OPÉRATION GOLDMAN (1966)

Un agent secret enquête sur le sabotage de plusieurs fusées en partance pour la Lune et met à jour le complot d’un redoutable super-vilain…

OPER AZIONE GOLDMAN

 

1966 – ITALIE / ESPAGNE

 

Réalisé par Antonio Margheriti

 

Avec Anthony Eisley, Wandisa Guida, Diana Lorys, Luisa Rivelli, Folco Lulli, Francisco Sanz, José Maria Caffarel, Renato Montalbano, Oreste Palella

 

THEMA ESPIONNAGE ET SCIENCE-FICTION

Coup sur coup, James Bond contre docteur No, Bons baisers de Russie, Goldfinger et Opération tonnerre secouent le box-office mondial dans les années 60. Aussitôt, la « spy mania » gagne les cinématographies de la planète entière. En ce domaine, l’Italie n’est pas en reste. D’où cette co-production avec l’Espagne qui permet à Antonio Margheriti, habitué à l’horreur (La Vierge de Nuremberg, Danse macabre, La Sorcière sanglante) et à la science-fiction (Le Vainqueur de l’espace, La Planète des hommes perdus), de se plier à son tour aux codes du genre, sous son pseudonyme habituel d’Anthony Dawson. En tête d’affiche, le cinéaste dirige deux familiers du cinéma bis : l’Américain Anthony Eisley (La Femme guêpe, The Mighty Gorga, Dracula contre Frankenstein, L’Invasion des cocons) et l’Espagnole Diana Lorys (L’Horrible docteur Orloff, Superargo contre les robots, Malenka la vampire, Les Cauchemars naissent la nuit). Le titre Opération Goldman reste un mystère dans la mesure où personne ne porte ce nom dans le film. Sans doute est-ce une allusion aux crédits financiers sans limite dont bénéficie le héros, doublée d’un clin d’œil à Goldfinger (comme le fit l’année précédente le Dr Goldfoot). Les Américains, eux, rebaptisent le film Lightning Bolt et se réfèrent à Opération tonnerre avec le slogan « he strikes like a ball of thunder » (« il frappe comme un coup de tonnerre »).

À Cap Kennedy, six lancements de fusées vers la Lune ont échoué l’un après l’autre dans des circonstances étranges. Inquiet d’un possible sabotage aux répercussions internationales, le département « S » de la Commission fédérale de sécurité mandate l’agent secret Harry Senneth (Anthony Eisley) pour mener l’enquête. Contrairement à sa supérieure, la rigoureuse capitaine Patricia Flanagan (Diana Lorys), qui privilégie les méthodes musclées, Senneth préfère les solutions élégantes : costumes de luxe, humour caustique et chéquier illimité de la banque fédérale. Un style bien à lui pour infiltrer les milieux suspects. L’affaire se complique avec la mystérieuse disparition du Dr Rooney (Francisco Sanz), un éminent scientifique du programme spatial. Avant de s’évanouir dans la nature, Rooney avait détecté d’inquiétants signaux de radiation provenant des fonds marins, près du centre spatial. Il soupçonnait que ces anomalies déviaient les fusées de leur trajectoire, provoquant leur destruction. Au fil de leurs investigations, Flanagan et Senneth remontent la piste jusqu’à un baron de la bière aux ambitions démesurées…

L’espion qui mimait

Pas franchement charismatique, Anthony Eisley campe ici un espion désinvolte à la Matt Helm auquel il est bien difficile de s’attacher, tant il semble lui-même peu concerné par ce qui se passe autour de lui, se contentant de mimer mécaniquement la prestation de Sean Connery. Diana Lorys est bien mieux lotie, quoique très sous-exploitée dans le film. La maîtrise des arts-martiaux dont est dotée son personnage n’est en effet jamais mise à contribution, l’agent qu’elle incarne disparaissant au beau milieu de l’intrigue pour ne réapparaître qu’à la toute fin. Opération Goldman ne manque pas de séquences d’action ambitieuses (la tentative de noyade dans le silo, la poursuite automobile à Cap Kennedy, le combat contre les chariots élévateurs), même si elles sont parfois entravées par des trucages approximatifs (incrustations hasardeuses, maquettes très identifiables). L’amateur de science-fiction se délectera surtout de la seconde partie du métrage au cours de laquelle toutes les folies sont autorisées, des camions de bière qui cachent des rayons laser à la grande cité sous-marine en passant par les volcans aquatiques artificiels, les scientifiques en hibernation ou encore le canon laser sur le point d’être installé sur la Lune et commandé par un cerveau électronique. Margheriti s’offre même quelques écarts horrifiques au moment où les hibernés se décomposent un à un dans leurs cylindres translucides. Le tout s’achève comme il se doit par un grand feu d’artifice final détruisant dans les flammes le superbe repaire du super-vilain.

 

© Gilles Penso

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DIE FARBE (2010)

Une adaptation minimaliste et atmosphérique de la fameuse nouvelle de H.P. Lovecraft La Couleur tombée du ciel

DIE FARBE

 

2010 – ALLEMAGNE

 

Réalisé par Huân Vu

 

Avec Paul Dorsch, Jürgen Heimüller, Ingo Helse, Philipp Jacobs, Michael Kausch, Olaf Krätke, Marco Leibnitz, Ralf Lichtenberg, Patrick Pierce, Erik Rastetter

 

THEMA MUTATIONS

Huân Vu est un homme à la passion tenace. Entre 2003 et 2007, alors qu’il est encore étudiant, ce réalisateur allemand d’origine vietnamienne s’attelle à son premier long-métrage, Damantus, un « fan film » consacré à l’univers du jeu de figurines Warhammer 40000. Cette première tentative n’a d’autre but que concrétiser une envie d’enfance et faire découvrir ses capacités de metteur en scène. Pour son projet suivant, il souhaite se laisser tenter par l’univers de H.P. Lovecraft et choisit, sous les conseils de son ami Jan Roth, d’adapter l’une de ses plus célèbres nouvelles, La Couleur tombée du ciel. Roth assure le rôle de coproducteur et de superviseur des effets visuels, Vu s’occupe du scénario et de la réalisation, et tous deux se partagent le travail du montage. Plus la production avance, plus il devient évident que l’ambition de Die Farbe (littéralement « La Couleur ») dépasse celle d’un simple film de fins d’études. Les deux compères décident donc d’aller d’abord au bout de leur cycle universitaire avant de pouvoir financer le long-métrage par leurs propres moyens. Pour doter cette histoire d’une coloration nouvelle (elle fut déjà adaptée trois fois à l’écran, dans Le Messager du diable, La Malédiction céleste et Colour From the Dark), elle est relocalisée dans l’espace et dans le temps. Tourné en noir et blanc, le récit se déroule donc dans un village allemand des années 40.

