L’ASSOCIE DU DIABLE (1997)

Al Pacino incarne un diable tentateur dans cette fable terrifiante qui révéla au public le talent de Charlize Theron

DEVIL’S ADVOCATE

1997 – USA

Réalisé par Taylor Hackford

Avec Keanu Reeves, Al Pacino, Charlize Theron, Delroy Lindo, Jeffrey Jones, Connie Nielsen, Judith Ivey, Craig T. Nelson

THEMA DIABLE ET DEMONS

L’Associé du Diable est un projet qui traînait chez Warner depuis le début des années 90. Un temps, il fut question que Joel Schumacher le réalise, avec Brad Pitt en tête d’affiche. C’est finalement Taylor Hackford (Dolores Claiborne) qui en hérita. Jeune avocat ambitieux qui exerce en Floride, Kevin Lomax (Keanu Reeves) gagne systématiquement tous ses procès, défendant de préférence les meurtriers et les pédophiles sur la culpabilité desquels il préfère souvent fermer les yeux. Certes, quelques états d’âme semblent parfois sur le point de remonter à la surface, mais jamais suffisamment pour altérer ses plaidoiries. Marié à Mary Ann (Charlize Theron), une femme d’affaire aimante taillée comme un top model, il mène la belle vie. Un jour, il attire par ses prouesses l’attention de John Milton (Al Pacino), le chef mystérieux d’un puissant bureau d’avocats new-yorkais. Une proposition alléchante pousse Lomax et son épouse à s’installer à Manhattan. Les affaires y sont plus florissantes que jamais, la carrière de Kevin décolle subitement… Mais peu à peu, le malaise s’insinue. Mary Ann en est la première victime, frappée d’hallucinations de plus en plus inquiétantes (ses nouvelles amies ont soudain des visages monstrueux, un enfant erre dans son appartement). Kevin lui-même perd parfois pied, confondant son épouse avec son envoûtante collègue Christabella (Connie Nielsen). Le jeune avocat refuse de se l’avouer, mais il devient bientôt évident que son patron n’est autre que le Diable, et qu’il tire toutes les ficelles de sa vie.

Si Keanu Reeves se glisse sans mal dans la peau de Lomax et si Pacino est un Satan absolument parfait, la vraie révélation du film est Charlize Theron. En cours de métrage, la belle plante révèle ses failles, ses faiblesses, bascule dans la dépression, et l’actrice (alors inconnue du grand public) joue cette déchéance avec une justesse assez bouleversante. Le cauchemar insidieux décrit dans le film est proche de celui que vit Mia Farrow dans Rosemary’s Baby, et le changement de coupe de cheveux de Mary Ann en cours de métrage, pour anecdotique qu’il semble, n’a rien d’innocent. Grâce à d’habiles effets spéciaux, L’Associé du Diable nous offre quelques visions surprenantes comme une ville de New York soudain vidée de ses habitants, ou des bas-reliefs qui s’animent soudain.

« Le libre arbitre, c'est comme les ailes du papillon… »

Mais ce sont les dialogues du film qui sont probablement les plus savoureux, Pacino exultant au cours d’un monologue final mémorable. « Le libre arbitre, c’est comme les ailes du papillon », lance-t-il. « Si on les touche, il arrête de voler. Je ne fais que planter le décor, chacun tire ses propres ficelles ». Après s’être octroyé le beau rôle du simple tentateur, il s’en prend directement à Dieu, qu’il qualifie littéralement de farceur et de voyeur : « Il donne à l’homme des instincts, il vous donne ce don extraordinaire, et que fait-il ? Pour son propre plaisir, pour une tranche de rigolade personnelle et cosmique, il impose les règles contraires. » De nombreux rebondissements surviennent au cours du dernier quart d’heure, jusqu’à un final qu’on aurait aimé plus mordant, mais dont le moralisme n’altère pas l’efficacité de ce remarquable essai sur les racines du mal.

© Gilles Penso

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LA FIANCEE DE FRANKENSTEIN (1935)

Quatre ans après son adaptation du roman de Mary Shelley, James Whale parvient à se surpasser lui-même en signant une séquelle magistrale

THE BRIDE OF FRANKENSTEIN

1935 – USA

Réalisé par James Whale

Avec Boris Karloff, Elsa Lanchester, Colin Clive, Ernest Thesiger, Valerie Hobson, Gavin Gordon, Douglas Walton, Una O’Connor 

