt une caisse marquée de la lettre “N”… Bien que son scénario fasse subir bon nombre d’outrages au roman de Jules Verne, cette troisième version de L’Île mystérieuse est sans doute la meilleure de toutes, de par la féerie et le souffle épique qu’elle dégage. Et c’est une nouvelle fois l’occasion, pour le magicien des effets spéciaux Ray Harryhausen, de nous ravir avec de magnifiques décors irréels conçus à partir de peintures sur verre, des maquettes de toute beauté (dont la montgolfière de la séquence d’ouverture et la sublime cité antique sous-marine) et bien entendu toute une série d’animaux géants criants de vérité.

Ces derniers sont une invention pure par rapport au roman initial, et semblent plutôt puiser leur inspiration chez H.G. Wells, autre romancier fétiche de Harryhausen. En effet, ce gigantisme animal et ce savant reclus sur une île croyant œuvrer pour la cause scientifique ne sont pas sans évoquer respectivement “La Nourriture des Dieux” et “L’île du Dr Moreau”. Le premier de ces monstres, un crabe gigantesque, fut réalisé à partir d’une véritable carcasse de crustacé. « Le crabe que vous voyez à l’écran provient du département alimentation de chez Harrod’s », nous avoue Ray Harryhausen (1). Le second, un Phororhacos (oiseau géant préhistorique) devint, suite à une nouvelle version du scénario, un poulet géant, la scène ayant ensuite été coupée dans plusieurs copies, sans raison logique.

Des décors inspirés de King Kong

On voit encore dans ce film des abeilles géantes, qui enferment le jeune couple de héros dans une alvéole conçue à leurs proportions, et un monstre marin mi-pieuvre mi-seiche inspiré du calmar géant du 20 000 lieues sous les mers de Richard Fleisher, dont cette Île mystérieuse constitue officieusement une suite illustre, Herbert Lom succédant avec talent à l’immense James Mason dans le rôle du Capitaine Nemo. Le lien entre les deux films est confirmé par l’aspect du Nautilus, reprenant la ligne dentelée et reptilienne de celui de 1954. Malgré leur manque de réalisme, les peintures sur verre qui prolongent les décors de l’île créent une atmosphère étrangement inquiétante, plus propice à l’intervention des créatures monstrueuses que ne l’auraient été les sites naturels d’une simple île tropicale. Parmi ces peintures, la caverne dans la falaise et le tronc d’arbre qui sert de pont au-dessus d’un vaste précipice sont d’évidentes allusions à King Kong. La référence est plus compréhensible lorsqu’on sait qu’un des premiers jets du scénario envisageait les lieux comme un monde perdu peuplé de dinosaures. 

 

(1) Propos recueillis par votre serviteur en février 2004. 

 

© Gilles Penso

 

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LA TERREUR DES ZOMBIES (1979)

Un film de très bon goût qui s'efforce de faire cohabiter les morts-vivants et les cannibales au beau milieu d'un festival de séquences gore excessives !

ZOMBI HOLOCAUST

1979 – ITALIE

Réalisé par Frank Martin (alias Marino Girolami)

Avec Ian McCullogh, Alexandra Delli Colli, Sherry Buchanan, Donald O’Brien, Peter O’Neal

THEMA ZOMBIES I CANNIBALES

L’Enfer des Zombies lui ayant rapporté gros, le producteur Fabrizio de Angelis décide de doubler la mise avec La Terreur des Zombies dont il confie la réalisation à non pas Lucio Fulci, mais à Marino Girolami, un artisan aussi touche à tout que peu doué. Du western (Les Terreurs de l’OuestUn Colt et le Diable) à la comédie égrillarde (Ah mon petit puceauQuatre zizis au garde à vous) en passant par le polar (L’Autre côté de la violenceFlic en jeans), ce Marino Girolami va où le box-office le mène. Alors, à une époque où le cinéma italien le plus commercial capitalise sur le succès de la vague gore américaine, il verse logiquement dans le gore.

La démarche commerciale de La Terreur des Zombies est d’autant plus flagrante que le script mange également au râtelier d’un second succès, Cannibal Holocaust. C’est d’ailleurs tout le défi du projet : obliger morts-vivants et cannibales à la cohabitation ! Dans le scénario, tout le mérite en revient à un savant fou qui, dans le but de créer l’être humain parfait, prélève des cerveaux d’occidentaux qu’il transplante dans la boîte crânienne de sauvages revenus aux pratiques anthropophages de leurs aïeux. Résultat : des créatures zombifiées, habitant d’une île des Moluques où débarquent deux l’assistante d’un grand chirurgien, deux anthropologues et une journaliste. Leur mission : découvrir les raisons de l’empressement d’un infirmier asiatique à dévorer les cœurs des cadavres encore frais de la salle d’autopsie.

