SCANNER COP 2 (1995)

Le cinquième opus de la saga initiée par David Cronenberg s’attache aux méfaits ultra-gore d’un Scanner psychopathe…

SCANNER COP 2 : VOLKIN’S REVENGE / SCANNERS : THE SHOWDOWN

 

1995 – CANADA

 

Réalisé par Steve Barnett

 

Avec Daniel Quinn, Patrick Kilpatrick, Khrystyne Haje, Stephen Mendel, Robert Forster, Brenda Swanson, Jerry Potter, Jewel Shepard, Tony Fasce, Terrie Snell

 

THEMA POUVOIRS PARANORMAUX I SAGA SCANNERS

Contrairement à tous les épisodes précédents de la franchise Scanners, qui s’appréhendent comme des films autonomes ne partageant qu’un thème commun, cet ultime opus reprend des personnages que nous connaissons déjà, puisqu’il se positionne comme une suite directe de Scanner Cop. Sam Staziak, le policier aux pouvoir parapsychiques incarné par Daniel Quinn (avec ses faux airs de Brad Dourif), est donc de retour, tandis qu’un échange de dialogues se réfère directement aux événements survenus dans le premier Scanners. Pierre David continue de produire, mais il cède cette fois-ci la mise en scène à Steve Barnett. Ce dernier s’était distingué en supervisant la version américaine du Déclic et en réalisant le film de science-fiction Mindwarp avec Bruce Campbell. Il allait plus tard se spécialiser dans la production exécutive, la direction de production et la post-production de gros films de studios tels que Spy Kids, Avatar, Miss Peregrine ou Alita Battle Angel. Pour offrir à notre héros un adversaire de poids, Patrick Kilpatrick (l’un des redoutables enseignants robots de Class of 1999) entre dans la peau de Karl Volkin, un Scanner surpuissant qui vide les autres Scanners de leur énergie vitale, accroissant sans cesse sa puissance et laissant derrière lui des cadavres desséchés. Nous voici donc face à la même mécanique narrative que Highlander et ses suites.

Le scénario nous apprend que Volkin s’est évadé d’un institut psychiatrique avec la ferme intention de se venger de Staziak, qui l’a arrêté par le passé au cours d’une opération ayant provoqué la mort de son frère. Bien décidé à mettre la main sur ce psychopathe redoutable, notre « super flic » est aidé par Carrie Goodart (Khrystyne Haje), qui travaille au Trans-Neural Center de Los Angeles, un centre d’aide pour les Scanners. En début de métrage, Staziak se révèle plus puissant que Volkin, mais ce dernier gagne en capacités au fur et à mesure qu’il « siphonne » ses congénères et finit par devenir quasiment invincible. L’enquête s’annonce donc complexe et particulièrement dangereuse, le supérieur de Staziak (incarné par le toujours très charismatique Robert Forster) lui laissant la bride sur le cou pour mener cette mission comme il l’entend… Scanner Cop 2 est le film de tous les excès. Ses nombreuses péripéties nous permettent ainsi de découvrir les nouveaux pouvoirs surprenants du policier télépathe, comme manipuler des malfrats à travers leurs écouteurs (ce qui provoque la décomposition de leurs oreilles), désamorcer une bombe à distance, faire dessiner un portrait-robot à une femme dans le coma, localiser un appel téléphonique ou même ranimer des cadavres !

Le vampire télépathe

Mais ce cinquième opus se distingue surtout par ses débordements gore dépassant en outrance tous ceux des films précédents. Le ton est donné lorsque Volkin s’en prend à sa première cible dans une ruelle. Le corps du malheureux se boursoufle puis se déchire et dégouline en fumant avant de se décharner en se recouvrant d’horribles brûlures. D’autres scènes du même acabit ponctuent régulièrement le film, Volkin variant parfois les plaisirs en aspirant la vie des autres Scanners via un baiser mortel, comme Matilda May dans Lifeforce. D’où cette phrase de Sam résumant la situation lors d’un échange avec Carrie : « Volkin détourne l’énergie vitale de ses victimes dans le but de se ressourcer, comme un vampire. » On note aussi cette vision horriblement surréaliste de deux corps fondus qui fusionnent en fumant, ou ce visage qui se déchire en deux (repris sur certains posters du film). Sollicité pour les maquillages du film, John Carl Buechler (Re-Animator, From Beyond) s’en donne à cœur joie. De fait, même si l’histoire de Scanner Cop 2 n’a rien de très captivant, ses débordements horrifiques combleront tous les amateurs d’effets spéciaux cosmétiques à l’ancienne.

 

© Gilles Penso

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LE TRÉSOR DE LA MONTAGNE SACRÉE (1979)

Christopher Lee incarne un calife maléfique dans cette aventure des Mille et une nuits sous influence du Voleur de Bagdad

ARABIAN ADVENTURE

 1979 – GB

 

Réalisé par Kevin Connor

 

Avec Christopher Lee, Milo O’Shea, Oliver Tobias, Emma Samms, Puneet Sira, John Wyman, John Ratzenberger, Capucine, Mickey Rooney, Peter Cushing

 

THEMA MILLE ET UNE NUITS

La collaboration entre le réalisateur Kevin Connor et le producteur John Dark aura été particulièrement fructueuse dans les années 70, permettant au grand public de découvrir toute une série de films d’aventures fantastiques gorgés de créatures gigantesques et de personnages pittoresques. Ainsi, après Le Sixième continent, Centre Terre : septième continent et Le Continent oublié, conçus pour la compagnie Amicus, Connor et Dark poursuivent ce cycle riche en monstres et merveilles avec Les Sept cités d’Atlantis et Le Trésor de la montagne sacrée pour le compte de EMI Films. Écrit par Brian Hayles, qui fut un auteur régulier de la série Doctor Who entre 1966 et 1974, le scénario du Trésor de la montagne sacrée cherche à retrouver la magie des films des 1001 nuits tels qu’ils furent popularisés dans les longs-métrages des frères Korda et de Ray Harryhausen. Contacté pour y jouer le grand méchant, Christopher Lee accepte sans hésitation. « Je n’ai pas pu résister », avoue-t-il. « C’est un très bon scénario de Brian Hayles, qui s’inscrit dans le genre du véritable conte de fées, où la romance et la beauté côtoient le genre de méchanceté et de violence qui, depuis des temps immémoriaux, fait délicieusement frissonner les enfants de tous les pays. » (1)

