TERMINATOR GENISYS (2015)

L'un des réalisateurs clé de la série Game of Thrones tente maladroitement de relancer la franchise créée par James Cameron

TERMINATOR GENISYS

2015 – USA

Réalisé par Alan Taylor

Avec Arnold Schwarzenegger, Jai Courtney, Jason Clarke, Emilia Clarke, Lee Byung-Hun, Matt Smith, J.K. Simmons

THEMA ROBOTS I VOYAGES DANS LE TEMPS I FUTUR I SAGA TERMINATOR

Polymorphe et quelque peu insaisissable, Terminator Genisys est le fruit contre-nature du recyclage auquel Hollywood ne cesse de se livrer avec ses franchises les plus populaires pour les adapter à un nouveau public et en tirer de juteux bénéfices. En ce sens, le film d’Alan Taylor est un véritable cas d’école, puisqu’il s’agit à la fois d’une prequel, d’une séquelle, d’un remake et d’un reboot de Terminator et Terminator 2 ! Ignorant les épisodes réalisés par Jonathan Mostow et McG, ce cinquième opus revient aux sources du mythe créé par James Cameron. Si les premières minutes du film nous racontent, dans le futur, les événements qui précèdent l’envoi dans les années 80 d’un Terminator pour tuer Sarah Connor puis d’un humain pour la sauver, suscitant un inévitable sentiment de déjà vu, les événements se compliquent par la suite. Car nous sommes visiblement en présence d’une année 1984 parallèle dans laquelle rien ne s’est déroulé comme prévu (on pense aux lignes du temps expliquées par Emmet Brown dans Retour vers le Futur 2, mais les points communs avec le classique de Robert Zemeckis s’arrêtent là).

Dans cet univers alternatif, Sarah Connor a été rendue orpheline à l’âge de neuf ans et élevée par un T-800 programmé pour la protéger. Lorsque Kyle Reese débarque du futur pour la sauver, il ne trouve donc pas la serveuse faible et innocente qu’il s’attendait à voir mais une guerrière armée jusqu’aux dents flanquée d’un gentil Terminator qu’elle surnomme Papy et dont les tissus humains vieillissent sur sa carcasse métallique (une astuce scénaristique visant à expliquer pourquoi Arnold Schwarzenegger n’a plus sa fraicheur d’antan). A partir de là, la prequel/séquelle se transforme quasiment en remake des deux premiers Terminator, dans la mesure où Alan Taylor et ses scénaristes s’efforcent de reconstituer la majorité des séquences d’action concoctées jadis par James Cameron, y compris le combat de Reese contre un T-800 squelettique ou le surgissement d’un T-1000 qui, à l’instar du Robert Patrick de 1991, se déguise en policier pour tenter de passer inaperçu. Même les décors des affrontements sont similaires. La comparaison avec T1 et T2 est donc inévitable, et à ce jeu là Terminator Genisys n’a évidemment aucune chance. Ici, aucune scène de combat ou de poursuite ne parvient ne serait-ce qu’à égaler celles qui précédèrent.

Papy Arnold

Il faut tout de même reconnaître que Terminator Genisys s’efforce de respecter autant que possible le matériau original et de lui rendre hommage parfois très maladroitement – les reprise des répliques « viens avec moi si tu veux vivre » ou « I’ll be back » sont puériles, la bande originale de Lorne Balfe martèle lourdement le thème créé par Brad Fiedel – mais avec une apparente sincérité. Du coup, bizarrement, ces maladresses rendraient presque touchant ce film bancal qu’on aimerait aimer malgré sa balourdise – les traits d’humour y sont navrant – et qui, avouons-le, s’apprécie avec un de ces plaisirs coupables qui incitent à l’indulgence. Il est d’ailleurs possible que Terminator Genisys soit réévalué à la hausse dans quelques années, un peu comme Terminator 3 qui, à l’époque de sa sortie, avait déchaîné une colère sans borne chez les fans du cyborg créé par James Cameron.

 

© Gilles Penso

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LE SIXIEME SENS (1986)

Une adaptation stylisée du roman de Thomas Harris, dans laquelle Hannibal Lecter (ici rebaptisé Lecktor) fait sa première apparition à l'écran

MANHUNTER

1986 – USA

Réalisé par Michael Man

Avec William Petersen, Brian Cox, Joan Allen, Kim Greist, Dennis Farina, Tom Noonan, Stephen Lang, David Seaman

