ORCA (1977)

Le producteur Dino de Laurentiis tente de surfer sur la vague des Dents de la Mer en remplaçant le requin par un orque à la mâchoire bien garnie

ORCA, THE KILLER WHALE

1977 – USA

Réalisé par Michael Anderson

Avec Richard Harris, Charlotte Rampling, Bo Derek, Keenan Wynn, Robert Carradine, Will Sampson, Charles Scott Walker

THEMA MONSTRES MARINS I MAMMIFERES

Un an après avoir massacré en règle le mythe de King Kong, le producteur Dino de Laurentiis décide de manger au râtelier des Dents de la Mer en y ajoutant une bonne dose de Moby Dick. Pour tout avouer, le résultat n’est pas si catastrophique qu’on aurait pu le craindre. Car Orca est un honnête film d’action qui ne lésine ni sur les effets spéciaux, ni sur les séquences mouvementées. Quant au réalisateur Michael Anderson (L’Âge de Cristal), il s’acquitte de sa tâche avec un talent indéniable. Le capitaine Nolan (Richard Harris), désireux de s’attirer la fortune en capturant un orque-épaulard, y entreprend une expédition au large des côtes du Canada pour chasser l’un de ces mammifères marins. Mais le seul résultat de cette chasse est la mort d’une femelle enceinte et la blessure du mâle. Le monstre marin, face à la perte de sa compagne, est déchiré par la douleur, qui se transforme vite en haine. Et l’orque géant se vengera terriblement, ravageant les embarcations d’un village côtier, dévorant les pêcheurs, et menaçant le capitaine Nolan qui accepte, bien malgré lui, de relever le défi et de combattre l’animal. 

Certes, Orca ne surprend pas vraiment dans la mesure où ses thèmes ont tous déjà été développés et parce que le suspense et les scènes dramatiques, pour efficaces qu’ils soient, n’évitent pas les lieux communs du genre. Mais le scénario de Sergio Donati et Luciano Vincenzoni présente la particularité d’inverser les rôles tenus par la baleine et le capitaine chez Herman Melville et tous ses descendants. Ici, en effet, c’est le mammifère marin qui a pris l’homme en grippe et le pourchasse inlassablement dans l’espoir de le réduire à néant. Parmi ses atouts, Orca compte des effets visuels soignés de Frank van Der Veer, des créations mécaniques convaincantes de Giuseppe Carozza et Jim Hole, une partition envoûtante d’Ennio Morricone et un climax très spectaculaire visualisant avec emphase l’affrontement final entre l’homme et le cétacé. Les amateurs de beautés exotiques apprécient également la présence très photogénique (à défaut d’être très charismatique) de Charlotte Rampling en biologiste marine et de Bo Derek en assistante du capitaine Nolan.

Moby Dick à l'envers

Signe des temps, le film se pare d’une dimension écologique bienvenue. Ici, l’orque n’est pas un simple monstre destructeur (comme le laisse imaginer son surnom américain « killer whale », autrement dit « baleine tueuse ») mais un mammifère monogame et intelligent, doté d’émotions, de mémoire et du sens de la communication. A travers l’analyse scientifique du professeur Bedford (Rampling) et les légendes ancestrales évoquées par le brave Umilak (Will Sampson), c’est donc à une créature complexe et insaisissable que nous avons affaire. Cette approche passionnante est quelque peu amenuisée par l’anthropomorphisme avec lequel est traité l’animal vedette et par le sens du mélo qui teinte trop outrageusement certaines scènes. Fort déconsidéré au moment de sa sortie, notamment à cause de ses trop grandes similitudes avec le drame aquatique de Steven Spielberg, Orca n’est finalement pas le plagiat tant décrié et mérite sans doute une plus juste réévaluation.

 

© Gilles Penso

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LE MASQUE DU DEMON (1960)

Le premier et sans doute le plus beau des films de Mario Bava, qui consacra Barbara Steele reine de l'épouvante

LA MASCHERA DEL DEMONIO

1960 – ITALIE

Réalisé par Mario Bava

Avec Barbara Steele, John Richardson, Andrea Checchi, Ivo Garrani, Arturo Dominici, Enrico Olivieri