Le film commence à Arkham, dans le Massachusetts, en 1975. Jonathan Davis (Ingo Heise), un jeune Américain, est à la recherche de son père mystérieusement disparu sans laisser de trace. Ses investigations le mènent jusqu’en Allemagne, dans un village isolé près de la frontière française où son père était en poste après la Seconde Guerre mondiale. En interrogeant les villageois, Jonathan finit par recueillir le témoignage d’Armin Pierske (Michael Kausch), un autochtone ayant croisé le disparu dans de très étranges circonstances. Pierske raconte alors la mésaventure vécue avant la guerre par ses voisins les Gärtener, dont le champ fut contaminé suite à la chute d’une météorite aux étranges propriétés. En buvant l’eau du puits, les membres de la famille furent un par un frappés par une contamination lente et inexorable. « Quelque chose ne va pas avec l’eau » lançait à l’époque Armin à son ami Nahum Gärtener (Erik Rastetter) en guise d’avertissement. Mais c’était déjà trop tard…

« Quelque chose ne va pas avec l’eau »

L’entrée en matière de Die Farbe n’est franchement pas très engageante. Le grain vidéo disgracieux, l’emploi trop visible d’effets numériques bon marché, le jeu très approximatif des acteurs, le montage maladroit jouent sérieusement en défaveur du film, qui prend les allures d’un court-métrage semi-amateur artificiellement étiré pour pouvoir durer 90 minutes. Fort heureusement, les choses s’améliorent lorsque l’intrigue s’installe en Allemagne et que les acteurs n’ont plus besoin de se faire passer pour des personnages américains. Le cœur de l’histoire – directement issu de la nouvelle de Lovecraft – est narré en flash-backs, et c’est clairement la partie la plus intéressante du film. Tout le reste est honnêtement très facultatif. Dans la campagne allemande morose et austère d’avant-guerre qu’il filme aux abords de Stuttgart, Huân Vu parvient à bâtir une atmosphère pesante où s’immisce progressivement l’abomination. Préférant l’étrangeté à l’effet choc, le réalisateur opte pour un rythme lent constellé d’images insolites (l’énorme insecte posé sur la tête de la femme en transe) et évite d’en montrer trop pour laisser l’imagination du spectateur faire le plus gros du travail. On note le choix judicieux d’une image en noir et blanc naturaliste (à mi-chemin entre La Nuit des morts-vivants et Carnival of Souls) dans laquelle s’invitent parcimonieusement des teintes colorées étranges, cette fameuse « couleur tombée du ciel » par laquelle le malheur arrive. Non exempt de maladresses (l’une des plus rédhibitoire étant sans doute l’emploi d’images de synthèse trop démonstratives pour donner corps au phénomène d’outre-espace), Die Farbe reste un exercice de style intéressant, très proche en esprit des films produits à faible coût par la « H.P. Lovecraft Historical Society » comme The Call of Cthulhu ou The Whisperer in Darkness.

 

© Gilles Penso

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MINECRAFT – LE FILM (2025)

Jack Black, Jason Momoa et leurs compagnons s’agitent dans cette adaptation d’un des jeux vidéo les plus populaires au monde…

A MINECRAFT MOVIE

 

2025 – USA

 

Réalisé par Jared Hess

 

Avec Jack Black, Jason Momoa, Sebastian Hansen, Emma Myers, Danielle Brooks, Jennifer Coolidge, Rachel House

 

THEMA MONDES VIRTUELS ET MONDES PARALLELES

L’industrie vidéo-ludique se posant en concurrente directe du 7ème art tout en se payant de belles synergies commerciales avec celui-ci, les adaptations de jeux sont devenues un genre à part entière, pour le pire… et le moins pire. En généralisant, on pourrait affirmer que les films se situant DANS l’univers du jeu peinent à impliquer le spectateur (le Super Mario Bros de 1993, Assassin’s Creed, Uncharted, Five Nights at Freddy’s), alors que ceux qui jouent la carte du « merveilleux » en commençant dans le monde réel avant de projeter leurs protagonistes dans un monde virtuel favorisent l’identification et la suspension d’incrédulité du spectateur. Une approche qui fonctionne parfaitement dans Tron, Matrix, Jumanji – Bienvenue dans la jungle, La Grande aventure Lego ou l’adaptation animée de Super Mario Bros (bien que la plupart de ces titres ne soient pas des adaptations de jeux existants), et que les scénaristes de Minecraft – le film ont salutairement choisi d’adopter ici face à l’absence totale d’enjeux dramatiques du matériau d’origine. Ainsi, sans jamais chercher à expliquer le pourquoi du comment puisqu’il est entendu que le spectateur sait ce qu’il est venu voir, le film introduit dès les cinq premières minutes le monde de Minecraft, dans lequel tout se construit et se détruit tout aussi facilement. L’argument narratif n’a de toutes façons que peu d’intérêt ici, la première demi-heure d’exposition enfilant les poncifs des films d’aventures familiaux des années 80 et 90 comme des perles – jusqu’aux inévitables enfants orphelins ayant du mal à trouver leur place dans une nouvelle ville – tout en émulant la structure et le ton de Jumanji – Bienvenue dans la jungle, dont l’efficacité de la mise en place s’avérait exemplaire. Mais copier n’étant pas jouer, Minecraft – le film est-il un divertissement aussi recommandable que son modèle ?