THEMA TUEURS I CANNIBALES I SAGA HANNIBAL LECTER

En 1981, l’écrivain Thomas Harris publie le roman « Dragon Rouge » et provoque un petit émoi dans la communauté des amateurs de polar. Eprouvant, tendu et constellé de détails réalistes, le texte s’inspire en partie de l’expérience d’Harris, ancien journaliste spécialisé dans les affaires criminelles. Cinq ans plus tard, Michael Mann, créateur de Deux Flics à Miami et réalisateur de La Forteresse Noire, décide d’adapter le roman en y injectant sa propre sensibilité. Dès les premières minutes du Sixième Sens, tout l’univers du futur auteur de Heat et Révélations envahit l’écran cinémascope : un océan à perte de vue, une magnifique photographie bleutée de Dante Spinotti, une musique synthétique planante, des ombres chinoises qui se découpent sur un ciel épuré… Will Graham (William Petersen) est un des experts légistes les plus habiles du FBI. Doté d’un instinct exceptionnel (auquel le film doit son titre français), il a la capacité d’entrer dans la peau des tueurs pour percer à jour leurs pensées, leurs rêves, leurs fantasmes. Alors qu’il a rendu son tablier depuis trois ans suite à l’arrestation de l’assassin anthropophage Hannibal Lecktor (Brian Cox), son ancien supérieur Jack Crawford (Dennis Farina) lui demande de reprendre du service pour enquêter sur le massacre de deux familles perpétré par l’énigmatique « tueur de la pleine lune ». C’est en voyant les photos tendues par Crawford que Graham accepte.

Là, toute la subtilité de Michael Mann se fait jour. Car au lieu des clichés atroces que l’on imagine, notre héros découvre les portraits heureux de deux familles nombreuses. Force est de reconnaître que l’impact de ces images est bien plus fort que s’il s’agissait de scènes de crimes éclaboussées d’hémoglobine, puisque c’est l’imagination du spectateur qui est sollicitée. Un peu rouillé, Graham doit retrouver ce qu’il appelle « la tournure d’esprit ». Il rend donc visite à Lecktor dans sa prison, mais l’entretien s’avère éprouvant dans la mesure où le cannibale lui démontre calmement à quel point tous deux sont semblables. « Nous recevons notre nature en même temps que nos viscères, pourquoi ne pas l’accepter ? » lui dit-il sans sourciller. Le caractère policier du film est palpitant. Mais c’est son aspect « autre », frôlant l’horreur et le fantastique sans jamais s’y conformer totalement, qui fascine le plus.

En ce domaine, la prestation du tueur incarné par Tom Noonan s’avère exceptionnelle. Terrifiant, comme lorsqu’il séquestre le reporter, un bas sur la moitié du visage, invoquant la fureur du dragon rouge, il est aussi paradoxalement touchant, fragile et à fleur de peau. Michael Mann applique ainsi à merveille l’adage selon lequel les monstres les plus intéressants sont ceux qui émeuvent et suscitent de l’empathie. Cette dualité chez l’assassin trouve son écho dans la mise en scène, alternant les séquences choc (le fauteuil roulant en flammes dans le parking) et les moments magnifiquement poétiques, comme cette jeune femme aveugle (Joan Allen) caressant un tigre endormi. Le Sixième Sens mit du temps à trouver son public, mais est désormais considéré comme une œuvre d’exception à laquelle de nombreux cinéastes se réfèrent et rendent hommage.

 

© Gilles Penso

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DRAGON ROUGE (2002)

Suite au succès du Silence des Agneaux et de Hannibal, cette prequel s'imposait… Même si elle souffre de la comparaison avec la version de Michael Mann

RED DRAGON

2002 – USA

Réalisé par Brett Ratner

Avec Anthony Hopkins, Edward Norton, Ralph Fiennes, Harvey Keitel, Emily Watson, Mary-Louise Parker, Philip Seymour Hoffman 

THEMA TUEURS CANNIBALES I SAGA HANNIBAL LECTER

Le Sixième Sens de Michael Mann n’ayant connu qu’un petit succès d’estime malgré ses grandes qualités, Dino de Laurentiis décida d’en produire un remake en 2002, profitant des triomphes au box-office du Silence des Agneaux et d’Hannibal. D’où ce Dragon Rouge, censé compléter de manière cohérente la trilogie des aventures du cannibale Hannibal Lekter en donnant à nouveau la vedette à Anthony Hopkins. L’idée n’est pas plus mauvaise qu’une autre, si ce n’est que le considérable échec artistique d’Hannibal n’incitait guère à l’enthousiasme. D’autant qu’après les prestigieux Michael Mann, Jonathan Demme et Ridley Scott, la réalisation de Dragon Rouge fut confiée à Brett Ratner, dont les seuls titres de gloire furent quelques clips ainsi qu’un éléphantesque Rush Hour avec Jackie Chan et Chris Tucker.

Étrangement, Ratner ne cherche pas à se distinguer ici par l’effet de style à tout prix ou la nervosité héritée de la génération MTV. Au contraire, sa mise scène joue la carte du classicisme efficace mais sans invention, empruntant la plupart de ses idées à ses prédécesseurs. Les séquences mettant en scène le profiler du FBI Will Graham et le tueur de la pleine lune singent sans vergogne celles de Michael Mann, parfois au découpage près, tandis que les scènes d’Hannibal Lekter s’inspirent largement de celles de Jonathan Demme, imitant la direction artistique et le montage du Silence des Agneaux. Le scénario lui-même est une copie conforme de celui du Sixième Sens, à l’exception d’un prologue racontant l’arrestation d’Hannibal Lekter par Will Graham.

