L’HOMME QUI RETRECIT (1957)

Cette adaptation magistrale d'un roman de Richard Matheson raconte une inexorable miniaturisation qui se mue peu à peu en voyage initiatique

THE INCREDIBLE SHRINKING MAN

1957 – USA

Réalisé par Jack Arnold

Avec Grant Williams, Randy Stuart, April Kent, Paul Langton, Raymond Bailey, William Schallert

THEMA NAINS ET GEANTS I ARAIGNEES I MAMMIFERES

Jack Arnold est l’un des artisans majeurs de la science-fiction des années 50, et la qualité de ses films de genre est allée crescendo. Après les extra-terrestres du Météore de la nuit (1953), le monstre aquatique de L’Etrange créature du lac noir (1954) et l’effrayante araignée géante de Tarantula (1955), L’Homme qui rétrécit aura été le point culminant de sa carrière. Le scénario, écrit par Richard Matheson d’après un roman qu’il publia l’année précédente, repose sur une idée toute simple qui n’aurait pas détonné dans un épisode de La Quatrième dimension, ce qui ne surprend guère lorsqu’on sait que Matheson fut l’un des collaborateurs réguliers de la série culte de Rod Serling. Tout commence sur un yacht, lorsque Scott Carey (Grant Williams), en vacances avec sa femme Louise (Randy Stuart), traverse un nuage étrange. A son retour, il constate que sa taille diminue et consulte de grands savants. L’un deux arrête pour quelque temps cette décroissance. Soigné avec dévouement par Louise, il trouve une consolation passagère auprès d’une charmante naine, Clarice (April Kent). Mais sa taille recommence bientôt à diminuer. Réfugié provisoirement dans une maison de poupées, il est attaqué par le chat de la maison et tombe dans la cave. Là, il lutte contre une araignée, puis passe à travers une plaque d’aération et se retrouve enfin libre. Mais que va-t-il devenir désormais ?

Le postulat peut sembler rudimentaire, mais le soin que Richard Matheson et Jack Arnold ont mis à accentuer le drame humain plutôt que le fantastique fait toute la force du film. Comme dans bien des récits de Matheson, le spectateur en vient à se poser la question cruciale : « Et si ça m’arrivait ? » Arnold, pour sa part, a accru davantage l’identification du spectateur à son héros en focalisant toute l’action sur lui, évitant toute intrigue secondaire et parallèle. La scène de suspense dans laquelle Louise et son frère se rendent dans la cave pour réparer une fuite d’eau, ignorant que le minuscule Scott les appelle en vain pour qu’ils viennent le chercher, fait atteindre au spectateur les sommets de son implication.

Combat contre un chat et une araignée

Les premières étapes de la métamorphose sont servies par des images simples mais extrêmement efficaces : les radios du crâne de Scott, de plus en plus petites, ou le malheureux protagoniste assis dans un fauteuil soudain trop grand pour lui. Puis les magnifiques effets visuels de Clifford Stine (Les Survivants de l’infiniTremblement de terre) prennent le relais : décors surdimensionnés, incrustations, perspectives forcées, le tout réalisé avec un effarant réalisme, tant et si bien que tous les trucages se font rapidement oublier. Les scènes les plus mémorables du film sont les affrontements du héros avec le chat et l’araignée, une tarentule géante un peu irréaliste (même minuscule, qu’est-ce qu’une tarentule viendrait faire dans la cave ?) mais réellement terrifiante, qui semble faire écho à celle de Tarantula. Comme dans le roman, le dénouement du film est on ne peut plus ouvert, jouant sur les lois de la relativité et offrant au spectateur le soin d’imaginer la suite de l’incroyable destin de Scott Carey.

 

© Gilles Penso

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L’EMPRISE (1981)

La terrifiante histoire d'une femme agressée régulièrement par une entité invisible et fantomatique

THE ENTITY

1981 – USA

Réalisé par Sidney J. Furie

Avec Barbara Hershey, Ron Silver, David Labiosa, George Coe, Jacqueline Brookes

THEMA FANTÔMES

A l’origine de L’Emprise, il y a un fait divers réel survenu à Los Angeles en octobre 1976, et considéré selon les experts comme « l’un des plus extraordinaires cas dans l’histoire de la parapsychologie », dixit le générique du film qui adapte lui-même un roman de Frank de Felita. Campée par la magnifique Barbara Herschey, Carla Moran est une jeune femme de 32 ans, mère célibataire d’un grand garçon, Bill, et de deux petites filles, Julie et Kim. Un soir, elle est agressée dans sa chambre par une créature invisible qui la frappe, l’étouffe et la viole sauvagement. Personne ne croit à son histoire, que l’on attribue à un cauchemar, mais lorsque l’entité prend en plein jour le contrôle de son véhicule, manquant de la tuer, elle décide d’aller voir un psychiatre de l’hôpital, le docteur Sneiderman (Ron Silver). En creusant la question, ce dernier développe une théorie liée aux peurs subconscientes de Carla. « Certaines phases de notre vie ne meurent jamais tout à fait, et elles nous affectent pendant toute notre vie », lui déclare-t-il. « Elles se manifestent quelques fois avec un esprit de vengeance. Elles peuvent créer des illusions, des angoisses et des hallucinations. » Persuadé que le tabou développé autour du sexe dans l’enfance de la jeune femme est à l’origine de ce visiteur imaginaire, il invoque le complexe d’Œdipe, affirmant : « votre créature est un symbole ».

