LE SEIGNEUR DU MONDE PERDU (2005)

Les trublions de The Asylum tentent un mixage entre Le Monde perdu, Lost et King Kong… Le résultat est évidemment catastrophique !

KING OF THE LOST WORLD

 

2005 – USA

 

Réalisé par Leigh Scott

 

Avec Bruce Boxleitner, Jeff Denton, Rhett Giles, Sarah Lieving, Christina Rosenberg, Steve Railsback, Chriss Anglin

 

THEMA SINGES I DINOSAURES I ARAIGNÉES I INSECTES ET INVERTÉBRÉS

Annoncé fièrement comme une nouvelle adaptation du Monde perdu d’Arthur Conan Doyle, King of the Lost World ressemble surtout à un mixage opportuniste de la série Lost et du King Kong de Peter Jackson. Le roman original ne contient évidemment ni catastrophe aérienne ni gorille géant. D’où ce titre original patchwork qui mélange joyeusement les trois influences, fruit du travail des rois du marketing de la compagnie de production The Asylum, dont le mot d’ordre est la copie systématique de tous les grands succès du moment, malgré des budgets ridicules. Le Seigneur du monde perdu débute par le crash d’un avion sur une île tropicale. Les survivants découvrent rapidement que l’endroit grouille de créatures étranges : une araignée géante attaque le groupe, un monstre invisible emporte un des leurs dans les airs et un cadavre de dinosaure git non loin. Les personnages cumulent les clichés caricaturaux sans la moindre retenue : le baroudeur qui n’a pas froid aux yeux et a visité toutes les jungles du monde, le type louche qui ne quitte jamais sa mallette, l’hôtesse de l’air un brin écervelée, la jeune femme entreprenante et courageuse…

Notre petit groupe trouve refuge dans une grotte, où des scorpions géants leur font passer un mauvais quart d’heure. Capturés par des indigènes blancs aux maquillages évasifs (des têtes de mort d’Halloween), ils sont conduits dans un village où se prépare un sacrifice : deux femmes sont droguées, deux hommes attachés. Surgit alors une volée de reptiles volants – qui ont plus des allures de dragons que de ptérodactyles – emportant l’un d’eux. Enfin apparaît le fameux gorille géant, amorçant un combat confus. Car si les ambitions du film semblent sans limites, les images de synthèses sollicitées pour mettre en scène le bestiaire du scénario (conçues à bas prix par la société Image Engine) n’ont aucun réalisme, s’efforçant de dissimuler leurs approximations par le dynamisme du montage, la nervosité de l’animation et l’abus d’effets de flous de mouvement.

Atomic climax

Les scènes incongrues abondent alors, comme la bataille apathique contre une femme indigène dans l’épave de l’avion ou l’escadrille de chasseurs qui surgit soudain et bombarde le gorille géant. Le seul rapport avec le roman, c’est finalement le nom Challenger que porte l’un des personnages. Pour le reste, le pauvre Conan Doyle ne méritait pas tant d’outrages. Au cours d’un climax parfaitement absurde, les explorateurs font carrément sauter une bombe atomique dans la carcasse d’avion qu’empoignait le gorille, en plein combat contre les reptiles volants. Après l’explosion gigantesque qui s’ensuit, inspirée manifestement de celle du déjà gratiné Roi Dinosaure de Bert I. Gordon, les trois survivants s’auto-congratulent joyeusement. Bref, c’est du grand n’importe quoi. Les acteurs jouent comme des savates, il n’y a pas de rythme, les effets spéciaux sont aux fraises, l’histoire n’a ni queue ni tête… Encore un mockbuster parfaitement dispensable signé The Asylum.

 

© Gilles Penso

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THE POUGHKEEPSIE TAPES (2007)

Dans ce faux documentaire perturbant, des agents du FBI exhument les centaines de cassettes vidéo enregistrées par un tueur psychopathe…

THE POUGHKEEPSIE TAPES

 

2007 – USA

 

Réalisé par John Erick Dowdle

 

Avec Stacy Chbosky, Ben Messmer, Samantha Robson, Ivar Brogger, Lou George, Amy Lyndon, Michael Lawson, Ron Harper, Kim Kenny, Iris Bahr, Linda Bisesti

 

THEMA TUEURS

Nous sommes en 2007, époque où le « found footage » est en train d’atteindre les sommets de sa popularité. Après quelques longs-métrages pionniers en la matière tels que Cannibal Holocaust, C’est arrivé près de chez vous ou Le Projet Blair Witch, trois œuvres déterminantes vont asseoir le genre et en faire le nouveau chouchou des producteurs (ça ne coûte pas cher et ça peut rapporter gros) : Diary of the Dead, [Rec] et Paranormal Activity. C’est exactement à la même période que John Erick Dowdle tourne The Poughkeepsie Tapes, preuve que tous ces films n’ont pas eu le temps matériel de s’influencer les uns les autres et que les bonnes idées flottent souvent dans les airs en même temps. Co-écrit par John Erick Dowdle et son frère Drew, The Poughkeepsie Tapes part d’une idée plutôt triviale. « Nous cherchions un moyen de réaliser un film à petit budget qui donne l’impression d’avoir coûté plus cher », explique simplement le réalisateur. « Nous pensions que l’idéal serait de faire quelque chose qui combine des aspects vidéo et cinématographiques. Alors que nous étions en train de réfléchir, j’ai dit : “Et si on faisait un faux documentaire sur les vidéos amateurs d’un tueur en série ?” Et Drew a répondu : “On y va !” Avant ce film, nous étions plutôt dans l’humour, et nous ne savions pas vraiment si nous serions à l’aise avec l’horreur. Mais Drew m’a dit : “Laisse tout tomber, écris le scénario et je m’occupe de réunir les fonds.” Six mois plus tard, le film était entièrement tourné. » (1)

