THE MONKEY (2025)

Deux frères jumeaux héritent d’un jouet très curieux : un petit singe qui, dès qu’il joue du tambour, entraîne une mort violente…

THE MONKEY

 

2025 – USA

 

Réalisé par Osgood Perkins

 

Avec Theo James, Tatiana Maslany, Christian Convery, Colin O’Brien, Elijah Wood, Rohan Campbell, Sarah Levy, Osgood Perkins, Tess Degenstein, Danica Dreyer

 

THEMA JOUETS I SAGA STEPHEN KING

Découverte par les amateurs de Stephen King dans les pages du magazine Gallery au tout début des années 1980 avant sa réédition dans le recueil Brume, la nouvelle Le Singe est un petit concentré d’épouvante extrêmement efficace qui repose sur un concept simple: un jouet en forme de petit singe provoque la mort chaque fois qu’il frappe dans ses cymbales. En 1984, une adaptation officieuse à tout petit budget en fut tirée sous le titre Le Singe du diable. Mais il restait certainement une transposition de plus grande envergure à mettre en chantier. Grand spécialiste de King (Les Évadés, La Ligne verte), Frank Darabont acquiert les droits de la nouvelle pour en tirer un film dans la foulée de The Mist. Mais le projet n’aboutit pas. Il faudra presque attendre deux décennies pour que The Monkey se concrétise enfin, sous les bons auspices du producteur James Wan (The Conjuring) et du réalisateur Osgood Perkins (Longlegs). Savoir ces deux hommes à la tête du film est à priori de bon augure, si ce n’est que Perkins adopte deux partis pris surprenants : remplacer les cymbales du singe par un tambour (Disney possédant apparemment les droits du look original du jouet depuis Toy Story 3) et surtout traiter le récit au second degré. « J’ai pris un paquet de libertés », avoue-t-il ouvertement. « Les producteurs avaient un scénario beaucoup trop sérieux. Je leur ai dit que ça ne me convenait pas. La Mort vous va si bien fut l’un de mes références principales – ce genre d’horreur cartoonesque qui éclabousse. » (1)

Élevés par leur mère depuis que leur père a disparu sans laisser de trace, les frères jumeaux Hal et Bill Shelburn vivent une sorte de rivalité permanente, l’un étant sans cesse le souffre-douleur de l’autre, ce qui provoque un certain nombre d’humiliations pour le pauvre Hal, notamment dans l’école qu’ils fréquent tous les deux. Hal finit même par nourrir des envies de meurtres à l’encontre de son frère. Un jour, ils découvrent dans un placard contenant des affaires de leur père un carton portant une indication énigmatique : « tournez la clé et regardez ce qui arrive ». À l’intérieur se trouve un singe mécanique équipé d’un tambour. Par curiosité, ils tournent la clé mais rien ne se passe. Le soir-même, alors qu’il dînent dans un restaurant japonais avec leur baby-sitter, le singe se déclenche tout seul et commence à jouer du tambour avec frénésie. Aussitôt, le massacre commence…

Singeries

La tonalité choisie par Osgood Perkins est déstabilisante. Le montage est bourré d’ellipses provoquant des effets comiques efficaces et le gore éclabousse généreusement l’écran, à l’issue de réactions en chaîne qui ne sont pas sans évoquer la saga Destination finale. Cette approche au second degré est un choix d’autant plus assumé que le réalisateur s’auto-proclamme « spécialiste des morts insensées et spectaculaires ». Son père Anthony Perkins est en effet décédé du sida en 1992 et sa mère Berry Berenson était l’une des passagères du premier avion ayant heurté le World Trade Center en 2001. Au-delà de l’envie d’aborder le thème du jouet possédé sur un ton plus léger que les Annabelle et autres The Boy, le recours à l’humour noir aurait-il donc des vertus cathartiques, permettant à Osgood de tourner en dérision l’absurdité, l’inutilité et le caractère aléatoire de la mort ? Sans doute. Mais un tel parti pris n’est pas sans revers. En tournant le dos au potentiel effrayant du concept initial et en le tordant dans tous les sens pour y greffer des rebondissements invraisemblables, The Monkey finit par muer son histoire en simple défouloir sans âme. Pire : le sort des personnages nous importe peu puisqu’ils ne sollicitent aucune empathie chez les spectateurs. C’est tout de même un comble pour un scénario bâtissant son suspense sur la possibilité que chacun d’entre eux puisse trépasser à tout moment. Malgré les commentaires enthousiastes de Stephen King, louant les audaces du film, nous ne pouvons donc nous empêcher de sentir qu’Osgood Perkins est complètement passé à côté de son sujet.

 

(1) Extrait d’une interview publiée dans Empire en janvier 2025

 

© Gilles Penso

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MARY POPPINS (1964)

Il aura fallu près de trente ans pour que Walt Disney puisse convaincre P.L. Travers de lui céder les droits de ses romans… Il a bien fait d’insister !

MARY POPPINS

 

1965 – USA

 

Réalisé par Robert Stevenson

 

Avec Julie Andrews, Dick Van Dyke, David Tomlinson, Glynis Johns, Matthew Garber, Keren Dotrice, Hermione Baddeley, Reta Shaw, Reginald Owen

 