Mais les attaques suivantes excluent peu à peu la thèse psychanalytique. Il y a d’abord ce viol dans la salle de bains, puis cette agression devant les enfants de Carla accompagnée d’éclairs électriques, et enfin cette scène incroyable où le corps dénudé de la jeune femme est malaxé par des doigts invisibles. Le trucage, hallucinant, utilise un corps factice conçu par Stan Winston et James Kagel, et la séquence est d’autant plus troublante que Carla connaît un orgasme. Celle-ci finit par faire appel à une équipe de parapsychologues, qui tente une expérience de la dernière chance : reconstituer la maison de Carla dans un gymnase de l’université et tenter de congeler la créature avec de l’hélium liquide, afin de prouver qu’elle a une masse et qu’elle n’est pas une simple projection psychique.

La prestation de Barbara Hershey

La force d’un tel sujet trouve un précieux écho dans l’interprétation extraordinaire de ses comédiens (Barbara Hershey remporta en 1982 le prix d’interprétation du Festival d’Avoriaz) et par la mise en scène très inspirée de Sidney J. Furie. Ce dernier crée un climat de malaise dès les premières minutes du film, jouant en maître avec ses cadrages, ses éclairages, ses angles de prise de vue, sa bande son et son montage. Refusant les effets chocs et les ellipses tentantes, il étire ses séquences, prolonge des plans apparemment anodins et construit de véritables morceaux d’anthologie en matière d’épouvante. La musique de Charles Bernstein, bien qu’un peu datée, concourt aussi à entretenir cette atmosphère oppressante qui ne quitte le spectateur que longtemps après la projection. Pas vraiment reconnu à sa juste valeur, L’Emprise a pourtant toutes les qualités d’un classique du genre, à mi-chemin entre L’Exorciste et Poltergeist avec lesquels il présente de nombreuses similitudes.

 

© Gilles Penso

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LE CONTINENT PERDU (1951)

Une expédition part retrouver la trace d'une fusée atomique échouée dans une forêt inconnue où vivent encore des dinosaures

THE LOST CONTINENT

1951 – USA

Réalisé par Samuel Newfield

Avec César Romero, John Hoyt, Hugh Beaumont, Whit Bissell, Hillary Brooke, Acquanetta, Chick Chandler, Sid Melton

THEMA DINOSAURES

Très influencé par Le Monde perdu, comme son titre le laisse entendre, le Continent perdu bénéficia en 1951 d’une campagne de promotion essentiellement axée sur ses séquences de dinosaures. Or celles-ci ne durent qu’une poignée de minutes, perdues au beau milieu d’une heure et demie d’actions pas franchement palpitantes. Dès le départ, nous pénétrons dans un QG top secret de l’armée, où tous les yeux se tournent vers une fusée atomique sur le point de décoller. Celle-ci s’élève dans les airs avec grâce (via des stock-shots empruntés à Rocketship X-M) et la mission se déroule sans encombre… jusqu’à ce que la fusée ne dévie inopinément de sa trajectoire pour aller s’écraser sur un plateau inconnu des mers du sud. L’incident est de taille, car l’engin contient un équipement ultra-secret, et en ces temps paranoïaques de guerre froide, il ne s’agirait pas qu’elle tombe entre de mauvaises mains. Une expédition aérienne est donc mise sur pied pour récupérer la fusée. Elle est menée par le major Joe Nolan (César Romero) et le lieutenant Danny Wilson (Chick Chandler), deux officiers charismatiques et tombeurs de ces dames. A leurs côtés se trouvent trois scientifiques aguerris (John Hoyt, Hugh Beaumont et Whit Bissell) ainsi que le jovial sergent Willie Tatlow (Sid Melton) assurant le rôle du faire-valoir comique.

Bientôt, l’avion se crashe au milieu de la jungle, et nos six hommes découvrent un village abandonné. Là, les autochtones se limitent à une belle indigène (interprétée par Acquanetta) et à son jeune frère (le film n’ayant visiblement pas prévu de ligne budgétaire pour les figurants). Etant donné que la fusée s’est écrasée sur une montagne sacrée, de laquelle personne n’est jamais revenu vivant, la petite expédition ne tarde pas à s’équiper pour une séance d’alpinisme. Dès lors, le film nous assène vingt bonnes minutes d’escalade laborieuse à flanc de rocher en carton-pâte, la caméra s’attardant plus que de raison sur chaque comédien pendant l’ascension, et le rythme s’alourdissant jusqu’à l’assoupissement du plus vaillant des spectateurs. Une fois enfin arrivés au sommet, nos hommes découvrent une jungle luxuriante habitée par une poignée de dinosaures maladroitement animés image par image par Augie Lohman.