THEMA FRANKENSTEIN I NAINS ET GEANTS I SAGA UNIVERSAL MONSTERS

Quatre ans après Frankenstein, James Whale, armé d’un budget de 400 000 dollars, met en scène La Fiancée de Frankenstein, une suite que beaucoup considèrent comme supérieure à l’originale. Il faut dire que Whale a injecté dans ce second film plus d’émotion, plus d’humour, plus de dynamisme, et une très belle partition de Franz Waxman, alors que le premier Frankenstein était quasiment dénué de musique. La caméra est devenue plus mouvante, et le rythme plus nerveux. Ici, le monstre est miraculeusement rescapé de l’incendie du moulin, tout comme son créateur, et dès lors les résurrections de la créature deviendront le leitmotiv de la série Universal. Comme son personnage apprend petit à petit à parler, Karloff a droit à quelques émouvantes lignes de dialogue. Le jeu du comédien s’enrichit donc, tout comme son maquillage que Jack Pierce a modifié pour lui donner un aspect partiellement brûlé. Cette évolution dans le traitement de la créature explique en grande partie la supériorité de ce second épisode sur son modèle. Car le zombie pataud affublé d’un cerveau de criminel s’est ici mué en être pathétique en quête d’affection, ce qui le rapproche finalement du texte initial de Mary Shelley. D’où une séquence très émouvante où le monstre trouve refuge chez un vieil ermite aveugle, seul humain à ne pas le traiter comme un monstre et à accepter bien volontiers sa compagnie.

Dans cette séquelle intervient également un inquiétant savant fou, le docteur Pretorius (Ernst Thesiger), exhibant avec exaltation à Frankenstein les êtres humains miniatures qu’il a fabriqués, dans une scène étonnante qui annonce Les Poupées du Diable, et qui reprend à son compte le mythe des homoncules créés par les alchimistes médiévaux et conservés dans des ampoules de verre. Mais la grande révélation du film est Elsa Lanchester, interprète de Mary Shelley dans le prologue du film où elle raconte à son mari et à Lord Byron la suite des aventures du monstre de son roman, mais surtout incarnation de la créature femelle que Frankenstein crée pour servir de compagne à son monstre, sous la pression de Pretorius. On se souviendra longtemps de sa coupe de cheveux spectaculaire qui évoque la foudre et de ses cris perçants.

Cinq minutes inoubliables

Le seul regret qu’on pourra formuler, vis à vis de cette créature, est la brièveté de son apparition (moins de cinq minutes de présence à l’écran), d’autant qu’elle ne réapparaîtra dans aucun autre film de la série, contrairement à tous ses monstrueux confrères. A l’instar de Boris Karloff dans le premier Frankenstein, le nom de la comédienne fut remplacé par un point d’interrogation dans le générique, afin d’entretenir un doute auprès des spectateurs. Rejeté par la promise qui lui fut pourtant confectionnée sur mesure, le monstre de Frankenstein finit par saccager le laboratoire et les deux créatures périssent dans une grande explosion…  Dans le montage original, le docteur passait lui aussi l’arme à gauche, mais les producteurs optèrent finalement pour un dénouement plus heureux. D’autres séquences furent modifiées ou coupées après les projections test organisées par Universal, ramenant la durée du film de 90 à 75 minutes.

 

© Gilles Penso

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LA COLLINE A DES YEUX (1977)

Wes Craven nous raconte sans concession le choc violent entre la civilisation et la sauvagerie la plus primaire

THE HILLS HAVE EYES

1977 – USA

Réalisé par Wes Craven

Avec Susan Lanier, Robert Houston, Martin Speer, Dee Wallace Stone, James Whitworth, Russ Grieve, Michael Berryman

THEMA TUEURS I CANNIBALES I SAGA LA COLLINE A DES YEUX WES CRAVEN

Fidèle aux thématiques qu’il développa dans La Dernière maison sur la gauche, lesquelles furent reprises avec brio par John Boorman dans Délivrance, Wes Craven continue de s’intéresser à la violence humaine poussée à son paroxysme, avec cette mémorable Colline à des yeux (quel titre magnifique !) dont il signa le scénario, la réalisation et le montage. Une famille américaine, dont la mère est croyante et le père ex-policier, quitte Cleveland pour la Californie dans une caravane tirée par un break, en direction d’une mine d’argent dont ils viennent d’hériter. Les parents, les deux filles, le fils, le gendre, un bébé et deux chiens-loups traversent donc le désert, au cours de ce qui semble s’apparenter de prime abord à un road movie initiatique. Lorsque l’essieu de la voiture se brise, ils se retrouvent isolés en plein Arizona face à une famille dégénérée vivant dans la colline. Le père, Jupiter, est un mutant victime d’une expérience atomique, sa femme est une corpulente ex-prostituée, ses enfants sont Pluton, Mars, Mercure et Ruby. Anthropophages, ils communiquent avec des radio CB volées. La famille de la colline décime les intrus et capture le bébé pour le dîner. Les survivants et le dernier chien vivant sont alors décidés à se venger…

Au cours de cet éprouvant « survival », Le spectateur suit ainsi les mésaventures de deux familles parfaitement antithétiques : l’une « normale », équilibrée, citadine, mais intruse en plein désert ; l’autre sauvage, cannibale, affamée et violée sur son propre territoire. Les membres de la première famille ne forçant pas spécialement la sympathie, le spectateur se trouve d’emblée sur un terrain glissant, dénué de pôles d’identification. Lorsque les rejetons de Jupiter répondent à l’envahissement de leur terre par l’agression nocturne de la caravane, le film bascule dans une violence inouïe, traitée avec une crudité décuplant son efficacité, ceci malgré un jeu d’acteurs assez approximatif. Ce bain de sang, qui semble partiellement s’inspirer de Massacre à la tronçonneuse, laisse pantois. Mais l’enthousiasme avec lequel les agressés, à bout de nerfs, finissent par rendre les coups, amplifie encore le malaise.