Un casting prestigieux ne suffit pas

Mais l’absence d’ambition artistique de ce remake se ressent surtout à travers la direction de ses acteurs. Car rarement casting aussi prestigieux aura été autant sous-exploité. Anthony Hopkins, dont chaque regard glaçait d’effroi dans Le Silence des Agneaux, se repose ici sur ses acquis avec décontraction et sans se soucier de la moindre demi-mesure. L’excellent Edward Norton s’avère bien fade dans le rôle de Will Graham, tout comme l’immense Harvey Keitel, assurant le strict minimum en interprétant le directeur du FBI Jack Crawford. Quant à Ralph Finnes, qui s’avérait terrifiant dans La Liste de Schindler, il faut avouer qu’il laisse indifférent en tueur psychopathe, malgré l’atrocité des actes que l’on attribue à son personnage. Jamais on ne retrouve ici l’intensité du jeu de Tom Noonan dans Le Sixième Sens, notamment au cours de son éprouvante confrontation avec l’infortuné journaliste. Cet état de fait s’applique aussi aux personnages féminins, plus en retrait, notamment Mary-Louise Parker qui joue l’épouse de Graham et Emily Watson en jeune aveugle qui se laisse séduire par le tueur. Bref chacun est ici très en deçà de son immense potentiel, prouvant une fois de plus que la multiplication de têtes d’affiche ne permet aucun miracle si le réalisateur n’y met pas du sien. Après tout, aucun des acteurs du Sixième Sens n’était célèbre en 1986, et la qualité du film n’en souffrit guère. Dragon Rouge est donc l’archétype du remake inutile, propre sur lui et sans bavures, mais pâlissant considérablement à la lumière de son  magistral modèle.

 

© Gilles Penso

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WOLFCOP (2014)

50% homme, 50% loup, 100% flic : telle pourrait être la phrase d'accroche de cette variante lupine de l'inspecteur Harry

WOLFCOP

2014 – CANADA

Réalisé par Lowell Dean

Avec Leo Farard, Amy Martysio, Jonathan Cherry, Sarah Lind, Aidan Devine, Jesse Moss, Corrine Conley

THEMA LOUPS-GAROUS

Wolfcop n’est pas exactement la comédie potache que son titre laisse imaginer. Certes, le grain de folie y est constant et le sérieux n’y a pas vraiment droit de cité, mais le deuxième long-métrage du cinéaste canadien Lowell Dean nous prend par surprise en optant pour des choix inattendus et en redéfinissant à sa manière le mythe du lycanthrope. Leo Farard y incarne l’inspecteur Lou Garou (!), un policier alcoolique qui travaille à Woodheaven, une petite ville du fin fond du Canada. Cela dit, « travailler » est un bien grand mot, puisqu’il traîne bien plus souvent dans les bars que sur les scènes de crimes. Un soir où il daigne enfin délaisser le comptoir pour enquêter dans les bois sur une affaire de tapage nocturne, il trouve un homme pendu à un arbre par les pieds et une troupe de gens encapuchonnés qui lui tombent dessus. Lorsqu’il revient à lui dans son appartement, c’est pour découvrir un pentagramme gravé sur son torse. Désormais ses sens semblent surdéveloppés, ce qui permet au réalisateur toute une série de jeux habiles sur la bande sonore, les gros plans et les reports de point. La première métamorphose de Lou, qui survient dans les toilettes de son bar favori, est déjà un morceau d’anthologie. Son urine se transforme en sang et la première partie de son corps qui se transforme est son pénis – en gros plan s’il vous plaît ! Si le montage nerveux ne nous permet pas de saisir précisément chaque étape de la mutation, le changement d’homme en loup est un processus manifestement douloureux, suivant les préceptes enseignés par John Landis dans Le Loup-Garou de Londres. Sale, sanglante, la séquence se positionne à mi-chemin entre Hurlements et La Mouche

Ce n’est qu’au moment de la seconde scène de transformation que le spectateur voit enfin vraiment ce qui se passe. Deux choses nous frappent alors : la qualité des effets spéciaux de maquillage 100% live, sans le moindre recours aux effets numériques, et le parti pris de s’éloigner de l’imagerie séminale créée par Rick Baker et Rob Bottin pour se rapprocher un peu du concept de La Compagnie des loups. Ici, l’homme ne se change pas à proprement parler en loup. C’est sa peau qui se déchire pour révéler la bête à l’intérieur de ses entrailles. Le processus s’apparente presque à une série de mues successives. De fait, Wolfcop nous offre l’une des métamorphoses les plus impressionnantes qu’on ait vues depuis celles – mythiques – des années 80.

Les super-pouvoirs du flic-garou

Toujours accro à l’alcool et aux donuts, notre « flic-garou » arbore dès lors un faciès proche du Fauve des X-Men. D’ailleurs, une fois qu’il réendosse sa tenue de policier, il se mue quasiment en super-héros et agit comme tel, faisant régner la justice grâce à ses nouvelles capacités surhumaines et relookant même sa voiture pour lui donner une allure plus bestiale, avec un logo W rouge vif sur le capot. Le film n’hésite donc pas à aller au bout de son concept dément, s’autorisant plusieurs écarts gore (le couteau dans l’œil en gros plan, le visage arraché à main nue, la décapitation à coup de griffes) et même une scène d’amour à la limite de la zoophilie ! Tant d’excès ne pouvaient rester sans suite. La sortie de Wolfcop 2 nous est donc annoncée dès le générique de fin, et sera effectivement distribuée deux ans plus tard.