Réalisé pour un budget modeste de 450 000 dollars, The Poughkeepsie Tapes prend donc les allures d’un documentaire entremêlant les témoignages d’enquêteurs, de témoins, de proches des victimes, de juristes, de fausses actualités d’époque, de reconstitutions, d’infographies, d’images d’archive et bien sûr d’extraits de ces fameuses cassettes VHS au contenu perturbant. Le postulat du film est le suivant : en faisant une descente dans une maison de Poughkeepsie, dans l’État de New York, des policiers découvrent plus de 800 cassettes vidéo réalisées par un tueur en série insaisissable connu sous le surnom du « Boucher de Walter Street ». Ces films amateur détaillent tous ses méfaits : meurtres, tortures psychologiques et physiques, mutilations… Malgré l’importance des preuves, le psychopathe prend soin de ne jamais apparaître à l’image sans être complètement déguisé, ce qui conduit la police et les forces de l’ordre à ouvrir une enquête sur sa localisation et celle de ses victimes. Du côté des psychologues, on se perd en conjectures, car cet assassin ne correspond à aucun profil, ou plutôt semble cumuler des centaines de caractéristiques psychologiques contradictoires. Qui est-il ? Comment le retrouver ? Et surtout, combien de cadavres va-t-il encore laisser dans son sanglant sillage ?

« True Crime »

Le scénario est malin, parce que The Poughkeepsie Tapes ne se contente pas d’aligner les images vidéo tremblantes au cours desquelles le tueur, en vue subjective, fait subir maints outrages à ses proies. Certes, ces éléments restent le cœur du film et constituent sans conteste ses passages les plus marquants, notamment les tourments d’une jeune femme qui est littéralement réduite en esclavage. Mais pour éviter que l’exercice devienne répétitif, Dowdle transforme son intrigue en véritable enquête policière riche en rebondissements et en surprises. Dans le rôle de Cheryl Dempsey, la victime sur laquelle s’attarde plus particulièrement le récit, Stacy Chbosky, la femme du réalisateur, est bouleversante et porte une grande partie de l’impact du film sur ses épaules, notamment lors du final redoutablement nihiliste. The Poughkeepsie Tapes doit sa réputation trouble autant à son contenu dérangeant qu’aux errements de son exploitation. Présenté avec succès au Tribeca Film Festival en 2007 comme une pure fiction, le film est ensuite projeté au Butt-Numb-A-Thon, cette fois vendu au public comme un véritable documentaire. Les spectateurs, conscients d’être manipulés, rejettent violemment la séance. MGM, qui avait acquis les droits de distribution, se retrouve avec un film déjà difficile à vendre et désormais encombré d’une mauvaise presse. Le studio retire donc le titre de son calendrier de sortie. Son exploitation vidéo est elle-même longtemps différée, mais un parfum d’interdit finit par assurer au film une seconde vie underground auprès des amateurs d’horreur réaliste. Après cette œuvre choc, tout le monde guettait les prochaines réalisations de John Erick Dowdle, mais il faut croire que c’était l’homme d’un film. Non pas que sa carrière se soit arrêtée là, mais on ne peut pas dire que l’embarrassant En Quarantaine ou l’anecdotique Devil soient à la hauteur des espoirs que nous placions sur lui. Il enchaînera avec Catacombes, No Escape et la série TV Joe Pickett.

 

(1) Extrait d’une interview publiée sur BlueCat Screenplay en janvier 2010

 

© Gilles Penso

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GIANTESS ATTACK VS. MECHA FEMBOT (2019)

Deux femmes géantes affrontent un gigantesque robot féminin piloté par une extra-terrestre maléfique… Tout un programme !

GIANTESS ATTACK VS. MECHA FEMBOT

 

2019 – USA

 

Réalisé par Jeff Leroy

 

Avec Tasha Tacosa, Rachel Riley, Christine Nguyen, Vlada Fox, Jed Rowen, John Karyus, Chelsea Bellas, Kali Cook, Ben Stobber, Malorie Mackey, Alexandra Marie

 

THEMA NAINS ET GÉANTS I ROBOTS I EXTRA-TERRESTRES I SAGA CHARLES BAND

Pour les amateurs de cinéma bis, de science-fiction délurée, de pastiches en série et de pin-up en petites tenues, Giantess Attack s’était révélé savoureux, malgré son budget ridicule et ses effets spéciaux particulièrement maladroits. Financé partiellement grâce à une campagne participative et distribué par Full Moon, la très prolifique compagnie de Charles Band, Giantess Attack appelait une suite. La voici donc, orchestrée par le même Jeff Leroy qui officie toujours comme producteur, scénariste et réalisateur. Le film précédent avait laissé Hollywood en bien piteux état, la ville ayant été saccagé sans retenue par Diedre (Tasha Tacosa) et Frida (Rachel Riley), deux actrices turbulentes transformées en titans suite à l’intervention de deux jumelles extra-terrestres venues de la planète Metaluna (jouées toutes deux par Christine Nguyen). Après un générique survolté, qui résume les événements survenus antérieurement sur le tempo de l’improbable chanson « Go Go Giantess Attack ! », nous retrouvons nos héroïnes ramenées à des proportions plus raisonnables. Alors que Diedre s’est réfugiée dans la « Forteresse de la Culpabilité Incommensurable » pour expier ses péchés, Frida, elle, arpente les montagnes en rêvant de reprendre du service…

Survivante du premier Giantess Attack, l’une des Métaluniennes (toujours incarnée par Christine Nguyen) oublie toutes les belles intentions que nous lui connaissions (à savoir protéger la Terre contre une menace extra-terrestre) et décide au contraire de conquérir le monde. Pour y parvenir, elle kidnappe le docteur Drew (John Karyus) un scientifique spécialisé dans la robotique, le miniaturise et lui ordonne de construire une femme-robot grande comme Godzilla afin d’aller semer la panique parmi la population. Alors que la « Mecha Fembot » (Vlada Fox) commence à perpétrer ses méfaits dans les rues de Los Angeles, Frida décide de s’interposer et parvient à redevenir gigantesque. Mais parviendra-t-elle seule à lutter contre cette menace colossale ? Comment persuader Diedre de se joindre à elle ?