Monstruosités familiales

Car là est bien le propos de Craven. La violence, la folie meurtrière et la haine bestiale sont dangereusement communicatives. Le final abrupt, une fois cet affolant axiome démontré, ne prend dès lors même plus la peine d’épiloguer, laissant le spectateur sur les rotules. « Dans pratiquement tous mes films, j’aime développer l’idée que la monstruosité peut naître chez les individus les plus normaux et que la violence est susceptible de se développer au sein des relations familiales », nous explique Wes Craven (1). Véritable trouvaille de casting, Michael Berryman, chauve interprète de Pluton, trouve ici le rôle de sa vie, et traînera par la suite son visage inquiétant dans maintes séries B sans nous faire oublier sa performance d’agresseur cannibale. Récipiendaire de maintes récompenses à travers le monde, notamment à Londres, Sitges et Los Angeles, La Colline a des yeux assit définitivement la réputation de Wes Craven, propulsé dès lors au rang de nouveau maître de l’épouvante.


(1) Propos recueillis par votre serviteur en octobre 2005

© Gilles Penso

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CLOVERFIELD (2008)

Le réalisateur Matt Reeves et son producteur J.J. Abrams imaginent un film de monstre géant filmé à la première personne par une caméra amateur

CLOVERFIELD

2008 – USA

Réalisé par Matt Reeves

Avec Michael Stahl-David, Lizzy Caplan, Jessica Lucas, Mike Vogel, T.J. Miller, Odette Yustman, Anjul Nigam

THEMA INSECTES ET INVERTÉBRÉS I SAGA CLOVERFIELD

Beaucoup de mystère entourait Cloverfield avant sa sortie sur les écrans : un titre énigmatique (littéralement «champ de trèfles»), une affiche hommage à celle de New York 1997 dans laquelle la Statue de la Liberté est décapitée, un teaser choc diffusé sur Internet… Il n’en fallut pas plus pour créer un habile processus d’attente, jusqu’à la révélation du producteur et initiateur du projet : J.J. Abrams, père des séries Alias et Lost et réalisateur de Mission Impossible 3. Au vu du résultat final, on ne peut que saluer l’audace de Cloverfield, qui raconte l’attaque de New York par un monstre géant sans jamais quitter le point de vue d’un caméscope amateur. Un peu comme si Le Projet Blair Witch rencontrait Godzilla ! Au-delà de ce concept osé, que le film parvient à respecter tout au long de ses 90 minutes, la grande force du scénario de Drew Goddard (plusieurs épisodes de Alias et Lost) est de s’attacher en priorité à ses personnages.

Pendant vingt minutes, le réalisateur Matt Reeves (co-créateur avec Abrams de la série Felicity) nous familiarise avec un groupe de jeunes new-yorkais qui organisent une soirée surprise pour le départ de leur ami Rob (Michael Stahl-David) au Japon. Amitiés, jalousies, amertumes, éclats de rire, rien n’échappe à la caméra amateur de Hud (T.J. Miller) qui est chargé de filmer la soirée. Si cette première partie ne manque ni de charme, ni de spontanéité, on pourra lui reprocher sa longueur excessive. Vingt minutes pour raconter que Rob est encore amoureux de la jolie Beth (Odette Yustman) et que Hud en pince pour la marginale Marlena (Lizzy Caplan), c’est tout de même beaucoup ! Alors que l’attention du spectateur commence à défaillir, l’événement survient enfin. Et comme tout est vu à travers un caméscope, les images sont confuses, mouvementées et difficiles à comprendre. Apparemment, une catastrophe est en train de survenir dans les rues de New York : l’armée tire en tous sens, la foule est en proie à la panique, et bientôt la tête de la Statue de la Liberté vient s’écraser aux pieds de nos héros ! Affolée, Marlena, qui en voit plus que les autres, se contente de dire en état de choc : « il mange les gens ! ». Ce dont elle parle est une créature gigantesque à mi-chemin entre le dinosaure, la pieuvre et la sauterelle géante.