THEMA SORCELLERIE ET MAGIE

Après avoir souvent secondé d’autres réalisateurs, le directeur de la photographie Mario Bava s’apprête au tout début des années soixante à réaliser son premier long-métrage avec Le Masque du démon, pour lequel il n’a pas encore trouvé son actrice principale. Or la compagnie Galatea Film, pour laquelle il travaille à l’époque, s’apprête à coproduire avec 20th Century Fox une épopée biblique pour laquelle Bava doit signer les images. Le studio américain a donc fait circuler à son partenaire italien des photographies d’actrices susceptibles d’apparaître dans le film. Parmi elles se trouve Barbara Steele, dont le charme particulier intéresse beaucoup Mario Bava. Ravie de cette opportunité, la comédienne ne prend même pas le temps de lire le scénario. Elle fait ses bagages et part pour l’Italie à la rencontre du cinéaste. La barrière de la langue l’inquiète un peu et le cinéma d’épouvante n’est pas spécialement sa tasse de thé, mais elle accepte de tenir la vedette du film qui – elle ne le sait pas encore – fera d’elle une star internationale. Le Masque du démon s’inspire très librement de la nouvelle « Viy » de Nicolas Gogol. Au 18ème siècle, la princesse Asa est condamnée pour sorcellerie. Les bourreaux la tuent avec le masque du démon, à l’intérieur duquel se dressent des pointes qui lui transpercent le visage. Deux siècles plus tard, son cadavre putréfié retrouve la vie grâce à des gouttes de sang. Elle utilise alors Vavuvitch (Arturo Dominici), son serviteur vampire, afin de prendre la place de la princesse Katia…

En assumant le double rôle de réalisateur et de directeur de la photographie, Bava parvient à doter Le Masque du démon d’une mise en forme somptueuse, chaque plan témoignant de son perfectionnisme. La magnifique photographie noir et blanc joue sur les ombres, les lumières, les contrastes et les clairs/obscurs, au sein de décors extrêmement photogéniques. Plusieurs passages horrifiques assez saisissants ponctuent le film, en particulier la terrible scène du prologue, avec le masque hérissé de pointes planté à coup de masse sur le visage de la sorcière (une vue subjective menaçant même le spectateur de subir lui-même le supplice !), la mise à nu du visage d’Asa, dont les orbites vides sont habitées par de petits scorpions, ou encore la résurrection spectaculaire de son compagnon, aux allures de zombie masqué. Bava aura le bon goût de refuser d’affubler ses acteurs de dents de vampire, contre l’avis de la production. Ces attributs peuvent cependant être aperçus sur certaines photos publicitaires de l’époque.

Ange et démon

La double prestation de Barbara Steele dans Le Masque du démon, à la fois innocente Katia et maléfique Asa, synthétise les deux postures ambivalentes de la femme dans l’épouvante classique (la victime et le bourreau) mais aussi dans une imagerie judéo-chrétienne volontiers manichéenne (la vierge et la tentatrice). Il faut bien sûr saluer le flair de Mario Bava, qui sut trouver chez la belle Barbara l’incarnation idéale de cette dualité. Le cinéaste estimait à l’époque, avec une touchante modestie, que ses talents de metteur en scène, surestimés à son goût, se limitaient simplement à ses connaissances dans la photographie, son expérience des effets spéciaux et sa capacité à créer des atmosphères particulières. Au vu du Masque du démon, force est de constater que la simple juxtaposition de ces spécialités n’eut pas suffi. De toute évidence, Bava eut le génie de les combiner en une extraordinaire alchimie, qu’il retrouvera ensuite à maintes occasions (Six femmes pour l’assassin, Les Trois visages de la peur, Hercule contre les vampires), mais rarement avec la même intensité. La qualité du film est d’autant plus remarquable que le tournage ne fut pas une partie de plaisir et que l’entente entre le réalisateur et son actrice principale ne fut pas toujours simple. Barbara Steele reconnaîtra plus tard que son manque d’expérience, sa confiance limitée dans les capacités de Mario Bava et ses difficultés avec la langue italienne n’en firent pas une actrice facile à diriger. Mais face au film, tout le monde s’accorde à dire que la rencontre Bava/Steele fut providentielle. Deux talents écloraient en même temps, se nourrissant l’un l’autre pour mieux s’épanouir et redynamiser un cinéma gothique alors encore ancré dans les figures de style des années 50. Avec Le Masque du démon, Mario Bava devenait l’un des cinéastes phares de l’épouvante, et Barbara Steele se muait en égérie du genre, destinée à marquer définitivement les mémoires dans des rôles reprenant souvent à leur compte la dualité ambigüe de la perverse sorcière Asa et de l’innocente princesse Katia.

 

© Gilles Penso

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LE LAC DES MORTS-VIVANTS (1980)

Réalisé par Jean Rollin caché sous pseudonyme, ce film de zombies est tellement mal-fichu qu'il en devient foncièrement drôle

LE LAC DES MORTS-VIVANTS

1980 – FRANCE

Réalisé par J.A. Lazer (alias Jean Rollin)