Complaisance gratuite

Éviscération, énucléation, trépanation, amputation et autres mutilations cadrées en gros plans (dont une tête réduite en bouillie par l’hélice d’un moteur), La Terreur des Zombies en donne aux amateurs du genre. Encore faut-il que ceux-ci ne soient pas trop regardants. Entre un script bancal, des dialogues navrants, des comédiens inexpressifs, des figurants pas très concernés, des images fadasses et une réalisation relâchée, le film se situe très loin derrière L’Enfer des Zombies dont, d’ailleurs, le décor de l’église est ici à nouveau investi, transformé en laboratoire. Docile, le réalisateur semble constamment obéir au doigt et à l’œil à son producteur. Bien sûr, le script ne lui donne aucun motif valable de justifier le premier déshabillage intégral d’Alexandra Delli Colli, mais il tourne tout de même la scène. Toute cette série B se présente sans complexe de cette manière : complaisante, gratuite dans ses excès, jamais contrariée par les trous béants d’un scénario façon gruyère. Ce qui fait justement tout son charme nauséeux !

© Marc Toullec

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PSYCHOSE II (1983)

Plus de 20 ans après le classique d'Alfred Hitchcock, Richard Franklin dirige Anthony Perkins dans une séquelle de très haute tenue

PSYCHO II

1983 – USA

Réalisé par Richard Franklin

Avec Anthony Perkins, Vera Miles, Meg Tily, Robert Loggia, Dennis Franz, Hugh Gillin, Claudia Bryar

THEMA TUEURS I SAGA PSYCHOSE

Sacrilège ! Tel est sans doute le premier mot qui vint à l’esprit des amateurs de Psychose lorsqu’ils apprirent la mise en chantier d’une séquelle du chef d’œuvre d’Alfred Hitchcock quelque vingt ans plus tard. Probablement motivé par le succès des slashers post-La Nuit des masques et Vendredi 13, ce Psychose II fut pourtant conçu sans la moindre faute de goût. Confié aux bons soins du scénariste Tom Holland (futur réalisateur de Vampires vous avez dit vampire ? et Jeu d’enfant) et du réalisateur australien Richard Franklin (grand admirateur d’Hitchcock ayant signé Patrick et Déviation mortelle), le film se situe vingt-deux ans après les événements du premier Psychose. Interné pendant deux décennies, Norman Bates (Anthony Perkins, toujours), a été reconnu sain d’esprit. Il revient donc dans la maison de son enfance et reprend la direction de son motel, malgré le combat de Lila Loomis (Vera Miles, fidèle au poste elle aussi) dont la sœur Marion fut assassinée par Norman (ce que nous rappelle le pré-générique en noir et blanc, reprenant l’inoubliable séquence du meurtre sous la douche tourné en 1960). Grâce à Madame Spool, Norman travaille comme aide-cuisinier dans un snack. C’est là qu’il se lie avec Mary (Meg Tily), une des serveuses. Après le renvoi de Warren Toomey (Dennis Franz), le nouveau gérant de son motel qui avait tendance à transformer l’établissement en hôtel de passe, Norman reçoit des notes écrites de sa mère l’intimant de ne plus recevoir Mary chez lui. Tandis que sa raison semble à nouveau sur le point de défaillir, une nouvelle série de meurtres se met à ensanglanter les lieux.

S’il mise sur la continuité en rendant un hommage visiblement très respectueux au premier Psychose, Richard Franklin ne cède pas pour autant au plagiat. Certes, certaines séquences sont quasiment des remakes de celles du film original (la discussion autour d’un sandwich, la douche, la montée de l’escalier), plusieurs cadrages et enchaînements de plans ressemblent à s’y tromper au découpage pourtant si particulier d’Hitchcock, et même les éclairages et les couleurs semblent délibérément imiter ceux des films technicolor du metteur en scène de La Mort aux trousses. Mais à vrai dire, cet « air de ressemblance » n’est souvent qu’un leurre, car l’intrigue diablement complexe s’appuie sur les bases du premier film pour mieux les détourner. Et si tout le monde – spectateurs et protagonistes – s’attend à revivre les mêmes événements que jadis dans le sinistre motel Bates, rien ne se passe finalement comme prévu.