La folie des grandeurs

Bien sûr, l’effet de surprise s’est émoussé, d’autant que Leroy met la pédale douce sur les fausses pubs et les flashs d’infos qui ponctuaient le premier volet. Nous avons certes droit à une introduction parodique laissant imaginer que nous regardons l’épisode d’une série télévisée diffusée sur la chaîne « Sci-Fly Channel », ainsi qu’à un gag récurrent lié à un spot publicitaire pour une campagne de dons destinés à des chats blessés, mais c’est un peu léger. Tout comme ce clin d’œil à Invasion Los Angeles (la bagarre au cours de laquelle Frida veut forcer Dierdre à mettre des lunettes) et ces silhouettes de Superman et Iron Man disséminées dans le décor. Le spectateur se rattrape donc avec les nombreux combats joyeusement destructeurs, au cours desquels se déploie une large gamme de maquettes (véhicules, bâtiments, mobilier urbain) destinés à finir en bouillie, comme dans un Godzilla des années 70 ou dans un épisode d’Ultraman. Comme toujours, des prises de vues très suggestives au grand-angle s’attardent sur l’anatomie des belligérantes, tandis que Leroy décline le gigantisme féminin sous toutes ses formes. Car au-delà de nos combattantes émules de King Kong et du savant ramené à la taille d’une souris, nous avons droit à plusieurs séquences d’une gratuité parfaitement assumée, comme le cauchemar du général se promenant sur le corps d’une femme grande comme un building, ou l’agent artistique transformé en émule de L’Homme qui rétrécit face à deux actrices qui se lancent dans un crêpage de chignon musclé. Après un épilogue délirant situé sur la Lune – avec une version féminine de Nick Fury et une écrevisse géante ! -, le générique nous annonce un troisième épisode : Giantess Attack in Space.

 

© Gilles Penso

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LA DAME ROUGE TUA SEPT FOIS (1972)

Une mystérieuse tueuse vêtue de rouge commet une série d’assassinats selon le rituel maléfique d’une légende ancestrale…

LA DAMA ROSSA UCCIDE SETTE VOLTE

 

1972 – ITALIE / ALLEMAGNE

 

Réalisé par Emilio Miraglia

 

Avec Barbara Bouchet, Ugo Pagliai, Marina Malfatti, Marino Masé, Pia Giancaro, Sybil Dannong, Nino Korda, Fabrizio Moresco, Rudolf Schündler, Carla Mancini

 

THEMA TUEURS

La Dame rouge tua sept fois est le second giallo consécutif réalisé par Emilio Miraglia, dans la foulée de L’Appel de la chair. Plusieurs points communs relient ces deux œuvres tourmentées, à commencer par le prénom d’Evelyn, donné aux personnages féminins centraux. Tourné principalement à Würzburg et Weikersheim, en Allemagne, La Dame rouge tua sept fois est une coproduction italo-germanique. Le film ne connaîtra pourtant aucune sortie en salle outre-Rhin. Il faudra attendre la fin des années 1980 pour le voir émerger, directement en vidéo, sur le marché allemand. Le prologue et le générique du film nous décrivent les disputes incessantes de deux petites filles en rivalité permanente. La blonde Kathy et la brune Evelyne sont en effet des sœurs que tout oppose. Face à l’un de leurs sempiternels crêpages de chignon, leur grand-père les interrompt pour leur raconter l’ancienne légende qui hante le château bavarois familial, selon laquelle la dynastie Wildenbrück serait maudite depuis de nombreuses générations. En effet, tous les cent ans, une habitante du château serait possédée par celle que l’on nomme « la Dame rouge », et se verrait contrainte d’assassiner sept personnes pour prolonger la malédiction. Or sa dernière victime est censée être « la Dame noire », c’est-à-dire la propre sœur de la tueuse.

Passée cette entrée en matière, nous voici en 1972. Désormais adulte, Kathy Wildenbrück (Barbara Bouchet, la Monneypenny de Casino Royale) est devenue photographe de mode dans la prestigieuse agence Springe. Sa sœur Evelyne, elle, n’a plus donné aucun signe de vie depuis son exil aux Etats-Unis. Après que leur grand-père ait été retrouvé mort dans son château et que les termes de l’héritage aient été énoncés, la situation dégénère. Les proches de Kathy sont en effets assassinés les uns après les autres sous les coups de poignard d’une étrange silhouette vêtue de rouge. Quelques témoins ayant aperçu le meurtrier érigent un portrait-robot, ressemblant de façon troublante à Évelyne. Mais selon Kathy, qui semble cacher un lourd secret, c’est parfaitement impossible. La malédiction de « la Dame rouge » serait-elle en train de prendre corps ?

Une œuvre somme

Le scénario tortueux de Fabio Pittoru et Emilio Miraglia s’amuse à entremêler deux motifs récurrents du giallo et du cinéma d’épouvante gothique. Le premier est le testament qui provoque cupidité et jalousie. Le second est la légende ancestrale qui menace de ressurgir à l’époque contemporaine. A ces figures classiques se greffent d’autres sous-intrigues qui resserrent l’étau sur nos protagonistes et rallongent la liste des suspects, notamment le mystère lié à la disparition d’Evelyne et les histoires intimes au sein de l’agence Springe. L’appât du gain, le chantage, les manigances, les convoitises, la luxure, tout cet imbroglio complexe – auquel s’ajoutent un meurtre caché et un trafic de drogue – permet de laisser planer le doute sur la véritable nature de la meurtrière. S’agit-il d’un fantôme vengeur ou d’une tueuse beaucoup plus triviale ? Si le cadre de la haute couture évoque bien sûr Six femmes pour l’assassin – auquel La Dame rouge tua sept fois se réfère directement en laissant le meurtrier se cacher derrière un buisson pour guetter ses victimes -, Miraglia ne cherche pas nécessairement à marcher sur les traces de Mario Bava pour développer sa propre esthétique. Les prises de vues inventives (la caméra qui se faufile dans les interstices d’une sculpture pour révéler un lit et son occupant) et les scènes de cauchemar baroques (Barbara Bouchet enchaînée et poignardée par le spectre translucide de la dame en rouge) nous emmènent ailleurs, portés par la très belle bande originale de Bruno Nicolaï. Comme s’il était conscient de livrer une œuvre somme – qui servira d’inspiration directe à plusieurs films de Dario Argento -, le réalisateur interrompra sa carrière juste après ce film.