© Gilles Penso

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HANNIBAL LECTER : LES ORIGINES DU MAL (2007)

Gaspar Ulliel campe un Hannibal Lecter jeune et nous montre la lente descente aux enfers qui mue un homme en monstre

HANNIBAL RISING

2007 – USA / GB / FRANCE

Réalisé par Peter Webber

Avec Gaspard Ulliel, Gong Li, Dominic West, Rhys Ifans, Richard Brake, Kevin McKidd, Helena Lia Tachovska, Aaron Thomas

THEMA TUEURS I CANNIBALES I SAGA HANNIBAL LECTER

Comment devient-on un monstre ? Où le mal prend-il sa racine ? Quels traumatismes peuvent-ils transformer un enfant en bête sauvage ? Telles sont les questions passionnantes soulevées par Hannibal Lecter : les origines du mal. Adaptant avec panache le dernier roman de Thomas Harris, le film de Peter Webber (La Jeune Fille à la Perle) relance ainsi une franchise en perte de vitesse après les épisodes peu concluants signés Ridley Scott et Brett Ratner. Les agents du F.B.I, les cellules capitonnées et les psychiatres disparaissent ici au profit d’un drame prenant sa source dans les affres de la deuxième guerre mondiale. A peine âgé de dix ans, Hannibal assiste à maintes atrocités dans le château où les Lecter ont trouvé refuge sur le front Est. Après la mort violente de tous les membres de sa famille, notre jeune garçon, recueilli dans un orphelinat, n’a bientôt plus qu’une idée en tête : retrouver ceux qui ont sauvagement assassiné sa petite sœur Mischka et leur faire passer l’arme à gauche. Fuyant l’austère institution, il trouve refuge en France auprès de la veuve japonaise de son oncle et s’initie avec elle au code d’honneur des samouraïs. Après un premier meurtre, Hannibal entame des études de médecine à Paris et commence parallèlement sa sanglante croisade.

Le choix de Gaspard Ulliel pour camper Anthony Hopkins dans ses années adolescentes peut surprendre, dans la mesure où ce comédien français de 22 ans avait jusqu’alors incarné des héros positifs et populaires, comme en témoignent Un Long Dimanche de Fiançailles et Jacquou le Croquant. Mais cette idée de casting s’avère finalement être un véritable coup de génie, car sous ses traits avenants surgissent furtivement un regard fou, un sourire carnassier, un froncement de sourcil bestial… Sans caricature ni outrance, le jeune Hannibal bascule ainsi dans la folie meurtrière. Et le drame humain de virer du même coup à l’horreur. Evacuant tout manichéisme trop explicite, Hannibal Lecter : les origines du mal démontre qu’une inévitable porosité existe entre le bien et le mal. Qui donc est le héros de ce récit tourmenté ? Hannibal, victime des horreurs de la guerre se muant en bourreau impitoyable ? Lady Murasaki (magnifique Gong Li), sa tante protectrice qui le soutiendra jusqu’au bout, même lorsqu’elle lui demandera avec désarroi : « que reste-t-il chez toi à aimer » ? L’inspecteur de police compatissant (Dominic West) qui cherche à empêcher Hannibal de commettre l’irréparable ?

Une œuvre complexe qui peut s'apprécier de manière autonome

En proposant plusieurs pôles d’identification, le film de Peter Webber perturbe insidieusement son spectateur, retrouvant du même coup l’ambiguïté qui seyait si bien au Sixième Sens et au Silence des Agneaux. Webber assume d’ailleurs pleinement le statut de prequel de son film sans pour autant chercher à imiter les œuvres qui le précédèrent, ce qui lui permet même de s’apprécier de manière autonome, sans la moindre nécessité de connaître les autres épisodes de la saga Lecter. Indiscutablement, cette œuvre complexe témoigne d’un véritable supplément d’âme, portée de surcroît par une photographie somptueuse de Ben Davis (Layer Cake) et une partition de toute beauté signée Ilan Eshkeri (L’Anneau Sacré) et Shigeru Umebayashi (2046).