Avec Howard Vernon, Anouchka, Pierre Escourou, Anthony Mayans

THEMA ZOMBIES I SAGA JEAN ROLLIN

Entre deux films érotico-fantastiques personnels, Fascination et La Nuit des Traquées, Jean Rollin signait pour la compagnie Eurociné cet impayable Lac des Morts-Vivants sous le pseudonyme de J.A. Lazer, dans l’espoir manifeste de profiter de la vogue des « zombie movies » suscitée par les œuvres de George Romero et Lucio Fulci. Ce film d’exploitation commandé par le producteur Marius Lesœur peut sembler éloigné du style habituel de l’auteur du Viol du Vampire, mais ce dernier fut en réalité appelé à la rescousse après que Jess Franco ait déserté le tournage, mécontent des innombrables restrictions budgétaires qui lui furent imposées. C’est donc avec un budget ridicule, une caméra déficiente et des effets spéciaux au rabais que Rollin emballe ce Lac des Morts-Vivants. Le prologue donne dans l’érotisme bucolique. Une jolie demoiselle fait un strip-tease intégral dans un petit coin de nature, se fait bronzer, puis s’en va batifoler dans le lac voisin, envoyant valdinguer un panneau annonçant que la baignade est dangereuse. Bientôt, un zombie borgne en uniforme nazi surgit et l’entraîne sous l’eau. Une femme qui s’en va battre son linge au lavoir est la seconde victime. Un zombie au maquillage ridicule (des lambeaux de latex mal collés menacent de se détacher de son visage) sort de l’eau, la suit, se jette très mollement sur elle puis lui suce le sang, tandis que la caméra, ne sachant trop comment filmer cette « action », tourne autour des deux acteurs sans conviction.

Une journaliste vient bientôt enquêter sur le « lac maudit », et s’entretient avec le maire du village (Howard Vernon, acteur fétiche de Jess Franco) qui lui raconte la légende locale. Pendant la guerre, une Française du village s’amouracha d’un jeune soldat allemand qui lui sauva la vie en lui évitant de sauter avec une bombe. Ils s’aimèrent – d’où une scène érotique besogneuse dans une grange – et de leur union naquit un nouveau-né. Puis un groupe de résistants tendit une embuscade au détachement allemand et les massacra avant de camoufler leurs corps, tandis que trépassèrent la mère et son bébé. « Nous avons fabriqué une horde de zombies destructeurs », conclue le maire. « L’air les traverse, l’eau leur sert de refuge, et la terre ne pourra jamais les transformer en poussière. »

« Nous avons fabriqué une horde de zombies destructeurs ! »

Et tandis que les morts-vivants multiplient leurs attaques orientées vers les filles dénudées (une équipe de basket féminine hilare, une femme en porte-jarretelles, une baigneuse aux seins nus), le spectateur soupire, incrédule. Joué par des acteurs catastrophiques, intégralement post-synchronisé, affreusement mis en musique, filmé n’importe comment, Le Lac des Morts-Vivants peut largement concourir dans la catégorie des pires films fantastiques de l’histoire du cinéma. Cela dit, avec ses dialogues absurdes (Vernon qui ordonne à des villageois armés de fusils d’aller préparer leurs fusils !), ses scènes aquatiques ratées (dans les vues sous-marines, on voit bien que les zombies sont dans une piscine dont les bords ont maladroitement été cachés par du tissu noir !) et ses séquences d’émotion pathétiques (les retrouvailles vibrantes entre un soldat zombie et sa fille), le film est un morceau de choix pour les amateurs d’humour involontaire.

 

© Gilles Penso

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KONGA (1961)

Michael Gough crée un singe géant dans cette imitation fauchée et complètement délirante de King Kong

KONGA

1961 – GB

Réalisé par Charles Lamont

Avec Michael Gough, Margo Johns, Jess Conrad, Claire Gordon, Austin Trevor, Jack Watson, George Pastell, Vanda Godsell

THEMA SINGES I VÉGÉTAUX

Le cinéma britannique des années 60, on le sait, a largement puisé dans le patrimoine fantastique américain des années 30, nous offrant des perles comme Le Cauchemar de DraculaFrankenstein s’est échappéLa Malédiction des Pharaons et autres La Nuit du Loup-Garou. Inévitablement, King Kong allait bientôt faire l’objet d’un quasi-remake anglais. Hélas, Charles Lamont n’ayant pas le talent de Terence Fisher et la compagnie AIP pas les mêmes ambitions que la Hammer, ce Konga n’a pas grand-chose pour séduire, même si on lui épargne la comparaison avec le chef d’œuvre dont il s’inspire évasivement. Michael Gough y incarne le professeur Charles Decker, éminent botaniste disparu dans la jungle africaine, qui regagne Londres après un an d’absence, en ramenant avec lui le jeune chimpanzé Konga et des graines de plantes insectivores. Accueilli par la presse, il déclare fièrement avoir découvert le chaînon entre la vie animale et la vie végétale. Grâce à un sérum extrait d’une plante récoltée chez les indigènes Bagandas, les graines deviennent en moins d’une semaine des végétaux arrivés à maturité. Ils atteignent une taille impressionnante, se nourrissent de viande et recèlent un enzyme qui leur permet de digérer n’importe quelle proie. Decker inocule ensuite le sérum à Konga, qui triple de volume et se transforme en gorille, défiant toutes les lois de l’évolution et de la logique. D’autant que le primate est dès lors incarné par un comédien dans un costume velu un tantinet grotesque. 