THEMA SORCELLERIE ET MAGIE

Sous l’impulsion de son épouse et de sa fille, Walt Disney tombe sous le charme du roman Mary Poppins et de ses suites, qui furent publiés à partir de 1934. La gouvernante magicienne qui en tient la vedette lui tape dans l’œil au point qu’il tente d’en acheter les droits d’adaptation dès 1939 auprès de sa créatrice la romancière Pamela L. Travers. Mais celle-ci refuse, persuadée qu’aucun film ne saura rendre justice à son œuvre. L’oncle Walt étant opiniâtre, il reviendra régulièrement à la charge. Ce n’est qu’au début des années 1960 que l’accord est enfin signé, à condition que Travers soit présente en tant que conseillère. Disney étant malin, il se réserve le droit du « final cut », que la romancière soit d’accord ou non avec le résultat final. Or Travers déteste une grande partie des choix artistiques du film, notamment l’édulcoration du caractère de Mary, la profusion de chansons et surtout la longue séquence dans laquelle les personnages évoluent dans un univers en dessin animé. En revanche, Walt et elle sont d’accord sur le casting de l’actrice principale : Julie Andrews. Disney l’a adorée dans « Camelot » à Broadway et accepte même de décaler le tournage pour lui laisser le temps d’accoucher. Andrews aurait préféré être sélectionnée pour tenir la vedette de My Fair Lady – un rôle qui échoit finalement à Audrey Hepburn -, mais elle n’aura pas à regretter ce « second choix. » Mary Poppins la rendra extrêmement populaire et lui permettra de remporter l’Oscar de la meilleure actrice.

La féerie s’installe dès l’entame du film. Tandis que la bande originale nous offre une compilation instrumentale des thèmes écrits par les frères Sherman, la caméra survole un Londres très graphique, le mot d’ordre esthétique du film étant la théâtralisation. D’où un tournage réalisé intégralement en studio, l’édification de décors volontairement excessifs (comme la bâtisse où vit l’amiral Bloom, dont le toit a les allures d’un navire) et le recours à des centaines de peintures sur verre signées Peter Ellenshaw pour prolonger les panoramas. Mary Poppins fait alors son apparition dans les cieux, accrochée à son parapluie/parachute, prête à bouleverser la vie de la famille Banks chez qui les nurses démissionnent les unes après les autres (la dernière en date étant incarnée par Elsa Lanchester, notre chère Fiancée de Frankenstein). Parallèlement entre en scène l’autre personnage clé du film (mixage de plusieurs amis de Mary Poppins dans les romans) : Bert (Dick Van Dyke), un musicien de rue qui assure la fonction de narrateur puisqu’il s’adresse directement aux spectateurs en les guidant pas à pas. Une sorte de miracle est en train de se préparer, nous annonce-t-il. Ses propos semblent autant annoncer les péripéties à venir que le futur gigantesque succès du film lui-même…

Le coup du parapluie

Pour s’opposer à la folie qui va bientôt s’installer dans le quotidien de la famille Banks, David Tomlinson est l’interprète idéal du banquier anglais des années 1910 à la vie bien rangée, au sérieux imperturbable, obsédé par l’ordre et allergique à toute idée de frivolité. Le choc avec l’arrivée de cette « sorcière bien aimée » aux allures de nounou bien comme il faut n’en sera que plus grand. Redoublant d’inventivité, les artistes du studio Disney sollicitent toutes les techniques d’effets spéciaux à leur disposition (oiseaux animatroniques, acteurs suspendus à des câbles pour défier la pesanteur, jouets animés en stop-motion, séquences projetées à l’envers, incrustations, caches, rotoscopie) pour pouvoir donner corps aux séquences les plus audacieuses du film. Le morceau de bravoure, en ce domaine, est sans doute le plongeon très poétique de nos protagonistes à l’intérieur d’un dessin à la craie sur un trottoir… qui les propulse dans un grand dessin animé, celui qui fit tant grincer des dents P.L. Travers. Mary Poppins regorge aussi de numéros musicaux devenus légendaires, de « A Spoonful of Sugar » (au moment où la chambre des enfants se range comme par magie) à « Supercalifragilisticexpialidocious » (dans le monde animé), en passant par « Chem-cheminée » (lors de la promenade sur les toits et dans les cieux londoniens), sans oublier la prodigieuse chorégraphie des ramoneurs qui fait office de climax mouvementé. Aujourd’hui encore, la magie du film opère. Pour l’anecdote, c’est en vistant le plateau de tournage que Robert Wiset et Ernest Lehman décidèrent immédiatement d’engager Julie Andrews pour tenir le rôle principal de La Mélodie du bonheur.

 

© Gilles Penso

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L’ENFER (1911)

Cette adaptation très ambitieuse de La Divine comédie de Dante nous immerge dans une série de tableaux macabres et surréalistes…

L’INFERNO

 

1911 – ITALIE

 

Réalisé par Francesco Bertolini et Adolfo Podovan

 

Avec Salvatore Papa, Arturo Pirovano, Giuseppe de Liguoro, Pier Delle Vigne, Augusto Milla, Attilio Motta, Emilise Beretta

 

THEMA DIABLE ET DÉMONS I MORT I MYTHOLOGIE

Le cinéma muet italien a démarré un peu plus tard que dans d’autres régions du monde mais s’est distingué très tôt par sa propension à dresser des reconstitutions spectaculaires ouvertes aux publics les plus larges. Pour y parvenir, les cinéastes transalpins de l’époque puisèrent souvent dans le folklore local et dans les classiques de la littérature italienne. D’où l’idée, en 1911, de s’attaquer à Le Divine comédie de Dante Aligheri, plus précisément à L’Enfer, les deux autres parties (Le Purgatoire et Le Paradis) ayant été jugées moins visuelles et moins attrayantes pour les spectateurs. Sous l’influence directe des gravures de Gustave Doré, qu’il s’efforce de reproduire avec un maximum de fidélité, L’Enfer de Francesco Bertolini et Adolfo Podovan mêle l’imagerie judéo-chrétienne et celle de la mythologie gréco-romaine avec une inventivité visuelle foisonnante et un déploiement de moyens conséquent. Tourné en 1908, principalement en studio, le film est racheté en cours de production par la société milanaise Milano Film qui initie un tournage additionnel en 1909 avec toute une série de nouvelles scènes filmées en extérieurs, ce qui n’est pas commun à l’époque. Il en résulte un film très atypique, dont l’ambition esthétique reste aujourd’hui encore très impressionnante.