« Il mange les gens ! »

Dès lors, le rythme ne défaillit plus, entraînant dans sa folle course des protagonistes s’efforçant d’éviter les assauts du monstre titanesque, mais aussi de ses innombrables parasites, des abominations de deux mètres de long dont la morsure s’avère fatale. D’où une mémorable séquence dans les couloirs du métro new-yorkais. Toute l’originalité du film découle du décalage entre le gigantisme du danger et la précarité des prises de vues. Les effets spéciaux prennent alors une tournure hyperréaliste et les comédiens rivalisent de naturel et de crédibilité. « Le gros défi des compositings d’un tel film est l’intégration parfaite de nos créations dans des prises de vues hyperréalistes et en mouvement permanent », raconte le superviseur des effets visuels Phil Tippett. « Le monstre lui-même était doté d’un concept très insolite, d’autant que l’intention a toujours été de ne pas le révéler entièrement dans des plans larges. On n’en distingue à chaque fois que des morceaux furtifs, et on essaie d’imaginer à quoi il ressemble réellement. » (1) Cerise sur le gâteau, une idée narrative supplémentaire permet au réalisateur d’intégrer des flash-backs dans son métrage, car les images auxquelles nous assistons sont censées être enregistrées sur une ancienne bande vidéo datant de l’idylle naissante du couple vedette. Les « décrochages » ainsi obtenus offrent un recul intéressant sur l’intrigue, et permettent de clôturer le film sur une note cruellement ironique.

(1) Propos recueillis par votre serviteur en avril 2008

 

© Gilles Penso

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LA MOUCHE (1986)

David Cronenberg revisite un classique de la science-fiction des années 50 pour pousser à son paroxysme son exploration des mutations de la chair

THE FLY

1986 – USA

Réalisé par David Cronenberg

Avec Jeff Goldblum, Geena Davis, John Getz, Joy Boushel, Leslie Carlson, George Chuvalo, David Cronenberg, Michael Copeman

THEMA INSECTES ET INVERTÉBRÉS I SAGA LA MOUCHE

En 1982, John Carpenter proposait avec The Thing un remake surprenant d’un classique de la science-fiction des années 50, contournant son prestigieux modèle en restructurant sa construction narrative et en modernisant ses thématiques. Quatre ans plus tard, David Cronenberg suit la même voie en proposant une vision très personnelle du scénario de La Mouche noire que Kurt Neuman réalisa en 1958. Jeff Goldblum y interprète Seth Brundle, un jeune scientifique qui vient de mettre au point dans son laboratoire une invention révolutionnaire : la fameuse téléportation. Ses premiers essais sur un babouin étant catastrophiques, Brundle revoit sa copie et décide d’être lui-même le cobaye de la prochaine expérience. Il se téléporte ainsi d’un « télépode » à un autre avec beaucoup de succès. Ce n’est que plus tard qu’il réalise qu’une mouche s’est infiltrée dans le télépode pendant l’expérience.

Comme dans The Thing, monstre et humain ne sont plus dissociés mais entremêlés en une hideuse et inexorable métamorphose, qui n’est pas sans évoquer celle, pathétique, imaginée par Kafka. L’idée de génie de cette nouvelle Mouche consiste à amener la transformation progressivement et en la délocalisant sur l’ensemble de l’organisme. Car ici, la mutation de l’homme en mouche est de toute évidence associée à une maladie progressive, avilissante, destructrice et annihilatrice. Rien n’empêche d’y voir une métaphore du sida, dont les ravages commençaient sérieusement à perturber la population au milieu des années 80. Le profil physique type des héros masculins de Cronenberg, taciturnes et intériorisés dans la lignée de James Woods, Christopher Walken, Jeremy Irons ou Peter Weller, n’est pas ici respecté par la présence de Jeff Goldblum, comédien plus populaire et fort différemment typé. Il faut voir là un choix artistique brillant, que Cronenberg imposa presque à son producteur Mel Brooks (ce dernier souhaitait ardemment donner le rôle à Pierce Brosnan).

La métamorphose

Conforme à ce que le public attend de lui, dans le registre du grand timide maladroit un peu doux-dingue, Goldblum casse peu à peu cette image avec un talent indiscutable. Le voir se muer, psychologiquement et physiquement, en surhomme arrogant, en infirme pathétique puis en monstre effrayant, est autant perturbant pour le spectateur que pour la journaliste incarnée par Geena Davis. Et les maquillages spéciaux de Chris Walas, très surprenants, portent aux nues l’horreur organique inhérente au récit. L’un des thèmes fétiches de l’œuvre de Cronenberg, la mutation, est ainsi porté à son paroxysme, même si le cinéaste n’en assume pas tout à fait la récurrence. « Etant donné que je n’ai pas tendance à faire d’auto-analyse, je n’étudie pas mes propres films ni ne cherche à établir de comparaisons thématiques entre eux », nous avoue-t-il. « Ceci étant dit, la mutation est inhérente au processus de la vie, puisque toute notre existence est régie par le changement. Je dirais donc que, plus qu’un cinéaste attiré par la mutation, je suis un cinéaste qui puise son inspiration dans la vie elle-même. » (1) D’où d’inévitables filiations entre La Mouche et les films précédents de Cronenberg.