 

© Gilles Penso

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FEMALIEN : COSMIC CRUSH (2020)

Des extra-terrestres partent en mission pour étudier les effets d’une forme de vie tentaculaire qui réveille la libido de ceux qui l’approchent…

FEMALIEN : COSMIC CRUSH

 

2020 – USA

 

Réalisé par Lindsey Schmitz

 

Avec Kira Noir, Jillian Janson, Lilly Fairfield, Paris White, Tyler Borresch, Rachel Grubb, Lexy Marie, Denise Milfort, Luke A. Schmitz, Megg Bel

 

THEMA EXTRA-TERRESTRES I SAGA FEMALIEN I CHARLES BAND

Au milieu des années 90, le producteur Charles Band tente de surfer sur la vogue des films érotiques qui cartonnent dans les vidéoclubs, tout en conservant son attachement à l’horreur et à la science-fiction. Ainsi naît le label éphémère « Surrender Cinema », destiné à alimenter les rayonnages de séries B dont les postulats fantastiques sont des prétextes pour déshabiller ses actrices girondes et les exhiber dans toutes les positions possibles et imaginables. Femalien, l’un des premiers opus de cette collection, connaît un modeste succès en 1996, suffisant en tout cas pour motiver la mise en chantier d’une suite deux ans plus tard. Cette petite « saga » à base d’extra-terrestres voluptueuses et dénudées aurait pu s’arrêter là. Mais à l’aube des années 2020, Band décide de revisiter plusieurs de ses anciens films sous des formes nouvelles en créant la série « Deadly Ten ». Ainsi, après les petits monstres Weedjies ! (qui déclinent l’imagerie de Ghoulies) et la sorcière sanglante de Necropolis : Legion (remake libre du premier Necropolis), la franchise Femalien renaît de ses cendres avec Femalien : Cosmic Crush, dont la mise en scène est confiée à Lindsey Schmitz. Familier des productions Full Moon, celui-ci fut assistant caméraman sur Evil Bong High-5, Killjoy’s Psycho Circus, Evil Bong 666, Puppet Master : Axis Termination, Evil Bong 777 et Weedjies !.

Les premières minutes du film nous permettent d’apprécier que les ambitions artistiques ont bien évolué depuis les deux premiers Femalien, malgré un budget toujours aussi famélique. Nous faisons d’abord connaissance avec un équipage spatial constitué du professeur Quenthosz (Denise Milfort), de la pilote Pim (Paris White) et d’un jeune couple d’étudiants à la sexualité débridée (Jillian Janson et Tyler Borresch). Notre quatuor atterrit sur une planète inconnue et y découvre un temple antique dans lequel sévit une créature tentaculaire ancienne, le Thanarian Pleasure Pod (variante olé olé du Cthulhu de Lovecraft en quelque sorte). Dès qu’elle frôle un des appendices de la bête, la scientifique se met dans tous ses états, se déshabille et se laisse posséder. Ce méga-parasite, qui draine peu à peu l’essence vitale de ses victimes consentantes, pénètre ensuite dans le vaisseau et s’en prend à Pim. De l’autre côté de l’univers, le Haut Conseil du peuple Alterian, des entités extra-terrestres spécialisées dans les voyages stellaires et capable de se téléporter d’un endroit à l’autre, envoie deux de ses « collectrices » enquêter sur cette étrange affaire : Maxy Prime (Kira Noir) et Gab-E J’nx (Lilly Fairfield). Parviendront-elles à faire cesser les agissements de la créature ou succomberont-elles à son étreinte ?

Les tentacules t’acculent

Certes, les maquettes sollicitées pour montrer les vaisseaux spatiaux, les décors miniatures censés représenter les planètes et les images de synthèse spatiales manquent singulièrement de réalisme, mais la touche « rétro pop » qu’ils apportent au film reste très appréciable. Tout comme les maquillages spéciaux de Ryan Schaddelee (superviseur des effets de I Am Not a Serial Killer). Celui-ci soigne son travail du mieux qu’il peut, concoctant le fameux monstre tentaculaire qui affole les sens de tout le casting mais aussi le look félin de Gab-E J’nx (dont le joli minois s’affuble d’yeux luisants, d’oreilles pointues et de dents acérées) et celui – plutôt impressionnant – de l’homme-pieuvre Hugh Mungous. Le casting – quasi-exclusivement féminin à l’exception du fadasse Tyler Borresch – ne démérite pas, s’efforçant de jouer avec le plus de conviction possible. Le scénario lui-même se tient bien mieux que dans les Femalien précédents, qui se contentaient d’un récit filiforme pour enchaîner un maximum de scènes de sexe. Ici, on sent une tentative de raconter quelque chose d’un peu plus consistant, même si l’objectif final reste toujours le même : déshabiller toutes les actrices pour les montrer faire des galipettes. Le film existe d’ailleurs dans deux versions : le montage « sage » de 82 minutes, qui amorce les scènes de sexe et de déshabillage sans aller jusqu’au bout, et le « director’s cut » de 99 minutes qui se montre forcément moins frileux.