Une faune préhistorique en stop-motion

Un brontosaure qui barrit comme un éléphant joue là un remake de King Kong, attaquant l’un des hommes réfugié dans un arbre, tandis que deux tricératops s’engagent dans une lutte à mort calquée sur les pugilats antédiluviens du Monde perdu. Ces brèves séquences souffrent de figurines plutôt grossières et de mouvements rigides et saccadés, mais elles ne manquent guère de charme, et constituent une véritable oasis au sein d’une aventure guère palpitante où les protagonistes passent leur temps à marcher, escalader, bavarder ou fumer cigarette sur cigarette. Le film compte aussi la brève apparition d’un ptérodactyle et d’un lézard géant. Malgré son manque d’intérêt, Le Continent perdu reçut un accueil honorable, les producteurs envisageant même un temps de lui adjoindre plusieurs séquelles mettant à nouveau en vedette César Romero et Chick Chandler.

© Gilles Penso

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LA MONTAGNE MYSTÉRIEUSE (1956)

Un dinosaure maladroitement animé en stop-motion sème la panique en plein décor de western

THE BEAST OF HOLLOW MOUNTAIN

1956 – USA / MEXIQUE

Réalisé par Edward Nassour, Ismael Rodriguez

Avec Guy Madison, Patricia Medina, Eduardo Noriega, Carlos Rivas, Mario Navarro, Pascual Garcia Pena, Julio Villareal

THEMA DINOSAURES

La Montagne mystérieuse est l’une des expériences les plus douloureuses de la carrière de Willis O’Brien, maître d’œuvre des effets spéciaux de King Kong, car le projet lui a carrément été volé par deux producteurs bien peu scrupuleux nommés Edward et William Nassour. Son histoire initiale, qu’il rêvait de mettre en image lui-même, a subi maints outrages sous les plumes respectives de Robert Hill, Ismael Rodriguez, Carlos Orellana et Jack De Witt. Le récit se déroule au fin fond de la campagne mexicaine où s’élève une montagne sinistre dont on dit qu’elle est creuse. L’intérieur n’a jamais été exploré car à son pied s’étend un marécage infranchissable. La légende dit aussi qu’un animal étrange, datant de l’aube de la création, habite cet endroit. Or on rapporte des disparitions inexpliquées de bétail et d’hommes. Jimmy Ryan et Felipe Sanchez découvrent un jour un bœuf enlisé dans la vase. Ryan, guère superstitieux, porte ses soupçons sur Enrique Rios, un riche voisin qui lui fait concurrence dans le commerce du bétail…

Les fans d’effets spéciaux et d’animation ont intérêt à être patients lorsqu’ils visionnent La Montagne mystérieuse, car la bête du titre ne montre le bout de son museau qu’après une heure de film, au moment où le spectateur est plus ou moins sur le point de s’endormir. La figurine est sans doute l’une des créations les moins inspirées du sculpteur Marcel Delgado (créateur des gorilles et des dinosaures de King Kong tout de même), et elle est animée très approximativement par Jack Rabin et Louis DeWitt. La bête semble ne bouger que toutes les trois ou quatre images et se retrouve en outre dotée d’attitudes trop souvent humanoïdes pour convaincre. Le monstre est malgré tout la vedette d’une séquence finale assez distrayante dans laquelle il s’attaque aux héros (maladroitement rétro-projetés), dévore une vache (animée image par image), s’empare d’un cow-boy dans une grotte (animé lui aussi) et finit englouti dans un marécage.

Un allosaure contre des cowboys

Pour quelques inserts, les pattes du dinosaure sont des bottes en latex absolument pas convaincantes et ses griffes des répliques grandeur nature à peine plus efficaces. Finalement, les images les plus intéressantes du monstre sont les plans larges filmés dans des décors miniatures complets, notamment lorsqu’il assaille la cabane où sont réfugiés l’héroïne et le petit garçon. On se prend à rêver aux images fabuleuses qu’aurait pu nous offrir Willis O’Brien. Mine de rien, ce film marque tout de même une double première : le mélange surréaliste du film de dinosaure avec le western (qui allait être repris avec beaucoup de talent dans La Vallée de Gwangi douze ans plus tard), et l’utilisation combinée de l’animation image par image et de la rétro-projection en format Cinemascope, ce qui vaut au film le label technique fantaisiste de « Regiscope ». Dix ans plus tard, des extraits de La Montagne mystérieuse seront réutilisés dans la série télévisée It’s About Time.