(1) Propos recueillis par votre serviteur en octobre 2005

 

© Gilles Penso

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LA MOUCHE NOIRE (1958)

Un savant qui a découvert le moyen de téléporter la matière organique décide d'être son propre cobaye. Mais une mouche met son grain de sel dans l'expérience…

THE FLY

1958 – USA

Réalisé par Kurt Neumann

Avec David Hedison, Vincent Price, Patricia Owens,Herbert Marshall, Kathleen Freeman, Betty Lou Gerson, Charles Herbert

THEMA INSECTES ET INVERTÉBRÉS I SAGA LA MOUCHE

C’était la fin des années 50, une époque ô combien imaginative où romanciers et scénaristes de science-fiction débordaient d’idées démentielles et donnaient parfois naissance à des joyaux comme L’Homme qui rétrécit, Planète interdite ou encore cette inoubliable Mouche noire, adaptant une histoire de George Langelaan publiée en juin 1957 dans Playboy. Hélène Delambre est accusée d’avoir assassiné son époux, le scientifique André Delambre, retrouvé écrasé sous une presse hydraulique. Elle confie son étrange histoire à François, le frère d’André, et à l’inspecteur Charas. Selon elle, André lui avait fait part de ses brillantes recherches, tournant autour de la désintégration d’un objet puis de sa réintégration sous sa forme primitive. Le récit de La Mouche noire est donc partiellement bâti autour d’un flash-back, selon une narration un peu inhabituelle. La première expérience de Delambre sur un chat échoue. Puis il réussit le transfert d’un rongeur, et sert finalement lui-même de cobaye. Mais au cours de l’essai, une mouche s’introduit avec lui dans l’appareil. Le résultat est tragique : André a désormais une tête de mouche et une serre à la place de sa main gauche. Quant à la mouche, sa tête et l’une de ses pattes sont à présent celles du professeur.

Vincent Price, dans le rôle du frère de la victime, accablé mais tout en retenue, annonce les personnages d’Edgar Poe qu’il incarnera peu après pour Roger Corman. David Hedison lui-même, d’habitude assez fade et peu expressif, trouve ici l’un de ses meilleurs rôles, sous la défroque de ce savant sain d’esprit et équilibré se laissant peu à peu tenter par le jeu de l’apprenti-sorcier. La technologie révolutionnaire qui sert de pierre angulaire au scénario, c’est-à-dire la téléportation, allait devoir attendre près d’une décennie, avec la série Star Trek, pour être à nouveau exploitée narrativement avec succès. La première expérience de Delambre sur un être vivant a des conséquences désastreuses, mais au lieu d’opter pour un résultat sanglant, le réalisateur a choisi une angoisse plus subtile : le chat cobaye disparaît, mais son miaulement distordu continue à hanter le laboratoire.

« Aidez-moi ! »

Le potentiel d’épouvante du film va croissant, malgré l’aspect peu convaincant de l’homme à tête de mouche (son maquillage dû à ben Nye étant cependant dissimulé la plupart du temps sous une serviette). Cela dit, la première apparition du monstre à visage découvert a beaucoup d’impact, grâce aux hurlements de Patricia Owens et à un procédé astucieux permettant d’adopter le point de vue subjectif de la mouche, l’actrice s’époumonant en un étrange plan multi-facettes. Mais en matière de terreur viscérale, c’est assurément le dénouement qui atteint des sommets propres à glacer le sang, même plusieurs décennies plus tard. La vision terrifiante de cette mouche à tête humaine qui hurle « aidez-moi ! », prisonnière dans une immense toile tandis qu’une hideuse araignée s’approche inexorablement d’elle pour la dévorer, hantera longtemps les cinéphiles les plus endurcis. Le réalisateur Kurt Neumann décéda quelques mois à peine après avoir terminé le film, lequel s’érigea dès sa sortie en gigantesque succès pour la 20th Century Fox.

 

© Gilles Penso

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THE MIST (2007)

Pour la quatrième fois de sa carrière, Frank Darabont adapte un texte de Stephen King qu'il transforme ici en véhicule de terreur primale

THE MIST

2007 – USA

Réalisé par Frank Darabont

Avec Thomas Jane, Andre Braugher, Laurie Holden, Marcia Gay Harden, Toby Jones, Amin Joseph, Alexa Davalos, William Sadler