Atteint d’une mégalomanie croissante, Decker éprouve la docilité du singe en lui ordonnant de tuer le docteur Foster, qui était vivement opposé à ses activités, puis le professeur Tagor, un dangereux rival, et enfin Bob, l’ami d’une jeune étudiante blondinette et pimpante dont Decker s’est épris. La majeure partie du film est ainsi consacrée à une vengeance par gorille interposé, reprenant sans beaucoup d’innovation la trame de ces bons vieux thrillers d’épouvante avec Bela Lugosi. Mais le film s’appelant Konga et le poster exhibant un primate gigantesque semant la terreur dans Londres, Charles Lamont est bien obligé de passer à la taille supérieure au moment du climax. Jalouse de la jolie étudiante, Margaret, la maîtresse et collaboratrice de Decker, fait donc une nouvelle injection à Konga qui devient géant, la tue, crève le plafond du laboratoire, enlève Decker et provoque une belle panique dans les rues londoniennes. 

A l'assaut de Big Ben

Michael Gough se substitue ainsi à Fay Wray (on a pas mal perdu au change !) et Big Ben à l’Empire State Building. Cet épilogue potentiellement emphatique est hélas ruiné par la piètre qualité des effets spéciaux (transparences catastrophiques, poupée à l’effigie de Gough pas réaliste pour un sou) et par le manque de conviction des figurants, qui courent en tous sens sans visiblement savoir ce qui est censé les effrayer. Bien évidemment, l’armée intervient et fait feu, jusqu’à l’inévitable trépas du gorille géant, qui redevient illico un petit chimpanzé. Au moment de sa distribution vidéo dans les années 80, Konga fut rebaptisé Panique sur Londres. Il y a fort à parier que la relative popularité du film soit davantage due à son affiche prometteuse qu’à son décevant contenu.

 

© Gilles Penso

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LE JOUR D’APRES (1983)

En pleine tension Est-Ouest, Nicholas Meyer réalise un film catastrophe d'un réalisme terrifiant

THE DAY AFTER

1983 – USA

Réalisé par Nicholas Meyer

Avec Jason Robards, Jobeth Williams, Steve Guttenberg, John Cullum, John Lithgow, Bibi Besch, Lori Lethin, Amy Madigan

THEMA POLITIQUE FICTION I CATASTROPHE

Auteur des savoureux C’était demain et Star Trek 2: la colère de Khan, Nicholas Meyer sacrifie en 1983 à la mode du film catastrophe avec Le Jour d’après. Mais il se distingue de la plupart de ses prédécesseurs en mettant principalement l’accent sur ses personnages et sur les répercussions du drame, loin des stéréotypes généralement rattachés au genre. La première partie du film s’attache à nous présenter les différents habitants de la petite ville de Kansas City, dans le Missouri. D’emblée, le tableau idyllique est entaché par des bulletins d’informations de plus en plus préoccupants, annonçant l’accroissement de la tension entre l’Est et l’Ouest. Avec simplicité et réalisme, Meyer nous décrit les réactions de la population face à l’invasion de l’Allemagne de l’Ouest par la Russie, prélude à une menace d’attaque nucléaire. Chacun y va de sa petite théorie. Les conservateurs pensent que les Etats-Unis ont tort de se mêler des affaires étrangères, les optimistes espèrent que les hommes ne reproduiront pas les erreurs du passé… Puis vient l’inévitable panique : la razzia dans les supermarchés, la fuite éperdue vers les abris, et enfin la catastrophe elle-même. Mélange d’images d’archives, d’effets spéciaux visuels et de séquences de destructions en tout genre, ce désastre fait froid dans le dos et prend aux tripes.

Les images fortes se succèdent sans concession : hommes en feu, monstrueux champignons atomiques se dressant au-dessus des voitures, bâtiments soufflés. Certes, certaines idées visuelles naïves s’avèrent artificiellement démonstratives, notamment les arrêts sur image sur différents personnages se muant en squelette après que l’image soit passée au négatif. Mais le terrible impact de la catastrophe n’en est guère amenuisé.  Après les explosions, les furtives visions du désastre sont frappantes : ville entièrement dévastée, buildings détruits via d’étonnants matte paintings, corps calcinés sous les gravats, pluie de cendres permanente, cadavres de bétail éparpillés dans un champ en ruines. En pareille situation, les sentiments s’exacerbent. Tandis que certains s’entraident, d’autres se calfeutrent dans leur cave sans se soucier du reste du monde, d’autres encore retournent à l’état sauvage, tandis que les médecins d’un hôpital s’efforcent dérisoirement de soigner tous les blessés qu’ils peuvent. 