© Gilles Penso

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LE ROI DES DINOSAURES (1955)

Pour son premier film, le spécialiste des monstres géants Bert I. Gordon met en scène un dinosaure régnant sur une planète qu'explorent des astronautes

KING DINOSAUR

1955 – USA

Réalisé par Bert I. Gordon

Avec Bill Bryant, Wanda Curtis, Douglas Henderson, Patricia Gallagher, Marvin Miller

THEMA DINOSAURES

Passionné de monstres géants en tout genres, Bert I. Gordon marque ses goûts pour le gigantisme dès son premier long-métrage, King Dinosaur, qui marche sur les traces du Monde perdu et de King Kong tout en sacrifiant aux goûts science-fictionnels de ce milieu des années 50, le tout avec un budget des plus anémiques. Il faut dire que le producteur de l’aventure, Al Zimbalist, n’est pas du genre dépensier, l’une de ses œuvres phares étant le redoutable Robot Monster. Le tournage de King Dinosaur n’excéda donc pas la durée d’un week-end, ce qui est déjà un petit exploit en soi. Tout commence par un bon quart d’heure de stock-shots scientifiques et militaires, commentés par la voix off sentencieuse de Marvin Miller nous apprenant qu’une nouvelle planète, baptisée Nova, s’insinue dans notre système solaire. Aussitôt, les autorités dépêchent une expédition afin de l’explorer. Quatre scientifiques – deux hommes et deux femmes – débarquent donc sur l’astre. Les comédiens sont tellement peu crédibles en savants et en astronautes qu’on n’essaie même pas d’y croire, d’autant que l’intrigue se concentre dès lors sur des relations amoureuses troublées et bardées de clichés.

Il se trouve que l’air de la planète est tout à fait respirable, comme par hasard, et l’aventure prend dès lors les allures d’un Tarzan un peu fantaisiste, tourné en réalité dans une poignée de canyons californiens. Tout y est : les vautours, le lémurien (qui pousse des cris de chimpanzé !), le serpent (qui rugit comme un fauve !!), et même le combat entre un homme et un crocodile (empaillé) censé l’agresser sauvagement. Un matin, notre petite expédition se retrouve nez à nez avec une guêpe géante, incrustée dans le décor via un trucage extrêmement maladroit. Mais le délire ne bat vraiment son plein que lorsque nos quatre explorateurs se rendent sur une île trônant au beau milieu d’un lac. Là, ils rencontrent le fameux « King Dinosaur », c’est-à-dire un iguane affublé d’une corne en plastique, que l’un des scientifiques prend en photo et identifie sans rire comme étant un Tyrannosaurus Rex… Le reptile se met alors à affronter un crocodile géant, en un combat repris quasiment plan par plan à Tumak fils de la Jungle.

Dinosaures improbables

Les monstres et les acteurs sont rarement vus dans les mêmes plans, mais lorsqu’ils le sont, les rétro-projections qui donnent l’impression du gigantisme des deux sauriens sont plutôt réussies. Et Bert I. Gordon a au moins le mérite d’avoir tourné son propre combat de dinosaures au lieu d’emprunter sans vergogne les plans du film de Hal Roach, comme le firent moult séries B fauchées. Après avoir vaincu le crocodile, ce bon vieux King Dinosaur s’en prend ensuite à un lézard géant, ce qui permet à nos héros de s’enfuir. Ils croisent alors furtivement d’autres étranges bestioles, comme un éléphant déguisé en mammouth, un tatou géant figurant probablement un quelconque dinosaure cuirassé, et même un troupeau de buffles. Alors, probablement lassés par cette faune un peu farfelue, nos héros placent une bombe atomique sur l’île et la font sauter en un gigantesque champignon (des stock-shots, toujours) qui clôt le film sur une note abrupte qui en laissera plus d’un perplexe.

 

© Gilles Penso 

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PIRATES DES CARAÏBES : LA FONTAINE DE JOUVENCE (2011)

Un quatrième épisode qui se passe des services de Gore Verbinski et fait appel à Penelope Cruz pour pimenter un peu les aventures de Jack Sparrow

PIRATES OF THE CARIBBEAN – ON STRANGER TIDES

2011 – USA

Réalisé par Rob Marshall

Avec Johnny Depp, Penelope Cruz, Geoffrey Rush, Ian McShane, Kevin R. McNally 

THEMA MONSTRES MARINS I SAGA PIRATES DES CARAÏBES

Inégale, la saga Pirates des Caraïbes s’est muée en véritable objet de culte, ravivant avec panache un sous-genre tombé en désuétude : le film de piraterie, mâtiné ici d’une bonne dose d’éléments fantastiques. Malgré la confusion extrême de son scénario et son déroutant manque de cohérence, le troisième opus avait su remplir à son tour les salles de cinéma et les tiroirs-caisse, au point qu’il semblait inévitable de poursuivre la franchise coûte que coûte. Le cinéaste Gore Verbinski ayant décidé d’aller nager dans d’autres eaux (en réalisant notamment le film d’animation Rango), c’est Rob Marshall (ChicagoMémoires d’une Geisha) qui fut chargé de prendre le relais. Si la mise en scène de Pirates des Caraïbes : la Fontaine de Jouvence y perd en style et en flamboyance, l’intrigue, en revanche, a gagné en clarté et en rigueur. Donc l’un dans l’autre, nous serions tentés de préférer l’approche plus légère de ce quatrième épisode, qui présente en outre le mérite de puiser une grande partie de son inspiration dans une autre saga ultra-populaire : les Indiana Jones.