THEMA INSECTES ET INVERTÉBRÉS I ARAIGNÉES I MONDES PARALLÈLES ET MONDES VIRTUELS I SAGA STEPHEN KING

L’adaptation d’un roman de Stephen King par Franck Darabont est toujours un événement. Après The Woman in Room, Les Evadés et La Ligne verte, notre homme s’attaque ici à « Brume », une nouvelle publiée en 1985 dans le recueil du même nom. Darabont en profite pour revenir à ses premières amours : les « monster movies » à l’ancienne. Rappelons en effet que cet auteur/réalisateur primé aux quatre coins du monde écrivit en début de carrière les scripts de Freddy 3, du Blob et de La Mouche 2. Incarné par Thomas Jane, le héros de The Mist est David Dayton, qui vit dans une petite ville du Maine et gagne sa vie en peignant des affiches pour le cinéma (son atelier est d’ailleurs orné par le fameux poster de The Thing). Un soir, une tempête ravage les environs et déracine de nombreux arbres autour de sa maison. Parti dans la superette du coin en compagnie de son jeune fils Billy pour acheter de quoi réparer les dégâts, David constate qu’une brume étrange enveloppe peu à peu toute la ville, et que d’inquiétantes créatures s’y dissimulent. Quiconque tente de s’échapper du magasin est en effet happé et dévoré par des choses invisibles. Pour éviter de connaître un sort similaire, la petite centaine d’habitants réfugiés dans le supermarché va devoir se serrer les coudes.

La grande force de The Mist est d’aborder son sujet sous un angle extrêmement réaliste et de s’attacher en priorité au comportement de ses protagonistes. En situation de crise, le vernis ne tarde pas à craquer, et lorsque la panique se répand telle une traînée de poudre, la nature humaine prend des atours très peu reluisants. A l’instar d’une Nuit des Morts-VivantsThe Mist pose alors en substance la question fatidique : les monstres qui rodent à l’extérieur sont-ils pire que les humains en proie au huis clos ? Galvanisés par une redoutable bigote (l’excellente Marcia Gay Harden) récitant sans interruption des versets de la bible, la plupart des rescapés se laisse bientôt aller au fanatisme religieux, quitte à organiser des sacrifices humains pour calmer « la colère divine ».

Les abominations tapies dans le brouillard

S’il se concentre sur ses comédiens qu’il filme d’ailleurs avec une nervosité proche du reportage (avec l’aide du chef opérateur et des cadreurs de la série The Shield), Franck Darabont ne délaisse pas pour autant les monstres eux-mêmes. Et lorsqu’il se décide enfin à les révéler, nous découvrons des abominations qui semblaient n’exister jusqu’alors que dans les pires cauchemars… ou dans les romans de Lovecraft. Céphalopodes titanesques dont les tentacules arrachent les chairs de leurs victimes, insectes géants armés de dards empoisonnés, créatures volantes à mi-chemin entre le ptérodactyle et le rapace, araignée géantes arborant d’hideux faciès grimaçants, chacune de ces bêtes apocalyptiques provoque d’irrépressibles frissons à chacune de ses apparitions. Accumulant les tensions extrêmes et les séquences horrifiques, le film s’achemine vers un dénouement très éprouvant, qui s’éloigne du texte original pour asséner un véritable coup de massue au spectateur. The Mist est donc une réussite indéniable, assumant pleinement son statut de « film de monstre » tout en transcendant avec talent les codes du genre.

© Gilles Penso

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PHASE IV (1973)

Le légendaire designer Saul Bass passe derrière la caméra pour confronter la race humaine à l'inquiétante intelligence des fourmis

PHASE IV

1973 – USA

Réalisé par Saul Bass

Avec Michael Murphy, Nigel Davenport, Lynne Frederick, Alan Gilford, Robert Henderson, Helen Horton

THEMA INSECTES ET INVERTÉBRÉS

Phase IV est un film très curieux, quasi expérimental, qui marque les débuts de Saul Bass aux commandes d’un long-métrage. A son génie visuel, nous devons les extraordinaires génériques animés d’une soixantaine de films, notamment L’Homme au bras d’or, Le Tour du monde en 80 jours, Sueurs froides, La Mort aux trousses, Spartacus, Exodus, West Side Story, Bunny Lake a disparu, Grand Prix, Alien, Les Nerfs à vif et Casino. A travers ses splendides storyboards, il participa aussi activement au découpage de la célèbre scène de la douche de Psychose. L’homme est donc un vétéran ayant touché à tous les genres, y compris au documentaire en tant que réalisateur, et son entrée dans la fiction pour le grand écran prend la tournure d’une fable de science-fiction conceptuelle, reposant sur un scénario de Mayo Simon.

A cause d’un déséquilibre écologique, des fourmis douées d’une redoutable intelligence se regroupent en Arizona et passent à l’attaque. James R. Lesko (Michael Murphy) et Ernest D. Hobbs (Nigel Davenport), deux scientifiques, s’installent dans un dôme rempli d’équipements électroniques afin d’interpréter le langage des fourmis. Après qu’elles aient détruit leur véhicule et, du même coup, leur générateur d’énergie principal, ils répandent un poison ocre autour du laboratoire, tuant des millions d’entre elles. Les survivantes trouvent un antidote et, de plus en plus fortes, se retournent contre leurs agresseurs. Mais l’insecticide a également tué des fermiers imprudents qui cherchaient refuge dans le dôme. Au petit matin, leur cadavre jauni gît dans la carcasse de leur camion. Kendra Eldridge (Lynne Frederick), une jeune fille qui a survécu à l’empoisonnement, se joint bientôt aux deux scientifiques…