 

© Gilles Penso

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CONJURING : L’HEURE DU JUGEMENT (2025)

Annoncé comme la dernière enquête des époux Warren, ce quatrième volet laisse entrevoir la possibilité d’une évolution de la franchise…

CONJURING LAST RITES

 

2025 – USA

 

Réalisé par Michael Chaves

 

Avec Vera Farmiga, Patrick Wilson, Mia Tomlinson, Ben Hardy, Elliot Cowan, Beau Gadsdon, John Brotherton, Steve Coulter, Madison Lawlor, Orion Smith, Kate Fahy

 

THEMA DIABLE ET DÉMONS I FANTÔMES I SAGA CONJURING

Quatrième incursion dans l’univers bâti autour d’Ed et Lorraine Warren et neuvième opus de la saga Conjuring, Conjuring : l’heure du jugement affiche clairement une volonté de clore un cycle, tout en laissant entrevoir d’autres possibles prolongements. Dans une industrie où les franchises d’horreur finissent souvent par s’étouffer sous leurs propres artifices, l’annonce d’une « dernière enquête » pour le couple vedette ne pouvait qu’attiser la curiosité. Dès l’ouverture, le récit met en avant une idée centrale : l’usure des Warren, qui ne sont plus seulement des enquêteurs confrontés aux forces occultes mais aussi un couple vieilli, entouré de leur fille Judy et de son fiancé Tony. Cet angle familial change la dynamique habituelle. Là où les épisodes précédents plaçaient le duo au cœur du dispositif, L’Heure du jugement fait entrer Judy dans la lumière. Longtemps réduite à une silhouette périphérique, la jeune femme devient ici un personnage moteur. Ce choix scénaristique permet d’aborder la thématique de passation, comme si la saga testait sa capacité à survivre sans ses figures tutélaires. Le script s’inspire de ce que les journaux américains des années 1980 appelèrent « la hantise des Smurl ». Pendant plus d’une décennie, une famille de Pennsylvanie affirma avoir été harcelée par une entité démoniaque. L’affaire attira les prêtres, les psychologues et les démonologues de tous poils.

Conjuring : l’heure du jugement reprend ces éléments réels mais les reconfigure pour en faire une ultime épreuve familiale. Le surnaturel est donc traité à la fois comme une menace extérieure et comme un révélateur de fragilités intimes. C’est là l’un des paris les plus intéressants de ce quatrième opus, qui tente de conjuguer la mécanique du film de possession avec un drame domestique. Sur le plan esthétique, Michael Chaves reste fidèle aux codes qui ont fait le succès de la saga en continuant – comme il le fit dans l’épisode précédent – d’emboîter les pas de James Wan. Mais c’est moins dans les effets de terreur « classiques » ou attendus – les figures fantomatiques et grimaçantes qui surgissent çà et là pour faire sursauter les spectateurs – qu’il fait mouche que lorsqu’il laisse le hors-champ faire son travail. Quand la fille Warren (Mia Tomlinson), seule dans une cabine d’essayage tapissée de miroirs, se perd dans un labyrinthe de reflets et se retrouve piégée dans une sorte de cauchemar mental (une séquence qui semble payer son tribut à Mario Bava et Dario Argento), ou quand le père Gordon (Steve Coulter) perd pied dans un décor pourtant ordinaire qui semble suinter de menaces diaboliques impalpables, Michael Chaves marque des points parce qu’il titille les peurs primaires sans en faire des tonnes. Même chose dans cette scène de décorticage d’un enregistrement vidéo qui, certes, dure beaucoup trop longtemps, mais sait éveiller nos sens en évoquant les investigations du Blow Out de Brian de Palma. Ce sont ces moments suspendus qui rappellent la force originelle du premier Conjuring.

Transition générationnelle

Le casting, lui, confirme sa solidité. Patrick Wilson et Vera Farmiga incarnent encore une fois un couple crédible et solide, sans perdre une once de leur charisme. Wilson impose une présence plus fragile, marquée par les années et par un cœur malade, tandis que Farmiga poursuit son travail d’identification avec la véritable Lorraine Warren, jusque dans les détails vestimentaires. Face à eux, Mia Tomlinson apporte un mélange de fraîcheur et de gravité qui donne au personnage de Judy une dimension nouvelle, bien éloignée du rôle secondaire qu’elle tenait auparavant (sous les traits des actrices Sterling Jerins dans Conjuring et Conjuring 2 et Grace McKenna dans Annabelle : la maison du mal). À ses côtés, le petit-ami campé par Ben Hardy complète efficacement le duo, même si son personnage reste plus fonctionnel. La vraie question posée par L’Heure du Jugement est celle de l’avenir. Le film est présenté comme la conclusion des aventures des Warren, mais il prépare aussi, en filigrane, une possible continuité. On peut y voir une tentative de prolonger la franchise sans trahir son ADN, en opérant une transition générationnelle. Il s’agit donc moins de fermer la porte que de tester la résistance de l’univers à de nouveaux visages.

 

© Benjamin Braddock

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GOOBERS (1997)

Engagé pour participer à une émission pour enfants, un jeune garçon découvre que les petits monstres qui en tiennent la vedette sont réels…

MYSTERY MONSTERS / GOOBERS !

 

1997 – USA

 

Réalisé par Charles Band

 

Avec Ashley Tesoro, Tim Redwine, Daniel Hartley, Michael Dennis, Caroline Ambrose, Sam Zeller, J.W. Perra, Tom Thomson, Eileen Wesson, Alli McGuire

 

THEMA PETITS MONSTRES I SAGA CHARLES BAND

En 1993, Charles Band lance le label Moonbeam pour élargir le champ des films qu’il produit à des spectateurs plus jeunes. Ainsi naissent quelques petits contes sympathiques comme Prehysteria, Le Château du petit dragon, Jack et le haricot magique, La Boutique fantastique ou L’Île magique. Quelques années plus tard, après la fin d’un accord juteux avec Paramount qui assurait la distribution de ces titres en vidéo, l’infatigable producteur crée un autre label, Pulse Pounders, qui s’applique à d’autres longs-métrages conçus pour un public familial. Les plus attentifs remarqueront que Pulse Pounders est déjà le titre d’un film à sketches produit en 1988 et jamais achevé, mais il n’y a aucun lien avec la nouvelle collection. En réutilisant ce titre, Band s’adonne simplement à l’une de ses activités préférées : le recyclage. Pour inaugurer ce label, place à Mystery Monsters, un film de monstres inoffensif qui sort une première fois en 1997 dans un format de 53 minutes. Band le réexploitera plus tard dans sa version intégrale de 80 minutes et lui donnera une seconde jeunesse avec un titre flambant neuf : Goobers. Ce nouveau nom ne veut pas dire grand-chose mais semble surtout exister pour évoquer les Gremlins, les Ghoulies et même les Goonies.