Faux semblants

L’énigme labyrinthique du scénario évoque les écrits de Boileau et Narcejac et la mise en scène de Franklin rappelle plusieurs effets de style de Brian de Palma. L’hommage à Hitchcock fonctionne donc moins frontalement que par ricochets, via ses inspirateurs et imitateurs. Jerry Goldsmith lui-même échappe ouvertement à l’influence de Bernard Herrmann en composant une partition plus douce, proche de son travail sur Poltergeist. On y sent la présence des fantômes du passé et aussi une certaine mélancolie naïve liée à l’enfance. Quant à Anthony Perkins, il emporte une nouvelle fois l’adhésion grâce à un charme et un talent toujours aussi vivaces.

© Gilles Penso

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THE TROLL HUNTER (2010)

Le cinéaste Andre Ovredal détourne la mode du "found footage" pour filmer des monstres géants dans les montagnes norvégiennes

THE TROLL HUNTER

2010 – NORVEGE

Réalisé par Andre Ovredal

Avec Otto Jespersen, Glenn Erland Tosterud, Tomas Alf Laresen, Johanna Mørck 

THEMA DIABLE ET DEMONS

Lorsque The Troll Hunter démarre, le spectateur sent bien qu’il arpente un terrain bien connu, celui du « faux reportage » à la manière de Blair Witch. Un carton introductif nous apprend que 283 heures d’images vidéo au contenu incroyable viennent d’être retrouvées et authentifiées par des experts, et que nous nous apprêtons à découvrir un montage condensé de ces images. Ainsi faisons-nous la connaissance d’un trio d’étudiants en journalisme enquêtant sur une série d’attaques attribuées à des ours. Un mystérieux braconnier revient dans toutes les conversations, et nos trois larrons finissent par retrouver la trace de cet homme bourru réfugié dans une caravane délabrée et répondant au prénom de Hans. L’homme refuse toute interview, mais les journalistes sont opiniâtres et finissent par le suivre lors d’une de ses énigmatiques virées nocturnes au cœur d’une forêt. Ce qu’ils découvrent dépasse toutes leurs attentes : Hans n’est pas un braconnier mais un employé du gouvernement chargé d’éliminer discrètement les trolls qui hantent les forêts norvégiennes !

The Troll Hunter se révèle alors sous sa véritable forme : un film de monstres géants à l’ancienne. L’apparition du premier troll – un colosse de quinze mètres de haut qui arbore trois têtes grimaçantes et arrache les arbres comme des fétus de paille – nous renvoie illico à King Kong et au bestiaire de Ray Harryhausen. Mais deux composantes modernisent résolument cette imagerie ancrée dans le cinéma fantastique d’antan : la caméra portée, qui s’affole bien sûr dès que les choses tournent mal et dope chaque séquence d’action d’une dose d’adrénaline fort bienvenue ; et l’humour omniprésent, empêchant le film de frôler le ridicule pour mieux assumer l’aspect surréaliste de son scénario. Le véritable exploit de The Troll Hunter est finalement d’aller au bout de son concept. Contrairement à un Cloverfield, par exemple, les monstres sont ici exposés sur toute la latitude de l’écran, au sein de plans délicieusement iconiques qu’on croirait parfois issus de couvertures de pulps de science-fiction, voire de livres de contes pour enfants. Car le réalisateur ne se cache jamais derrière le prétexte de la caméra amateur pour économiser les effets spéciaux et cacher ses créatures. Rien de plus logique finalement : si un cameraman apercevait un monstre haut comme un immeuble, s’efforcerait-il de le filmer le plus soigneusement possible ou agiterait-il frénétiquement sa caméra ? 

Petit budget mais grands effets

« Nous avons beaucoup discuté de ces fameux trolls, de leur apparence, de leur taille, de leur comportement », explique le comédien Glenn Erland Tosterud. « Une fois les situations mises en place, nous devions construire la peur à partir de rien. Dans ces cas-là, l’imagination devient l’outil le plus précieux du comédien. Pour avoir une idée plus précise de la hauteur des monstres, l’équipe technique utilisait parfois des poteaux au sommet desquels étaient marqués des repères. Nous pouvions donc tous regarder ensemble dans une direction précise. Pour le reste, l’improvisation était souvent le maître mot. » (1) Conçus par l’illustrateur norvégien Theodore Kittelsen, les nombreux trolls qui crèvent régulièrement l’écran ont tous été réalisés en image de synthèse par des artistes locaux qui prouvent ici leur indiscutable savoir-faire artistique et technique. Certaines séquences rivalisent sans peine avec les moments les plus mémorables de la trilogie Jurassic Park, notamment lorsque nos héros passent en voiture sous les pattes d’un colosse velu qui cherche à prendre la fuite dans les montagnes enneigées, ou lorsque le chasseur de trolls affronte une créature titanesque sur un pont de fortune. Quand on pense que l’intégralité du film a été produite pour un budget équivalent à trois millions de dollars, on ne peut qu’admirer de tels excès cinégéniques.