Hollywood ne s’avouant jamais vaincue face à la difficulté d’accoucher d’un scénario acceptable pour une propriété intellectuelle chèrement acquise, il aura fallu plus de dix ans de développement avant que Minecraft – le film ne débarque sur nos écrans. Dès 2014, Shawn Levy, à qui l’ont devait alors notamment le très réussi La Nuit au musée (qui empruntait déjà au Jumanji original), fut engagé mais, ne parvenant pas à s’entendre sur un scénario digne de ce nom, s’en alla réaliser Free Guy, une distrayante variation sur le thème de Un Jour sans fin appliquée… aux codes du jeu vidéo justement. C’est Jared Hess, acclamé (notamment par Spielberg, rien que ça) pour sa comédie Napoleon Dynamite, qui conduira le projet Minecraft à terme, aidé par ses complices de toujours au scénario : Chris Bowman et Hubbel Palmer. On notera également la présence de deux autres scribes au générique : Neil Widener et Chris Galetta. Tout ce beau monde pour accoucher de ça ? On peut légitimement penser que les deux premiers ont exposé les grandes lignes de l’ « intrigue » et que les suivants ont participé à l’élaboration des gags et des personnages. Car au-delà de la direction artistique et de l’animation de personnages en images de synthèse anguleux franchement réussies, chapeautées par le superviseur des effets spéciaux Grant Major (Fantômes contre fantômes, la trilogie Le Seigneur des Anneaux, King Kong), Minecraft – le film repose entièrement sur les épaules de ses interprètes principaux : Jack Black et l’étonnant Jason Momoa.

Black micmac

Étonnamment, Jack Black devait à l’origine se contenter de prêter sa voix à un cochon. Ayant déjà travaillé avec Jared Hess sur Nacho Libre, il accepta le premier rôle après le désistement de Matt Berry, initialement envisagé. La popularité de Black sur les réseaux sociaux a façonné un personnage à part entière : ses grimaces, ses chorégraphies et acrobaties (dis)gracieuses et ses chansons délirantes sont devenues sa marque de fabrique. Son évolution artistique semble même emprunter le chemin inverse de celles des clowns tristes Robin Williams et Jim Carrey, qui  sont passés de l’excentricité à la plus grande gravité (via la dépression). Jack Black, lui, semble avoir complètement abandonné toute envie de jouer la comédie et s’amuse de la façon la plus régressive qui soit. Selon que vous aimiez le comédien ou pas, le film s’apparente à un one-man show survolté ou à une torture ininterrompue, le summum étant atteint avec trois chansons parfaitement absurdes. Quant à Jason Momoa, peinant encore à s’imposer comme un nom « bankable » malgré les deux Aquaman et Fast & Furious X et semblant jouer ici le Dwayne Johnson de seconde classe, il crée la surprise en s’avérant être un substitut méritant, jouant comme s’il se fichait désormais de son image, s’amusant visiblement à jouer le raté sympathique. Bien sûr, la partition comique joue la même note tout le long du film, mais le montage ne laisse pas de gras sur les improvisations et nous emmène vite d’une péripétie à l’autre. On peut déplorer néanmoins l’absence totale d’enjeux dramatiques. Minecraft – le film annonce-t-il une certaine idée du cinéma de divertissement à l’ère Tiktok ? La plateforme a d’ailleurs contribué à la promotion du film par le biais du « chicken jokey challenge », consistant à se filmer dans les salles obscures en hurlant et en lançant du popcorn lors d’une scène précise. On aura le droit de désapprouver… Reste qu’il serait malhonnête de reprocher à Minecraft – le film ce qu’il n’a jamais prétendu être, à savoir un film enlevé et subtil : il s’agit d’un divertissement familial complètement potache et absurde et c’est déjà bien plus qu’il n’avait le droit de l’être !

 

 © Jérôme Muslewski

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DOLL GRAVEYARD (2005)

Possédées par l’esprit d’une petite fille défunte, quatre poupées bizarres surgissent de terre pour assouvir une sanglante vengeance…

DOLL GRAVEYARD

 

2005 – USA

 

Réalisé par Charles Band

 

Avec Jared Kusnitz, Gabrielle Lynn, Kristyn Green, Anna Alicia Brock, Brian Lloyd, Scott Seymour, Ken Lyle, Hannah Marks

 

THEMA JOUETS I SAGA CHARLES BAND

Réalisé dans la foulée de Decadent Evil, Doll Graveyard permet à Charles Band de sacrifier une fois de plus à sa passion obsessionnelle pour les petits monstres et les poupées tueuses. Au lieu de relancer la franchise Puppet Master (dont le dernier épisode en date, Puppet Master vs. Demonic Toys, avait été mis en chantier indépendamment de sa compagnie Full Moon), l’infatigable producteur préfère miser sur des jouets tueurs inédits. C’est l’occasion pour lui de lancer sur le marché de nouvelles figurines à collectionner destinées aux amateurs du genre. Il n’y a pas de petits profits chez Band ! Le producteur signe lui-même la mise en scène de Doll Graveyard et s’épaule de quelques techniciens et artistes solides – tous habitués à son univers – pour l’aider à mener à bien le projet avec un budget comme toujours minuscule. Christopher Bergschneider (Retro Puppet Master, Prison of the Dead, Mega Scorpions) prend en charge la fabrication et l’animation des poupées, le directeur de la photographie Thomas Callaway (Creepozoids, Blood Dolls, Les Morts haïssent les vivants) s’occupe de l’image du film et le groupe District 78 (Petrified, Evil Bong, Ghost Poker) signe une bande originale électronique très efficace.

Le prologue sinistre de Doll Graveyard, situé en 1905, montre un père tyrannique (Ken Lyle) qui, dans un accès de cruauté, oblige Sophia (Hannah Marks), sa fille de douze ans, à enterrer dans le jardin ses poupées chéries. La gamine s’exécute en pleurant toutes les larmes de son corps, mais glisse sur le sol et se brise le cou. Son paternel l’enfouit alors sous terre avec ses jouets. Cent ans plus tard, Lester Fillbrook (Ken Lyle toujours) fait l’acquisition avec sa fille ado Deedee (Gabrielle Lynn) et son jeune fils Guy (Jared Kusnitz) de la maison et du jardin où eut lieu le drame. Un soir, alors que ce père célibataire part pour un rendez-vous galant, Deedee en profite pour inviter des amis et faire la fête. Au programme : musique, alcool, drogue et sexe. Ses deux meilleures copines, la délurée Olivia (Kristyn Green) et la très sage Terri (Anna Alicia Brock) sont bientôt rejointes par deux lourdauds pleins de testostérone, Rich (Brian Lloyd) et Tom (Scott Seymour), qui s’amusent à martyriser Guy. Or ce dernier vient de découvrir dans le jardin l’une des poupées de Sophia. Alors que la nuit vire à l’orage, les trois autres jouets émergent de la terre et préparent leur revanche, tandis que l’esprit de la défunte Sophia possède Guy…

Oh oh oh, jolies poupées !