Le film met en scène Dante lui-même (Salvatore Papa), égaré dans une forêt aux troncs épais où le menacent tour à tour un lion, une panthère et un loup. Le poète latin Virgile (Arturo Pirovano) intervient alors et le conduit jusqu’aux portes de l’Enfer. « Abandonnez tout espoir en entrant ici », lui dit-il. Tous deux s’apprêtent en effet à pénétrer dans des cercles de plus en plus profonds et de plus en plus effrayants. Leur odyssée dans les tréfonds de l’au-delà les amène à croiser Charon, le nocher des Enfers qui transporte les âmes égarées, le juge Minos, qui décide des châtiments des trépassés, le chien tricéphale Cerbère, les Gloutons soumis à des pluies infernales, le grimaçant Dieu Pluton au front cornu, une horde de mauvais esprits, les trois Furies, les blasphémateurs frappés par des pluies incandescentes, le dragon Geryon, les suicidés transformés en arbres qui saignent, les harpies qui volent sinistrement dans les cieux, des démons ailés et cornus armés de fouets et de fourches, des géants, et même Lucifer lui-même qui empoigne Judas pour le dévorer…

Le visage des damnés

Pour pouvoir visualiser les mille tourments des âmes damnées, L’Enfer met à contribution tous les trucages à sa disposition, mêlant aux astuces de Méliès (surimpressions, expositions multiples, câbles de suspension) une série de trouvailles techniques étonnantes. Des marionnettes grandeur nature donnent ainsi naissance à Cerbère et à Geryon, des costumes sophistiqués permettent de visualiser les Harpies et les hommes transformés en monstres reptiliens, la perspective forcée mue Pluton en titan et permet de faire interagir les protagonistes avec trois géants enchaînés, des caches prolongent les décors pour leur donner un caractère « dantesque ». Sans oublier une abondance de fumigènes et d’effets pyrotechniques. Cette recherche plastique permanente offre aux spectateurs des tableaux surréalistes, parmi lesquels on se souviendra des âmes qui volent dans les cieux, des centaines de corps qui agonisent au sol, surplombés par une pluie diluvienne et des rideaux de brume, des suppliciés enterrés par la tête dont les jambes s’agitent sous les flammes, ou encore du lac glacé duquel émergent à perte de vue des têtes humaines. L’Enfer n’hésite pas à basculer dans l’érotisme (les corps se dénudent allègrement) et l’horreur graphique (un supplicié porte à bout de bras sa tête décapitée qui hurle encore, un comte dévore la tête d’un archevêque). Sans doute les intertitres sont-ils trop chargés en textes, au lieu de laisser les images se suffire à elles-mêmes, mais le film frappe par l’ampleur de sa mise en scène et par une certaine modernité (les raccords dans l’axe, les mouvements de caméra). Ce sera d’ailleurs un immense succès en Italie.

 

© Gilles Penso

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L’INCROYABLE CRÉATURE DE L’ESPACE (1957)

Trois gangsters, une jeune femme kidnappée et un géologue se retrouvent dans la montagne face à une créature extra-terrestre…

THE ASTOUNDING SHE-MONSTER

 

1957 – USA

 

Réalisé par Ronnie Ashcroft

 

Avec Robert Clarke, Kenne Duncan, Marilyn Harvey, Jeanne Tatum, Shirley Kilpatrick, Ewing Miles Brown, Al Avalon, Scott Douglas

 

THEMA EXTRA-TERRESTRES

Si L’Incroyable créature de l’espace ressemble tant à un film d’Ed Wood, c’est parce que ce dernier fut officieusement sollicité comme consultant et coscénariste par la production. La petite compagnie Hollywood International Production n’alloue au réalisateur débutant Ronnie Ashcroft qu’un budget de 18 000 dollars, un planning de quatre jours de tournage et une équipe technique réduite à sa plus simple expression (un gaffer, un assistant, un caméraman et un preneur de son). Ashcroft lui-même s’occupe du montage dans son salon pour réduire les coûts de post-production. Difficile de faire des miracles dans ces conditions. Cette tentative maladroite de mélange de film de gangsters et de film de science-fiction n’a donc rien de franchement mémorable. En récupérant les droits de distribution, American International Pictures cherche tout de même à attirer un maximum de spectateurs. Un poster provocant est donc dessiné par l’artiste Albert Kallis (qui s’inspire d’une photo nue du mannequin Madeline Castle) et un titre racoleur est envisagé. Mais après réflexion, Naked Invader (« L’Envahisseuse nue ») est jugé un peu trop osé pour la censure de l’époque. On se rabat donc sur The Astounding She-Monster (« La Stupéfiante femme-monstre »), plus sagement traduit par L’Incroyable créature de l’espace lors de l’exploitation du film en France.

« Les astronomes et philosophes de l’antiquité pensaient que le futur était écrit dans les étoiles, et que le passé restait gravé sur le tableau noir du ciel », nous dit une voix off lyrique sur fond spatial. Nous apprenons alors qu’un conseil d’entités extra-terrestre décide de faire partir un émissaire depuis Antarès, étoile de la constellation du Scorpion, pour aller rendre visite à la Terre suite aux dangereux essais nucléaires effectués par les humains. Ce postulat, qui peut laisser espérer une intrigue brodant sur les mêmes thématiques que Le Jour où la Terre s’arrêta, n’est pourtant qu’un faux départ, car le reste de l’intrigue ne s’y réfère quasiment plus. La jolie extra-terrestre – en combinaison plus ou moins futuriste et au maquillage accentuant ses sourcils – qui émerge dans les bois, après la chute de la météorite qui la transportait, se contente en effet de se promener lentement dans la forêt sans prononcer un mot et d’irradier d’un simple geste de la main tous ceux qui s’approchent trop près d’elle. Bientôt, la visiteuse croise la route de trois gangsters, qui viennent de kidnapper une riche héritière dans l’espoir d’en tirer une juteuse rançon, et d’un géologue qui vit dans la montagne avec son chien…