Les ruines de la civilisation

Les images surréalistes se succèdent alors, comme cette poignée de fidèles qui écoutent le sermon d’un prêtre dans les ruines d’une église, ou ce terrain de basket transformé en gigantesque mouroir. La dernière partie du Jour d’Après nous montre la dégénérescence physique et psychologique des protagonistes et ne laisse guère d’espoir. Le film s’achève sur le dernier instinct ridicule de propriété d’un homme cherchant mollement à chasser des individus assis sur le tas de ruines qui fut, jadis, sa maison. Un peu long, un tantinet démonstratif, ce téléfilm ambitieux, distribué en salles en Europe, s’avère malgré tout diablement efficace. Pour enfoncer le clou, un carton au générique de fin annonce que les dommages montrés dans le film sont moins sévères que ceux qui surviendraient réellement en cas d’attaque nucléaire massive.

 

© Gilles Penso

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THE ISLAND (2005)

Michael Bay calme un peu ses penchants pyrotechniques pour cette fable de science-fiction existentialiste

THE ISLAND

2005 – USA

Réalisé par Michael Bay

Avec Ewan McGregor, Scarlett Johansson, Djimon Hounsou, Steve Buscemi, Sean Bean, Michael Clarke Duncan

THEMA DOUBLES I FUTUR

Michael Bay n’étant pas réputé pour sa finesse, on ne peut qu’être agréablement surpris par la portée de son discours dans The Island. Car mine de rien, derrière ses pétarades pyrotechniques, son film est l’un des premiers à aborder de manière aussi frontale les problématiques liées à l’existence des clones, leur conscience et leur crise d’identité. L’analyse n’est ni très profonde, ni très subtile, mais elle a le mérite d’évoquer sans détour les problèmes éthiques soulevés par l’eugénisme. La première partie de The Island nous plonge dans un univers futuriste dystopien qui présente un certain nombre de points communs avec celui de THX 1138. Suite à un cataclysme écologique, l’atmosphère terrestre est devenue irrespirable, et les humains sont parqués dans des colonies souterraines régies avec une bienveillance trop excessive pour être honnête. Tout de blanc vêtu, chaque citoyen est contrôlé dans le moindre de ses agissements, abruti par un travail mécanique et enjoint à éviter toute intimité avec ses camarades. Pour échapper à cette monotonie sous étroite surveillance, une loterie est organisée chaque soir, permettant au vainqueur de quitter la colonie pour partir s’établir sur une île paradisiaque, seul endroit de la planète ayant miraculeusement échappé à la contamination.

Noyé dans cette masse servile, Lincoln Six-Echo (Ewan McGregor) découvre un jour que tout ça n’est que supercherie. L’île n’existe pas, pas plus que la contamination, et lui et ses semblables sont des clones en élevage conçus pour permettre à de riches malades de se doter d’organes de rechange. Lincoln s’échappe donc en compagnie de Jordan Two-Delta (Scarlett Johansson), et dès lors la fable d’anticipation se mue en film d’action, terrain de jeu favori de Michael Bay. Comme si la première partie du récit l’avait quelque peu frustré, l’ex-protégé de Jerry Bruckheimer se lâche sans retenue par la suite, cédant à toutes les tentations. Ça commence par une fusillade dans la foule, s’enchaîne avec une monstrueuse traque sur l’autoroute que Bay plagie sur son propre Bad Boys 2, vire à la poursuite sur des scooters volants façon Le Retour du Jedi ou Judge Dredd, puis s’achève par des cascades vertigineuses à flanc de building et des explosions à tire-larigot. Sans compter ces multiples envolées d’hélicoptères que le réalisateur de The Rock filme avec une délectation manifeste.

Chassez le naturel et il revient au galop

Le film souffre ainsi d’un déséquilibre double : la rupture de rythme violente entre les deux parties bien distinctes de l’intrigue, et le décalage entre les passionnantes thématiques du scénario, très inspirées du roman « Frères de Chair » de Michael Marshall Smith, et leur traitement purement récréatif. Quant au climax, il répond sans surprise à toutes les obligations du genre et multiplie sans vergogne les invraisemblances, annihilant quelque peu les formidables enjeux politiques, psychologiques, médicaux et moraux présents à l’état embryonnaire dans le scénario de Caspian Tredwell-Owen, Alex Kurtzman et Roberto Orci. Comme souvent chez Michael Bay, le film se pare d’un casting judicieux. Aux côtés d’Ewan McGregor et Scarlett Johansson, on note Sean Bean en médecin véreux, Djimoun Hounsou en redoutable traqueur et Steve Buscemi en exubérant technicien. 