Évidemment, il est difficile de ne pas penser à Puppet Master en regardant Doll Graveyard, qui aurait tout à fait pu s’inscrire dans la franchise la plus prolifique de Charles Band. Les jouets mis ici en scène ont d’ailleurs un petit air de déjà-vu. Le soldat allemand équipé d’un casque à pointe et le samouraï armé d’un katana évoquent beaucoup Tunneler et Blade, deux des « stars » de la saga des poupées tueuses. L’horrible poupon en porcelaine aux mâchoires acérées n’est pas sans nous rappeler le Baby Oopsie de Demonic Toys. Quant à Ooga Booga, le guerrier africain très stérotypé qui brandit une lance mortelle, il présente beaucoup de points communs avec la poupée vaudou de Ragdoll. Ce quatuor infernal nous distrait raisonnablement et ponctue le film de quelques meurtres sanglants, même si les mouvements des petites créatures restent très limités (on rêve à ce qu’aurait pu donner un Ooga Booga animé en stop-motion). L’intrigue elle-même a tendance à tourner en rond, en raison de la répétition des situations et du nombre restreint de personnages confinés dans un décor unique, et ne recule devant aucune incohérence. L’ensemble finit par s’essouffler, d’autant que l’épilogue, expédié à la va-vite, sent un peu le bâclage, le film n’exploitant jamais le lien qui semble unir les deux pères (incarnés par le même acteur). Huit ans plus tard, Ooga Booga aura droit à son propre film.

 

© Gilles Penso

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SUPER EXPRESS 109 (1975)

Panique à bord du train à grande vitesse Hikari 109 en direction de Hakata : s’il ralentit, une bombe le fera exploser et tuera ses 1500 passagers…

SHINKANSEN DAIBAKUHA / BULLET TRAIN

 

1975 – JAPON

 

Réalisé par Junya Satô

 

Avec Ken Takakura, Sonny Chiba, Kei Yamamoto, Eiji Gô, Akira Oda, Raita Ryû, Masayo Utsunomiya, Yumiko Fujita, Yumo Takigawa, Etsuko Shihomi, Ken Utsui

 

THEMA CATASTROPHES

Depuis le début des années 70, porté par les succès de Airport, La Tour infernale, L’Aventure du Poséidon ou Tremblement de terre, le cinéma catastrophe est à la mode aux Etats-Unis. Pour profiter de cette vogue, les studios japonais décident d’entrer dans la danse. La Toho n’y va pas par quatre chemins et se lance dans des désastres cataclysmiques à grande échelle tels que La Submersion du Japon ou Fin du Monde – Nostradamus an 2000. La compagnie concurrente Toei se lance à son tour, mais sous un angle différent, plus subtil et plus complexe. Ainsi naît Super Express 109. Le concept est développé par Junya Satô, réalisateur pour la Toei depuis le début des années 60, qui s’associe à l’occasion avec le scénariste Ryûnosuke Ono pour pondre un concept infaillible : un train à grande vitesse est contraint de ne jamais ralentir, sous peine d’exploser et de faire périr tous ses passagers. Habitué aux rôles de mafieux, star du Yakuza de Sydney Pollack aux côtés de Robert Mitchum, Ken Takakura entre dans la peau du poseur de bombes. Deux autres vétérans du cinéma nippon, Sonny Chiba (The Street Fighter) et Ken Utsui (L’Invincible Spaceman), incarnent respectivement le conducteur du train et le chef du centre de contrôle. L’œil attentif reconnaîtra aussi parmi les « insurgés » un tout jeune acteur, Akira Oda, qui n’est autre que le Ryu de la série San Ku Kaï.

Une bombe a été posée à bord du train express Hikari 109, au départ de Tokyo et en direction de Hakata. 1500 passagers se trouvent à bord. Si le train passe en dessous de la vitesse de 80 kilomètres/heure, il explosera. Pour prouver ses dires, le poseur de bombe a installé le même dispositif sur un train de fret, qui effectivement se désagrège dans une grande déflagration au moment où il ralentit son allure. Pour compliquer davantage les choses, un système de contrôle à distance sophistiqué est conçu pour faire freiner le Hiraki 109 automatiquement s’il va trop vite. Les autorités sont sur les dents et les passagers commencent à s’agiter, se doutant que quelque chose ne tourne pas rond. Lorsque le terroriste et ses complices fixent enfin leurs conditions, la tension monte d’un cran : ils réclament en effet cinq millions de dollars en petites coupures. L’affaire monte jusqu’au ministère des finances et au premier ministre. Le gouvernement va-t-il céder ?

Runaway Train

Regorgeant d’excellentes scènes de suspense, truffé d’effets spéciaux de haut niveau (maquettes, pyrotechnie, incrustations, transparences), Super Express 109 décrit en parallèle la panique qui s’installe à bord du train, les efforts de la police pour retrouver le coupable, les stratégies qu’échafaudent les autorités pour tenter de sauver les passagers et les manœuvres du poseur de bombes et de son équipe pour s’adapter à une situation qui ne cesse de changer. Les codes du film catastrophe et du film policier s’entremêlent donc étroitement. Soudain, à mi-parcours, le scénario entre dans l’esprit du terroriste pour nous faire découvrir ses motivations, ses sentiments et ses doutes. « Si on persiste, on va devenir des monstres », finit-il même par dire à un de ses complices, alors qu’il perd peu à peu le contrôle des événements. Ce n’est donc pas l’acte d’un être machiavélique mais plutôt celui d’un homme désespéré, ce que nous confirment des flash-backs disséminés entre deux rebondissements. Le film prend alors une dimension sociale inattendue (reflet des préoccupations bien réelles de la population japonaise de l’époque), la psychologie s’invite, le récit se complexifie et le manichéisme s’effrite. Tout en cultivant une tension qui ne cesse de croître jusqu’au point de non-rupture, Super Express 109 révèle ainsi des couches de profondeur inattendues. Exploité avec succès partout dans le monde (souvent dans des versions raccourcies), le film de Junya Satô aura une influence durable sur de nombreux cinéastes. Comment ne pas penser par exemple au Speed de Jan de Bont ou au Unstoppable de Tony Scott ?