Lee entre donc avec enthousiasme dans la peau du tyrannique calife Al-Quazar, qui a emprisonné son âme dans un miroir et ne rêve que de puissance absolue, comme tout bon vilain qui se respecte. Mais pour obtenir les pleins pouvoirs qu’il convoite, il lui faut s’emparer d’une rose magique cachée dans l’île enchantée d’El-Il et uniquement accessible à un être au cœur pur. Il enrôle donc l’intrépide Hasan (Oliver Tobias) – un imposteur qui se fait passer pour un prince – et lui promet la main de Zuleira (Emma Samms), sa propre fille, en échange de la précieuse relique. Accompagné du jeune voleur Majeed (Puneet Sira) et de son singe de compagnie, Hasan part aussitôt à l’aventure. Après avoir bravé un génie maléfique jailli d’une bouteille, des dragons mécaniques crachant des torrents de feu et des monstres tapis dans les marécages, la Rose d’El-Il est enfin à leur portée. Mais Hasan découvre que son commanditaire n’a jamais eu l’intention de tenir sa promesse…

Star Wars à la sauce orientale

Très fortement inspiré par Le Voleur de Bagdad des frères Korda, Le Trésor de la montagne sacrée en reprend les personnages principaux dont il conserve les attributs et les apparences (finalement, seuls les noms changent). Le vil Al-Quazar remplace donc Jaffar, Hasan et Zuleira se substituent au prince Ahmad et à sa princesse, et le jeune voleur Majeed s’érige en émule (plutôt sympathique et convainquant) du Abu que campait Sabu en 1940. Le scénario ne réserve donc que peu de surprises, dans la mesure où nous sommes en terrain connu. La nouveauté est à chercher du côté d’une certaine autodérision (Mickey Rooney qui astique un faux dragon en bougonnant, le génie de la lampe qui n’a rien de particulièrement serviable) et de la forte influence de La Guerre des étoiles. Car le succès du space opera de George Lucas n’a pas laissé indifférent Kevin Connor, qui s’appuie sur des effets visuels audacieux (à défaut d’être toujours très réussis) pour concocter une poursuite de tapis volants filmée à la manière d’une bataille de vaisseaux spatiaux, aux accents d’une musique pleine d’emphase composée par Ken Thorne. Certes, Le Trésor de la montagne sacré n’arrive pas à la cheville de son modèle Le Voleur de Bagdad ou du 7ème voyage de Sinbad, mais le jeune public de l’époque y trouva maintes sources de réjouissances. Aujourd’hui, bien sûr, le film de Connor a pris un inévitable coup de vieux.

 

(1) Extrait d’une interview parue dans Starbust en janvier 1979

 

© Gilles Penso

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CREATION OF THE GODS 2 : DEMON FORCE (2025)

Un second volet encore plus spectaculaire que le premier, gorgé de rythme, d’action, de batailles grandioses et de créatures monstrueuses…

FENG CHEN 2: ZHAN HUO XI QI

2025 – CHINE

Réalisé par Wuershan

Avec Huang Bo, Yosh Yu, Nashi, Chen Muchi, Xuejian Li, Kris Philips, Naran, Hsing-Kuo Wu, Swanson Han, Yafan Wu, Yu Xia, Kun Chen

THEMA HEROIC FANTASY I SORCELLERIE ET MAGIE

 

Après Creation of the Gods I : Kingdom of the Storms, le second volet de la trilogie fantastique de Wuershan s’avère encore plus maîtrisé et fluide que le premier opus au niveau du rythme et de l’action ! La narration est entraînée par la dynamique de la réalisation, tandis que nous sommes déjà familiarisés avec l’univers et les personnages. Les crimes du prince tyrannique King Yin Shou (Fei Xiang), responsable de la déchéance du royaume des Shang, vont engendrer la chute des déités qui protégeaient la dynastie ancestrale. Sa concubine, possédée par l’envoutante femme renard Su Daji (Naran), prête à sauver la vie de son protégé au péril de la sienne, continue de répondre aux désirs de puissance de son royal complice. Creation of the Gods 2 : Demon Force affirme son statut de grande fresque d’heroic-fantasy et d’épopée fantastique pour marquer résolument l’Histoire du cinéma asiatique et s’exporter à l’international sur le marché des blockbusters américains.

On y retrouve tous les codes classiques qui font le merveilleux et le romantisme de films comme Excalibur de John Boorman ou Ladyhawke de Richard Donner, les intrigues par-delà la vie et la mort de Conan, ou celles des Histoires de fantômes chinois produites par Tsui Hark : magie, mythologie, légendes, sur fond de véracités historiques concernant la succession des dynasties, des royaumes et des empires. La philosophie confucéenne n’est pas exclue avec l’importance de la loyauté familiale et du respect hiérarchique, ainsi que toutes les références inspirantes et éblouissantes aux films de sabre de l’âge d’or, et à des œuvres plus personnelles comme Les Cendres du temps de Wong Kar Waï, ou encore Tigre et Dragon d’Ang Lee. On assiste donc à un florilège de citations bien choisies qui enchanteront les amateurs du genre, ainsi qu’à des scènes de batailles grandioses, et à un art de la démesure destiné à nous éblouir, et qui fait mouche, à grands renforts de créatures géantes et monstrueuses.