 

© Gilles Penso

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L’HISTOIRE SANS FIN (1984)

L'adaptation somptueuse par Wolfgang Petersen d'un plaidoyer pour la lecture écrit par le romancier Michael Ende

THE NEVERENDING STORY / DIE UNENDLICHE GESCHICHTE

1984 – ALLEMAGNE / USA

Réalisé par Wolfgang Petersen

Avec Barret Oliver, Gerald McRaney, Drum Garrett, Darryl Cooksey, Nicholas Gilbert, Thomas Hill, Noah Hathaway 

THEMA CONTES I DRAGONS I SAGA L’HISTOIRE SANS FIN

De l’épais et magnifique roman écrit en 1979 par Michael Ende, Wolfgang Petersen et son co-scénariste Herman Weigel n’ont retenu que la première moitié, et de cette moitié le scénario n’a conservé que la trame, abandonnant au passage de nombreux détails pourtant passionnants reposant sur la mise en abîme, la vie propre qui habite les livres, les plaisirs complexes de la lecture et l’imagination en général. « Le livre était trop gros pour que l’histoire tienne sur un seul film », nous explique le réalisateur Wolfgang Petersen. « Voilà pourquoi nous n’en avons adapté qu’une partie, et que nous avons dû évacuer un certain nombre de personnages, comme Ygramul, l’araignée géante qui change sans cesse de forme. » (1) 

Le résultat est un conte de fées adapté sur mesure aux enfants mais qui, jusqu’au dénouement, baigne tout de même dans une ambiance un peu oppressante et mélancolique. Le personnage central est Bastien (excellent Barret Oliver), un jeune garçon qui, depuis la mort de sa mère, a trouvé refuge dans la lecture. Un jour, poursuivi par des garnements de son école, il se cache dans la librairie de monsieur Koreander où il découvre un livre mystérieux, « L’Histoire sans Fin ». Sa curiosité étant piquée au vif, il dérobe le livre, se réfugie dans le grenier de son école et se plonge dans la lecture de « L’Histoire sans Fin ». Le livre raconte l’histoire de Fantasia, un Pays Fantastique menacé par un terrible « Néant » qui engloutit tout sur son passage. La Petite Impératrice elle-même, qui règne sur Fantasia dans sa tour d’ivoire, est tombée gravement malade. En désespoir de cause, on fait appel au jeune guerrier Atreyu (Noah Hathaway) pour contrer les effets du « Néant ». Falkor, un dragon bienveillant à la voix chaleureuse et à la tête de chien, sera son allié le plus précieux. Bientôt, au fil de sa lecture, Bastien a l’étrange impression qu’il peut influer sur le cours du récit…

Quand le lecteur influe sur le récit…

Évidemment, la lecture sur plusieurs niveaux du livre original (l’histoire du Pays Fantastique, l’histoire du lecteur Bastien, et l’histoire du lecteur des aventures de Bastien, c’est-à-dire nous-mêmes) perd ses propriétés vertigineuses du fait même du passage sur support cinématographique. Mais le charme initial subsiste. « L’Histoire sans Fin n’est pas le genre de film qui m’attirait à priori », nous avoue Petersen. « Je suis plus porté sur les thrillers comme Le Bateau ou Dans la Ligne de Mire. Mais j’ai fait ce film en pensant à mes enfants, et j’y ai pris beaucoup de plaisir. » (2) Techniquement, le film est magistral. Les décors, les créatures et les effets spéciaux rivalisent de beauté et d’ingéniosité. Les jeunes comédiens eux-mêmes sont très convaincants. Dommage que cette version cinématographique ne cherche pas à transcender outre-mesure la simple fable enfantine et s’achève sur une happy end aussi invraisemblable que puérile. Dommage également que la bande originale du film ait été confiée au pape du disco des années 80 Giorgio Moroder, composant ici une musiquette synthétique guère adaptée à la grande épopée que narre un film par ailleurs très enthousiasmant.

 

(1) et (2) Propos recueillis par votre serviteur en avril 1995.

 

© Gilles Penso

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G.O.R.A. (2004)

Ce space opera déjanté et parodique était à l'époque le film le plus cher de l'histoire du cinéma turc

G.O.R.A.

2004 – TURQUIE

Réalisé par Omer Faruk Sorak

Avec Cem Yilmaz, Rasim Oztekin, Ozkan Ugur, Idil Firat, Safak Sezer, Ozge Ozberk, Erdal Tosun, Ozan Guven, Cezmi Baskin

THEMA SPACE OPERA I EXTRA-TERRESTRES

Avec son budget de cinq millions de dollars et ses trois années de production, G.O.R.A. est non seulement le film turc le plus cher de l’histoire du cinéma, mais également le premier space opera de grande envergure jamais réalisé dans cette partie du continent. Assez curieusement, ce n’est pas un émule de George Lucas ou de James Cameron que l’on trouve à l’initiative de ce projet colossal, mais le comique Cem Yilmaz, habitué jusqu’alors au stand up, l’idée des Turcs dans l’espace lui étant venue d’un de ses sketches. G.O.R.A. est donc un étrange mixage de film de science-fiction ultra ambitieux (les effets visuels sont de très haut niveau, les décors sont immenses et innombrables, la mise en image est superbe) et de comédie décontractée à la Saturday Night Live. Avec son humour pince sans rire, Yilmaz (scénariste mais également interprète des deux rôles principaux du film) n’est d’ailleurs pas sans nous évoquer par moments le Sacha Baron Cohen déjanté de Borat. Nous le découvrons d’abord sous les traits d’Arif, un vendeur de tapis qui vit d’expédients et s’est spécialisé dans les photos truquées de soucoupes volantes. Un jour, il est réellement enlevé par des extra-terrestres, à bord d’un immense vaisseau spatial, et emmené par le commandant Logar (à nouveau Yilmaz) sur la planète Gora, aux côtés d’autres terriens, afin de grossir le rang des esclaves humains de cette peuplade conquérante. Fourbe au-delà de tout, Logar compte épouser la fille du chef Tocha, la belle Ceku, afin de régner sur Gora. Il ne se doute pas que le modeste Arif s’apprête à lui mettre des bâtons dans les roues… 