 

© Gilles Penso

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SABEL IS STILL YOUNG (2022)

Après l’assassinat de son époux pendant sa nuit de noces, une jeune femme laissée pour morte décide de se venger…

BATA PA SI SABEL

2022 – PHILIPPINES

Réalisé par Reynold Giba

Avec Micaella Raz, Julio Diaz, JC Tan, Benz Sangalang, Rash Flores, Richard Solano, Angela Morena, Stephanie Raz, Gardo Versoza, Ina Alegre

THEMA TUEURS

 

Sabel is Still Young est le premier film de Reynold Giba qui, en 2022, écrivit les scénarios de cinq films : la romance Sisid, l’histoire de fantômes Bahay na pula, le drame Virgin Forest, le thriller horrifique Alappap et donc Sabel is Still Young. Le point commun qui relie ces œuvres à priori disparates est la mise en scène fréquente de jeunes acteurs taillés comme des mannequins et souvent en tenue très légère (le caractère ouvertement racoleur des posters utilisés pour leur exploitation sur le territoire philippin est très explicite à ce propos). Pour Sabel is Still Young, nous entrons dans le domaine du sous-genre « rape and revenge » tel qu’il fut défini par des films comme I Spit on Your Grave de Meir Zarchi. Le principe est toujours le même : une jeune femme violée par plusieurs individus et laissée pour morte décide de prendre sa revanche de la manière la plus violente et sanglante possible. Actrice principale de Sabel is Still Young, Micaella Raz démarre alors sa carrière de manière hyperactive, puisqu’elle tourne la même année dans pas moins de quatre longs-métrages et deux séries télévisées. Jusqu’alors cantonnée dans des seconds rôles où – déjà – elle joue de ses charmes sans trop de pudeur, la comédienne porte cette fois-ci le film à bout de bras, dans un rôle intense qui nécessite sa pleine implication.

Micaella Raz incarne Sabel Arena, une jeune femme qui n’a jamais connu son père, est élevée seule par sa mère coiffeuse et s’apprête à épouser le beau Bryan (Benz Sangalang) dans la petite ville de Tan-Awan. Chacun a revêtu sa plus belle parure pour la cérémonie, les parents sont aux anges, le micro passe de main en main pour les discours de circonstance et Sonny (Gardo Versoza), le maire de la ville, dit publiquement tout le bien qu’il pense de cette union. Le soir venu, les jeunes mariés regagnent la chambre d’hôtel avec vue sur mer qu’ils ont réservée et entendent bien profiter de leur nuit de noces en toute tranquillité. Mais soudain, trois hommes, dont le chef Jethro (JC Tan) n’est autre que le fils du maire, surgissent dans la chambre, assassinent Bryan, violent à tour de rôle Sabel et jettent les deux corps à la mer avant de rejoindre leurs petites familles respectives. Or Sabel a survécu et n’entend pas laisser ce crime impuni…

Sabel est la bête

Dès les premières minutes, les prises de vues tremblantes en caméra portée, avec recadrages intempestifs et reports de point, témoignent d’une volonté d’approcher la mise en scène de manière brute et réaliste – façon cinéma vérité. Les petites vignettes qui constituent la première partie du film saisissent ainsi des instants de vie quotidiens et banals, comme pour mieux contraster avec la violence qui s’apprête à frapper les jeunes époux. Le malaise est accentué par le retour à la normale des trois agresseurs. L’un s’occupe de sa grand-mère, l’autre de son épouse enceinte, le troisième de ses enfants. Rien chez eux ne semble correspondre au profil d’un monstre. La pulsion collective qui les a poussés à commettre l’irréparable n’en est que plus surprenante. L’intrigue se complique avec des manœuvres politiques liées au futur successeur du maire et avec des mystères entourant l’identité du père de Sabel. Mais à mi-parcours, le film oublie toute quête de crédibilité pour se laisser tenter par des rebondissements rocambolesques. Sabel est donc recueillie par un ex-militaire revanchard qui accepte de la former au combat, au cours d’une série d’entrainements qu’on croirait presque échappés de Karate Kid. La vengeance elle-même bascule ouvertement dans les codes du cinéma d’exploitation, montrant de manière explicite la nudité et les actes sexuels, puis collectant les meurtres sanglants extrêmes avec en prime quelques détails bien gratinés comme un pénis tranché et enfoncé dans la gorge de la victime ! On peine donc à saisir les véritables intentions du film, d’autant que sa durée de 2h30 paraît bien excessive au regard d’une intrigue aussi ténue.

 

© Gilles Penso

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ON A VOLÉ LE CERVEAU D’HITLER (1963)

Réfugiés sur une île d’Amérique du Sud, des nazis nostalgiques maintiennent en vie la tête d’Hitler pour pouvoir dominer le monde !