(1) Propos recueillis par votre serviteur en février 2011. 

© Gilles Penso

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LE 7ème VOYAGE DE SINBAD (1958)

Les 1001 Nuits ne pouvaient rêver plus belle transposition à l'écran, portée par le fabuleux bestiaire de Ray Harryhausen

THE 7TH VOYAGE OF SINBAD

1958 – USA

Réalisé par Nathan Juran

Avec Kerwin Matthews, Kerwin Mathews, Kathryn Grant, Richard Eyer, Torin Thatcher, Alec Mango, Danny Green, Harold Kasket 

THEMA MILLE ET UNE NUITS I DRAGONS I REPTILES ET VOLATILES I SAGA SINBAD

Un squelette vivant qui affronte à coups de sabre un prince des Mille et Une Nuits : c’est par cette image surréaliste que Ray Harryhausen, architecte des effets spéciaux du Monstre des temps perdus et des Soucoupes volantes attaquent, commença à imaginer le projet du 7ème Voyage de Sinbad. L’enjeu était pour lui important : échapper à la routine des films de monstres lâchés dans la civilisation pour s’immerger dans la fantaisie mythologique. Le héros du titre s’apprête à épouser la jolie princesse Parisa, une union qui aura le grand mérite de seller la paix entre les villes ennemies de Chandra et Bagdad. Mais pour récupérer sa lampe merveilleuse, le magicien Sokurah veut entraîner Sinbad sur l’île des Cyclopes, en réduisant Parisa au dixième de sa taille…

Depuis le magnifique Voleur de Bagdad de Ludwig Berger, jamais les contes de Mille et Une Nuits ne furent si flamboyants à l’écran. Les trucages d’Harryhausen s’adaptent à merveille à cette féerie généreuse en créatures inoubliables : une femme serpent qui annonce la Méduse du Choc des Titans un gigantesque oiseau Roc bicéphale et son « poussin », un superbe dragon quadrupède enchaîné à une grotte, et bien sûr les fameux cyclopes, entrés au panthéon des plus beaux monstres de l’histoire du cinéma fantastique. La morphologie composite de ces géants cornus à l’œil unique et aux pattes de bouc le dispute à leur férocité, ainsi qu’à leur capacité à véhiculer les influences littéraires et cinématographiques de leur créateur. Car si la capture des hommes de Sinbad par l’un de ces colosses évoque Homère, le combat final qui oppose le dragon et le cyclope nous renvoie illico à l’une des séquences les plus célèbres de King Kong. La scène d’anthologie du film demeure cependant la fameuse lutte de Sinbad contre un squelette armé d’une épée. Bernard Herrmann compose pour cette trépidante séquence un concerto pour castagnettes et xylophone, partiellement inspiré par « La Danse Macabre » de Saint-Saëns. L’ombre des classiques plane d’ailleurs souvent sur la magnifique partition du 7ème Voyage de Sinbad, notamment les tonalités orientales de la « Danse Arabe » du « Casse-Noisettes » de Tchaïkovsky qu’évoque le thème de Bagdad, ou « Le Sacre du Printemps » de Stravinsky dont on retrouve les attaques inquiétantes à chaque manifestation des pouvoirs magiques de Sokurah.

« Du pays au-delà de l'au-delà… »

A plus d’une reprise, le film plonge dans une naïveté trop pleine de charme désuet pour ne pas séduire. C’est par exemple le cas lorsque la princesse Parisa glisse à l’intérieur de la lampe magique où elle rencontre le petit génie. Assez curieusement, le film marcha partout sauf en Angleterre, où une censure apparemment très pudibonde refusa l’entrée aux enfants de moins de seize ans non accompagnés d’un adulte, sous prétexte que le squelette et le dragon étaient trop effrayants ! Cette œuvre enchanteresse restera dans les mémoires comme l’un des “must” du magicien Ray Harryhausen. « Le 7ème Voyage de Sinbad a coûté environ 650 000 dollars », nous révèle-t-il. « Ce n’est rien ! Il a rapporté des millions à la Columbia. Financièrement parlant, c’est notre plus gros succès. »  (1)

(1) Propos recueillis par votre serviteur en février 2004. 