Tommy (Tim Redwine), 12 ans, vient de rejoindre le casting de l’émission pour enfants très populaire « Cap’n Mike’s Goobers Show », dans laquelle l’animateur Mike (Michael Dennis) partage la vedette avec trois créatures rigolotes baptisées les Goobers : le snob Squidgy, le glouton Blop et la grotesque Esmerelda. Tommy est impatient de découvrir comment l’équipe des effets spéciaux fait fonctionner les monstres. Mais Mike est catégorique, précisant qu’il y a trois règles à respecter s’il veut rester sur cette émission : ne jamais poser de question sur les Goobers, ne jamais les toucher et ne jamais approcher le vestiaire de Mike. Tommy accepte à contrecœur et doit aussi subir les humeurs de Jimmy (Daniel Hartley), un autre garçon qui participe au show et qui se prend pour une superstar. Heureusement que son autre partenaire, Susie (Ashley Tesoro), est plus sympathique. Poussé par sa curiosité, il découvre qu’il n’y a pas d’effets spéciaux dans l’émission. Les Goobers sont réels et la propriétaire originale de ces petits monstres, une redoutable souveraine venue d’un monde parallèle, débarque pour récupérer ses biens et se venger du capitaine Mike qui les lui a volés.

Puppet Show

Plutôt bien joué, mené sur un rythme relativement trépidant, Goobers collecte quelques saynètes savoureuses (Tommy qui essaie de se confier à son père, lequel est totalement obnubilé par sa collection de cartes de baseball) et dresse en filigrane une petite satire amusante du monde des programmes télévisés pour la jeunesse et des enfants stars. Les personnages de la reine Mara (la séduisante Caroline Ambrose) et de son serviteur Groon (l’impressionnant Sam Zeller) véhiculent eux-mêmes leur lot de gags, le second s’efforçant d’expliquer à la première les us et coutumes des humains en utilisant un langage primitif. « J’aime le terme producteur exécutif » finit par dire Mara en se présentant sous l’identité d’une riche investisseuse. « Ils produisent et ils exécutent ! » Sa manière de signer un contrat vaut aussi le détour. « Par ce sang royal, le sang du serpent, j’appose ici ma signature et mon serment » dit-elle d’un ton solennel. « Que je sois brûlée et déchirée si jamais je venais à rompre ce serment, jusqu’au dernier jour et jusqu’à ce que la dernière étoile se soit éteinte. » Le gros point faible du film – et c’est tout de même rédhibitoire -, ce sont ses monstres vedettes. Car ces marionnettes au design évasif animées par l’équipe de Mark Rappaport ressemblent à des petits jouets en plastique vaguement agités devant la caméra. Squidgy est certes un peu plus mobile, puisque les gros plans utilisent un acteur derrière un masque. Mais on ne peut pas dire que ces « Goobers » soient très expressifs, ni particulièrement attrayants. Ils ne réapparaîtront d’ailleurs dans aucun autre film produit par Charles Band, pourtant habituellement enclin à faire fructifier ses concepts.

 

© Gilles Penso

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BRING ON THE DAMNED (2024)

Produit par Troma, ce film à sketches délirant met en scène des exorcistes, des serial killers, des Martiens et des enquêtrices habillés en tigres !

BRING ON THE DAMNED

 

2024 – USA

 

Réalisé par Brandon Bassham

 

Avec Sydney Hirsch, Zac Amico, Ian Fidance, Johnny Ferri, Marcus Bishop-Wright, Alan Ceppos, SaraKate Coyne, Giuseppe De Caro, Dominick Denaro, Patrick Foy

 

THEMA DIABLE ET DÉMONS I TUEURS I EXTRA-TERRESTRES

Originaire de la scène comique newyorkaise, Brandon Bassham se fait remarquer grâce à deux films d’horreur décalés réalisés avec des budgets ridicules, Feartown U.S.A. et The Slashering. En 2015, la compagnie Troma, spécialisée dans ce genre de production foutraque, acquiert les droits de distribution de ces longs-métrages bricolés avec les moyens du bord, marquant le début d’une collaboration étroite entre Bassham et les créateurs du Toxic Avenger. Notre homme co-écrit ainsi avec Lloyd Kaufman Shakespeare’s Shitstorm et se lance quelques années plus tard dans un film à sketches plus ambitieux : Bring on the Damned. Son idée consiste au départ à solliciter plusieurs scénaristes et réalisateurs pour chapeauter l’ensemble. Mais face aux scripts qu’on lui soumet (tous très proches les uns des autres), il change son fusil d’épaule. C’est lui qui prendra en charge l’ensemble du projet en adoptant pour chaque segment un style radicalement différent, tant dans les sujets que dans la mise en forme. En attendant de pouvoir réunir le financement nécessaire (20 000 dollars, donc vraiment pas grand-chose), il tourne les sketches au fur et à mesure, sur une période qui s’étend entre 2022 et 2025. Et c’est bien sûr Troma qui assure la coproduction et la distribution, Lloyd Kaufman se fendant même d’une apparition éclair dans le film.

Dans « Blasphem », le premier chapitre, une psychiatre (Steph Shober) est chargée d’examiner le cas d’une jeune femme (Amanda Flowers) souffrant de violents troubles du comportement. Selon l’église, qui la croit habitée par le démon, il faut l’exorciser. Détournant les codes du « found footage », ce faux reportage (avec image vidéo abimée et caméra portée) est plus drôle qu’effrayant, malgré les hurlements hystériques à répétition qui saturent la bande son, les gros plans grimaçants de la possédée et les morts sanglantes. Parmi celles-ci, on note un morceau d’anthologie : un curé qui s’arrache le visage devant les caméras ! Quelques éléments improbables alimentent également cette entrée en matière prometteuse, comme l’exorciste qui utilise un poing américain et une batte de base-ball ornés tous deux d’un crucifix pour chasser le démon. Le second chapitre, « Obsession », se tient beaucoup moins. Filmée en noir et blanc, dans une ambiance rétro qu’accentue une musique légère à l’accordéon, cette relecture loufoque de Jules et Jim raconte l’amitié naissante entre deux hommes ayant assassiné leur femme respective. Maladroit, hésitant entre le slapstick et l’horreur (avec une allusion au visage de chair de Massacre à la tronçonneuse), c’est sans conteste le plus faible des sketches de Bring on the Damned.