THE MADMEN OF MANDORAS / THEY SAVED HITLER’S BRAIN

 

1963 – USA

 

Réalisé par David Bradley

 

Avec Audrey Caire, Walter Stocker, Carlos Rivas, John Hollans, Marshall Reed, Scott Peters, Keith Dahle, Dani Lynn, Nestor Pauva, Pedro Regas, Bill Freed

 

THEMA MÉDECINE EN FOLIE

En 1963, le réalisateur David Bradley commet The Madmen of Mandoras (« Les fous de Mandoras »), un film d’espionnage et de science-fiction au concept invraisemblable dans lequel des néo-nazis réfugiés en Amérique du Sud tentent de ressusciter Adolf Hitler par le biais d’expériences dignes des plus fous des savants de l’histoire du cinéma fantastique. Cinq ans plus tard, le film est rallongé avec de nouvelles séquences pour pouvoir être diffusé à la télévision américaine sous le titre qui deviendra son appellation officielle : They Saved Hitler’s Brain (« Ils ont sauvegardé le cerveau d’Hitler »). Ce remontage ajoute une couche d’extravagance puisque des personnages habillés et coiffés à la mode du tout début des sixties (costumes ajustés et robes cintrées, brushings pour les dames, cheveux courts et feutres mous pour les hommes) y côtoient d’autres qui adoptent le look typique de la fin de la décennie (mini-jupe et cheveux longs d’un côté, grosse moustache et coupe à la Mireille Mathieu de l’autre !). Déjà bien barré, le film saupoudre ainsi son postulat délirant d’anachronismes qui le transportent carrément dans une autre dimension. Résultat : On a volé le cerveau d’Hitler est un nanar de compétition devenu évidemment objet de culte auprès de tous les amateurs de pellicules « autres ».

Le film commence sur des chapeaux de roue. Le professeur Bernard, chercheur pour le gouvernement qui expérimentait un antidote dans le but de contrer les effets du redoutable gaz G, meurt dans l’explosion de sa voiture. Or l’attentat semble être un complot organisé en haut lieu. Mais un autre savant, le professeur Coleman, connaît lui aussi l’antidote. Dès que la nouvelle se propage, sa fille Suzanne est kidnappée. Kathy, la sœur de la jeune femme, et Phil, son beau-frère, mènent l’enquête et se retrouvent avec un cadavre sur les bras. Leurs investigations les mènent jusqu’au Mandoras, en Amérique du Sud, où d’anciens nazis liés au gouvernement fomentent dans l’ombre quelque complot maléfique et préparent la domination du monde grâce à une arme chimique imparable : le fameux gaz G. Nous apprenons alors qu’Hitler a survécu à la guerre et que des médecins du troisième Reich se sont activés dans son bunker pour le maintenir en vie coûte que coûte…

La Führer de vivre

Parfaitement inutiles, les séquences additionnelles occupent la première partie du film. Nous y faisons la connaissance de Vic Gilbert et Tony Gordon, deux agents du gouvernement qui sont chargés d’enquêter sur la mort du professeur Bernard puis disparaissent de l’intrigue. La mise en forme très sommaire, les décors banals, les dialogues sans intérêt et les looks post-68 de ces deux personnages font tâche avec le reste du film. Non pas que la suite soit palpitante et riche en « production value » (le budget est tellement faible que la musique est empruntée à The Devil’s Hand et les cascades automobiles à Thunder Road), mais l’on se perd en conjectures sur l’intérêt s’avoir ajouté artificiellement ces presque 20 minutes de bla bla en début de métrage. Mêlant les codes du cinéma d’espionnage avec ceux du film noir, On a sauvé le cerveau d’Hitler bascule pleinement dans la science-fiction débridée lorsqu’apparaît un appareil radio surmonté d’une grande svastika sous laquelle se tient un cylindre transparent dans lequel flotte la tête d’un Adolf Hitler hagard. Celui-ci, qui se contente d’écarquiller les yeux et d’aboyer quelques phrases en allemand, est un élément comique involontaire tellement aberrant qu’il sera maintes fois cité et parodié par la suite, du Saturday Night Live aux Simpsons en passant par Futurama et même Sabrina l’apprentie-sorcière.

 

© Gilles Penso

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NECRONOMICON : LE LIVRE DE SATAN (2008)

Une adaptation à tout petit budget d’une nouvelle de Lovecraft avec Jeffrey Combs, Dean Stockwell et un monstre tentaculaire…

THE DUNWICH HORROR

 

2008 – USA

 

Réalisé par Leigh Scott

 

Avec Sarah LIeving, Griff Furst, Dean Stockwell, Jeffrey Combs, Natacha Itzel Badar, Leigh Scott, Lauren Michele, Lacey Minchew, M. Steven Felty

 

THEMA DIABLE ET DÉMONS

Leigh Scott est un des piliers de la compagnie Asylum, spécialisée dans les imitations à micro-budgets des blockbusters du moment. Parmi l’infinité de séries B ou Z que Scott a commises, citons les inénarrables Le Seigneur du monde perdu (effroyable crossover entre King Kong et Jurassic Park – Le Monde perdu), Les Ailes de la terreur (tentative de mixage impensable entre Les Oiseaux et 28 jours plus tard) ou encore Transmorphers (dont le titre est suffisamment éloquent). Le voir s’attaquer à une adaptation d’un des récits de H.P. Lovecraft n’avait donc rien de particulièrement rassurant. L’histoire en question, L’Abomination de Dunwich, avait déjà été très librement portée à l’écran en 1970 par Daniel Haller sous le titre Horreur à volonté. Dean Stockwell y tenait le rôle du mystérieux Wilbur Whateley. Or curieusement, Stockwell est également à l’affiche du Dunwich Horror de 2008 (rebaptisé chez nous Necronomicon : le livre de Satan). Cette fois-ci, il ne joue pas Whateley mais le docteur Henry Armitage, rôle que tenait Ed Begley dans la version de 1970. Convoquer le même acteur pour cette version plus récente semble procéder d’un geste cinéphilique adressé à une toute petite niche. D’autant que Whateley, lui, est ici joué par Jeffrey Combs, un habitué des adaptations de Lovecraft (Re-Animator, From Beyond, Pulse Pounders, La Peur qui rôde, Castle Freak, Necronomicon).