La nature reprend ses droits

Le sujet de Phase IV est à la fois fascinant et terrifiant, dans la mesure où il repose sur des faits scientifiques indiscutables, d’autant qu’il est traité avec un maximum de réalisme. Mais le style du film, qui privilégie les images emblématiques au détriment de la psychologie de ses personnages (tant humains que fourmis) atténue beaucoup son impact. Jouant au maximum la carte de l’épure, le scénario se concentre uniquement sur trois personnages, mais exploite très évasivement la claustrophobie et l’angoisse de ce huis clos représenté par le dôme, entièrement cerné par les dangereux hyménoptères. Les prises de vues des fourmis, qui n’ont rien à envier à celles des meilleurs documentaires animaliers, sont très impressionnantes, d’autant qu’elles ne doivent rien aux effets spéciaux. Quelques images choc ponctuent également Phase IV, comme l’araignée dévorée en quelques secondes par une horde de carnassières, les tours gigantesques bâties par les fourmis, la main du cadavre d’où s’échappent les dangereux insectes (une vision qui servira de support au fameux poster du film), ou le scientifique échoué dans un piège et bientôt recouvert de milliers d’entre elles. Le final, très ouvert, est un peu escamoté, une voix off nous expliquant ce que des images auraient pu nous faire comprendre avec un impact bien plus fort.

© Gilles Penso

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L’ATTAQUE DES CRABES GEANTS (1957)

Roger Corman ose tout, y compris mettre en scène des crustacés géants et télépathes qui attaquent l'humanité !

ATTACK OF THE CRAB MONSTERS

1957 – USA

Réalisé par Roger Corman

Avec Richard Garland, Pamela Duncan, Russel Johnson, Mel Welles, Beech Dickerson, Leslie Bradley, Jonathan Haze

THEMA INSECTES ET INVERTÉBRÉS

Hyperactif en cette belle année 1957, Roger Corman réalisa pas moins de dix films en douze mois, dont cet étonnant Attack of the Crab Monsters qui demeure l’une de ses séries B de science-fiction les plus fameuses. « Ce film de 70 000 dollars en a rapporté plus de 1 million », affirme fièrement Corman (1). Se laissant probablement guider par la vogue des invertébrés géants amorcée par Des Monstres attaquent la villeTarantula et consorts, le producteur/réalisateur et son scénariste Charles B. Griffiths prennent pour héros un groupe de scientifiques explorant une île du Pacifique pour y étudier les retombées des essais atomiques, et découvrir ce qui est arrivé à l’expédition précédente, qui n’a plus donné signe de vie. A peine débarquent-ils que le réalisateur nous octroie une séquence choc assez gratinée pour l’époque. Un marin y tombe d’une barque et s’enfonce sous l’eau. Lorsque ses collègues le repêchent, il n’a plus de tête ! Plus tard, nous aurons droit à un autre effet presque gore, lorsqu’un des membres du groupe se fait arracher la main par un éboulement. Bientôt, l’expédition découvre que toute vie animale semble avoir disparu sur l’île, à l’exception de quelques crabes de terre qui errent sur la plage. Mais l’effet des radiations atomiques s’est avéré bien plus spectaculaire que le bouleversement de l’écosystème. 

En effet, nos héros se retrouvent bientôt en présence de crabes gros comme des camions et particulièrement vindicatifs, qui dévorent un à un les membres de l’équipe. Doués de télépathie, les crustacés mutants communiquent dès lors avec les humains en empruntant la voix de leurs victimes. Ce phénomène pour le moins excentrique est vaguement expliqué par un scientifique avançant la théorie que les crabes ont dévoré le cerveau des hommes, assimilant dès lors leurs cellules et leur intelligence. L’argument ne tient pas, même pour le spectateur le moins exigeant, mais cette idée scénaristique accroît le potentiel d’épouvante du film, et permet aux monstres de dépasser leur rôle basique de machines à détruire et à engloutir. Par le biais de la bande son, Corman parvient à créer des moments d’angoisse efficace, les monstres restant invisibles dans un premier temps mais cliquetant d’une manière insolite et stressante. Puis ce sont des pinces géantes qui apparaissent, fracassant les murs en carton-pâte et capturant les victimes hurlantes. 