A priori, tout y est : la quête de l’objet surnaturel (en l’occurrence la fontaine de jouvence, équivalent du Graal d’Indiana Jones et la dernière croisade), l’intrigue sentimentale à rebondissements, l’expédition concurrente, la jungle sauvage truffée de pièges, le climax grandguignolesque… Mais il manque un élément essentiel qui empêche ce Pirates des Caraïbes de marcher dignement sur les traces des Aventuriers de l’Arche Perdue : des personnages forts et des sentiments exacerbés. Or tout ici n’est que cabotinage, minauderie et maniérisme. Le jeu sentimental qui s’installe entre Jack Sparrow (Johnny Depp) et Angelica Teach (Penelope Cruz) laisse froid dans la mesure où les comédiens se contentent de se donner la réplique comme on échangerait des pas de danse, avec grâce mais sans la moindre émotion.

Une sympathique attraction

Même travers du côté des complexes relations qui lient Angelica au redoutable Barbe Noire (Ian McShane, excellent par ailleurs). Or sans motivations fortes, sans enjeux humains solides, une telle aventure se vit comme une sympathique attraction de parc à thème (retour aux sources pour un concept initialement conçu pour Disneyland) mais nous prive de toute réelle implication. Seuls deux personnages, pourtant tout à fait secondaires, parviennent à nous toucher et à nous faire vibrer, oasis de fraîcheur au sein d’un spectacle trop préfabriqué pour totalement convaincre. Restent quelques morceaux de bravoure mémorables (le navire de Barbe Noire qui s’anime pour capturer les membres de l’équipage, le soulèvement de zombies empruntés à l’imagerie vaudou, l’étourdissant assaut des sirènes qui calque sa dynamique sur l’attaque des raptors du second Jurassic Park), un grain de folie bienvenu et une partition toujours aussi énergisante qu’Hans Zimmer a joyeusement agrémentée de guitares hispanisantes du plus bel effet. A défaut d’entrer dans les annales, cet énième acte de piraterie sait distraire son public avec une générosité finalement très appréciable.

© Gilles Penso

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CONAN LE DESTRUCTEUR (1984)

Arnold le barbare revient dans une aventure moins grandiose et plus légère que la précédente, sous la direction d'un Richard Fleischer en fin de carrière

CONAN THE DESTROYER

1984 – USA

Réalisé par Richard Fleischer

Avec Arnold Schwarzenegger, Grace Jones, Wiilt Chamberlain, Mako, Olivia d’Abo, Tracey Walter

THEMA HEROIC FANTASY

En échange de la résurrection de sa bien-aimée Valeria, Conan promet à la reine Taramis (Sarah Douglas) d’accompagner la princesse Jehnna (Olivia d’Abo) aux confins du pays, au cœur d’un territoire ennemi, pour lui rapporter une corne légendaire incrustée d’un diamant magique. Le colossal Cimmérien ignore que la reine souhaite en réalité posséder le joyau afin de réveiller Dagoth, une divinité monstrueuse et démoniaque à laquelle elle souhaite sacrifier la princesse… Les aventures magiques et enivrantes de Conan, contées avec verve par Robert Howard, avaient perdu une partie de leur impact lors de leur transposition à l’écran, malgré la maestria de John Milius et le souffle épique qu’il avait su donner à son œuvre. Cette suite, signée par le grand Richard Fleischer, vétéran du cinéma à grand spectacle (20 000 lieues sous les mersLe Voyage fantastiqueSoleil vert), confirme les pertes subies. Il faut dire que Fleischer eut du mal à terminer sa carrière avec éclat, tombant sous la coupe de Dino de Laurentiis pour lequel il signa l’année précédente Amityville 3. Pour autant, Fleischer entretint jusqu’au bout d’excellentes relations avec le puissant producteur, les deux hommes étant liés par une admiration respective. De fait, c’est Raffaella de Laurentiis, fille du mogul, qui suggéra le nom de Fleischer à la mise en scène, son film emblématique Les Vikings ayant été l’une des sources d’inspirations majeures de John Milius pendant la réalisation du premier opus. 

Arnold Schwarzenegger reste l’interprète idéal et indétronable du barbare, mais l’intrigue de ce second Conan est très anecdotique, moins chargée de sens et de symboles que celle du film précédent. La quête du héros n’intéresse donc que dans une faible mesure le spectateur, les personnages secondaires s’avèrent pour le moins superficiels (y compris la sauvageonne interprétée par la sculpturale Grace Jones, à l’affiche de Dangereusement vôtre l’année suivante) et les décors évoquent tantôt ceux d’Indiana Jones et le temple maudit, tantôt ceux d’une série télévisée de science-fiction psychédélique des années 70 (époque Cosmos 1999 ou L’Âge de cristal). Pour attirer un plus large public, les producteurs et le studio décident d’édulcorer drastiquement la violence présente dans le premier Conan afin d’obtenir une classification « PG 13 » (pour un public à partir de 13 ans accompagnés d’un adulte). Ce choix discutable ne joue pas en faveur de Conan le destructeur et dénature l’esprit des écrits d’Howard.