Une des plus grandes fresques du cinéma fantastique

Ce spectacle, qui existe également en 4DX, et que l’on compare à la trilogie du Seigneur des anneaux de Peter Jackson, bénéficie d’un succès phénoménal au box-office. S’il est vrai que la représentation d’un des héros du film, ressuscité sous la forme d’un personnage tricéphale (bleu), n’est pas la trouvaille la plus enthousiasmante de l’histoire, on ne boudera pas notre plaisir pour autant, et on retiendra plutôt avec bonheur les performances physiques et les ballets chorégraphiques dignes des plus grandes scènes de kung fu du cinéma hongkongais. Notons en particulier la prestation, la beauté et le talent des acteurs Yosh Yu et Nashi (originaire de Mongolie intérieure comme Wuershan), qui forcent l’admiration dans les rôles respectifs de Ji Fa, et de Deng Chanyu, la farouche guerrière Shang. Peut-on apprécier le film sans avoir vu le premier volet ? Assurément. Autant il était difficile de suivre tous les enjeux du premier film avec son nombre toujours croissant de personnages, autant ici il est plus facile de s’immerger dans cette bataille à mort pour la reconquête par les humains d’un paradis perdu. Ce film-événement réunit tout ce que l’on peut aimer dans le wu xia pian, le merveilleux et la fantasy. Il réjouira les amateurs du genre, mais aussi le grand public et les familles en quête d’un divertissement spectaculaire de qualité.  

© Quélou Parente

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PRESENCE (2024)

Une famille dysfonctionnelle s’installe dans une nouvelle maison en espérant soigner ses fêlures. Mais quelque chose les observe…

PRESENCE

2024 – USA

Réalisé par Steven Soderbergh

Avec Lucy Liu, Chris Sullivan, Callina Liang, Eddy Maday, West Mulholland, Julia Fox, Benny Elledge, Daniel Danielson, Jared Wiseman, Robert M. Jimenez

THEMA FANTÔMES

 

De longs plans-séquence dans une maison hantée ? Voilà qui nous rappelle The Silent House de Gustavo Hernandez. Si ce n’est que la caméra en mouvement adopte ici le point de vue subjectif d’un fantôme observant les habitants en silence, ce qui semble rapprocher le postulat de Presence de celui de A Ghost Story, voire de Here (même si chez Zemeckis ce « spectre spectateur » n’était suggéré que de manière abstraite). L’idée de Presence est née dans l’esprit de Steven Soderbergh après avoir appris que la maison qu’il avait acquise avec son épouse était présumée hantée par l’esprit de la précédente locataire. Dans le traitement de dix pages qu’il écrit, le principe du regard du fantôme matérialisé par les mouvements de la caméra est déjà établi. Lorsqu’il soumet le fruit de ses réflexions au scénariste David Koepp (avec qui il avait collaboré sur le thriller Kimi), ce dernier est immédiatement emballé. Après tout, n’avait-il pas déjà brillamment abordé un thème voisin dans Hypnose ? Presence étant un projet très personnel, Soderbergh assure lui-même le montage et les prises de vues, obtenues avec une caméra numérique légère montée sur un petit stabilisateur. Le film est mis en boîte en trois semaines seulement, dans un décor unique, avec un budget de deux millions de dollars, afin d’en limiter les risques et de garder un contrôle total sur le résultat final.

La présence qui donne son nom au film nous accompagne entre les murs d’une grande maison de banlieue avant même que les protagonistes entrent en scène, histoire de nous familiariser avec le langage filmique que va adopter Soderbergh mais aussi de nous rendre nous-même témoins des événements. Comme le spectre, nous sommes des spectateurs/voyeurs, nous apprêtant à nous immiscer dans l’intimité des nouveaux arrivants en gardant nos distances. Bientôt débarque l’agent immobilier, suivi de près par la famille Payne : la mère Rebecca (Lucy Liu), le père Chris (Chris Sullivan), le frère aîné Tyler (Eddy Maday) et la sœur cadette Chloe (Callina Liang). Après quelques hésitations, ils décident de prendre possession des lieux. Mais tout n’est pas au beau fixe chez les Payne. Rebecca est obsédée par son travail et a commis des fraudes financières qui entament profondément la confiance de son époux. Tyler est un champion de natation arrogant qui fait l’admiration de sa mère. Quant à Chloe, elle pleure encore la mort de sa meilleure amie Nadia. Un peu délaissée, ultrasensible, Chloe sera la première à sentir cette présence surnaturelle qui glisse entre les murs…

Esprit voyeur

Soderbergh opte pour une mise en forme très primaire, collant de très près à son concept sans s’embarrasser de fioritures. La caméra reste donc la plupart du temps lointaine, en captant les actions au grand-angle, tandis que chaque plan-séquence s’interrompt par un écran noir silencieux avant d’enchaîner sur le suivant, comme si la première version brute du film sortie de la salle de montage était celle finalement choisie pour le résultat définitif. L’idée est intéressante, même si les mouvements de cette présence nous semblent bien trop humains pour être attribués à un être de l’au-delà. La vue subjective monte et descend les escaliers, se cache derrière les portes ou les placards, évite les meubles pour se frayer un chemin, bref ressemble à ce qu’elle est vraiment : le fruit du travail minutieux d’un réalisateur/cameraman chargé de tout filmer dans le décor en évitant de se casser la figure ! En effet, rien ne justifie que ce fantôme s’embarrasse des contraintes physiques et matérielles de ce bas-monde… à moins qu’il ne s’agisse des réflexes hérités de son ancienne vie ? La relative froideur du dispositif s’atténue progressivement, en grande partie grâce au naturel des quatre acteurs principaux et au lyrisme de la très belle musique de Zack Ryan qui casse un peu l’austérité du film. Au moment climax, lorsque la caméra décide de se rapprocher drastiquement des acteurs tandis que la situation est en train de basculer, un malaise soudain nous étreint. Car nous voilà impuissants face au drame qui se noue, tellement identifiés à cet esprit muet que nous aimerions qu’il agisse pour nous, qu’il prenne les choses en main, qu’il se comporte enfin en poltergeist digne de ce nom. La sensation est loin d’être inintéressante, même si Presence – pour audacieux et original qu’il soit – ne nous aura finalement convaincus qu’à moitié.