Même s’il est localisé en Louisiane et non en Nouvelle-Angleterre, le scénario est manifestement plus fidèle au texte original que la version précédente, reprenant même quelques phrases de la nouvelle en guise de voix off introductive. Mère célibataire de trente-cinq ans, Lavina accouche d’un petit garçon et d’un monstre – le bien-nommé Yog Sothoth – dans la maison Whateley. Dix ans plus tard, le Dr Henry Armitage et son assistante, le professeur Fay Morgan, découvrent que la page 751 de chaque exemplaire du livre maudit le Necronomicon a disparu et que la « Confrérie noire » s’apprête à ouvrir le portail de notre monde pour laisser entrer les démons et les anciens dieux. En désespoir de cause, Armitage et Morgan invitent le professeur Walter Rice, un homme sceptique et imbu de lui-même, à les aider à retrouver le livre, qu’il est capable de traduire grâce à ses connaissances linguistiques…

Poulpe friction

La scène d’exorcisme qui ouvre le film trahit d’emblée ses travers : des effets visuels bon marché, une musique synthétique à côté de la plaque, une mise en scène statique, une direction d’acteurs réduite à sa plus simple expression… De toute évidence, ce n’est pas ce Necronomicon : le livre de Satan qui saura rendre justice à L’Abomination de Dunwich. Dean Stockwell nous y apparaît vieilli et apathique, Jeffrey Combs joue les rednecks dégénérés sans beaucoup de subtilité et un certain Jeffrey Alan Pilars (inconnu au bataillon) entre dans la peau de l’improbable Olas, un homme mystérieux qui flotte dans les airs et vit depuis des siècles dans une sorte de harem au milieu des bayous avec des femmes orientales à moitié nues qui se trémoussent et fument de l’opium ! Leigh Scott semble malgré tout avoir fait ses devoirs, constellant son film d’allusions à différents textes de Lovecraft, mettant même brièvement en scène le personnage légendaire d’Abdul Halazred, en transe, qui remplit frénétiquement les pages du futur Necronomicon. Le film tente bien de nous montrer la créature difforme et tentaculaire qui menace les protagonistes en fin de métrage, mais les effets visuels ont beaucoup de mal à suivre et ne nous offrent qu’une sorte de poulpe en plastique avec un visage squelettique. Scott utilise donc tous les caches misères possibles, abusant par ailleurs d’effets de montage bizarres reprenant les artefacts des cassettes vidéo (accélérés, sautes d’images, etc.). Dommage que cette œuvrette soit si maladroite, car on la sent malgré tout pétrie de bonnes intentions. Les amateurs de l’écrivain de Providence n’y trouveront hélas pas leur compte.

 

© Gilles Penso

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FREAKY FRIDAY (2003)

Jamie Lee Curtis et Lindsay Lohan incarnent une mère et sa fille dont les corps s’inversent à la faveur d’un sortilège…

FREAKY FRIDAY

 

2003 – USA

 

Réalisé par Mark Waters

 

Avec Jamie Lee Curtis, Lindsay Lohan, Mark Harmon, Harold Gould, Chad Michael Murray, Stephen Tobolowsky, Christina Vidal, Ryan Malgarini, Haley Hudson

 

THEMA SORCELLERIE ET MAGIE I FREAKY FRIDAY

C’est le producteur Andrew Gunn qui est à l’initiative de ce remake d’Un vendredi dingue dingue dingue. Au départ, le studio Disney n’est pas particulièrement enthousiaste, dans la mesure où une seconde adaptation du roman de Mary Rodgers a déjà été diffusée en 1995 sur Disney Channel (le téléfilm Un Vendredi de folie de Melanie Mayron). Il faut croire que Gunn sait être convaincant, car la production est lancée au début des années 2000. Pour autant, le casting n’est pas une partie de plaisir. Envisagée au départ dans le rôle de la mère, Jodie Foster préfère passer son tour, de peur que sa présence sous forme de clin d’œil au film original finisse par éclipser les qualités propres du remake. C’est finalement Annette Bening qui est sélectionnée, Tom Selleck acceptant dans la foulée d’incarner son futur second époux Ryan. Mais à une semaine à peine du début du tournage, Bening se désiste, entraînant aussi le départ de Selleck. Pris de cours, Andrew Gunn et le réalisateur Mark Waters se tournent alors vers Jamie Lee Curtis, sur la foi de son interprétation désopilante dans True Lies. Trouver la jeune actrice qui jouera sa fille n’est pas beaucoup plus facile. Michelle Trachtenberg est la favorite, jusqu’à ce que son engagement sur la série Buffy tueuse de vampires l’empêche de participer au film. Sa remplaçante Lindsay Lohan est presque sélectionnée à contrecœur. Quand on sait que le succès gigantesque de Freaky Friday repose en grande partie sur son casting, on se dit que les hasards et contretemps hollywoodiens tombent parfois très bien.

La société américaine ayant bien évolué depuis 1976, la cellule familiale du Freaky Friday original a entièrement été repensée pour mieux coller à l’époque de ce remake. La femme au foyer incarnée jadis par Barbara Harris est désormais une psychiatre hyperactive (Jamie Lee Curtis), son mari businessman a été remplacé par un petit-ami qu’incarne Mark Harmon (le scénario ayant décidé d’en faire une veuve sur le point de refaire sa vie), son fiston sage comme une image est maintenant un gamin extrêmement turbulent (Ryan Malgarini) et la fille adolescente populaire et adepte du ski nautique que jouait Jodie Foster s’est muée en marginale un peu grunge membre d’un groupe de rock amateur (Lindsay Lohan). À l’école, celle-ci doit faire face à des professeurs sévères, aux brimades de son ancienne meilleure amie et à son béguin pour Jake (Chad Michael Murray). Alors qu’elles dînent dans un restaurant chinois, la mère et la fille se disputent vivement, mais la vénérable propriétaire des lieux les interrompt en leur donnant des biscuits chinois. De part et d’autre de la porte d’une salle de bain, toutes deux lisent simultanément le message du fortune cookie à haute voix avant de ressentir un violent tremblement de terre. Le lendemain matin, elles se réveillent chacune dans le corps de l’autre…