L'avènement de Dagoth

Cependant, la plus grosse erreur artistique du film reste probablement d’avoir confié la fabrication du monstrueux Dagoth à Carlo Rambaldi. Ce démon séculaire, à l’apparition duquel le spectateur est psychologiquement préparé dès les premières séquences, était un élément particulièrement réjouissant du scénario, puisqu’il évoque les mythologies chères à Robert Howard mais aussi à ses confrères H.P. Lovecraft et Clark Ashton Smith. Hélas, sa visualisation sous forme d’un homme costumé dans une balourde défroque de latex amenuise considérablement l’impact de sa prestation, et achève ce second Conan cinématographique sur une note bien passable. Roy Thomas et Gerry Conway, auteurs de l’histoire originale, furent d’ailleurs fort déçus par le résultat final, passablement remanié en cours de route par le scénariste Stanley Mann (DamienMeteor), à tel point qu’ils publièrent en 1990 leur récit sous forme d’une bande dessinée mise en image par Mike Docherty, « Conan : The Horn of Azoth ». Il serait malgré tout injuste de réduire Conan le destructeur à ses défauts et à son immense simplification du mythe initial. Car en l’état, et à condition évidemment de faire abstraction du matériau littéraire dont il est issu, le film demeure très divertissant et ménage un certain nombre de séquences hautes en couleur. Une agréable série B d’heroïc-fantasy, en somme.

 

© Gilles Penso

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DEVIL (2010)

Produit par M. Night Shyamalan, ce huis-clos dans un ascenseur bloqué convoque le Diable en personne…

DEVIL

2010 – USA

Réalisé par John Erick Doodle

Avec Chris Messina, Logan Marshall-Green ; Geoffrey Arend, Bojana Novakovic, Jenny O’Hara, Bokeem Woodbine, Matt Craven

THEMA DIABLE ET DEMONS

Produit par M. Night Shyamalan, qui n’a jamais tout à fait su transformer l’essai miraculeux de Sixième sens, et réalisé par John Erick Dowdle, signataire d’un parfaitement inutile En QuarantaineDevil ne partait pas avec toutes les chances de son côté. Pourtant, les toutes premières images du film sont prometteuses. Aux accents d’une imposante partition cuivrée de Fernando Velasquez, la caméra survole les buildings de Philadelphie. Ce type de plan aérien, ultra banalisé, prend ici une tournure inattendue dans la mesure où les images sont inversées. La tête en bas, les immeubles s’offrent à nos yeux sous un jour inquiétant et un indicible sentiment de malaise s’installe. Avec une virtuosité empruntée à un David Fincher, les prises de vues foncent en plan séquence à l’intérieur d’un des bâtiments, où un agent d’entretien nettoie les sols tandis qu’à l’arrière-plan un corps tombe dans le vide et s’écrase sur le toit d’une camionnette. Voilà une entrée en matière pour le moins intrigante, qui nous rappelle que l’auteur de Phénomènes a toujours su soigner ses prologues.

Alors que l’inspecteur Bowden (Chris Messina) enquête sur ce trépas violent, cinq personnes qui ne se connaissent pas entrent dans l’ascenseur de l’immeuble : un agent de sécurité, une jeune femme séduisante, un jeune homme introverti, un VRP bavard et une vieille dame. Ici aussi, la caméra sait surprendre, captant en plan séquence l’entrée successive des acteurs du drame dans la cabine jusqu’à faire face au miroir. Brusquement, l’ascenseur se bloque entre deux étages. De la simple contrariété, la situation dégénère peu à peu et vire au cauchemar… Le pitch, voisin de celui de Cube, est intéressant, mais sa mise en application s’avère bien vite besogneuse, jusqu’à ce que les cimes du grotesque soient peu à peu atteintes, annihilant tout l’impact de ce Devil finalement bien vain.