« Les roues du destin tournent… »

Pendant la première partie du film, la voix off se sent obligée de commenter toute l’action avec une emphase exagérée, multipliant les formules du style « Les roues du destin tournent » ou « La haine a commencé à tisser sa mystérieuse toile. » Ce procédé pesant semble faire office de remplissage, car le premier tiers du métrage est quasiment dénué de son direct, multipliant les scènes muettes comme dans le calamiteux La Bête de Yucca Flats. Lorsque les gangsters, la kidnappée et le géologue se rencontrent, la mise en scène accuse soudain un statisme très théâtral. Presque tout se situe dès lors dans une cabane dans les bois, que Ronnie Ashcroft filme en plan large fixe tandis que les acteurs échangent des répliques banales et que l’action stagne dangereusement. Régulièrement, l’extra-terrestre campée par Shirley Kilpatrick fait une petite apparition pour tenter de nous égayer, mais elle n’a pas grand-chose à faire à part déambuler mollement. Comme en outre le dos du costume de l’actrice se déchire dès le premier jour de tournage et qu’il n’y a pas assez d’argent pour le remplacer ou le réparer, la malheureuse est contrainte d’effectuer d’étranges marches à reculons pour toujours rester face à la caméra ! On s’ennuie donc sérieusement dans ce film peu avare en dialogues scientifiques involontairement risibles (« Vu les rayons alpha et gamma qu’elle dégage, elle doit être en grande partie constituée de radium »). Dommage, car l’épilogue nous offre une petite révélation qui aurait pu emmener l’intrigue sur un terrain beaucoup plus intéressant.

 

© Gilles Penso

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CROCODILE (1979)

Suite à une série d’explosions nucléaires survenues en Thaïlande, un crocodile prend des proportions alarmantes et dévore tous ceux qu’il croise…

CROCODILE

 

1979 – THAILANDE / CORÉE DU SUD

 

Réalisé par Sompote Sands et Won-se Lee

 

Avec Nard Poowanai, Ni Tien, Angela Wells, Kirk Warren, Min Oo, Robert Chan Law-Bat, Hua-Na Fu, Bob Harrison, Wan-Ta Sha, Feng-Chien Tso, Nancy Wong

 

THEMA REPTILES ET VOLATILES

Crocodile (connu aussi en France sous le titre de Carnages) est le résultat d’une collaboration entre la Thaïlande et la Corée du Sud, initiée par le producteur Sompote Sangduenchai, plus connu à l’international sous le pseudonyme de Sompote Sands. Bien que ce dernier soit généralement cité en tant que réalisateur, il semblerait que la mise en scène de la version originelle ait en réalité été assurée par le cinéaste coréen Won-se Lee, sur la base d’un scénario rédigé par Su-jung Yeo et Yeol Yu. Quant à Sands, il s’est principalement consacré à la conception des effets visuels. Pour rendre le film plus attractif auprès du public américain, le producteur Dick Randall, figure emblématique du cinéma d’exploitation, s’est associé à Sompote Sands en 1981 pour intégrer de nouvelles séquences spécifiquement tournées en vue de la distribution outre-Atlantique. Trois versions de Crocodile existent donc. La toute première, officiellement signée par Won-se Lee et sortie en 1978, le montage américain, distribué par Herman Cohen et projeté en salles à partir de novembre 1981, et la version internationale (datée de 1979) qui propose davantage de nudité et de violence graphique (notamment une entrée en matière parfaitement gratuite au cours de laquelle le saurien géant dévore deux femmes topless).

Crocodile s’ouvre sur un cataclysme naturel s’abattant sur un petit village, réalisé avec des maquettes et de jolis effets atmosphériques, comme un plafond de nuages tourmentés ou un cyclone marin très spectaculaire. Le prétexte de ce désastre est une série d’explosions nucléaires survenues en Thaïlande et sur les côtes de la mer de Chine. Après la tempête qui a détruit une île, le docteur Tony Akom (Nard Poowanai) conduit sa famille à Pattaya. Mais les radiations ont fait croître démesurément un crocodile agressif (sous l’influence manifeste de Godzilla). Le monstre dévore l’épouse et la fille du docteur, puis décime un village touristique. Abattu, Akom décide alors de se venger et d’entreprendre la chasse au monstre. Il se fait aider par John Stromm (Min Oo) et par Tanaka (Kirk Warren), un pêcheur intrépide. Le film montre alors ouvertement sa vraie nature : un plagiat éhonté et extrêmement maladroit des Dents de la mer, le grand requin blanc étant remplacé par ce crocodile géant et mutant qui – allez savoir pourquoi – respecte un rituel qui le pousse à tuer tous les sept jours.

Massacre thaïlandais

La première partie du film alterne les scènes de plage, les attaques du saurien, les destructions du village et les préparatifs évasifs du héros (émule thaïlandais du capitaine Achab de Moby Dick) en vue de chasser l’animal. Le montage, chaotique, répète inlassablement les mêmes plans, dans une confusion assez pénible. Pour faire office de remplissage, le réalisateur intègre des scènes inutiles et d’un bon goût extrême, comme ce dépeçage en gros plan d’un crocodile dans une réserve (qui hérissera les poils de l’American Human Association, refusant catégoriquement de valider ce film). Le monstre vedette est alternativement un vrai crocodile, filmé au milieu de petites maquettes, et une gueule mécanique géante dans laquelle viennent se jeter ses victimes en criant. La seconde partie du film, conformément à son modèle, se déroule en mer où les trois héros traquent la bête à bord d’un bateau de pêche. Bien entendu, le loup de mer est finalement happé par les mâchoires du monstre, le bateau coule, et le monstre périt dans une explosion. Précisions que cette ultime déflgaration est due à un bâton de dynamite qui reste allumé sous l’eau pendant que le héros l’amène en nageant jusque dans la gueule du crocodile !