 

Gilles Penso

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HANNIBAL (2001)

Anthony Hopkins revient jouer les cannibales mais Jodie Foster laisse son badge du FBI à Julianne Moore

HANNIBAL

2001 – USA / GB

Réalisé par Ridley Scott

Avec Anthony Hopkins, Julianne Moore, Giancarlo Giannini, Gary Oldman, Ray Liotta, Frankie Faison, Francesca Neri

THEMA TUEURS I CANNIBALES I SAGA HANNIBAL LECTER

Après trois remarquables escapades dans le monde de l’imaginaire (Alien, Blade Runner et Legend), Ridley Scott décidait d’adapter ses dons d’esthète à des univers plus réalistes et plus contemporains : le thriller (Traquée, Black Rain), le road movie (Thelma et Louise), l’aventure initiatique (Lame de fond), le film de guerre (A armes égales) et le film d’époque (1492 : Christophe Colomb, Gladiator). Après cet enchaînement de défis colossaux, Ridley Scott se prépare à un autre challenge de taille : prendre la succession de Michael Mann et Jonathan Demme pour réaliser Hannibal, séquelle de deux thrillers horrifiques remarquables, Le Sixième sens et Le Silence des agneaux. Il aborde ainsi sous un angle nouveau deux genres qui lui sont déjà familiers, le film policier et le film d’horreur. S’essayant pour la première fois de sa carrière à l’exercice de la séquelle, Ridley Scott réinterprète donc à sa manière le mythe d’Hannibal Lecter créé par le romancier Thomas Harris. Lâché dans la nature à la fin du Silence des agneaux, l’incorrigible psychiatre anthropophage s’est réfugié à Florence, où il a pris l’identité d’un professeur d’arts plastiques. Repéré par la police, il laisse quelques victimes ensanglantées sur son sillage et retourne en Amérique. Là, il est menacé par Mason Verger, une de ses anciennes victimes dont le visage est horriblement défiguré. Condamné à une assistance respiratoire et ivre de vengeance, Verger entend bien faire sortir Lecter de son repaire en utilisant comme appât l’agent du FBI Clarice Starling. Cette dernière vient de mener une désastreuse opération visant à démanteler un trafic de drogue. Désormais prise entre les feux de médias envahissants et d’un collègue qui tente de la disgracier aux yeux de ses autorités, elle va donc croiser à nouveau le chemin du tueur cannibale qui semble éprouver pour elle des sentiments complexes et contradictoires.

 

Jodie Foster n’appréciant guère le scénario d’Hannibal, tiré d’un roman controversé de Thomas Harris, c’est la non moins talentueuse Julianne Moore qui lui succède sans complexes dans le rôle de Clarice Starling. Ce changement de visage n’est pas particulièrement problématique, dans la mesure où la vedette ici est Anthony Hopkins, comme le titre l’indique assez explicitement. Et celui-ci, après avoir un temps envisagé lui aussi de ne pas participer à cette séquelle, reprend visiblement avec une certaine bonne humeur le rôle du célèbre cannibale, cabotinant même comme pour mieux hisser son personnage au rang d’icône du cinéma de genre, là où nous étions en droit d’espérer une prestation plus subtile.

Beaucoup de bruit et de sang pour pas grand-chose

Certes, le scénario de ce troisième opus peine parfois à assembler de manière cohérente trois intrigues et trois protagonistes distincts. Ainsi, les méfaits vengeurs d’Hannibal Lecter, les enquêtes de Clarice Starling et les machinations diaboliques de Mason Verger (Gary Oldman défiguré par un maquillage incroyable qui provoque un sentiment de malaise à chacune de ses apparitions) s’entremêlent confusément. Mais la virtuosité imparable de Ridley Scott, les effets spéciaux cosmétiques impressionnants de Greg Cannom et de nombreuses séquences d’épouvante extrêmes ne cessent d’éprouver les nerfs des spectateurs, lesquels ressortent du film K.O. après tant de bruit, de sang, de cris et d’horreur. Mais une certaine vacuité se dégage in fine de cette accumulation de morceaux de bravoure. On sera donc tenté de préférer largement l’angoisse sourde et latente des films de Michael Mann et Jonathan Demme aux chocs immédiats élaborés par Ridley Scott.

 

© Gilles Penso

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ALIEN VS PREDATOR (2004)

Le crossover le plus attendu de l'histoire de la science-fiction n'aura finalement été qu'un pétard mouillé

ALIEN VS PREDATOR

2004 – USA

Réalisé par Paul W.S. Anderson

Avec Sanaa Lathan, Raoul Bova, Lance Henriksen, Ewen Bremner, Colin Salmon, Tommy Flanagan, Joseph Rye, Carsten Norgaard

THEMA EXTRA-TERRESTRES I SAGA ALIEN I PREDATOR

La fin d’Alien : la Résurrection restait ouverte sur une invasion probable de la Terre du futur par les redoutables extra-terrestres au sang acide. Mais au lieu d’orienter la franchise dans ce sens, la Fox décida de profiter du succès du Freddy contre Jason initié par New Line pour proposer Alien vs. Predator, un crossover longtemps annoncé qui naquit d’abord sous forme de bande dessinée chez Dark Horse Comics. L’enthousiasme du fan de science-fiction fut largement émoussé par le choix du réalisateur. Car pour succéder à Ridley Scott, James Cameron, David Fincher, Jean-Pierre Jeunet, John Mc Tiernan et Stephen Hopkins (excusez du peu !), c’est Paul W.S. Anderson qui fut sélectionné. Les titres de gloire du jeune cinéaste étant les peu mémorables Mortal KombatEvent Horizon et Resident Evil, on doutait quelque peu de ses capacités à prendre la relève de cette glorieuse ascendance. Et effectivement, Alien vs. Predator fait l’effet d’un pétard mouillé, sous-exploitant terriblement le potentiel de ses deux monstres vedettes. 