La tartine qui tombe du mauvais côté

Premier problème : incapable de gérer son concept jusqu’au bout, le film refuse de jouer la carte de la claustrophobie, en collectant finalement plus de séquences extérieures que de scènes confinées dans la cabine. Deuxième problème : la répétition des situations (la lumière s’éteint, quelqu’un meurt, et ainsi de suite) finit vite par lasser. Troisième problème, le plus grave : une volonté opiniâtre de tout expliquer en prenant le spectateur par la main de peur qu’il soit incapable de suivre l’intrigue tout seul. D’où cette voix off puérile et omniprésente qui, tout au long du métrage, nous raconte que le diable s’immisce parfois parmi les humains pour emporter leur âme. Pire : le gardien stéréotypé campé par Jacob Vargas qui s’avère bardé de superstitions bigotes (normal, c’est un latino) et qui passe son temps à raconter aux autres personnages le mode de fonctionnement du Diable. Summum du grotesque : la scène de la tartine qui tombe du mauvais côté quand Satan est dans les parages (!) et celle du « Je vous salue Marie » que ledit gardien entonne à l’attention des prisonniers de la cabine (au secours !). Bref, ce « Diable dans l’ascenseur » perd tous ses atouts en cours de route, malgré ses nombreuses qualités formelles (auxquelles il faut ajouter la photographie stylisée de Tak Fujimoto) et le jeu plutôt convainquant de Chris Messina et Logan Marshall-Green.

 

© Gilles Penso

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CAPTAIN AMERICA, FIRST AVENGER (2011)

Joe Johnston réussit avec brio ce qu'aucun réalisateur n'était parvenu à faire avant lui : rendre crédible le super-héros étoilé au bouclier tricolore

CAPTAIN AMERICA – FIRST AVENGER

2011 – USA

Réalisé par Joe Johnston

Avec Chris Evans, Hayley Atwell, Hugo Weaving, Tommy Lee Jones, Dominic Cooper, Sebastian Shaw, Stanley Tucci

THEMA SUPER-HEROS I SAGA CAPTAIN AMERICA I AVENGERS I MARVEL

Si le studio Marvel avait su nous surprendre agréablement avec L’Incroyable Hulk et Iron Man, l’enthousiasme était retombé aussi sec face à  Iron Man 2 et Thor, deux opus à la dramaturgie déficiente et au scénario laxiste. Que fallait-il donc attendre de Captain America, nouvelle pièce de cet étrange puzzle cinématographique annonçant la sortie du film choral Avengers ? Les prédictions étaient mitigées, surtout au regard des précédentes adaptations « live » du héros en costume bleu blanc rouge (des catastrophiques téléfilms réalisés respectivement en 1978 et 1990). Mais c’était compter sans l’inventivité de Joe Johnston, signataire d’œuvres éminemment sympathiques telles que Chérie j’ai rétréci les gosses RocketeerJumanjiJurassic Park 3 et Wolfman.

S’appuyant sur un scénario habile de Joss Whedon, Christopher Markus et Stephen McFeely, le cinéaste crée un super-héros débordant d’humanité en l’inscrivant dans son contexte historique d’origine, la seconde guerre mondiale. Sous l’influence du Steven Spielberg des années 70/80, Johnston cligne plusieurs fois de l’œil vers le maître, dès le prologue qui nous renvoie illico à celui de Rencontres du troisième type (des scientifiques emmitoufflés arpentent le désert pour y découvrir d’étranges vestiges), et surtout plus tard lorsque le nazi psychopathe incarné par Hugo Weaving découvre une inestimable source de pouvoir surnaturelle et s’exclame : « et dire que le führer perd son temps à chercher des breloques dans le désert ! » La référence à Indiana Jones dépasse d’ailleurs largement le cadre de cette réplique jouissive, l’ombre de l’archéologue rétro et de ses exploits de comic book se déployant au fil de ce long-métrage empreint de l’esprit des serials des années 30.

La Torche Humaine se transforme en Super-Soldat

Par le biais d’effets numériques hallucinants, Chris Evans, déjà interprète de la Torche Humaine dans les deux Quatre Fantastiques, incarne le frêle et rachitique Steve Rogers, qui se porte volontaire pour devenir un « super-soldat » au service de l’armée américaine, développant à l’issue d’une expérience top-secrète une musculature et une force hors du commun. Incontestablement daté, le costume du super-héros, aux couleurs du drapeau US, est ici intelligemment détourné, Johnston nous en proposant d’abord une version volontairement kitsch (avec en prime une allusion directe aux serials en noir et blanc qui furent réellement tournés dans les années 40 ainsi qu’aux bandes dessinées de Jack Kirby et Joe Simons) avant d’opter pour une panoplie militaire respectant les graphismes initiaux de Kirby en les réadaptant sous un jour plus fonctionnel et moins tape-à-l’œil. L’aventure se pare de séquences d’action généreuses et souvent inédites, tandis qu’Hugo Weaving et Tommy Lee Jones s’en donnent à cœur joie dans le registre du cabotinage et de l’auto-dérision. Certes, le film ne décolle jamais totalement, incapable d’atteindre le souffle épique propre aux chefs d’œuvre du genre, et c’est probablement un défaut imputable à la majorité des réalisations de Joe Johnston. Mais le spectacle ne déçoit jamais, et l’épilogue en forme de porte ouverte remplit allègrement sa fonction : donner envie de découvrir toutes affaires cessantes l’aventure collégiale des Vengeurs !