© Gilles Penso 

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MANIAC (2012)

Le producteur Alexandre Aja et le réalisateur Franck Khalfoun revisitent le classique de William Lustig en offrant le rôle du psychopathe à Elijah Wood

MANIAC

2012 – FRANCE / USA

Réalisé par Franck Khalfoun

Avec Elijah Wood, Liane Balaban, Nora Arnezeder, America Olivo, Genevieve Alexandra, Sammi Rotibi

THEMA TUEURS

Pas courant qu’un classique de l’horreur poisseuse des années 80 fasse l’objet d’un remake à l’étranger, hors USA. En l’occurrence le Maniac orchestré en 1980 par William Lustig et Joe Spinell, portrait d’un serial killer sous l’emprise de sa mère dans le New York d’avant le grand ménage de Rudy Giuliani. Et ce sont des Français qui tirent les ficelles du Maniac millésimé 2012 : Thomas Langmann en tant que principal producteur, Alexandre Aja et Grégory Levasseur au scénario, Franck Khalfoun (Deuxième sous-sol) à la réalisation… Par contre, c’est bien un Américain qui incarne le tueur en série Frank Zito : Elijah Wood en personne ! Oui, le Frodon de la trilogie du Seigneur des Anneaux. Un individu excessivement « normal » en regard de Joe Spinel dont la grande taille, la bedaine, les cheveux longs et gras, la peau grêlée et la cinquantaine bien sonnée installaient immédiatement le personnage. Courageux d’avoir confié le rôle à un comédien nettement plus jeune, nettement plus petit, nettement moins menaçant. Visiblement, en dépit du risque de rebuter ses fans à interpréter un assassin impuissant, hanté par le souvenir de sa mère nymphomane, Elijah Wood avait urgemment besoin de ce nouvel contre-emploi (après Sin City) pour relancer sa carrière, prouver qu’il est capable de jouer autre chose que les Hobbits. Louable, mais cela suffit-il ?

Oui, tant qu’il n’apparaît pas à l’image car, pendant plus d’une trentaine de minutes, l’ex-Frodon montre à peine son visage, sinon par des reflets. Le bénéfice d’une action filmée de son point de vue, en caméra subjective. Un procédé efficace qui, immédiatement, fait du Maniac 2012 autre chose que le banal remake du Maniac 1980. Du moins tant que le réalisateur l’emploie. Brutalement, au terme de la poursuite dans le métro puis du meurtre en surface, la caméra virevolte, se braque dans la direction opposée, sur Elijah Wood. Une raison à cela ? Aucune, sinon l’évidente nécessité de justifier la présence de l’acteur en tête d’affiche. Du coup, Maniac en prend un sacré coup. Le soufflé retombe et, en dépit des modifications apportées au script originel, la routine prend le dessus. Certes, ce Maniac-là bénéficie de moyens largement supérieurs à ceux de son modèle. Certes, les meurtres avec scalps sont bien abominables, soutenus par des effets spéciaux aussi réalistes que possible. Par contre, dès que l’objectif de la caméra se repositionne, le film ne retrouve pas la dynamique, l’oppressante tension de sa première partie.

Frodon en tueur amateur de scalps

Dans la peau de Frank Zito, désormais héritier d’une boutique de mannequins vintages qui attirent l’attention d’une jolie photographe française, Elijah Wood peine dès lors à s’imposer, à constituer un danger palpable.  Rien n’y fait, pas même la surenchère dans l’horreur, de beaux et grands décors, de la tôle froissée. Le grand luxe en contradiction avec les bouts de ficelle de l’original. D’ailleurs, son réalisateur, William Lustig, pointe à nouveau au générique, parmi les nombreux producteurs. Un poste purement honorifique, l’implication de l’intéressé dans le projet se résumant à l’encaissement d’un chèque contre la cession des droits. Bilan : un film inégal, sans complexe dans l’horreur, un remake qui ne s’imposait pas vraiment, sinon pour souligner que les temps ont bien changé. En 1980, Maniac était diffusé au Marché du Film du Festival de Cannes, dans l’indifférence générale, à l’exception des acheteurs potentiels et des amateurs du genre. En 2012, son remake bénéficie d’une projection dans le cadre de la Section Officielle, avec smokings, montée de marche et tapis rouge. Une consécration pour les uns. De la pure récup’ pour les autres.

 

© Marc Toullec

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