 

© Gilles Penso

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BOOKS OF BLOOD (2020)

Onze ans après le Livre de sang de John Harrison, cette nouvelle version réinvente plusieurs récits de Clive Barker…

BOOKS OF BLOOD

 

2020 – USA

 

Réalisé par Brannon Braga

 

Avec Britt Robertson, Freda Foh Shen, Nicholas Campbell, Anna Friel, Rafi Gavron, Yul Vazquez, Andy McQueen, Kenji Fitzgerald, Paige Turco, Saad Siddiqui

 

THEMA TUEURS I FANTÔMES

Pilier de la saga Star Trek, Brannon Braga fut scénariste pour Star Trek : la nouvelle génération, Star Trek : Générations, Star Trek : Premier Contact, Star Trek Voyager et Star Trek Enterprise. Nous lui devons aussi les scripts de Mission impossible 2 et de plusieurs épisodes de 24 heures chrono. Au début des années 2020, il s’associe à Adam Simon (réalisateur de Sanglante paranoïa et Carnosaur) avec qui il se lance dans l’écriture d’adaptations pour l’écran de nouvelles issues des six tomes du recueil Livre de sang de Clive Barker. L’idée première est de créer une série TV d’anthologie, avec des épisodes autonomes tirés des courtes histoires publiées entre 1984 et 1985. Mais le rendement d’un tel programme reste incertain. Braga et Simon se rabattent alors sur un seul film, qui sera directement diffusé sur la plateforme de Hulu. Le segment central s’inspire directement de la toute première nouvelle du recueil, qui fut déjà adaptée en 2009 par John Harrison dans son Livre de sang. Pour les autres « sketches », les duettistes inventent de toute pièce de nouvelles histoires et puisent quelques idées dans la dernière nouvelle du cycle, Jérusalem Street (qui servit aussi d’inspiration au film de Harrison). Déjà metteur en scène de plusieurs clips et épisodes de séries TV, Braga signe là son premier long-métrage en tant que réalisateur.

Après une brève entrée en matière au cours de laquelle un tueur à gage occis un libraire après lui avoir extirpé une information importante – l’adresse où se trouve un « livre de sang » qui pourrait le rendre riche jusqu’à la fin de ses jours -, le premier segment démarre : Jenna. Nous y suivons le parcours tourmenté d’une étudiante mentalement très perturbée qui souffre notamment de misophonie (une aversion pour les bruits) et décide de fuguer pour trouver refuge dans un bead & breakfast tenu par un vieux couple sympathique. Malgré le jeu très convainquant de Britt Robertson (À la poursuite de demain), un travail minutieux sur le sound design pour traduire les phobies de la jeune protagoniste et la construction d’une ambiance très efficacement paranoïaque (ponctuée de visions macabres glauques), ce sketch ne mène finalement nulle part et nous laisse sur notre faim. Par ailleurs, on se perd en conjectures sur les choix des scénaristes : pourquoi avoir créé une histoire étrangère à l’univers de Barker alors que les Livres de sang regorgent de récits captivants qui ne demandent qu’à être (ré)adaptés ?

Trilogie macabre

Le second chapitre, Miles, nous ramène quant à lui sur un terrain connu. Cette intéressante réadaptation de la nouvelle Livre de sang, moins fidèle dans la forme que le film de John Harrison mais plus proche dans l’esprit, intègre la notion de deuil qui permet d’enrichir les personnages et de réorienter leurs motivations. Il ne s’agit donc pas d’étudier une demeure prétendument hantée mais de communiquer avec l’esprit d’un enfant disparu dans la maison où il a grandi. Sans doute plus efficace que chez John Harrison, dans la mesure où elle est plus concise, cette version possède les mêmes qualités que le segment Jenna (une mise en scène soignée, une direction d’acteurs impeccable) mais s’achève sans doute trop abruptement sans nous laisser le soin de bien mesurer le besoin qu’ont les morts de raconter leurs histoires en les inscrivant dans la chair d’un « livre vivant ». Quant au dernier segment, Bennett, il reprend le tueur du début du film pour le mener sur la trace du livre de sang. Pas particulièrement palpitant, cet épilogue présente tout de même la particularité de se raccorder aux trois récits précédents en les entremêlant les uns avec les autres pour fermer toutes les portes narratives ouvertes jusqu’alors. L’idée se défend, mais l’écriture de Books of Blood manque singulièrement de rigueur et de finesse pour convaincre. En l’état, cette tentative reste très anecdotique.

 

© Gilles Penso

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WEEK-END DE TERREUR (1986)

Le 1er avril, les amis d’une jeune étudiante la rejoignent sur une île pour multiplier les blagues potaches, jusqu’à ce que la situation dégénère…

APRIL FOOL’S DAY

 

1986 – USA

 

Réalisé par Fred Walton

 

Avec Deborah Foreman, Ken Olandt, Amy Steel, Jay Baker, Deborah Goodrich, Griffin O’Neal, Leah Pinsent, Clayton Rohner, Amy Steel, Thomas F. Wilson

 