Disco inferno

Brandon Bassham se rattrape avec « Perversion », qui s’attache à une jeune femme introvertie incapable de connaître un orgasme… sauf si elle commet de sanglants homicides. Voici donc notre serial killeuse (Sydney Hirsch) qui écume la boîte disco du coin pour y cueillir ses victimes. Ce segment – le plus long des cinq – s’agrémente de plusieurs idées de mise en scène inventives, comme un quadruple split screen coloré qui montre en parallèle le destin funeste de quatre victimes masculines de la tueuse. Johnny Ferri, qui joue un émule de John Travolta dans ce sketch, apparaît également dans le suivant, « Nihilism », qui prend quant à lui les atours d’un film noir des années 40 (même si les tenues et les accessoires ne rendent guère justice à la reconstitution d’époque). Tous les clichés d’usage sont de mise (détective privé, gangsters, voix off désabusée, femmes fatales), si ce n’est que nous sommes dans un monde parallèle où les Martiens (des nuages flottants et luminescents) se sont intégrés à la population. D’où quelques moments « autres » qui ne sont pas sans évoquer les univers de David Lynch. Mais c’est dans le dernier chapitre, « Sadism », que le délire bat totalement son plein. Au sein de ce mixage improbable entre Seven et un dessin animé de Hanna et Barbera, nous découvrons que trois chanteuses déguisées en tigres, « Tara and the Tiger Babes », assistées d’un sosie du Fred de Scooby-Doo, sont spécialisées dans les affaires de crimes sexuels violents et tentent d’arrêter un assassin connu sous le surnom de « boucher des fesses » ! Voilà qui clôt en beauté cette anthologie certes inégale, Sans doute trop longue et ouvertement fauchée, mais bourrée d’idées folles et d’inventivité.

 

© Gilles Penso

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OPÉRATION DIABOLIQUE (1966)

Un homme d’âge mûr, à la vie comblée mais sans saveur, accepte la proposition d’une société secrète qui lui propose de tout effacer et de recommencer…

SECONDS

 

1966 – USA

 

Réalisé par John Frankenheimer

 

Avec Rock Hudson, Salome Jens, John Randolph, Will Geer, Jeff Corey, Richard Anderson, Murray Hamilton, Karl Swenson

 

THEMA MÉDECINE EN FOLIE

Dans les méandres du cinéma américain des années 60, certains films résistent aux catégories et reviennent hanter les spectateurs longtemps après leur sortie. Opération diabolique appartient à cette famille rare d’œuvres inclassables et dérangeantes. Ce drame de science-fiction psychologique, passé relativement inaperçu lors de sa sortie, s’est lentement imposé comme une pièce maîtresse du cinéma paranoïaque post-maccarthyste, où le corps, l’identité et l’illusion de la liberté deviennent des terrains de manipulation absolue. Le récit suit Arthur Hamilton (Rock Hudson), un homme d’âge mûr, bien installé dans une existence morne et insatisfaisante malgré une réussite sociale apparente. Un jour, il reçoit un appel mystérieux d’un vieil ami qu’il croyait mort. Celui-ci lui propose une seconde vie qui s’annonce comme un renouveau complet. Intrigué, Arthur accepte de le suivre et entre dans l’engrenage d’une organisation secrète qui, moyennant la signature d’un contrat sans retour, propose à ses clients de simuler leur mort, de changer de visage et d’identité grâce à la chirurgie, puis de renaître ailleurs sous une autre forme. Arthur devient alors Tony Wilson, jeune artiste séduisant vivant dans une maison californienne de rêve. Une renaissance ? Plutôt une descente aux enfers…

John Frankenheimer, dont la filmographie regorge de thrillers politiques mâtinés de science-fiction (Un crime dans la tête, Sept jours en mai), poursuit ici son exploration de l’aliénation contemporaine en s’attaquant frontalement au mythe américain de la réinvention. À l’instar d’un épisode hypertrophié de La Quatrième dimension, le film déploie son ambiance oppressante avec une virtuosité glaçante. La caméra du chef opérateur James Wong Howe transforme chaque plan en un piège visuel. Objectifs déformants, plongées vertigineuses, images tremblées ou embarquées sur le corps des personnages, tout contribue à faire vaciller les repères, comme si la réalité se disloquait au fil des minutes. Mais Opération diabolique est bien plus qu’un exercice de style paranoïaque. C’est aussi une œuvre profondément métaphysique qui questionne le prix de nos désirs. Qui sommes-nous vraiment, une fois libérés des contraintes sociales et familiales ? Peut-on recommencer sa vie en supprimant son passé ? Le protagoniste campé par Rock Hudson s’apprête à passer d’une prison existentielle à une autre, plus belle mais tout aussi rigide. Malgré la jeunesse retrouvée et les plaisirs soudain accessibles, le vide subsiste. La nouvelle vie qu’on lui vend n’est qu’un décor de cinéma, un fantasme sans âme.

Seconde (mal)chance

C’est d’ailleurs là l’ironie cruelle que dépeint film : ce rêve américain de la seconde chance, tant vanté, s’effondre dès lors qu’il est consommé. Dans une séquence hallucinatoire – une bacchanale où le vin coule à flots tandis que les corps s’entrechoquent dans une cuve géante – le film verse dans le cauchemar dionysiaque, révélant les pulsions enfouies que le système tente de canaliser sous des atours séduisants. Mais même cet abandon hédoniste ne parvient pas à combler le manque. L’identité de Tony Wilson se craquelle, les failles d’Arthur Hamilton remontent à la surface. Et c’est précisément en trahissant le pacte – autrement dit en avouant à des proches son ancienne vie – qu’il condamne son « nouveau moi » à l’échec. Nous ne sommes pas loin des cauchemars kafkaïens, où les personnages se retrouvent piégés dans des structures opaques, dominées par des règles qu’ils ne comprennent pas. À travers Opération diabolique, Frankenheimer capte aussi les tensions souterraines d’une Amérique en pleine mutation, marquée par la guerre du Viêt Nam, les mouvements civiques et les désillusions de l’ère post-Eisenhower. À sa sortie, le film est un échec commercial. Sans doute trop étrange, trop pessimiste et trop en avance sur son temps. Aujourd’hui, il est redécouvert comme un chef-d’œuvre incontournable, une œuvre charnière entre la science-fiction introspective des années 60 et les cauchemars psychologiques des années 70.