© Gilles Penso

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HURLEMENTS 4 (1988)

Réalisé par le vétéran John Hough puis entièrement modifié par son producteur, ce quatrième opus ne vaut que pour son dernier quart d’heure…

THE HOWLING IV – THE ORIGINAL NIGHTMARE

 

1988 – USA

 

Réalisé par John Hough et Clive Turner

 

Avec Romy Windsor, Michael T. Weiss, Antony Hamilton, Susanne Severeid, Lamya Derval, Norman Anstey, Kate Edwards, Dennis Folbigge, Anthony James

 

THEMA LOUPS-GAROUS I SAGA HURLEMENTS

Cette troisième suite du classique de Joe Dante a été enfantée dans la douleur. Initialement, c’est le scénariste et producteur Clive Turner qui envisage de réaliser le film, en cherchant à revenir aux sources du roman de Gary Brandner qui inspirait le premier Hurlements. Mais les investisseurs préfèrent solliciter un metteur en scène plus aguerri et optent pour John Hough (Les Sévices de Dracula, La Maison des damnés, Les Yeux de la forêt, Incubus). Dès lors, une tension palpable s’installe pendant la mise en chantier du film et ira crescendo. Hough commence son tournage sans scénario définitif. Turner tarde en effet à rendre sa copie, n’en finissant plus de changer le script alors que les prises de vues sont très avancées. Le réalisateur fait donc ce qu’il peut, entravé par un budget tellement ridicule qu’il n’a même pas de quoi se payer une prise de son en direct. Tous les dialogues seront donc post-synchronisés, ce qui explique pourquoi de nombreux plans montrent les personnages parler de dos ou hors-champ. Tant bien que mal, Hough termine son film mais n’est pas au bout des déconvenues. Turner décide en effet de tout changer, de tourner de nouvelles séquences et de revoir le montage de A à Z. Voilà qui explique pourquoi le film semble si décousu.

Il semblait certes impossible de tomber plus bas que Hurlement 2 et Hurlements 3, qui atteignaient bien souvent les plus hauts sommets du grotesque. John Hough redresse donc la barre, avec des acteurs plus convaincants, une mise en scène plus solide et un rendu plus « professionnel » que les improbables deux épisodes précédents. Romy Windsor incarne Mary, une romancière à succès en proie à d’effrayantes hallucinations qui provoquent chez elle des crises de panique. Son médecin préconise qu’elle se mette au calme quelques temps. Elle se réfugie donc avec son époux Richard (Michael T. Weiss) dans un cottage au beau milieu de la campagne. Là, ils découvrent la petite population de Drago, la minuscule bourgade du coin, notamment un shérif particulièrement bourru. Les hallucinations semblent s’être calmées, mais Mary est maintenant assaillie la nuit par des rêves étranges où elle entend hurler des loups et où elle se voit courir dans les bois, aux trousses d’une mystérieuse silhouette encapuchonnée. Est-elle en train de développer une paranoïa délirante, ou une véritable menace pèse-t-elle sur elle et son mari ? Un jour, elle reçoit la visite de Janice (Susanne Severeid), une femme à la recherche d’une religieuse qui fut sa consœur, et que Mary voit dans ses rêves éveillés. Toutes deux décident de mener l’enquête…

La métamorphose gluante

Pas foncièrement palpitante, l’histoire de Hurlements 4 tente maladroitement de créer un double triangle amoureux (Mary semble courtisée par son agent littéraire, Richard est attiré par une charmante vendeuse d’artisanat local) dans l’espoir un peu vain de réveiller les spectateurs de leur torpeur. Il faudra attendre près de 70 minutes pour que le premier loup-garou montre le bout de son museau. En charge des effets spéciaux de maquillage, le très doué Steve Johnson joue la carte de l’inédit. La séquence de transformation qui intervient à dix minutes de la fin du métrage prend donc une tournure hallucinante. La victime expulse d’abord des litres de liquide visqueux qui recouvrent tout son corps, puis arbore une grimace bestiale. Muée bientôt en squelette gluant à l’issu de ce phénomène de décomposition avancée, elle baigne dans son propre jus et s’agite frénétiquement, tandis que des chœurs sinistres scandent « Satan t’appelle ! ». Puis du magma émerge un lycanthrope pantelant à la mâchoire qui s’allonge. Hélas, l’impact de la scène est sérieusement amenuisé par la maladresse du montage. Incapable de se décider sur le look des loups-garous, le film part d’ailleurs dans toutes les directions : des chiens aux yeux luisants, des hommes velus aux dents acérées, des gargouilles hirsutes aux oreilles pointues, voire des trolls au visage boursouflé et à la bouche qui se déchire pour révéler des crocs lupins. Le dernier quart d’heure d’Hurlements 4 a au moins le mérite de nous distraire par ses excès et ses effets outranciers. Mais le reste du film ne suscite qu’un ennui profond.