La vie de ma mère

La première partie de Freaky Friday enfonce gentiment les portes ouvertes, dressant les portraits croisés stéréotypés de l’adolescente rebelle que personne ne comprend, de la working girl débordée qui jongle avec tous ses téléphones portables, du petit frère agaçant, du futur beau-père qui peine à trouver sa place dans l’équation et du grand-père attachant et excentrique. Mais dès que le sortilège opère, le film trouve son rythme de croisière et la mécanique s’emballe. Voir Jamie Lee Curtis regarder son visage dans le miroir d’un air horrifié (« Je suis vieille ! On dirait le Gardien de la Crypte ! ») donne tout de suite le ton. La star révélée par Halloween est hilarante dans le rôle de l’ado coincée dans un corps d’adulte. Mais Lindsay Lohan excelle tout autant en mère de famille obligée de revivre une vie de lycéenne. Et dire que Curtis et Lohan n’étaient que des plans B ! Difficile aujourd’hui d’imaginer d’autres actrices pour les remplacer. Contrairement à Un vendredi dingue dingue, le film de Mark Waters prend le parti de ne pas séparer les actions mettant en scène la mère et la fille et de les contraindre à partager un maximum de séquences ensemble, multipliant la possibilité de quiproquos et de situations comiques. Tout converge vers un climax vaudevillesque au cours duquel toutes deux doivent respectivement répéter un futur mariage et donner un concert dans un festival. Très gros succès public et critique, Freaky Friday motivera la mise en chantier d’autres films prolongeant la franchise.

© Gilles Penso

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VAMPIRE RESURRECTION (2003)

Après l’assassinat de sa bien-aimée, un homme du 19ème siècle se transforme en vampire pour traverser les siècles et retrouver sa réincarnation…

SONG OF THE VAMPIRE / VAMPIRE RESURRECTION

 

2003 – USA

 

Réalisé par Denice Duff

 

Avec Denice Duff, James Horan, Jillian McWhirter, Frank Bruynbroek, Marilyn O’Connor, Geoffrey Lewis, Julie Michaels, John Mese, Scott Spearman

 

THEMA VAMPIRES I SAGA CHARLES BAND

Actrice principale de la saga Subspecies, Denice Duff rempile pour une nouvelle histoire de vampires écrite au début des années 2000 par Ron Ford (Terreur, Hollywood Mortuary) et Jose Prendes (La Porte de l’enfer, The Terminators). Duff connaît bien Prendes, qui vient alors de la diriger dans The Monster Man. Elle accepte non seulement de jouer dans le film mais aussi de le réaliser. La comédienne voit là l’occasion de s’essayer à la mise en scène dans le cadre d’un projet modeste aux risques limités. Titré d’abord Song of the Vampire avant d’être rebaptisé Vampire Resurrection lorsque le producteur Charles Band en acquiert les droits de distribution, le film est tourné en 2001 pendant quatre semaines, principalement à Los Angeles et à Bâton Rouge. Après les prises de vues, l’actrice / réalisatrice se voit contrainte de laisser le long-métrage en suspens pour honorer le contrat qui la lie au soap opera Les Feux de l’amour (dans lequel elle joue Amanda Browning). « Lorsque je suis revenue du tournage de la série, j’ai commencé l’enfer de la postproduction de mon film », raconte-t-elle. « Je sais maintenant pourquoi il y a si peu de femmes réalisatrices. Elles sont occupées à être de bonnes mères, à élever leurs enfants, contrairement à moi qui ai passé une année entière à essayer d’arriver au bout de ce film. Je n’étais pas souvent là, et quand je l’étais, j’étais toujours au téléphone. Mais j’ai réussi à le finir tant bien que mal. Le résultat est pas mal, sans plus. » (1)

La réalisatrice est un peu sévère avec son galop d’essai, même s’il n’y a effectivement pas de quoi crier au chef d’œuvre. Enfoui sous terre depuis cent ans, Jonathon Travers (James Horan) a dû sacrifier son âme et devenir un vampire pour retrouver son véritable amour, Caroline (Denice Duff), morte assassinée dans ses bras un siècle plus tôt. Nous faisons alors connaissance de Victoria (Duff toujours), une jeune femme des années 2000 qui se réveille régulièrement en sursaut, troublée par des rêves récurrents où elle se voit dans bras de Jonathon un siècle plus tôt. Serait-elle la réincarnation de Caroline ? Après sa longue « hibernation », le vampire décide de sortir de sa tombe. Nous le découvrons alors dans un état souffreteux digne du Udo Kier pâlichon de Du sang pour Dracula. Mais après avoir bu quelques litres de sang prélevés directement à la gorge d’un croque-mort et d’une jeune femme rencontrée dans la rue, Jonathon se sent mieux. Pris en flagrant délit par la police, il est abattu et ramené à la morgue. Mais il ne lui faut pas longtemps pour se relever, aussi nu que Mathilda May dans Lifeforce, et prendre la fuite. Entretemps, l’ex-mari de Victoria, Marty (Frank Bruynbroek), une crapule de la pire espèce, sort de prison. Les choses ne vont donc pas tarder à se compliquer, d’autant que tôt ou tard, il faudra bien que Jonathon croise la route de Victoria…

Ralentis, fumigènes et synthétiseurs

À travers les séquences romantico-gothiques dont elle nimbe son film, Denice Duff cherche manifestement à retrouver l’élégance et le caractère victorien d’Entretien avec un vampire – ou dans une plus modeste mesure de Journal intime d’un vampire. Mais les moyens lui manquent cruellement pour esthétiser correctement son film. De fait, l’imagerie naïve à laquelle elle sacrifie (comme cette silhouette féminine en nuisette qui bouge au ralenti au milieu de la fumée sur fond de chœurs synthétiques) n’est pas vraiment convaincante. Le film souffre aussi de comédiens manifestement peu concernés qui récitent leurs répliques sans une once de crédibilité (notamment les deux policiers chargés de mener l’enquête). Mais il faut reconnaître à Denice Duff sa capacité à emballer le film malgré les infinités d’obstacles qui se dressèrent sur son chemin et sa volonté ambitieuse de ne pas s’inscrire dans la même mouvance que la saga Subspecies pour tenter autre chose. C’est du reste – et de loin – l’actrice la plus convaincante du casting. Au passage, le film réserve aux fans de cinéma fantastique quelques clins d’œil ciblés, comme la secrétaire qui lit la revue Femmes Fatales, la présence d’une photo de Lon Chaney Jr. en loup-garou, ou une réplique mentionnant le prince Vadislav de Roumanie. Les amateurs apprécieront.

 

(1) Extrait d’un entretien publié dans Film Threat en 2004.

 

© Gilles Penso

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