Au cours d’un prologue qui traîne en longueur et cherche vaguement l’inspiration du côté de Stargate et Abyss, le milliardaire Charles Bishop Weyland (Lance Henriksen, qui joue trop souvent dans tout et n’importe quoi) réunit une équipe de scientifique pour partir explorer une pyramide récemment découverte sous le sol de l’Antarctique. A l’intérieur, des Predators retiennent captive une reine Alien. Dès que nos protagonistes pénètrent les lieux, nous revoilà dans une situation standard usée jusqu’à la corde : les humains pris au piège dans un lieu clos et assaillis par des monstres tapis dans l’ombre. Toutes les séquences qui suivent ont été vues ailleurs, l’effet de surprise n’ayant donc plus cours. Comme en outre Anderson semble avoir été particulièrement marqué par Cubedont il avait copié l’un des pièges dans Resident Evil, il remet ça en dotant la pyramide d’une architecture à géométrie variable. Restent les monstres, qui s’avèrent de belles réussites visuelles. Tour à tour créatures mécaniques dues au duo Tom Woodruff & Alec Gillis et images de synthèse supervisées par John Bruno, ils volent la vedette aux humains à l’occasion d’une première séquence d’affrontement assez monumentale. 

« Quel que soit le vainqueur, nous sommes perdants… »

Le plat de résistance du film, en termes d’effets spéciaux, est la reine des rliens, qui s’avère être une petite merveille technologique. « La tête de la reine que nous avons construite pour Alien vs. Predator était assez similaire à celle d’Aliens, mais elle était beaucoup plus mobile grâce aux avancées de l’animatronique », explique Tom Woodruff. « Son armature était mise en mouvement par des mécanismes hydrauliques. Huit manipulateurs la faisaient bouger avec des joysticks. Etant donnée qu’elle était reliée à un ordinateur, il était possible d’enregistrer ses mouvements et de les reproduire. Elle pouvait s’accroupir, se redresser du haut de ses quatre mètres trente, puis tourner brusquement sa tête vers la caméra, ouvrir sa mâchoire et laisser sortir sa seconde mâchoire télescopique. Il y avait aussi une reine des aliens en images de synthèse, mais nous avons essayé d’utiliser la version mécanique chaque fois que c’était possible. La nôtre ne pouvait pas courir sur un sol gelé, par exemple. Dans ce cas, la version numérique devait prendre le relais. C’était un bon exemple de mélange des techniques. » (1) Le pugilat final, qui met en scène ce monstre colossal, s’avère de fait impressionnant. La mise en scène y est nerveuse et la chorégraphie surprenante, mais comme ces combats n’ont aucun véritable enjeu dramatique, leur issue nous importe peu. « Quel que soit le vainqueur, nous sommes perdants » disait le slogan. « Quel que soit le vainqueur, nous sommes indifférents » pourrait-on ajouter. Vers la fin, comble du ridicule, l’héroïne fait ami-ami avec un Predator pour éradiquer la menace des aliens, jusqu’à un faux happy end des plus éculés. Et pour couronner le tout, le compositeur Harald Kloser (Passé virtuelLe Jour d’après) signe là une partition lourdingue et martiale qui ne cherche même pas à recycler les thèmes mythiques créés par Jerry Goldsmith et Alan Silvestri. Bref, rien ne va plus dans ce crossover sans inspiration qui ferait presque passer Freddy contre Jason pour un chef d’œuvre. Ce qui n’est pas peu dire.


(1) Propos recueillis par votre serviteur en mars 2014

 

© Gilles Penso

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KING KONG S’EST ÉCHAPPÉ (1968)

Après avoir lutté contre Godzilla, le King Kong japonais revient sur les écrans pour se mesurer à son double robotisé

KINGU KONGU NO GYAKUSHU / KING KONG ESCAPES

1968 – JAPON

Réalisé par Inoshiro Honda

Avec Rhodes Reason, Akira Takarada, Eisei Amamoto, Linda Miller, Mie Hama, Haruo Nakajima

THEMA SINGES I DINOSAURES I ROBOTS I SAGA KING KONG

L’équipe de King Kong contre Godzilla se lança six ans plus tard dans ce King Kong s’est échappé joyeusement délirant qui ne constitue pas vraiment une suite au film mythique opposant le dinosaure atomique et le gorille géant, mais adapte plutôt une série animée de 78 épisodes diffusée sur les petits écrans en 1966. Co-produit par la Toho et Rankin-Bass, King Kong s’est échappé est ainsi construit autour d’un scénario qui s’avère digne d’un serial de science-fiction des années 30, tout en s’imprégnant de l’ambiance des James Bond alors très en vogue sur les écrans du monde entier. Le récit s’amorce sur le sous-marin atomique américain « Explorer », qui patrouille dans les eaux du Pacifique Sud, près de Java. L’ « Explorer » ayant besoin de réparations, le commandant Nelson, la scientifique Susan et le lieutenant Nomura explorent la région et font face à un serpent de mer et à un tyrannosaure (traduisez un homme dans une panoplie en caoutchouc écailleuse) à qui l’équipe du film donna le petit nom de Gorosaurus, car au Japon tous les monstres ont un nom. 