 

© Gilles Penso

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THE GORGE (2025)

Miles Teller et Anya Taylor-Joy incarnent deux tireurs d’élites chargés de surveiller un ravin au fond duquel se terrent de mystérieuses créatures…

THE GORGE

2025 – USA

Réalisé par Scott Derrickson

Avec Miles Teller, Anya Taylor-Joy, Sigourney Weaver, Sope Dirisu, William Houston, Kodna Holdbrook-Smith, James Marlowe, Julianna Kurokowa

THEMA MUTATIONS

 

C’est Zach Dean, scénariste de The Tomorrow War, qui est à l’origine de The Gorge. Son script, écrit spontanément sans commande spécifique d’un studio, fait le tour des maisons de production hollywoodiennes et finit par entrer dans la fameuse « Black List », celle des scénarios ultra-prometteurs n’ayant pas encore trouvé acquéreur. Ce sont finalement Skydance Media et Apple Original Film qui décident de s’associer pour financer le film, dont les hautes ambitions nécessitent un budget conséquent. Aussi à l’aise avec les production modestes (Sinister, Black Phone) qu’avec les blockbusters (Doctor Strange), Scott Derrickson se voit confier la mise en scène de ce long-métrage hybride. The Gorge présente en effet la particularité de se situer aux confluents de plusieurs genres : la science-fiction, l’horreur, l’action, l’espionnage, le thriller et la romance. Pour les rôles principaux, la production penche pour Miles Teller (Les Quatre Fantastiques) et Anya Taylor-Joy (Furiosa : une saga Mad Max). En lisant le scénario, les deux acteurs ont la surprise d’y découvrir des clins d’œil à deux des rôles qui les rendirent populaires. L’un y joue en effet de la batterie, comme dans Whiplash, et l’autre se lance dans des parties d’échecs, comme dans Le Jeu de la dame. « Bizarrement, c’était dans le scénario depuis le tout début, avant même que nous soyons attachés à ce projet », révèle Teller (1). « On a trouvé ça un peu exagéré et on a essayé de faire retirer ces scènes », ajoute Taylor-Joy. « Mais ils nous ont répondu que ces choses aidaient les personnages à faire connaissance » (2). Le double clin d’œil subsiste donc à l’écran.

The Gorge met en scène deux snipers qui sont chargés à distance d’une mission identique : tenir leur position pendant un an, chacun d’un côté opposé d’une gorge abyssale, sans aucun contact avec l’extérieur ni avec leur homologue d’en face. Levi Kane (Miles Teller), ex-sniper de la Marine reconverti en mercenaire, hérite de la tour ouest. Drasa (Anya Taylor-Joy), espionne lituanienne au service du Kremlin, garde l’est. Chacun d’eux lutte contre ses propres démons comme il peut. Tandis que Levi est hanté par les fantômes des cibles qu’il a abattues, Drasa est obsédée à l’idée que son père, rongé par un cancer, ait décidé d’écourter ses souffrances pour rejoindre sa défunte épouse le jour de la Saint-Valentin. À son arrivée, Levi relève son prédécesseur qui lui apprend qu’en plus des tours, des tourelles automatiques surveillent la zone, des antennes masquent l’endroit du reste du monde et des mines tapissent les parois. Pourquoi tant de précautions ? Parce qu’en bas, dans les ténèbres, quelque chose de monstrueux rôde…

La peur qui rôde

Si la situation de départ est très intrigante, Scott Derrickson ne peut s’empêcher de céder à un certain nombre de facilités, bardant cette romance à distance de clichés, concoctant des séquences de suspense difficilement crédibles (même avec la meilleure volonté du monde), expédiant en deux coups de cuiller à pot son climax et son épilogue. Sans compter ce recours toujours un peu paresseux aux films d’archives (une vieille bobine qui traine au bon endroit, un fichier vidéo immédiatement accessible dans un ordinateur sans âge) pour tout expliquer (un gimmick sans doute hérité de Sinister). Pourtant, le film reste miraculeusement captivant grâce à la force de son concept, à ses acteurs épatants (dont l’alchimie à l’écran est indiscutable) et au design hallucinant du monde infernal qui s’est développé au fin fond de la gorge. Ces créatures impensables, mêlant la morphologie des hommes, des arbres, des insectes et des reptiles, nous évoquent tour à tour les monstruosités de The Thing, les aberrations biologiques d’Annihilation ou les abominations des écrits de Lovecraft, tandis que le décor infernal dans lequel grouillent ces erreurs de la nature s’inspire des œuvres du peintre surréaliste polonais Zdzislaw Beksinski. Malgré ses invraisemblances et ses raccourcis, The Gorge reste donc une très agréable surprise, sa diffusion sur la plateforme Apple TV + ayant été très chaleureusement accueillie.

(1) et (2) Extraits d’interviews parues dans Entertainment Weekly en février 2025

© Gilles Penso

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SCANNER COP (1994)

Un jeune flic doté d’un pouvoir de Scanner tente d’élucider une série de meurtres sanglants qui frappent les rangs de la police…

SCANNER COP

 

1994 – CANADA

 

Réalisé par Pierre David

 

Avec Daniel Quinn, Darlanne Fluegel, Richard Grove, Mark Rolston, Richard Lynch, Hilary Shepard, James Horan, Gary Hudson, Cyndi Pass, Luca Bercovici

 

THEMA POUVOIRS PARANORMAUX I SAGA SCANNERS

Après Scanners II et Scanners III, on aurait pu s’attendre à ce que la franchise initiée par David Cronenberg allait mourir de sa belle mort. Mais on a vu des sagas plus improbables fructifier tous azimuts, comme celle des Hurlements par exemple. Alors pourquoi ne pas continuer à décliner le concept ? C’est en tout cas l’intention du producteur Pierre David qui décide cette fois-ci de passer lui-même à la mise en scène, son « poulain » Christian Duguay étant parti tourner d’autres films et téléfilms (comme Explosion immédiate, Cauchemar en haute mer et Planète hurlante). Pour redynamiser une saga en sérieuse perte de vitesse, David choisit l’angle policier et l’attrait que le grand public semble avoir développé pour le mot « cop ». Après tout, il y a bien eu un Robocop et un Maniac Cop, alors pourquoi pas un Scanner Cop ? Contrairement aux trois films précédents, celui-ci n’est pas tourné au Canada mais sur le sol américain, principalement à Los Angeles. Finalisé par George Saunders et John Bryant (American Ninja 5, Martial Outlaw), le scénario, on s’en doute, ne fait pas dans la dentelle et n’entretient pas de lien narratif avec les précédents Scanners. Une fois de plus, aucun personnage n’assure la transition et seul le thème des êtres possédés de pouvoirs parapsychiques subsiste.