De vrais moments d'angoisse

Lorsque les crabes apparaissent enfin en entier, il faut avouer qu’ils sont plutôt réussis, leur morphologie, leur texture et leurs déplacements fonctionnant assez bien, malgré de gros yeux un peu grotesques et les jambes humaines des manipulateurs que les plus attentifs peuvent apercevoir furtivement. Conçus grandeur nature par Beach Dickerson et Ed Nelson, les crustacés géants (en fait un seul exemplaire jouant le rôle de l’ensemble des créatures) interagissent du coup avec les comédiens avec un certain degré d’efficacité. « Ce crabe mesurait environ quatre mètres et était maintenu par des câbles », raconte Roger Corman. « Ed Nelson, qui a joué plus tard dans la série télévisée Peyton Place, a fait ses premiers pas d’acteurs à l’intérieur du crabe. Il a également joué un officier de marine dans le film. Il manœuvrait le monstre depuis l’intérieur pendant que Chuck Hanawalt, mon chef machiniste, ainsi que les autres membres de l’équipe le soutenaient avec des perches. » (2) Dommage que la solution pour éliminer les monstres s’avère si simple, et que le film s’achève aussi brutalement, sans le moindre épilogue digne de ce nom. Lors de sa sortie, L’Attaque des crabes géants fut présenté en double programme avec Not of this Earth, un autre petit bijou de science-fiction signé Corman. 

 

(1) et (2) Extrait de la biographie “Comment j’ai fait 100 films sans jamais perdre un centime” par Roger Corman et Jim Jerome, publiée en 1990

 

© Gilles Penso

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JOE’S APARTMENT (1996)

Une comédie déjantée dans laquelle un jeune homme sympathise avec la horde de cafards qui infeste son appartement

JOE’S APARTMENT

1996 – USA

Réalisé par John Payson

Avec Jerry O’Connell, Megan Ward, Billy West, Reginald Hudlin, Robert Vaughn, Jim Turner, Sandra Denton, Don Ho, Jim Sterling

THEMA INSECTES ET INVERTÉBRÉS

A l’origine, Joe’s Apartment est un court métrage de John Payson, dans lequel des cafards en 3D chantent et dansent avec frénésie dans une salle de bains. Le petit film connaît un tel succès qu’il se mue immédiatement en objet de culte et permet à son auteur d’en tirer un long métrage, à l’aide d’un budget avoisinant les treize millions de dollars. Le résultat est un mixage improbable entre la comédie romantique, le film d’horreur, le conte de fées, la satire sociale et la comédie musicale ! Son héros, incarné par Jerry O’Connell, débarque de son Iowa natal pour s’installer à New York. Dès la gare routière, le contraste avec sa campagne se fait sentir, Joe étant agressé par trois voleurs différents en l’espace de cinq minutes ! Bien en peine de trouver un logement à bas prix, il déniche finalement par hasard un appartement insalubre dans le quartier défavorisé de l’East River, dont l’ancienne locataire vient de succomber. Joe est aux anges, mais il déchante en découvrant que ses colocataires sont des milliers de cafards bavards qui s’agitent en tous sens et poussent volontiers la chansonnette. Après s’être efforcé par tous les moyens de se débarrasser de ces insectes très encombrants, il réalise que ces derniers peuvent s’avérer des alliés très précieux. Notamment lorsqu’un promoteur bien peu scrupuleux envisage de faire raser l’immeuble pour y bâtir une prison.

Sur ce postulat absurde, Payson bâtit une comédie burlesque, qui n’hésite pas à raser les pâquerettes et donner dans le scato, fidèle en cela à l’humour ado défendu par MTV, chaîne coproductrice du film. Ainsi, Joe ramasse les crottes pour obtenir de l’engrais, puis travaille dans une entreprise de pastilles d’urinoir, avant d’intégrer un groupe de rock alternatif baptisé « Shit ». Ce qui nous donne droit à l’une des scènes les plus comiques et les plus stupides du film : Joe, qui n’a jamais touché une batterie de sa vie, tente un solo en plein concert, sous la mine désabusée d’un public de hard-rockers purs et durs. Aux côtés d’O’Connell, on trouve la mignonnette Megan Ward, propre à susciter une romance naïve avec Joe, mais aussi le vétéran Robert Vaughn, dans le rôle hilarant d’un respectable sénateur qui raffole des dessous féminins !

« Sex, Bugs and Rock'n Roll ! »

Mais les véritables vedettes sont bien entendu les cafards. Insectes réels, figurines animées image par image ou image de synthèse ultra-réalistes, ils suscitent tour à tour éclats de rire et cris de dégoûts auprès d’un public qui ne sait plus trop où donner de la tête, tant Joe’s Apartment échappe à toute classification, s’approchant de films fous tels que La Cité des monstres. Ce qui est sûr, c’est que le divertissement y est roi, l’originalité totale, et les parodies de comédies musicales de véritables morceaux d’anthologie. Avec une mention spéciale pour « Funky Towell », où les cafards, mus par un rythme endiablé, se lancent dans une chorégraphie hallucinante, à mi-chemin entre Les Blues Brothers et Chantons sous la pluie. Ce délire pur fut assorti d’un slogan impayable : « Sex, Bugs, Rock’n Roll » ! Mais il faut croire que cet œuvre était décidemment trop atypique, car elle ne connut qu’un succès confidentiel. C’est souvent le lot des films cultes.

© Gilles Penso

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