Attiré par Susan comme il le fut 35 ans plus tôt par Fay Wray, le légendaire King Kong survient, toujours aussi pataud dans son costume velu endossé par Haruo Nakajima. Kong anéantit les deux monstres, le combat contre le T-Rex se démarquant maladroitement de l’une des plus célèbres séquences du King Kong original, et s’achevant comme on pouvait s’y attendre par l’écartèlement de la mâchoire du saurien. Entre-temps, au pôle Nord, le docteur Who (aucun lien avec celui de la série britannique) et madame Piranha (!) tentent d’extraire des profondeurs l’élément X, une substance nucléaire dont la possession assurerait à un état, si petit soit-il, le contrôle du monde entier. Afin de récupérer ce précieux minerai, le Dr Who a construit un gigantesque robot à l’image de King Kong, Mechanic-Kong. Mais les radiations sont si puissantes que le robot échoue. Le Dr Who enlève alors King Kong lui-même pour lui faire forer la mine. Emprisonné, sous hypnose et sous l’effet de sédatifs, Kong travaille à la mine, mais l’hypnose s’estompe. Who fait alors enlever Nelson et Susan pour qu’ils collaborent. Mais Kong s’échappe et combat son double robotisé au cours d’un vertigineux climax.

Place à Mechanic-Kong !

Même si le scénario de King Kong s’est echappé est un hallucinant fourre-tout qui part dans tous les sens, et même si le mythique gorille géant créé par Schoedsack et Cooper n’est plus ici qu’un faire valoir gentillet aux tendances comiques, le film se suit avec un entrain indiscutable. Distrayant en diable, bourré d’idées folles et de séquences visuelles inventives, King Kong s’est échappé s’avère bien plus jouissif que son prédécesseur, d’autant qu’il s’adresse sans équivoque à un jeune public très friand de gros monstres et de gadgets futuristes. Distribué initialement en France sous le titre La Revanche de King Kong, le film est ressorti en 1977, dans la mouvance du King Kong de Guillermin, avec le titre que nous lui connaissons maintenant, King Kong s’est échappé, assorti d’un poster se référant au chef d’œuvre de Schoedsack et Cooper, histoire de tromper sur la marchandise en faisant croire à un tout nouveau film.

 

© Gilles Penso

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LE FILS DE KONG (1933)

Une suite très facultative du chef d'œuvre de 1933, réalisé avec la même équipe et sorti dans la foulée de son illustre prédécesseur

SON OF KONG

1933 – USA

Réalisé par Ernest B. Schoedsack

Avec Robert Armstrong, Helen Mack, Frank Reicher, Noble Johnson, Steve Clemento, Victor Wong, John Marston

THEMA SINGES I DINOSAURES I DRAGONS I SAGA KING KONG

Le succès de King Kong fut tellement gigantesque que la même équipe se lança immédiatement dans une séquelle joyeusement titrée Le Fils de Kong. Et oui, le grand singe avait un rejeton ! Espérons qu’un jour on nous présentera sa mère ! Le scénario, qui semble s’inspirer en partie d’un film muet de 1927 baptisé The Enchanted Island, se centre autour du personnage de Carl Denham, croulant sous les dettes et ruiné depuis que son gorille géant a ravagé la moitié de New York. Il entend un jour parler d’un trésor qui serait caché quelque part sur l’île du Crâne. Il décide alors d’y retourner avec le capitaine Englehorn, le cuisinier Lumpy et un personnage louche nommé Helstrom. Tous trois font escale sur le port malais de Dakang, où ils rencontrent la jeune Hilda. Celle-ci survit avec son père alcoolique grâce à l’exploitation d’un numéro minable de singe savant. Après un incendie criminel qui met fin aux jours de son père, Hilda décide de partir avec Denham et son équipage. Arrivés sur l’île, ils trouvent une version un peu plus petite de Kong, à la fourrure blanche peu touffue, qu’ils arrachent aux sables mouvants. La créature joueuse les prend dès lors en amitié.

Assez ressemblant à son père, bien que moins grand, couvert de poils blancs, Kong junior roule des épaules en se dandinant comme un bouledogue de Tex Avery. Ainsi, alors que la première partie du film, reprenant l’histoire quelques mois après la fin du film précédent, a des tonalités réalistes, sérieuses, voire mélodramatiques, la suite en revanche, qui se déroule sur l’île du crâne, bascule dans le délire le plus total et prend des allures de cartoon. Le premier adversaire de Kong junior est un ours des cavernes, censé mesurer quatre mètres et demi de haut. Son combat avec le gorille est un peu longuet, mais c’est une vraie petite merveille du point de vue de l’animation. Plus tard, notre Kong miniature se heurte à un dinosaure quadrupède fantaisiste aux grands yeux blancs et aux allures de dragon chinois. L’affrontement de Kong Jr contre cet étrange animal, filmé dans une très belle maquette de temple antique, s’inspire de ceux de du Kong original contre les sauriens de son île. Nous demeurons donc en terrain connu.