THEMA TUEURS

Après avoir participé à quatre films de la saga Vendredi 13 pour Paramount Pictures, le producteur Frank Mancuso Jr. se lance dans un autre slasher dont la réalisation est confiée à Fred Walton. Ce dernier avait beaucoup fait couler d’encre en 1979 grâce à Terreur sur la ligne, qui empruntait les codes du cinéma d’horreur et du film policier pour se muer contre toute attente en drame urbain. Le voici désormais à la tête d’un film en apparence beaucoup plus classique, même si son scénario s’efforce en fin de métrage de dynamiter les lieux communs du genre. L’un des rôles féminins principaux est confié à Amy Steel, sur la foi de sa présence remarquée dans Le Tueur du vendredi. Un autre échoit à Deborah Foreman (Valley Girl) qui impressionne fortement Walton lors de sa seconde audition, la première n’ayant pas convaincu l’équipe de production. Au détour du casting, l’œil attentif reconnaîtra aussi Tom Wilson, l’inoubliable Biff Tannen de Retour vers le futur. Après avoir envisagé de tourner le film à Martha’s Vineyard (qui prêta déjà ses décors naturels aux Oiseaux et aux Dents de la mer), Mancuso Jr et Walton se rabattent finalement sur le Canada, plus précisément Victoria, capitale de la Colombie-Britannique, notamment dans deux propriétés privées mises à la disposition de l’équipe pendant six semaines.

Pour le week-end du 1er avril, la riche étudiante Muffy St. John (Deborah Foreman) a invité quelques camarades de fac à séjourner dans sa maison familiale, au beau milieu d’une petite île. Sur le ferry qui transporte la joyeuse équipe, l’ambiance est à la drague et à la franche rigolade, avec tout un lot de blagues de très haut niveau (« ta braguette est ouverte », « Argh, j’ai un couteau planté dans le ventre ! »). Mais l’une des plaisanteries tourne mal et Buck (Mike Nomad), employé sur le ferry, se retrouve gravement blessé et transporté d’urgence à l’hôpital. Ce qui n’empêche pas la troupe turbulente de garder son entrain en débarquant chez Muffy. Celle-ci a préparé de nombreux poissons d’avril à l’intention de ses convives. Les farces vont donc bon train, des coussins péteurs aux chaises escamotables en passant par les verres baveurs, les cigares explosifs, les robinets arroseurs, les poignées de portes amovibles ou les lampes trafiquées. Mais bientôt, les rires se figent. Un meurtrier se cache en effet dans l’ombre et se met à frapper un à un les invités…

Poison d’avril

De prime abord, rien ne distingue ce Week-end de Terreur de n’importe lequel des slashers ayant fleuri sur les écrans depuis les succès de La Nuit des masques et Vendredi 13. Tous les clichés de mise s’accumulent sagement : le groupe de jeunes gens réunis dans une maison au milieu de la nature, les couples qui se font et se défont, les assassinats en série et même le chat qui fait sursauter ! Dans la joie, la bonne humeur et la finesse, le montage alterne la réplique « l’un d’entre vous va sortir sa bistouquette » avec le gros plan d’une saucisse qui sort de son sac, ou s’appesantit sur le visage d’un garçon énamouré qui déclame à une de ses amies : « j’aimerais bien labourer ton champ ». L’exaspération nous gagne donc assez tôt. Fred Walton s’offre certes quelques idées de mise en scène intéressantes (le cadavre qui apparaît dans une barque sous les lattes d’une cabane, les têtes décapitées qui émergent au fond d’un puits) et le compositeur Charles Bernstein (Les Griffes de la nuit) concocte un joli thème d’ouverture dont les sonorités enfantines nous rappellent celui écrit par Jerry Goldsmith pour Poltergeist. Mais ce n’est pas suffisant pour maintenir vivace l’intérêt des spectateurs. Certes, la révélation finale est une surprise très audacieuse qui transcende le récit de A à Z. Mais elle manque singulièrement de crédibilité et de cohérence. Visiblement peu satisfait par ce twist final, Walton ajoute même un épilogue pas beaucoup plus convaincant.

 

© Gilles Penso

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NOTHING (2003)

Deux amis qui s’isolent dans une petite maison pour échapper au monde extérieur découvrent soudain qu’ils sont entourés d’un grand vide blanc…

NOTHING

 

2003 – CANADA

 

Réalisé par Vincenzo Natali

 

Avec David Hewlett, Andrew Miller, Gordon Pinsent, Marie-Josée Croze, Andrew Lowery, Elana Shilling, Soo Garay, Martin Roach

 

THEMA POUVOIRS PARANORMAUX

A la fin de Cube, le seul survivant d’un labyrinthe machiavélique au fonctionnement inexplicable ouvrait une porte donnant sur une lumière blanche aveuglante… Le même éclat aseptisé semble nimber tout entier Nothing, troisième long-métrage de Vincenzo Natali. « Il faut croire que j’ai une imagination très limitée, puisque je n’arrête pas de me répéter ! » plaisante le cinéaste à propos de ce point commun visuel. « La lumière blanche me fascine parce qu’elle m’évoque la page blanche de l’écrivain », poursuit-il. « Dans les films de Steven Spielberg, cette lumière blanche symbolise la présence de Dieu. Pour moi, elle représente plutôt le contraire. C’est le néant, l’opposé de Dieu, l’absence de toute chose. C’est un concept existentiel inquiétant, qui nous ramène à notre propre solitude. Rien ni personne ne nous attend de l’autre côté de la porte » (1) Malgré cette vision apparemment nihiliste, l’humour, encore discret dans Cube et Cypher, est le moteur de Nothing, une comédie fantastique atypique qui se situe dans un registre étrange, quelque part entre le nonsense des Monty Pythons et les questionnements existentialistes de La Quatrième dimension.