Le prologue nous montre les tourments d’un Scanner rendu fou par les maux de têtes intolérables qu’il ne peut plus endiguer, à cause de son incapacité à trouver de l’éphémérol, seul médicament susceptible de le soulager. En pleine crise, il est abattu et laisse derrière lui Sam, un petit garçon qui possède les mêmes pouvoirs que lui. Officier sur le terrain ce jour-là, le policier Pete Harrigan (Richard Grove) décide d’adopter l’enfant. Quinze ans plus tard, Harrigan est devenu chef de la police de Los Angeles et Sam (Daniel Quinn) s’est engagé à son tour dans les forces de l’ordre. Débutant, encore maladroit, Sam tient à dissimuler ses capacités paranormales et suit scrupuleusement son traitement à l’éphémérol. Mais lorsqu’une série de meurtres violents frappe ses collègues, perpétrés par des gens dont le comportement semble contrôlé à distance par une force extérieure, Sam décide de mettre ses pouvoirs au service de l’enquête, quitte à se mettre lui-même en danger de surcharge sensorielle.

Têtes multiples et monstres gluants

On ne peut pas reprocher à Scanner Cop de susciter l’ennui. Son scénario délirant autorise tous les excès – y compris cette scène impensable où Sam « scanne » un ordinateur de la police pour affiner un portrait-robot ! – et les effets spéciaux confiés à John Carl Buechler ne s’imposent aucune limite. D’où une série d’images cauchemardesques excessives, comme ce passage devenu fameux au cours duquel un Scanner devenu fou voit pousser trois hideux visages miniatures sur son front. Étant donné que les assassins sous hypnose sont frappés d’hallucinations et voient des monstres à la place des policiers qu’ils s’apprêtent à tuer, Buechler peut pousser le bouchon encore plus loin, lâchant sur les écrans des démons grimaçants ou des aliens insectoïdes gluants. Tout est donc permis, même ces images mentales malsaines d’un hôpital psychiatrique mué en antichambre de l’enfer, sans oublier bien sûr le passage incontournable de la franchise : la tête qui explose. Côté casting, Scanner Cop ne fait pas beaucoup d’éclat. Son héros, campé par une sorte de sosie de Brad Dourif jeune, est d’une exaspérante platitude. Et Si Richard Lynch est parfait en méchant, comme toujours, on ne peut pas en dire autant de la diseuse de bonne aventure gothique qui lui sert de bras droit, jouée par Hilary Shepard qui en fait des tonnes dans le registre du ricanement sarcastique. Refusant de s’arrêter en si bon chemin, Pierre David enchaînera avec Scanner Cop 2.

 

© Gilles Penso

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LE MONDE DES ANIMAUX (1956)

Des dizaines de dinosaures animés par Ray Harryhausen et Willis O’brien prennent vie dans ce documentaire animalier atypique…

THE ANIMAL WORLD

 

1956 – USA

 

Réalisé par Irwin Allen

 

Avec les voix de Theodore Von Eltz et John Storm.

 

THEMA DINOSAURES I SAGA RAY HARRYHAUSEN

Le producteur Irwin Allen, futur créateur de séries télévisées de science-fiction à succès (Perdus dans l’espace, Au cœur du temps, Voyages au fond des mers) et initiateur de films catastrophe monumentaux (La Tour infernale, L’Aventure du Poséidon), se fait remarquer dès 1953 par le documentaire The Sea Around Us, inspiré d’un best-seller de Rachel Carson, qui lui permet de remporter un Oscar. Très fier de sa statuette, il décide d’enchaîner avec une « séquelle » racontant le développement de la vie animale sur Terre, depuis les microbes jusqu’aux hommes, qu’il baptise Le Monde des animaux. Il envoie donc plusieurs cameramen en pleine nature pour qu’ils lui ramènent des images vivantes et sauvages de fauves, d’insectes, de singes, etc. Plus de 800 000 mètres de pellicule sont ainsi enregistrés et ramenés à Allen qui se charge de les faire monter par Gene Palmer et Robert A. Belcher et d’y adjoindre un commentaire off déclamé par Theodore Von Eltz et John Storm. Pour la première partie de son film, Allen souhaite évoquer la préhistoire et l’âge des dinosaures, et il fait naturellement appel aux spécialistes de la stop-motion Willis O’Brien (King Kong) et Ray Harryhausen (Le Monstre des temps perdus) pour s’en charger, sous les conseils éclairés du docteur Charles L. Camp, professeur de paléontologie à l’Université de Californie. « J’avais un peu de temps libre avant mon film suivant, Les Soucoupes volantes attaquent, et j’ai accepté ce travail qui ne m’a pris que six ou sept semaines », raconte Harryhausen. « Willis O’Brien a conçu tous les arrière-plans peints et les maquettes, et mon travail fut simplement de l’animation. » (1)

Cette séquence d’une dizaine de minutes s’ouvre sur la période jurassique, au cours de laquelle nous observons d’abord un brontosaure qui broute la cime d’un arbre puis pond des œufs. Un allosaure effraie le gigantesque végétarien, tandis qu’éclosent les œufs du brontosaure. Un stégosaure est tué par un terrible cératosaure, mais avant que le prédateur ne puisse s’en repaître, l’un de ses semblables survient et un combat sauvage s’ensuit, à l’issue duquel les deux monstres tombent du haut d’une falaise. Plus tard, au cours du Crétacé, un tyrannosaure est sur le point d’affronter un tricératops, mais la lutte est interrompue par un cataclysme gigantesque. Le tyrannosaure disparaît alors dans une faille créée par un glissement de terrain, tandis que les éruptions volcaniques et les tremblements de terre provoquent la mort de tous les dinosaures vus jusqu’alors. Les décors miniatures, assez simplifiés, sont principalement des éléments de végétation à l’avant-plan, notamment des palmiers et des fougères en étain, prolongés par des maquettes de montagnes à l’arrière-plan et des peintures en toile de fond. Le prologue du Monde des animaux étant assez proche du projet avorté Evolution de Harryhausen (un court-métrage racontant les premiers pas des dinosaures sur la Terre), celui-ci en profite pour recycler l’une des idées visuelles de son court métrage inachevé, à savoir l’entrée dans le champ à l’avant-plan d’un allosaure qui saute et menace un brontosaure. L’effet s’avère toujours aussi efficace du double point de vue dramatique et dynamique, d’autant que la vivacité du carnassier contraste avec les mouvements lents et pesants du végétarien.