 

© Gilles Penso

 

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LA TRAQUE (2009)

Dans ce croisement inattendu entre les univers de Stephen King et Claude Chabrol, des chasseurs sont attaqués par de monstrueux sangliers

LA TRAQUE

2009 – FRANCE

Réalisé par Antoine Blossier

Avec Grégoire Colin, François Levantal, Joseph Malerba, Fred Ulysse, Bérénice Bejo, Isabelle Renauld

THEMA MAMMIFERES

Bien qu’il narre les mésaventures de chasseurs menacés par des sangliers particulièrement agressifs au beau milieu de la forêt nocturne, La Traque n’a pas la vocation d’être un Razorback à la française. Il s’agirait plutôt du croisement inattendu entre les univers de Stephen King et Claude Chabrol. Le réalisateur Antoine Blossier et le scénariste Erich Vogel, attaquant ici leur premier long-métrage, ont en effet puisé leur inspiration dans les terreurs primaires décrites par l’auteur de Cujo tout en y injectant l’hypocrisie larvée et les pressions familiales chères au metteur en scène de L’Enfer. La Traque s’ancre ainsi dans la campagne française et s’attarde dans un premier temps sur une famille aux relations complexes. Nicolas (François Levantal) est l’industriel le plus important de la région, mais il est clair que ses pratiques douteuses (dont l’emploi abusif de pesticides) ne sont du goût ni de son frère David (Joseph Marbela), ni de son père Eric (Fred Ulysse), tous deux agriculteurs liés par des rapports interdépendants pas très sains. Pièce rapportée de ce petit monde en vase clos, Nathan (Grégoire Colin) est le gendre du puissant David, et s’efforce d’inciter son épouse Claire (Bérénice Béjo) à prendre ses distances avec une famille décidément très envahissante.

Les enjeux sont distincts, les tensions palpables, le drame peut donc commencer. Et pour exacerber les émotions en pleine nature, rien de tel qu’une agression animale monstrueuse, comme au bon vieux temps des Dents de la mer et des Oiseaux Le premier incident insolite se manifeste par la mort inexplicable de nombreux cerfs retrouvés couverts de morsures sur la clôture électrique de l’exploitation agricole. De toute évidence, des sangliers semblent être responsables de l’hécatombe. Les quatre hommes se plongent donc au cœur de la forêt voisine, fusil au poing, pour en découdre avec les prédateurs omnivores. Alors que le soleil décline et que d’inquiétantes bêtes se profilent aux alentours, la tension monte d’un cran et le cauchemar n’est pas loin… « Dans le premier niveau d’écriture du film, il s’agit du récit de chasseurs qui vont traquer les prédateurs responsables de la mort de leurs bêtes », explique le scénariste Erich Vogel. « Le second niveau raconte l’histoire d’un jeune médecin dont la fiancée est enceinte et qu’il essaie d’arracher des griffes d’une famille trop possessive. Il se mêle donc aux chasseurs en essayant de profiter de ce moment d’intimité avec la famille de sa future femme pour les convaincre de la laisser partir. La grosse difficulté du scénario consistait à entremêler ces deux histoires sans que le résultat ne semble artificiel. » (1)

 

Les bêtes de la forêt

La Traque a beaucoup d’atouts en main : une mise en scène brute d’une très grande efficacité, une brochette de comédiens extraordinaires, une mise en image élégante signée Pierre Haïm (chef opérateur de La Haine et Les Morsures de l’aube), une magnifique partition de Romaric Laurence (Ong-Bak, Vendues) qui semble directement puiser son inspiration chez le Danny Elfman de Wolfman Seuls véritables bémols : l’utilisation abusive de la « sahky cam » et de la sous-exposition, qui empêchent souvent de saisir la teneur exacte des séquences d’action en les rendant parfois quasi-illisibles, ainsi que la présence trop discrète des créatures à l’écran, aucune ne montrant réellement le bout de son groin à cause d’évidentes restrictions budgétaires, et malgré le travail animatronique du très talentueux Pascal Molina (Les Rivières pourpres,  La Cité des enfants perdus). « Le travail de Pascal Molina sur le film était phénoménal », raconte Antoine Blossier. « Les créatures animatroniques étaient très réussies, mais nous n’avons eu les moyens de ne faire construire que les têtes et les épaules. Du coup, nos choix de cadrages étaient très limités. J’ai donc dû renoncer à toutes mes envies de plans larges sur les bêtes. Ce que j’aurais vraiment voulu, c’est avoir un plan iconographique de la bête, une vision impressionnante et iconique qui aurait satisfait les spectateurs tout en inscrivant définitivement La Traque dans son statut de film de créatures. » (2) Initialement titré Proie, le film a été rebaptisé La Traque quelques mois avant sa sortie pour éviter toute confusion avec La Proie d’Eric Vallette, au profit d’une homonymie assumée avec un thriller français de Serge Leroy qui plongeait Mimsy Farmer dans une cauchemardesque partie de chasse.


(1) et (2) Propos recueillis par votre serviteur en février 2010

 

© Gilles Penso

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