David Hewlett et Andrew Miller, qui faisaient déjà partie du casting de Cube, incarnent ici deux amis d’enfance cohabitant dans une petite maison de ville. Andrew est un agent touristique agoraphobe qui travaille à domicile pour éviter d’affronter le monde extérieur, et Dave un employé de bureau traité avec mépris par l’ensemble de son entourage. Suite à un enchaînement malheureux de concours de circonstances, ces deux êtres quelque peu inadaptés se retrouvent pourchassés par une horde de gens mécontents, y compris la police qui vient siéger sur le seuil de leur bicoque. Alors que la situation semble critique, David et Andrew ouvrent la porte pour découvrir que la maison se trouve maintenant dans un vide blanc qui se prolonge à perte de vue. Abasourdis, tous deux essaient d’explorer les environs, mais doivent se rendre à l’évidence : il n’y a rien, où qu’ils aillent. Par la seule force de leur pensée, ils ont réussi à faire disparaître tout le monde extérieur. Il leur est désormais possible d’effacer tout ce qu’ils détestent…

Carte blanche

Vincenzo Natali repousse donc une fois de plus les limites du cinéma conceptuel. Ici, le père de Cube et Cypher s’aventure sur un terrain aussi audacieux que vertigineux : un huis clos minimaliste dans un vide absolu. L’idée de base est fascinante, presque insensée. Mais n’était-il pas risqué de tout miser sur cette situation absurde ? Reconnaissons à Natali sa capacité à en exploiter toutes les possibilités, jouant habilement avec le cadre, multipliant les artifices visuels pour éviter la monotonie, sollicitant les grands angles, les vues en contre-plongée sous le vide et même des cadrages aux formes insolites. Tous les moyens sont bons pour briser la rigidité de l’espace uniforme. Mais Nothing finit par être prisonnier de ses propres contraintes. L’absence totale de repère tend bientôt à plonger le spectateur dans une certaine lassitude. L’espace immaculé qui constitue l’unique décor devient un élément redondant qui limite l’implication émotionnelle. D’autant qu’il n’est pas simple de s’attacher à ces deux protagonistes pathétiques, envers lesquels le réalisateur lui-même ne semble pas nourrir beaucoup d’empathie. En somme, Nothing est une expérience cinématographique aussi fascinante que frustrante. Si Vincenzo Natali démontre une fois de plus son talent pour explorer des concepts inédits, son troisième long-métrage peine à transcender son dispositif et à établir une véritable connexion émotionnelle avec son public. Son essai suivant, Splice, sera beaucoup plus convaincant.

 

(1) Propos recueillis par votre serviteur en février 2010

 

© Gilles Penso

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PROPHET (1998)

Le réalisateur stakhanoviste Fred Olen Ray dirige l’expert du kickboxing Don « The Dragon » Wilson dans ce thriller de science-fiction mouvementé…

THE CAPITOL CONSPIRACY / THE PROPHET

 

1998 – USA

 

Réalisé par Fred Olen Ray

 

Avec Don « The Dragon » Wilson, Alexander Keith, Ted Monte, Barbara Steele, Arthur Roberts, Paul Michael Robinson, Rick Dean, Jenna Bodnar, Sid Sham

 

THEMA POUVOIRS PARANORMAUX

Il y a des réalisateurs particulièrement prolifiques, capables d’enchaîner plusieurs films la même année. Mais en ce domaine, Fred Olen Ray semble être un recordman toutes catégories. En 1998, pas moins de onze longs-métrages mis en scène par ses bons soins sont dans les réseaux de distribution, parmi lesquels ce Prophet connu aussi sous le titre de The Capitol Conspiracy. Après son expérience heureuse avec l’as des arts martiaux Don « The Dragon » Wilson sur le film d’action Inferno alias Indian Ninja, Olen Ray rempile pour un nouveau thriller mouvementé qui s’appuie cette fois-ci sur un argument de science-fiction. Pour cette coproduction entre les compagnies Royal Oaks d’Andrew Stevens et Concorde/New Horizons de Roger Corman, le réalisateur signe sous le pseudonyme d’Ed Raymond (c’était déjà le cas pour Inferno) et s’appuie sur les talents acrobatiques de son acteur principal couvert de titres et de récompenses (élu maintes fois champion du monde de kickboxing et de full-contact par de prestigieuses fédérations internationales, au risque de faire pâlir Jean-Claude Van Damme), quitte à ce que le scénario et la cohérence des péripéties passent largement à l’arrière-plan. Comme beaucoup de films de Fred Olen Ray à l’époque, Prophet sera exploité directement en vidéo.

Le virevoltant « Dragon » Wilson incarne ici Jarrid Maddix, un agent du FBI chargé de retrouver cinq personnes que ses supérieurs accusent d’être des terroristes. Alors qu’il traque avec sa partenaire Vicki Taylor (Alexander Keith) ce groupe de suspects potentiellement très dangereux, notre héros découvre qu’on lui cache des choses et que tous les fugitifs qu’il suit à la trace possèdent des pouvoirs paranormaux. Or Maddix se rend bientôt compte qu’il est lui aussi doté des mêmes capacités hors du commun, sans comprendre pourquoi. Lorsque les supérieurs de l’agent récalcitrant se rendent compte qu’il est au courant de leurs petits secrets, ils chargent un de ses collègues de l’éliminer. En fuite, devenu l’homme à abattre, le kickboxer déchaîné tente de révéler l’existence du projet « Sunstreet », dans le cadre duquel plusieurs agents ont été soumis à des expériences pendant leur enfance afin de développer leurs capacités psychiques.