Rythme échevelé, mise en scène alerte, gags ininterrompus, G.O.R.A. est un divertissement permanent au fil duquel les clins d’œil à Star Wars abondent : le sabre laser, le costume de Logar (calqué en grande partie sur celui de Dark Vador), l’hologramme du vieux maître Garavel qui annonce à Arif que la Force est en lui… D’autres références s’en mêlent, en particulier Le Cinquième Elément lorsqu’Arif sauve la planète d’une collision avec une boule de feu, Matrix dont le fameux « bullet time » est pastiché à outrance et, d’une manière plus générale, les films de kung-fu. On note aussi, en début de métrage, un flash-back hilarant en noir et blanc qui narre le premier contact entre les hommes et les extra-terrestres, via une version campagnarde, grivoise et muette du Jour où la Terre s’Arrêta

Clins d'œil dans tous les sens

Entre deux scènes comiques, l’équipe des effets visuels réalise de véritables exploits, nous offrant de magnifiques visions de la planète Gora, dignes de La Menace Fantôme (avec des buildings et des vaisseaux en 3D à la Flash Gordon), ou encore une excellente séquence de fuite en aéroglisseurs volants (clin d’œil à celui de Luke Skywalker sur la planète Tatooine). Dommage que le scénario de G.O.R.A. ne soit que très moyennement passionnant et se contente de collecter ses morceaux d’anthologie. Avec une écriture plus rigoureuse, nous aurions vraiment eu droit au Austin Powers ou au Y’a-t-il un Pilote dans l’Avion du space opera. Tel quel, le film de Omer Faruk Sorak ressemble finalement à un sketch de deux heures qui rachète sa légèreté par ses indiscutables qualités formelles et son grain de folie permanent.

© Gilles Penso

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FRANKENSTEIN JUNIOR (1974)

Mel Brooks déclare sa flamme à l'âge d'or du cinéma d'épouvante à travers cette parodie qui demeure la référence absolue du genre

YOUNG FRANKENSTEIN

1974 – USA

Réalisé par Mel Brooks

Avec Gene Wilder, Marty Feldman, Peter Boyle, Madeline Kahn, Gene Hackman, Kenneth Mars, Cloris Leachman, Teri Garr

THEMA FRANKENSTEIN

Frankenstein Junior est de loin la plus réussie de toutes les parodies du mythe créé par Mary Shelley, et probablement le meilleur film de Mel Brooks, alors porté aux nues par le succès du Shérif est en Prison. Gene Wilder, co-scénariste du film et instigateur du projet, y interprète le docteur Friedrich Von Frankenstein, chirurgien de renom qui rêve d’épouser la blonde Elisabeth (Madeline Kahn). Comme le veut le lieu commun, il revient dans le sinistre château de son ancêtre. Avec la complicité du nabot Igor (Marty Feldman) et de la pulpeuse Inga (Teri Garr), il retrouve les secrets familiaux, et notamment un livre sobrement titré : « Comment je l’ai fait ». Le jeune Frankenstein vole bientôt un cadavre dans un cimetière et tente de le ramener à la vie. Mais à la suite d’une erreur d’Igor, il greffe à la créature (Peter Boyle) un cerveau anormal. La suite est connue. Quoique… 

Le pastiche est ici d’autant plus réussi que Mel Brooks connaît sur le bout des doigts et respecte scrupuleusement les conventions du genre et les caractéristiques des œuvres parodiées, à savoir les trois premiers Frankenstein de la Universal. On y retrouve les mêmes décors tordus, les mêmes éclairages inquiétants, la même photographie quasi-expressionniste en noir et blanc (signée ici Gerard Hirschfield), bref la même atmosphère. Sans compter que Mel Brooks réutilise l’équipement électrique conçu par Kenneth Strickfadden pour visualiser les expériences de Frankenstein dans les deux films de James Whale. Le trio Gene Wilder, Peter Boyle et Marty Feldman, respectivement docteur, créature et assistant bossu, est des plus réjouissants. Même les personnages secondaires sont des répliques précises de ceux de la trilogie des années trente. On retrouve ainsi la petite fille joueuse de Frankenstein, le vieil ermite aveugle de La Fiancée de Frankenstein (qui a pris ici les traits de Gene Hackman), l’inspecteur au bras artificiel du Fils de Frankenstein (Kenneth Mars caricaturant à l’occasion la prestation de Lionel Atwill…