 

© Gilles Penso

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HYSTERICAL (1982)

Dans cette parodie bancale et mal-fichue, le fantôme d’un gardien de phare surgit cent ans après sa mort pour transformer ceux qu’il croise en zombies…

HYSTERICAL

 

1982 – USA

 

Réalisé par Chris Bearde

 

Avec Richard Kiel, Bill Hudson, Mark Hudson, Brett Hudson, Cindy Pickett, Julie Newmar, Robert Donner, Murray Hamilton, Clint Walker, Franklyn Ajaye, Bud Cort

 

THEMA FANTÔMES I ZOMBIES

Au début des années 1980, alors que le cinéma parodique bat son plein dans le sillage du succès de Y a-t-il un pilote dans l’avion ?, trois frères musiciens et comédiens – Mark, Brett et Bill Hudson, alias les Hudson Brothers – décident de se lancer dans leur propre pastiche cinématographique. Originaires de Portland et stars d’une série télé pour enfants dans les années 70 (The Hudson Brothers Razzle Dazzle Show), ils mêlent depuis toujours humour burlesque, pop culture et autodérision. Le trio veut désormais parodier le cinéma d’horreur gothique dans un long métrage où fantômes, zombies et savants fous se télescoperaient sur un tempo infernal. Pour mettre en scène ce joyeux chaos, ils font appel à Chris Bearde, scénariste de renom ayant œuvré sur Rowan & Martin’s Laugh-In et co-créé The Gong Show. Bearde, habitué au rythme frénétique des émissions de variétés et au nonsense télévisuel, partage leurs goûts. Mais le passage du petit au grand écran ne se fait pas sans heurt. Malgré un casting de seconds rôles solides – Richard Kiel (L’Espion qui m’aimait), Julie Newmar (Batman), Charlie Callas (Peter et Elliot) -, le film passe relativement inaperçu à sa sortie en 1983, éclipsé par les comédies plus structurées de l’époque (comme Y’a-t-il enfin un pilote dans l’avion ?, sorti la même année). Il devient pourtant culte auprès des amateurs de nanars assumés et de comédie slapstick déjantée, culte alimenté par la relative difficulté pour pouvoir revisionner cette pellicule tombée aux oubliettes.

Le 31 octobre 1882, à Cape Hellview, dans l’Oregon, le capitaine Howdy (Richard Kiel), gardien de phare adultère, succombe en même temps que son épouse et que sa maîtresse Venetia (Julie Newmar) après une crise de jalousie spectaculaire aux répercussions catastrophiques. Un siècle plus tard, à New York, Frederic Lansing (Bill Hudson), auréolé par le succès de son livre polisson Bouche à bouche, rêve d’une reconnaissance littéraire plus prestigieuse. Pour s’isoler et chercher l’inspiration, l’écrivain décide de faire ses bagages et de partir dans l’Oregon où il prend comme nom de plume Casper Brown. Sur place, il fait la rencontre de la charmante Kate (Cindy Pickett) et s’installe dans le phare maudit. Mais les vieilles légendes s’apprêtent à refaire leur apparition. Stimulé par la présence du bel écrivain, le fantôme de Venetia décide de se servir de lui comme hôte pour l’esprit de son défunt amant. Le spectre de Howdy réapparaît bientôt et commence à tuer les habitants de la bourgade, qui se muent aussitôt en zombies blafards. Deux scientifiques maladroits (Mark et Brett Hudson) sont alors appelés à la rescousse pour aider à résoudre cette affaire.

Fantômes en fête

L’intention d’Hysterical est louable et la volonté de bien faire transparaît derrière ce scénario abracadabrant, mais aucun gag ne fait vraiment mouche. Poussifs, mal amenés, tellement insistants que tout effet comique s’évapore aussitôt, ils nous embarrassent plus qu’ils ne nous amusent. Les voix off censément humoristiques (qui traduisent les pensées des personnages) tombent elles aussi à plat, à cause d’un tempo mal géré et d’une écriture franchement pataude. Les traducteurs français en rajoutent, à grands coups de jeux de mots approximatifs et de contrepèteries : « Quelle braguette magique a réveillé la belle au phare dormant ? », ou encore « Je suis le speaker qui ne se laisse pas brouiller l’écoute ! ». En roue libre, les adaptateurs prennent même des initiatives bizarres, comme le remplacement de la phrase récurrente que répètent tous les zombies du film (« what difference does it make ? », autrement dit « qu’est-ce que ça peut bien faire ? ») par un incompréhensible « à la limite, je t’emmerde ». Les nombreux clins d’œil cinéphiliques du film sont insérés « au forceps » dans le récit, du chauffeur de taxi punk hystérique échappé de Taxi Driver au capitaine qui émerge des eaux aux accents d’une musique imitant celle des Dents de la mer (avec même la convocation de Murray Hamilton dans le rôle du maire de la bourgade), en passant par deux émules d’Indiana Jones qui rivalisent de bêtises et de maladresses, Dracula qui sort de son tombeau et se transforme en chauve-souris, l’écrivain qui se prend pour le Jack Nicholson de Shining ou la séance de possession façon L’Exorciste. Tout ça ne vole pas très haut, malgré quelques idées audacieuses (la grande séquence de comédie musicale dans la fête foraine qui annonce le Thriller de Michael Jackson avec quelques mois d’avance), ce qui explique l’oubli dans lequel est tombé cet anecdotique Hysterical.

 

© Gilles Penso

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