Une fantasie « sério-comique »

Parmi les autres monstres qui hantent les lieux, on note un styracosaure échappé des scènes coupées de King Kong et un monstre marin qui surgit brusquement pour dévorer un marin, tous animés de main de maître par un Willis O’Brien pourtant bien peu motivé par cette séquelle manquant d’ampleur et d’inspiration. D’autant que le final, abrupt et imprévu, est un sommet d’incohérence. Annoncée comme « A Serio-Comic Phantasy », Le Fils de Kong engrangea bon nombre de spectateurs au début de son exploitation, grâce à l’aura de son prédécesseur, mais son succès s’avéra éphémère, le film ayant fini par sombrer un peu dans l’oubli. Il faut dire qu’on a du mal à croire que cette fantaisie sans prétention ait été réalisée la même année et avec la même équipe que le monumental King Kong

 

© Gilles Penso

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PIRANHA (1995)

Un remake terne du film de Joe Dante, produit directement pour le format vidéo par Roger Corman

PIRANHA

1995 – USA

Réalisé par Scott P. Levy

Avec William Katt, Alexandra Paul, Monte Markham, Darleen Carr, Mila Kunis, Soleil Moon Frye, Kehli O’Byrne, James Karen 

THEMA MONSTRES MARINS I SAGA PIRANHAS

Remake version années 90 du Piranhas de Joe Dante, toujours produit par Roger Corman, ce téléfilm laisse imaginer, via sa séquence d’intro, une réjouissante variante sur le genre, à base d’excès polissons (une jeune fille à la poitrine démesurée se dévêt allègrement), de clins d’œil cinéphiliques (il y est fait allusion à L’Etrange Créature du Lac Noir et L’Attaque des Crabes Géants) et de références marquées (la scène se démarque à peine du prologue des Dents de la Mer). Mais la suite manque singulièrement de fantaisie et entraîne le désenchantement généralisé. A vrai dire, ce film suit les péripéties de son modèle avec une fidélité et une aliénation telles qu’on se demande sincèrement l’intérêt de sa mise en chantier. Il y est donc toujours question d’une jolie détective privée (Alexandra Paul, ex-sirène d’Alerte a Malibu) faisant équipe avec un pêcheur porté sur la bouteille (William Katt, héros récurrent de Ralph Super-Héros et Perry Mason) pour retrouver la trace d’un jeune couple disparu dans une région écartée et montagneuse, le fin mot de l’énigme étant une race de piranhas mutants de trente centimètres de long créés par l’armée et répondant au doux nom d’« opération dents tranchantes ». 

Comble de l’absurdité de ce remake, l’humour et le gore ont ici complètement été évacués. Exit le cynisme insolent de Joe Dante et les effets spéciaux inventifs de Rob Bottin. Les vues des bancs de piranhas et les gros plans furtifs de « grignotage » intempestif sont tout simplement des stock-shots du film précédent. Les quelques effets additionnels du film sont dus à John Carl Buechler et son équipe (Re-Animator et From Beyond) mais n’apportent strictement rien de neuf. C’est d’autant plus surprenant que 17 ans séparent les deux films et que les techniques, en la matière, ont sensiblement évolué. Pour couronner le tout, le casting de ce nouveau Piranha est d’une triste fadeur. Dans le film de Dante, il y avait tout de même Barbara Steele, Dick Miller, Kevin McCarthy et Paul Bartel dans de réjouissants seconds rôles. Là, nous n’avons droit qu’à d’anciennes « gloires » du petit écran guère convaincantes, peu aidées il est vrai par un réalisateur en manque total d’inspiration (Scott Levy, habitué aux « direct to video » sans éclat).

Quelques gouttes d'eau salée dans un océan d'inspidité

Certes, il y a bien quelques scènes de suspense habilement ficelées (notamment la course pour éviter l’ouverture des vannes et l’attaque de la colonie de vacances par les piranhas), une poignée de clins d’œil amusants (une allusion à un cabinet d’avocats nommé Dante & Sayles, qui sont les noms respectifs du réalisateur et du scénariste du premier film) et de timides écarts horrifiques (comme le bras arraché d’une nageuse, allusion à la jambe tranchée des Dents de la Mer, ou quelques blessures sanglantes assez gratinées), mais ce ne sont que des gouttes d’eau salées dans un océan d’insipidité. Bref, voilà encore un remake inutile et indigent, à ranger aux côtés du Psycho de Gus Van Sant et du Fog de Rupert Wainwright. Cela dit, nous sommes sans doute passés à côté du pire : personne, en effet, n’a encore eu l’idée saugrenue de mettre en chantier une séquelle de Piranhas 2 les tueurs volants !

 

© Gilles Penso

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