Barbara Steele complote dans l’ombre…

On ne peut pas dire que Prophet soit un film d’une très grande qualité, même au regard des autres « œuvres » signées par Olen Ray. A vrai dire, ce récit d’agent spécial aux facultés pré-cognitives n’est qu’un prétexte pour que le peu charismatique « The Dragon » cogne régulièrement ses adversaires, séduise sa blonde partenaire et s’interroge mollement sur son propre passé. Cela dit, il faut reconnaître à Olen Ray un indiscutable savoir-faire dans la mise en scène des séquences d’action, notamment celles au cours desquelles la star saute et roule au milieu des voitures lancées à vive allure dans sa direction tout en mitraillant à tout va. Dans un rôle secondaire, on note la présence de Barbara Steele sous la défroque de l’agent Oakley du FBI, qui reste cantonnée dans son bureau gris et donne régulièrement des instructions à ses équipes. Le scénario nous révèle en cours de route qu’elle est la véritable méchante du film, ayant jadis organisé des expériences médicales contre-nature sur des enfants désormais dotés de pouvoirs parapsychiques. Cette parenthèse facultative dans la filmographie de l’immense comédienne révélée par Mario Bava marquera d’ailleurs le net ralentissement dans sa carrière. Olen Ray, lui, n’aura pas le temps de souffler, déjà embarqué dans une demi-douzaine d’autres séries B du même acabit.

 

© Gilles Penso

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JOSH KIRBY : TIME WARRIOR ! CHAPITRE 6 – LAST BATTLE FOR THE UNIVERSE (1996)

L’ultime volet de la saga du jeune « guerrier du temps » et de ses compagnons s’achève sur une note étonnamment intimiste…

JOSH KIRBY TIME WARRIOR! CHAPTER 6 : LAST BATTLE FOR THE UNIVERSE

 

1996 – USA

 

Réalisé par Frank Arnold

 

Avec Corbin Allred, Jennifer Burns, Derek Webster, Jonathan C. Kaplan, Michael C. Mahon, Stacy Sullivan, Helen Siff, Charisma Carpenter, Johnny Green

 

THEMA VOYAGES DANS LE TEMPS I NAINS ET GÉANTS I SAGA JOSH KIRBY I CHARLES BAND

Au fil de leurs aventures précédentes, le lycéen Josh Kirby (Corbin Allred), la guerrière Azabeth Siege (Jennifer Burns), le scientifique Irwin 118 (Jonathan C. Kaplan) et la petite créature Prism (une marionnette mécanique dont l’utilité scénaristique nous laisse perplexes) avaient rencontré des dinosaures transformés en montures médiévales, un bébé extra-terrestre géant, des jouets vivants, des vers gloutons, un robot carnassier et des hommes-champignons. Nous étions donc en droit de nous attendre à une apothéose pour l’ultime épisode. Or contre toute attente, le réalisateur Frank Arnold et ses scénaristes (Ethan Reiff et Cyrus Voris) décident au contraire de jouer la carte de l’intimisme. Ce choix est guidé par les très faibles moyens mis à leur disposition (toutes les créatures précédemment citées étant bricolées avec des budgets étriqués ne permettant pas de faire des merveilles) mais aussi par la tournure qu’est en train de prendre l’arc narratif de ce serial estampillé Full Moon Entertainment. C’est finalement un parti-pris judicieux, qui permet de ramener l’aventure à de plus justes proportions et de l’achever de manière inattendue.

Comme toujours, l’épisode précédent (Journey to the Magic Cavern) nous abandonnait en plein cliffhanger. Mais celui-ci était d’une nature particulière. Au lieu de jeter nos héros d’un danger à un autre en les abandonnant dans des situations particulièrement hasardeuses, il remettait en question tous les événements précédents par la grâce d’un audacieux retournement de situation. Le début de cet ultime opus nous permet de mieux comprendre la réorganisation des forces et des enjeux via une série de flash-backs complétant quelques pièces du puzzle manquant. Les pouvoirs de Josh Kirby semblant augmenter d’épisode en épisode (« je ne suis pas n’importe qui, je suis un guerrier temporel ! » affirme-t-il en oubliant momentanément toute modestie), le voilà désormais capable de se transformer littéralement en machine à voyager dans le temps. La « dernière bataille pour l’univers » que nous promet le sous-titre de ce sixième épisode se prépare donc. Le fait que l’intrigue se situe désormais dans les années 80 offre de très intéressants paradoxes temporels, le moindre n’étant pas la rencontre de Josh avec un bébé qui n’est autre que lui-même ou avec une mère qu’il n’a jamais connue. Ces situations permettent pour la première fois de doter la série d’un atout émotionnel qui lui était jusqu’alors rigoureusement inconnu. Et c’est manifestement la plus grande force de cet épisode.

La fin de l’aventure

Les moments les plus intimistes sont donc les plus réussis, d’autant que les effets visuels restent l’une des grandes faiblesses de la série (images de synthèse approximatives, plans composites hasardeux, effets numériques ratés). Chaque fois que la mise en scène les sollicite, le caractère « cheap » de l’entreprise saute aux yeux. Reste l’armure de Zoetrope, une création toujours aussi impressionnante, même si la première partie du film s’amuse à l’incruster de manière très maladroite dans des extraits des épisodes précédents pour visualiser son voyage temporel à rebours. On regrette aussi l’extrême mollesse du combat final opposant le vilain en armure et Josh – déguisé en chevalier médiéval avec un dé à coudre géant en guise de heaume ! Il n’empêche que les personnages restent attachants et que l’épilogue – qui doit beaucoup à Retour vers le futur – boucle habilement la boucle entamée avec le premier épisode. Ainsi s’achève la saga Josh Kirby, une longue aventure épique qui aura su faire fi de ses moyens très limités pour s’offrir de belles ambitions et ravir le jeune public américain de l’époque. Ces six films n’arrivèrent pas jusqu’à nous, leur circuit de distribution étant resté limité, et il faut bien reconnaître qu’ils n’ont pas bien passé le cap des années, leur style et leurs effets étant fatalement très datés aujourd’hui. Ils s’inscrivent malgré tout dans le haut du panier des productions de Charles Band destinées à un public familial, aux côtés d’un Prehysteria, d’un Jack et le haricot magique ou d’un Château du petit dragon.

 

© Gilles Penso

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