« Frau Blücher ! »

Dans un tel contexte, n’importe quel effet comique ferait mouche, et comme ils sont ici savamment orchestrés, le spectateur est aux anges. Notons pour mémoire le gag à répétition qui consiste à faire hennir de frayeur les chevaux dès que quelqu’un prononce « Frau Blücher », la situation délicate de Frankenstein et Igor nez à nez avec un policier alors qu’ils viennent de dérober un cadavre au cimetière voisin, la bosse du même Igor qui ne cesse de changer de côté (le faux raccord mué en gag, il fallait le faire !), le spectacle de claquettes donné par le docteur et sa créature au cours d’un très sérieux congrès scientifique, ou encore le dénouement en forme de retournement imprévu de situation. Dommage que Mel Brooks n’ait pas su, par la suite, exploiter mieux que ça ses talents de parodieur, à moins que la trilogie des Frankenstein d’Universal ait été pour lui une source d’inspiration plus riche que les autres. Toujours est-il que Frankenstein Junior demeure la référence absolue dans le genre, loin devant Le Bal des Vampires ou la très inégale saga des Deux Nigauds.

 

© Gilles Penso

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DRILLER KILLER (1979)

Abel Ferrara tient le rôle principal de son second long-métrage, celui d'un tueur détraqué armé d'une perceuse !

DRILLER KILLER

1979 – USA

Réalisé par Abel Ferrara

Avec Abel Ferrara, Carolyn Marz, Baybi Day, Harry Schultz, Alan Wynroth, Maria Helhoski, James O’Hara, Richard Howorth

THEMA TUEURS

Né et élevé dans le Bronx, Abel Ferrara a tourné quelques courts-métrages en super 8 et en vidéo avant d’attaquer en 1976 son premier long, un essai érotico-expérimental baptisé Nine Lives of a Wet Pussy. Un an plus tard, Ferrara tente un mélange bizarre entre le drame urbain et le film d’horreur. Armé d’une caméra 16 mm et d’un ridicule budget de 20 000 dollars, il s’attaque ainsi au tournage de The Driller Killer entre juin 1977 et mars 1978 dans les quartiers les plus sordides de New York. Sous le pseudonyme de Jimmy Laine, il incarne lui-même le rôle principal, celui d’un artiste peintre nommé Reno Miller qui partage son appartement miteux avec Carol (Carolyn Marz) et Pamela (Baybi Day), formant ainsi un triangle amoureux aux relations ambiguës (Ferrara en profite pour filmer avec une gratuité affichée une scène lesbienne sous une douche). Reno peine à payer les dettes qui s’accumulent et a bien du mal à finir la toile que lui a commandée une galerie de New York. Lorsque les Roosters, un groupe de punk rock échevelé, s’installe dans l’appartement voisin et s’adonne à des répétitions tonitruantes jour et nuit, les nerfs de notre peintre se mettent à craquer. Il commence à être en proie à des hallucinations, à entendre des voix… Un jour, pris d’un soudain accès de folie, il massacre un homme avec sa perceuse électrique. Ce n’est que le premier d’une longue série de meurtres ultra sanglants que Reno perpètre la nuit, une ceinture de batteries à la taille et une chignole à la main, s’en prenant aux SDF et aux poivrots du quartier…

Tourné à l’arrache, dans des conditions souvent précaires, The Driller Killer est un film brut et dépouillé, dont de nombreuses scènes dialoguées semblent en grande partie improvisées. Mais la spontanéité ainsi obtenue ne rattrape pas le fâcheux manque de rigueur du film. Les relations entre les personnages n’ont aucune teneur, la plupart de leurs réactions sont illogiques, l’agencement des séquences semble parfois aléatoire, et certaines d’entre elles durent plus que de raison (le type qui pousse des cris dans l’abribus, nos trois protagonistes qui mangent une pizza). Quant au tueur à la perceuse, rien n’explique vraiment son basculement dans la folie meurtrière, Abel Ferrara préférant visiblement la captation d’actions brutes à une quelconque approche psychologique du sujet.

Massacre à la chignole

Lorsqu’il s’agit de filmer les assassinats, le réalisateur livre des images à la violence exacerbée, notamment lorsque Reno perce en gros plan le crâne d’un malheureux avec force écoulement de sang, une séquence gorissime qui n’aurait pas dépareillé dans un film de Lucio Fulci. A mi-chemin entre le slasher (qui n’en était alors qu’à ses premiers balbutiements) et le thriller dépressif façon Taxi Driver (dont il semble souvent s’inspirer), The Driller Killer laisse finalement perplexe mais on sent bien, ça et là, les prémisses stylistiques d’un réalisateur en devenir, qui allait nous offrir quelques mémorables descentes aux enfers cinématographiques telles que Bad Lieutenant ou Snake Eyes. Dans son générique de fin, Ferrara dédie The Driller Killer « aux habitants de New York, la cité de l’espoir ».

 

© Gilles Penso

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