« Deux milliards d’années en formation ! »

Irwin Allen étant avant tout un homme de spectacle, l’idée de montrer des dinosaures sans affrontement avec des hommes a quelque chose de frustrant. Alors, contournant l’anachronisme, il se permet une petite dérive, montrant ce qui se serait passé si l’être humain avait côtoyé les grands sauriens de l’ère secondaire, le temps d’une séquence brève dans laquelle un brontosaure emporte dans sa gueule un homme préhistorique, animé lui aussi image par image. Premier long-métrage à mettre en scène des dinosaures animés en couleurs, Le Monde des animaux est présenté à l’Académie des Arts et des Spectacles en 1955 par Irwin Allen et la Warner, mais il ne remporte pas d’Oscar. Le film sort en juin 1956, et bien que la séquence des dinosaures ne concerne que 15% du métrage total, c’est son argument de vente principal, notamment sur les affiches qui clament : « Deux milliards d’années en formation ! » Le succès du Monde des animaux est tout relatif, mais il entraîne tout de même une adaptation en bande dessinée éditée chez Dell en 1956 et un troisième documentaire signé Irwin Allen, The Story of Mankind qui, comme son titre l’indique, raconte l’histoire de l’humanité. Une série de différends légaux dus à la répartition des droits des images entre les différents opérateurs du film rendent finalement Le Monde des animaux invisible sur les écrans et indisponible en vidéo dans son intégralité. Seule la séquence des dinosaures aura été épargnée, ressurgissant partiellement dans une séquence onirique du film Trog (1970) et une série de diapositives de la collection View-Master.

 

© Gilles Penso

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WITCHOUSE 3 (2001)

Trois jeunes femmes se filment en train de pratiquer une séance de sorcellerie pour les besoins d’un documentaire… et invoquent la redoutable Lilith !

WITCHOUSE 3 – DEMON FIRE

 

2001 – USA

 

Réalisé par J.R. Bookwalter

 

Avec Debbie Rochon, Tanya Dempsey, Tina Krause, Paul Darrigo, Brinke Stevens, Michael Deak

 

THEMA SORCELLERIE ET MAGIE I SAGA WITCHOUSE I CHARLES BAND

En découvrant les rushes de The Coven, un minuscule film d’horreur bricolé par le réalisateur Brad Sykes pour surfer sur la vogue encore vivace de Dangereuse alliance, le producteur Charles Band se dit qu’il pourrait en racheter les droits et le rebaptiser Witchouse 3, ce qui lui permettrait d’obtenir à moindre coût un troisième volet pour sa « saga » d’épouvante. En apprenant ça, J.R. Bookwalter, qui avait réalisé Witchouse 2, met Band au défi : plutôt qu’acheter The Coven, pourquoi ne produirait-il pas – pour une somme encore moindre – un troisième épisode original ? Band accepte, bien sûr, et Bookwalter se lance donc dans ce film minimaliste tourné en neuf jours avec cinq acteurs et un nombre restreint de décors. The Coven sortira finalement en 2002 sous son titre original, tandis que Bookwalter réunit quatre scream queens pour tenir la vedette de son Witchouse 3. Brinke Stevens (Slave Girls, Sorority Babes, Sideshow) et Debbie Rochon (Tromeo and Juliet, Terror Firmer, Toxic Avenger 4), censées tourner ensemble un film de loup-garou qui finalement ne se fera pas, sont immédiatement recrutées par Band. Tanya Dempsey (Shrieker) et Tina Krause (Psycho Sisters) les rejoignent. Car les rôles majeurs du film sont féminins, conformément à l’envie de s’inscrire dans la mouvance de Dangereuse alliance.

Tanya Dempsey incarne Annie, une jeune femme malmenée par un époux brutal (Paul Darrigo) qui décide de fuguer pour partir se réfugier chez ses deux amies Stevie (Debbie Rochon) et Rose (Tina Krause). Or ces dernières sont en train de tourner un documentaire sur la sorcellerie. Un soir où toutes les trois sont bien éméchées, Stevie décide de se lancer dans un rituel de sorcellerie et de le filmer en utilisant un livre de sorts. Elle trace donc un cercle au sol, allume des bougies et prononce des incantations, le tout enregistré par une caméra vidéo. Tout ce cérémonial folklorique provoque le surgissement de la sorcière Lilith (Brinke Stevens). C’est du moins ce que pensent les trois amies face aux lumières bizarres, aux apparitions fantomatiques et aux bruits surnaturels qui les entourent soudain. Paniquées, elles s’enfuient hors de la maison puis se ressaisissent : et s’il s’agissait simplement d’autosuggestion et d’hallucinations due à leur état d’ébriété avancé ? Effectivement, quand elles rentrent, tout semble revenu à la normale…

« Tout ce qui a trait à la magie va par trois »

Le second degré s’installe dès l’entame du film, avec cette fausse séance de sorcellerie tenue par une prêtresse aux dents pointues en plastique qui nous fait croire un instant que nous avons affaire à Lilith. Mais Witchouse 3 ne parviendra pas à tenir cette promesse d’une relecture ironique du mythe des sorcières. Le scénario se contente en effet d’enfoncer des portes ouvertes. Il ne se passe pas grand-chose pendant ces 90 minutes poussives, où Lilith se contente de faire quelques apparitions furtives au sein de séquences ennuyeuses censées effrayer les spectateurs. N’ayant rien d’intéressant à défendre, les actrices, pour sympathiques qu’elles soient, ne nous convainquent jamais et débitent d’interminables dialogues soporifiques, dont l’improbable : « Tout ce qui a trait à la magie va par trois, comme la Sainte trinité et les Rois Mages. » Un retournement de situation inattendu tente bien de relancer cette intrigue anémique au cours du dernier acte, sans grand succès. On peut certes saluer la capacité de J.R. Bookwalter à emballer son film avec un budget squelettique de 26 000 dollars et les efforts de son chef opérateur Danny Draven pour tenter de faire du cinéma avec sa caméra DV Cam. Mais WItchouse 3 n’a rien pour marquer les mémoires. Voilà sans doute pourquoi le WItchouse 4 que le réalisateur envisageait de tourner dans la foulée ne vit jamais le jour.

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© Gilles Penso

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CARNOSAUR 3 (1996)

Un petit groupe de militaires est chargé de ramener vivants trois redoutables dinosaures carnivores lâchés dans la nature…

CARNOSAUR 3 : PRIMAL SPECIES

 

1996 – USA

 

Réalisé par Jonathan Winfrey

 

Avec Rob Camilletti, Stephen Lee, Cyril O’Reilly, Scott Valentine, Rodger Halston, Terri J. Vaughn, Billy Burnette, Rick Dean, Jason Brawley, Janet Gunn

 

THEMA DINOSAURES I SAGA CARNOSAUR

On ne peut pas dire que Carnosaur 2 fut un gigantesque hit dans les vidéoclubs, mais cette petite suite sans prétention remplit suffisamment les tiroir-caisse pour donner envie à Roger Corman d’initier un nouvel épisode. Titré dans un premier temps Primal Species, le film est d’abord conçu comme un « direct-to-video » autonome sans lien direct avec les deux opus précédents. Mais Corman décide finalement d’en faire un Carnosaur officiel et en confie la réalisation à Jonathan Winfrey, metteur en scène de quelques séries B d’action comme New Crime City ou Black Scorpion. Pour limiter les frais, le budget est revu à la baisse par rapport à Carnosaur et Carnosaur 2 (qui avaient chacun coûté dans les 800 000 dollars). Un seul costume en caoutchouc à la coupe approximative est donc sollicité pour représenter tous les velociraptors du film. « Ce tournage était hilarant », se souvient Justina Vail, interprète de la soldate Proudfoot. « Nous étions poursuivis par ce type en costume de dinosaure qui courait à travers la pièce. Garder son sérieux et avoir l’air crédible était donc un vrai défi ! » (1) Si aucun des personnages du film précédent ne revient dans Carnosaur 3, deux acteurs y réapparaissent dans des rôles différents : Rick Dean et Michael McDonald.

Au tout début du film, un bataillon de terroristes armés jusqu’aux dents appartenant au groupe « Eurotrash » prend de force une cargaison militaire après avoir massacré tous les soldats qui étaient chargés de la transporter, dans un beau déchaînement pyrotechnique qui permet à Carnosaur 3 de démarrer sur les chapeaux de roue. Le commando des forces spéciales antiterroristes mené par le colonel Rance (Scott Valentine) est donc missionné pour retrouver la précieuse cargaison. Mais le butin n’a rien à voir avec ce que les voleurs imaginaient. Au lieu d’uranium, ils trouvent dans le camion dérobé trois dinosaures endormis qui sortent aussitôt de leur torpeur et les attaquent. « On aurait dit un lézard sous stéroïdes » dit l’un des soldats pour décrire l’une des bêtes. « Ce sont des clones de dinosauriens génétiquement modifiés », rectifie Dr Hodge (Janet Gunn), la scientifique dépêchée sur place. La mission du commando, bientôt épaulé par un petit groupe de marines, consiste à ramener vivants les deux raptors mâles et la femelle tyrannosaure qui viennent de s’échapper…

« On ne s’arrête pas pour faire des pauses pipi ! »

La toute première réplique du film (« Tu es dans l’armée mon gars, on ne s’arrête pas pour faire des pauses pipi ! ») a l’avantage de donner très tôt le ton. Il y en aura d’autres de haut niveau tout au long du métrage, comme le festif « rien de tel qu’un pain de C4 pour bien commencer la journée » ou l’insurpassable « j’ai l’impression que mes couilles sont venues serrer les mains à mes amygdales ». Les acteurs surjouent tellement qu’on en vient à se demander si le film n’a pas volontairement été envisagé au second degré, ce que tendrait à confirmer cette mention fantaisiste du générique de fin précisant qu’« aucun dinosaure n’a été maltraité ou blessé durant le tournage de ce film. » Pour autant, Carnosaur 3 se révèle bien plus embarrassant que drôle, surtout face à ce contingent de militaires tous plus idiots les uns que les autres, férus de blagues stupides, de rires gras et de remarques machistes. L’action se déroulant majoritairement dans un décor banal d’entrepôt puis dans les coursives sombres d’un bateau, les péripéties finissent par patiner et se répéter. Bien conscient que ses dinosaures ne sont pas très crédibles, Jonathan Winfrey joue prudemment la carte du montage nerveux et de la pénombre. Au moment du climax, le T-rex surgit enfin, même s’il nous semble improbable qu’une bête de 9 mètres de long ait réussi aussi longtemps à échapper à la vigilance des soldats. Son intervention finale – qui se limite principalement à des gros plans furtifs de sa tête en caoutchouc – est donc le bouquet final de cette seconde séquelle à l’intérêt finalement très limité.

 

(1) Extrait d’une interview parue dans Starlog en novembre 2020.

 

© Gilles Penso

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